Artois Presses Université La Négation | Jan Goes, Mariana Pitar La négation : u

Artois Presses Université La Négation | Jan Goes, Mariana Pitar La négation : une notion problématique* ? Belinda Lavieu-Gwozdz p. 329-347 Texte intégral Je remercie les relecteurs anonymes pour leurs remarques, suggestions et corrections. La négation comme le néant et sans doute la mort exerce une fascination 1 2 3 4 5 (P. Attal, 1994 : 7) Introduction 1. La cohorte Notre recherche porte sur l’état de connaissances des élèves de cycle 3 (cycle des approfondissements-CE2, CM1 et CM2) dans le domaine de la négation. Les programmes de français de l’école primaire (B.O. du 19 juin 2008) fixent au cycle 3 « La connaissance et l’emploi pertinent [...] des formes négatives » (p. 123). Notre recherche se situe dans une double perspective : une perspective linguistique d’abord, permettant de faire le point sur la notion de négation. Nous nous appuierons sur différentes grammaires de référence mais aussi sur des manuels scolaires afin d’avoir une vision relativement large de cette notion (définition, critère de repérage syntaxique, interprétation sémantique...) une perspective didactique ensuite, permettant de voir, à partir d’un questionnaire-élève comment les élèves, de cycle 3 appréhendent la négation et les difficultés qu’ils rencontrent : sont-ils capables de définir et de repérer une phrase négative ? Sont-ils en mesure de comprendre les différents sens d’une tournure négative ? L’objectif de notre recherche est de montrer qu’une approche purement syntaxique ou exclusivement sémantique ou notionnelle ne peut suffire à appréhender la notion de négation dans la mesure où cette dernière apparaît comme « un opérateur syntactico-sémantique complexe » (Hamm, 1994 : 171). Après avoir présenté la cohorte sur laquelle porte l’expérimentation puis décrit le protocole adopté, nous présenterons une analyse des résultats en avançant des pistes de réflexion au niveau didactique ; enfin, pour conclure, nous proposerons les prolongements envisagés de ce travail. 6 7 8 9 2. Le protocole Notre expérimentation a été menée auprès des trois niveaux du cycle des approfondissements. Notre échantillon est composé d’écoles favorisées et d’autres appartenant à un réseau ECLAIR1. La cohorte se répartit de la manière suivante : École dans un dispositif ECLAIR École dans un dispositif RRS École « sans étiquette » Total CE2 = 22 élèves CE2 = 25 élèves CE2 = 12 élèves (CE1/CE2) = 59 élèves de CE2 CM1 = 25 élèves CMH 27 élèves CM1 =10 élèves (CM1/CM2) = 62 élèves de CM1 CM2 = 21 élèves CM2 = 25 élèves CM2 = 17 élèves (CM1/CM2) = 63 élèves de CM2 = 68 élèves = 77 élèves = 39 élèves = 184 élèves Le choix de ces classes et de ces niveaux s’est fait selon plusieurs critères : tout d’abord le choix de la pédagogie (démarche appropriative, réflexion sur la langue à partir du savoir des élèves), ensuite le choix d’une population variée (enfants issus de milieux favorisés, modestes et défavorisés) ; enfin il fallait un échantillon quantitativement significatif afin que nos résultats aient un sens. Nous avions bien signalé aux enseignants que le travail demandé aux élèves ne devait pas être présenté comme une évaluation, mais qu’il faisait partie d’une recherche concernant l’ensemble des élèves de cycle 3. Ces recommandations ont été suivies par les enseignants et les élèves ont joué le jeu, nous tenons à les remercier de leur confiance. Notre expérimentation a eu lieu dans les trois écoles à la même période (avril 2013). Celle-ci s’est déroulée en deux phases : une première phase écrite où nous avons demandé aux enseignants respectifs des classes de CE2, CM1 et CM2 de distribuer des questionnaires que nous avions nous-même élaborés. Cette fiche a été renseignée par les élèves sur le temps de classe là où l’emploi du temps indiquait « grammaire » et une seconde phase orale où nous avons organisé des entretiens par groupe de cinq élèves. 10 11 12 Dans la première phase, les élèves devaient répondre par écrit avec leurs propres mots à une première question ouverte : « Qu’est-ce que la négation ? ». La question était lue à l’oral et les enseignants étaient autorisés à compléter les consignes, en précisant qu’il fallait écrire le plus d’informations possibles pour permettre aux lecteurs de bien comprendre cette notion. En aucun cas les élèves n’avaient été prévenus des questions au préalable. Il s’agissait en effet de recueillir une connaissance intériorisée (et non reconstruite pour répondre à une demande anticipée). Aucune durée n’était précisée par les consignes, les enseignants devaient simplement laisser le temps nécessaire aux élèves pour répondre. Il leur était également possible d’aider