Comment les stéréotypes sur les jeunes nuisent à leur employabilité en France #
Comment les stéréotypes sur les jeunes nuisent à leur employabilité en France #H.R Insights 1 PAGE 3 RÉSUMÉ Le chômage des jeunes diplômés de bac +5 est une spécificité française : tandis que les autres jeunes de pays européens d’Europe occidentale sont près du plein-emploi (3,7 %), les jeunes diplômés français sont 9,2 % à être à la recherche d’une insertion professionnelle un an après la fin de leurs études. D’où vient cette exception française ? Pour répondre, l’étude compare l’accès à l‘emploi des jeunes français à celui des jeunes Européens de 5 pays comparables. 682 jeunes diplômés de master de gestion ont été suivis de janvier 2017 (6 mois avant leur fin d’études) à septembre 2018. Les données recueillies permettent de repérer 5 types de trajectoires dont les fréquences sont différentes selon les pays. Comment expliquer ses différences d’employabilité qui concernent des jeunes de compétences égales ? Dans l’échantillon étudié, les différences de trajectoires ne s’expliquent ni par les différences de croissance ni par les différences de rigueur dans la protection de l’emploi. De façon très contre-intuitive, les CDD sont, en réalité, à la fois plus contraignants et plus fréquents en France qu’ailleurs. Un modèle alternatif questionne la rationalité des acteurs et met en jeu les processus de décision en matière d’embauche. Dans ce cas, c’est l’image des jeunes comme salariés qui est en jeu. L’adhésion à un stéréotype concernant les spécificités comportementales des jeunes explique 18,4 % des différences de trajectoires. Plus fort en France que dans les autres pays, cette peur d’un « péril jeune » explique les réticences à offrir un emploi à un jeune diplômé. S’il faut plus de temps pour trouver un emploi aux jeunes Français, c’est qu’à compétences égales, les jeunes sont perçus comme moins attractifs en France que dans les autres pays européens. L’employabilité n’est pas qu’un stock de compétences à apparier aux besoins des marchés. C’est aussi la perception, par les acteurs du recrutement, des compétences et potentiels des individus. #H.R Insights 1 PAGE 4 INTRODUCTION Le chômage des jeunes est toujours particulièrement élevé en France : au taux de 20,1 %, il est le plus élevé de toute l’Europe de l’ouest, bien au- dessus de la moyenne des jeunes européens (14,2 %). La situation est, en proportion, encore plus critique chez les diplômés de bac +5 : les jeunes diplômés français sont 9,2 % à être au chômage un an après la fin de leurs études, tandis que les jeunes européens de l’ouest sont près du plein- emploi (3,7 %). D’où vient cette exception française ? Pour comprendre, l’étude compare l’accès à l‘emploi des jeunes français au regard de celle des autres européens de 5 pays comparables : le Royaume-Uni, le Portugal, la Suisse, les Pays-Bas et l’Allemagne. 682 jeunes ont été suivis de janvier 2017 (6 mois avant leur fin d’études) à septembre 2018. Ils ont été interrogés tous les 6 mois de façon à reconstituer les parcours. Au final, les données recueillies permettent de repérer 5 types de trajectoires dont les fréquences sont différentes selon les pays. Les données proviennent des travaux d’un groupe international de recherche sur les carrières (ICAR Network). Les données recueillies sur la période récente (2017-2018), présentées dans ce document, sont identiques à celles recueillies depuis le début des travaux du réseau ICAR en 2012. #H.R Insights 1 PAGE 5 La population étudiée est celle des diplômés de master de gestion. Ces très diplômés, souvent décrits comme les plus privilégiés et les moins affectés par les problèmes d’insertion, ne sont pas moins touchés que d’autre part la spécificité française du chômage des jeunes : ils sont 9,2 % à être au chômage 6 mois après leur sortie des études. Ces cinq pays ont été choisis pour représenter un panachage des variables régulièrement utilisées (territoire, culture, système juridique, taux de croissance et opportunité de l’apprentissage). Plus important, les contenus pédagogiques et les compétences acquises à la fin d’un master de gestion sont comparables dans ces pays. L’étude permet donc d’étudier les trajectoires à compétences égales. Étudier ces différences de trajectoires conduit à examiner les différences d’employabilité entre les différents jeunes et donc d’analyser ce qu’est, réellement, l’employabilité. L’étude teste deux modèles. Le premier définit l’employabilité comme un appariement rationnel entre offre de compétences et besoins des marchés. À compétences égales, ce seraient donc les différences des marchés