(1) Fawzi Britel, « Pour affiunter la globalisation mondiale de ['économie: la

(1) Fawzi Britel, « Pour affiunter la globalisation mondiale de ['économie: la culturede l'intelligence économique », 4 .122002, eColiecte Centre National de Développement, (hltp://doc.abhatoo.n etmaIdoc/article.ph p3?id_ article=350). (2) Mohamed Benabid, Dossier Intelligence économique, L'Économiste, 12 août 2004. Économie L'intelligence économique au Maroc : innover dans le développement Philippe Clerc* D epuis plusieurs années, les décideurs marocains, les chefsd'entreprises,lesanimateurs del'appuiéconomique etlesuniversitairessesontprogressivementappropriés l'intelligence économique, comme démarche de maîtrise de l'informationstratégique utileaudéveloppement desentreprises, desorganisations publiques,maisaussideprojetsetdeterritoires. Lesexpertsetlesuniversitaires ontconsidéré ladémarchecomme « l'atout-maître» dans la bataille économique et la gestion des rapports de force internationaux(1). Les chroniqueurs se sont émus de la lenteurde la diffusionde la démarche et plus encore de la culture de l'intelligence économique (2). Ennovembre2004,lesRencontresinternationales deTétouan (3)ontmarqué,selonnous,deuxgrandesévolutions:ladécision au plus haut niveau de l'État de doter le Maroc d'institutions permettantdestructurerprogressivement unepolitiquepublique d'intelligence économique,à l'échelle nationaleetterritoriale. *PhilippeClerc est directeurde l'intelligence économique,de l'innovation et des TIC Assemblée des chambres françaises de commerce et d'industrie, président de l'Association française pour le développement de l'intelligence économique (AFDIE). 111 Les Cahiers de l'Orient Le passage d'une politique de transcription/imitationdes conceptsdel'intelligence économiquepratiquésdans lespays du Nord (anglo-saxonsou francophone - France,Canada, ProvinceduQuébec)àunepolitiqued'innovationversuneintel- ligenceéconomique etstratégique adaptéeàlaréalitééconomique et socialedes pays émergents,mais avant tout du Maroc. Cesévolutionsontétéconfirméesàl'occasiond'un colloque surlethème« Veillestratégiqueetcompétitivité» organisépar l'association R&D Maroc en mars 2005 (4). L'importancegéostratégique dusujetn'est pasdesmoindres. En effet,lesluttesd'influence redoublent.Lapolitiqued'intel- ligenceéconomiquedu Maroc,sa volontépour ainsidirede se doter d'une capacité d'agir « en stratégie et en influence », devientunenjeuentrel'Europe,plusprécisémentpourlaFrance et lesÉtats-Unis: USaida trèstôtproposéde financerleprojet d'observatoire d'étude de l'intelligence économique, dont l'inspiration est maroco-française.Notre tentative de dresser iciunepremière monographie dudispositif marocain d'intelligence économiquenouspermettrad'entrevoirl'originalitéoul'absence d'originalité de la culture de l'intelligence économique au Maroc.Existe-t-il unmodèlemarocain(culture, pratiqueetorgani- sation, objectifs et politique) ou le modèle se construira-t-ilà partirdel'apprentissageoudansl'imitationd'un modèlefrançais ou américain? Comme toute nation dotée d'une économie émergente,le Marocestpréoccupéparlapérennisationdesondéveloppement, voire par sa survie, par la préservation de son identité entre Europe et Afrique et la recherche de nouvelles capacités de puissance économique et culturelle (accord de libre-échange aveclesÉtats-Unis,avecl'Union européenne,aveclaTurquie). L'offensive commercialechinoisedéstabilisedespans entiers del'activitééconomique marocaine.Ellecondamnelesdécideurs marocains au sursautprospectif et stratégique. Aussi,lesstratègesmarocainsconjuguent-ilsenpermanence la tension entre la nécessaireinteractionavec les dynamiques hyperconcUlTentielles delamondialisation, larecherche obsédante du rattrapage économique et technologique et la conception d'un modèle de développementplus solidaire,plus coopératif 112 (3) Rencon1res internationales de Tétouan « Intelligence économique et veille s1ratégique, défis et s1ratégies pour les économies émergentes », Tétouan, 25-27/1112004, souslehaut patronage du roi et à l'initiative de Rachid Talbi El AIimi, ministre des Aflàires économiques et générales, maire de Tétouan;de Mohammed MbaIki, waIi de Tétouan en 2004, aujourd'hui Directeur général de l'Agence du développement des provinces orientales; Driss GuernIoui, Wliversité de Rabat, et Xavier Richet, Sorbonne NouveUe. Voir les Actes in dirXavier Richetet Driss GuernIoui, Intelligence économique et veille stratégique. Défis et stratégies pour les économies émergentes. Economica, Paris 2006. (4) Semaine de l'innovation, Casablanca, 7-8 mars 2005, R&D Maroc, Association marocaine pour la recherche- développement. www.rdmaroc.or g. Organisateur Mohamed