par une dictée à l’adulte ceux qui avaient des difficultés à écrire leurs explications. La fiche est standardisée pour toutes les classes de cycle 3 (du CE2 au CM2), elle se présente de la manière suivante : Utiliser le langage pour analyser le langage – l’activité métalangagière – est une singularité constitutive de l’étude de la langue (Dolz et Meyer, 1998 : 8, Schön, 2008 : 7). « Le métalangage, réflexivité sur le langage, peut être perçu avec l’approche choisie comme une métalangue explicative des contenus » (Chiss & David, 2012 : 120). Demander aux élèves d’expliquer par écrit, avec leurs propres mots, ce qu’est la négation, peut être considéré comme « une reformulation impliquant un décentrage qui traduit une forme de réflexion métalinguistique » (Grossman, 1998 : 91). Cette approche repose sur l’idée que « plus les tâches font 13 14 15 16 Prénom : Date : Classe : Dans les phrases suivantes (i) Tu mets un (N) lorsque celles-ci sont négatives et tu soulignes les marques de la négation ; (ii) Tu indiques le ou les sens de cette phrase entre guillemets. Exemple : (0) Je ne peux pas venir à ta fête samedi (N) « Il n ’est pas possible que je vienne à ta fête samedi », « Je n ’ai pas la possibilité de venir à ta fête samedi », « il ne m’est pas possible d’être présent à ta fête samedi ». (1) Je crains qu’il ne pleuve (2) Je ne crains pas qu’il vienne (3) Je peux ne pas ranger ma chambre (4) Je ne peux pas ranger ma chambre (5) Vous n’êtes pas sans savoir que l’école est obligatoire (6) Paul ne déjeunera pas avec nous aujourd’hui (7) Tous les livres n’ont pas été rangés appel à un savoir grammatical explicite, plus les élèves seront en capacités de contrôler et planifier leurs propres processus de traitement linguistique » (Gombert, 1990 : 27). Il s’agit de « connaissances métalinguistiques déclaratives qui précéderaient le contrôle métalinguistique de l’application de ces connaissances » (Gombert, 1990 : 247). Ces explications reformulées par l’élève utilisent des attributs construits, avant tout, dans le cadre scolaire. Les termes utilisés par les élèves, les propriétés mises en avant, la façon dont elles évoluent sur une année scolaire (voire sur un cycle) sont des indicateurs précis des pratiques de l’enseignant, du discours et de la terminologue employée au sein de l’espace classe. Nous avons ensuite posé une seconde question où il s’agissait pour les élèves de cycle 3 d’exécuter individuellement une consigne qui consistait à repérer les éléments de la négation ensuite d’identifier le(s) sens possible(s) des phrases négatives. La suite de la fiche se présente sous cette forme : Ce corpus de sept phrases n’a pas été choisi au hasard. Nous souhaitions interroger les élèves de cycle 3 sur 17 18 19 3. Données théoriques de la négation 3.1. Dans les grammaires de référence différents types de négation dans la mesure où « l’incidence syntaxique de la négation ne couvre pas toujours sa portée sémantique ; autrement dit, la place des termes négatifs n’indique pas automatiquement quel segment est affecté par la négation. [...] Dans l’interprétation des énoncés, il faut donc s’interroger sur la portée de la négation » (Riegel et al., 2009 : 697). Tantôt nous avons sélectionné des énoncés où la négation porte sur le verbe (énoncé 6), tantôt sur les modaux (énoncé 3 et 4), tantôt sur le verbe et d’autres constituants de la phrase (énoncé 6), ou encore sur la double négation ou que Riegel et al, (op. cit. : 713) nomme la « négation cumulée » comme l’illustre l’énoncé (5). Nous avons également voulu tester les interprétations de la négation sur les quantificateurs (énoncé 7) et sur le fonctionnement du ne explétif (énoncé 1 et 2). Nous avons complété ce questionnaire par une seconde phase orale où nous avons organisé des entretiens par groupe de cinq élèves. Ces derniers explicitaient, débattaient, argumentaient, confrontaient leurs réponses avec leurs camarades issus de la même classe. Notre présence a servi à relancer le débat et à gérer les tours de parole. L’entretien a duré dix minutes par groupe pour échanger sur les questions 1 et 2 proposées lors de la phase écrite. À partir de la consultation de différentes grammaires de référence et manuels scolaires, nous proposons dans cette section d’organiser la définition de la négation selon différents paramètres généralement retenus dans ces ouvrages. Pour le grammairien, le terme négation recouvre à la fois un phénomène sémantique et les formes lexicales et uploads/Management/ la-negation-la-negation-une-notion-problematique-artois-presses-universite.pdf

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  • Publié le Nov 10, 2021
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