dans les six pays qui pourraient expliquer les différences de trajectoires. Le second modèle testé postule que l’employabilité des jeunes provient aussi de la perception de leurs compétences par les acteurs des entreprises. Et cette perception peut être biaisée par des stéréotypes. #H.R Insights 1 PAGE 6 Le chômage élevé des jeunes de haut niveau de qualification : l’insertion paradoxale des jeunes en France Des constats généraux La comparaison internationale est un moyen fructueux d’analyser les trajectoires et les parcours d’insertions des jeunes. Elle permet de contrôler ou de tester de nombreuses variables. Cinq pays sont utiles à comparer avec la France : le Royaume-Uni, le Portugal, la Suisse, les Pays-Bas et l’Allemagne. Ces six pays partagent le même niveau de développement, le même territoire et la même culture. Ils se distinguent par leurs systèmes juridiques, leurs taux de croissance, l’opportunité de l’apprentissage et, évidemment, le taux de chômage des jeunes. Données générales : taux de chômage dans les pays étudiés et dans l’Union Européenne1 : 1Sources : Eurostat, Banque Mondiale, Institut Fédéral de statistiques (Suisse) TAUX DE CHÔMAGE DES JEUNES TOUS NIVEAUX DEQUALIFICATION (2019) TAUX DE CHÔMAGE TOUS ACTIFS (2019) TAUX DE CHÔMAGE TOUS BAC +5 (2019) TAUX DE CHÔMAGE TOUS BAC +5 GESTION APRÈS 6 MOIS (2018) MOYENNE UNION EUROPÉENNE 14,2 6,4 8,1 7,2 ROYAUME-UNI 10,2 3,7 5,2 4,2 SUISSE 6,35 2,6 2,4 3,1 PORTUGAL 17,2 6.7 4,1 4,2 FRANCE 20,1 8,7 4,8 9,2 PAYS-BAS 6,2 3,3 3,9 4,1 ALLEMAGNE 5,3 3,2 2,7 2,9 #H.R Insights 1 PAGE 7 Dans le groupe de pays retenus, c’est en France et au Portugal que le chômage des jeunes de tous niveaux de qualification est le plus élevé (respectivement 20,1 % et 17,2 %) ; il y est supérieur à la moyenne de l’Union (14,2 %). C’est en Suisse, aux Pays-Bas et en Allemagne que les jeunes de tous niveaux de qualification sont le moins souvent au chômage. La hiérarchie est identique en ce qui concerne le taux de chômage de tous les actifs : les taux en France (8,7 %) et au Portugal (6,7 %) sont supérieurs à la moyenne européenne (6,4 %). Les taux des autres pays sont voisins et très inférieurs à la moyenne de l’Union. Le cas des diplômés de Master est différent. Leur taux de chômage dans tous les pays étudiés est nettement inférieur à la moyenne de l’Union et, hormis, au Royaume-Uni (5,2 %), inférieur au seuil de 5 % qui définit le plein-emploi. Les diplômes de master connaissent donc le plein-emploi partout sauf, de peu, au Royaume-Uni. Le cas est différent pour les jeunes diplômés de Master en gestion : ils sont en plein-emploi partout dans le groupe des pays retenus, sauf en France où leur taux de chômage (9,2 %) est supérieur à la moyenne de l’Union (7,2 %). La France présente à la fois le plus fort taux de chômage général élevé (8,7 %), le plus fort taux de chômage des jeunes (20,1 %) et le plus fort taux de chômage des jeunes diplômés de gestion (9,2 %) en particulier. Or c’est aussi en France que les diplômés de Master sont en plein-emploi. Il existe donc une spécificité Française du chômage des jeunes diplômés de Master de Gestion. #H.R Insights 1 PAGE 8 2&3CDD et CDI sont des modalités du droit français mais qui trouvent des correspondances dans les systèmes juridiques des pays étudiés. Les trajectoires types des diplômés de 2017 : où sont les jeunes diplômés 18 mois après la fin de leurs études ? Cinq trajectoires-types décrivent 84,7 % des individus de l’échantillon en Europe et 82,7 % en France. Les autres cas représentent chacun moins de 3 %. Trajectoire 1 : insertion directe (EU : 36,4 % ; France : 17,2 %) Dans ce premier cas, les individus accèdent directement à un emploi en CDI après un stage ou une alternance. Ils sont 36,4% en moyenne dans les 6 pays, mais seulement 15,2% dans l’échantillon français. Les jeunes ne sont pas recrutés dans l’entreprise où ils ont été stagiaires ou alternants. Trajectoire 2 : insertion retardée (EU : 14,1 % ; France : 31 %) Le deuxième cas décrit le parcours d’individus qui accèdent directement à un emploi en CDI après une période de chômage d’une durée moyenne de 7 mois. Les jeunes ne sont pas recrutés dans l’entreprise où ils ont été alternants ou stagiaires. Ils sont 14,1 % en moyenne dans les 6 pays, mais 31 % dans l’échantillon français. Janvier 2017 Juillet 2017 Janvier 2018 Septembre 2018 Chômage Emploi en CDI3 dans une entreprise différente de celle du stage ou de l’alternance École + stage ou école + uploads/Management/ hri1-presse.pdf
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- Publié le Mar 15, 2021
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