Smani, directeur général de R&D Maroc. (5) Driss Guerraoui: communication « Intelligence économique et raccourcis technologiques: quels enseignements pour les économies émergentes ? » Rencontres internationales de Tétouan, 25-26-27 novembre 2004. (6) Extrait de l'allocution de Rachid Talbi El AIirni, Rencontres internationales de Tétouan, 25-26-27 novembre 2004 Une économie prometteuse etdurable:unautremodededéveloppement valorisantl'identité et l'histoire culturellemarocaine comme levier d'influence et « d'avantage compétitif ». Cette réalité rend d'autant plus nécessairelaconstruction d'un véritablesystèmedeconnaissance des enjeux, des potentiels, des menaces de l'environnement mondialisépermettantd'irriguer les systèmesde décisiondes stratèges,d'enrichir leurs visions, de lire le futur,de gérer les rapports de forceet les négociationsessentielles,par exemple les accords de libre-échange. À défaut, chacun ne pOUlTa que constater lerecul des capacités de développement et la multiplication des risques de dépendance stratégique dans les secteurs essentiels de l'économie marocaine. La captation des cerveaux par les grands réseaux de domination technologiqueet dusavoird'économies émergentesoudéveloppées constitue l'un des facteurs préoccupant de l'affaiblissement des capacités deR&D et demanagement du Maroc (5). La perception de l'intelligence économiquepar les décideursillustrecettetension. M. Rachid Talbi ElAlimi, ministre desAffaires économiques et générales, maire de Tétouan, ne conçoit pas l'intelligence économique comme un effet de mode, mais bien comme « un outil deperformance économique, unfacteur de compétitivité et de consolidation du rayonnement du Maroc au sein du concert des nations modernes », un outil d'influence. «La mise enplace de dispositifs de surveillanceJournissant des informations fiables, permettant de scruter les concurrents, les opportunités d'affaires, les technologies et les nouveaux procédés ne cèdent aucunement à un effet de mode, mais correspond bien à un impératif depremier plan pour les acteurs exposés à la compétition mondiale» (6). À la question qu'il pose - commentanticiper,déciderlesmeilleurschoix,adapter les capacités et gagner la bataille du développement durable? - M. Mohammed Mbarki, wali de Tétouan en 2004, répond que « l'intelligence économique représente un arsenal pour faire gagner la bataille du développement face ou dans le nouveau système mondial de domination, une méthode indispensable aux entreprises, aux gouvernants, aux développeurs ». Iltraduitl'intelligenceéconomiquedanssadimensionterritoriale et n'hésite pas à parlerde l'ardente obligationqui doit animer 113 Les Cahiers de l'Orient ces derniers pour soutenir et porter la compétitivité des territoires, la vraiemesure- selonlui- de la compétitivitéde demain. Pour Driss Guerraoui,professeur à l'université de Rabbat- Agdal, conseiller du Premier ministre, « le rôle vital» de l'intelligenceéconomique pourunpaysémergent, enl'occurrence pour le Maroc, réside dans les méthodes qu'elle fournit aux entrepriseset aux développeurspour accéder à la maîtrisede technologies dans une stratégie de recherche de raccourcis technologiques. Elle contribue à la « promotion du génie national,commeavantagestratégique» et nourrit leprocessus de «transformation d'inégalités en égalitésde production ». Un événementessentielà cet égardest survenuau débutde l'année 2006. Il est pourtant resté sans grand écho. De quoi s'agit-il? De la réunionà Skhirate,près de Rabat, les 27 et 28 janvier 2006, du premier Forum de coopérationdécentralisée entre le Maroc et la France. Plutôt que denégocier et concluredesaccordset projetsde coopération au niveau des États et de leurs administrations centrales,sesontentenduspourréunirlesdécideursetanimateurs qui sur le terrain pilotent des politiques de développement économique, social et culturel.Ainsi, se sont rencontrés des. maires, desprésidentsd'associations, decollectivitéslocales, d'universités, desanimateursdeprogrammes de coopération, issus des deux côtés de la Méditerranée afin de conclure des accords de coopération. Cette rencontre marque, selon nous, les débuts d'une approche nouvelle nécessitant de part et d'autre, France et Maroc, une démarche d'intelligence économique et sociale pour piloter des coopérations dans lesquelleschacunpuiseperformances économique,technolo- gique et sociale. Dès 2002, RachidBenmokhtar,présidentde l'universitéAl Akhawayn d'Ifi-aneen appelait au changementde paradigme de croissance,pour résoudre l'équation marocaine,s'agissant d'articuler libéralisationet entrée dans la mondialisationavec réductionde la ftacture socialeet technologique: « Se focaliser sur le rôle dévolu aux organisations qui symbolisent le nouvel ordre économique (OMC, Banque mondiale,FMI..) ousurlerôlespécifiquedesgrandsensembles (7)« La mondialisation vue à partir d'un pays en voie de développement» Rachid Benmokhtar, ex- ministrede l'Education nationale du Maroc, est aujourd'hui président de l'université AI Akhawayn d'lfTane. (8) Association fTançaise pour le développement de l'intelligence économique Philippe Clerc, « Intelligence et développement ou la créativité de Stevan Dedijer », Hommage à Stevan Dedijer, Cahier de l' Afdie n02, in Regard sur l'IE, septembre/octobre 2004.Voir www.afdie.org. 114 Une économie prometteuse économiques, Amérique du Nord, Japon, Europe, n'est suffisant ni pour évaluer les risques de leurs politiques, ni pour appréhender des options nouvellesplus porteuses d'avenir. Une réflexion profonde sur la théorie de la croissance économique est indispensable et un changement radical des paradigmes économiques est nécessaire. Comment réfléchir à une approche intégrée de l'économie qui associe l'économie, la technologie, le social et l'environnement. » (7) Revenons un instant sur la définition de l'intelligence économique,enprenantencompte cettetensionentrecompétitivité accrue et développement durable. Intelligence économique et développement: définition Depuis1975,ilexisteuneécoledel'intelligenceéconomique appliquéeaux pays en développementou émergents.Ellea été développéeparStevanDedijer,professeuràl'universitédeLund enSuèdeetsepoursuitenFranceàtraverslestravauxdel'AFDIE (8) le réseau du cabinet Sopel International, partenaire des Rencontresinternationalesde Tétouan et qui pilote le Forum intelligenceéconomiqueet développement(FIED). StevanDedijera trèstôtintroduitla démarched'intelligence socialecommel'approchelamieuxadaptéepour« faireémerger» lessystèmesd'intelligencenationaux,voirepourlespaysenvoie de développement, les créer. Il définit l'intelligence sociale comme « l'ensemble des activités d'une société, reliées à l'intelligence,lacapacitéàs'adapter,répondreàdes circonstances changeantes,afin de réaliser des objectifsde développement décidés».' L'intelligencesocialedèslorsfournitlesoutilspour«piloter» en connaissance de cause, c'est-à-dire en disposant de la connaissance nécessaire à la réalisation des objectifs des différents systèmes sociaux composant une nation. Stevan Dedijer avait l'habitude d'interpeler la capacitéd'intelligence d'une nationdeson«QIcollectif».L'efficacitédel'intelligence sociale,beaucoupparlentaujourd'hui d'intelligence collective d'un pays, repose surla taille et le dynamismedes activitésde productionet de développementde la connaissance,ainsi que sur la densité et la qualité de ses réseaux d'information et 115 Les Cahiers de l'Orient d'expertise. Le Forum de partenariat ftanco-marocain sur la coopérationdécentraliséedejanvier2006aparfaitementillustré cette approche.Il a retenu dans ses conclusions la nécessité dedévelopperune approched'intelligence socialepourpiloter plus efficacement les différents projets de coopération « au service des populationset des territoires ». En France, l'intelligence économique s'entend à la fois comme une politique publique de compétitivité industrielle fondée sur la maîtrise de l'information utile et comme une démarched'appui àladécisionstratégique.Ils'agit alorsd'une pratique légalederenseignementéconomique,d'organisation et de protection des savoir-faire,d'analyse et d'interprétation de ladynamiquedesmarchéset desacteurspar desentreprises oudesorganisations,dansuneperspectivededéploiementcom- mercial, technologique ou culturel. L'intelligence économique se présente alors comme la capacité à comprendreet interpréter en dynamique, de façon permanenteetsystématique,lesenjeuxetles«signauxprécoces d'alerte» enprovenance del'environnement detouteorganisation outerritoire, pourunpilotageplusefficient - enconnaissance de cause- des stratégiesde développement. La démarche procureunvéritable apprentissage delaperception, parl'utilisation de savoir-faired'analyse stratégique,de sécuritééconomique, dedétectiondessignauxfaibleset« avant-coureurs »(mouvement deconcurrents,dedonneursd'ordre clés,risquededépendance stratégique- compétences,technologiesclés -, mutations industrielles...). Elle sertalors le faiblecommele fort,chacun en fonctionde lapuissancede sonindustriede la connaissance et de la performance du capital social (identité culturelle, compétences, savoir-faire de gestion de crise, de partage d'information, culturedu réseau et de la confiance...) dans uploads/Management/ intelligence-que-au-maroc.pdf

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  • Publié le Sep 25, 2021
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