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HAL Id: halshs-03084260 https://halshs.archives-ouvertes.fr/halshs-03084260 Submitted on 21 Dec 2020 HAL is a multi-disciplinary open access archive for the deposit and dissemination of sci- entific research documents, whether they are pub- lished or not. The documents may come from teaching and research institutions in France or abroad, or from public or private research centers. L’archive ouverte pluridisciplinaire HAL, est destinée au dépôt et à la diffusion de documents scientifiques de niveau recherche, publiés ou non, émanant des établissements d’enseignement et de recherche français ou étrangers, des laboratoires publics ou privés. Le Management en Tunisie Karim Ben Kahla To cite this version: Karim Ben Kahla. Le Management en Tunisie. Manageor: les meilleures pratiques du management, 2010. ￿halshs-03084260￿ 1 Section 3. Le Management en Tunisie1 Réalisé par Karim Ben Kahla (Directeur de l’ISCAE Tunis ) Introduction : les avatars de la comparaison Existe-t-il un management « à la tunisienne »? Un modèle ou un idéaltype qui transcenderait les différences et les spécificités locales et présenterait suffisamment de cohérence pour se distinguer des autres types de management (à la française, à la japonaise, à l’américaine, etc.)? En quoi ce management différerait-t-il de celui qui est véhiculé par les manuels et les revues savantes ? Et en quoi serait-il plus ou moins proche d’autres types de managements dont les contours obéiraient à des frontières géopolitiques, supra ou infra étatiques? Poser ces questions c’est prendre pour acquis le postulat selon lequel les pratiques gravitent autour de certaines logiques inconscientes ou incorporées qui définiraient une sorte d’habitus du manager tunisien. A son tour cet habitus s’(op)pose ou, plus simplement se positionne, par rapport aussi bien aux postures normatives qui véhiculent un one best way (américain?) du management que des pratiques venues d’ailleurs et produites de façon plus ou moins déterministe par des contextes, des structures et/ou des contingences culturelles, économiques et technologiques. Ces questions supposent également que le niveau d’analyse « Tunisie » soit suffisamment homogène ou du moins que l’on puisse transcender les différences entrepreneuriales locales qui sont pourtant encore chères aux tunisiens eux-mêmes. Si elle n’est pas ontologique, la variété des managements relève non seulement des approches sociologiques de ceux-ci mais également d’une posture épistémologique remettant en cause aussi bien les définitions que les conceptions des réalités managériales qui recouvrent le réel organisationnel. En effet, au-delà de la relativité des pratiques, c’est la définition même, les frontières et les approches du management qui nous semblent devoir être interrogés. Ainsi, toute comparaison se devrait de relever le défi de la prise en compte des cadres d’analyses et de s’interroger sur la pertinence d’une compréhension de la réalité du management tunisien à travers le prisme toujours déformant des théories et des cadres occidentaux et plus particulièrement américains. La perception et l’expression des spécificités du management tunisien risque alors de dépendre des généralisations liées au management occidental considéré comme performant non seulement pour conduire les entreprises mais également pour saisir la réalité de celles-ci. Au-delà de la question de la diversité des pratiques managériales et de la nécessaire sociologie de celle-ci, la question de l’existence d’un éventuel management tunisien, impose de passer d’une problématisation en termes de territoires du management à une autre qui s’interrogerait sur la résistance et la pertinence des territoires face au management. Ce glissement du questionnement est nécessaire non seulement parce qu’avec les Technologies de l’information et de la communication et la rétiologie on assiste à une « explosion » des territoires et une virtualisation de ceux-ci mais également parce que le management ambitionne de maîtriser les frontières territoriales symboliques et matérielles et qu’il devient ainsi au fondement même de la communication, du savoir et de l’inter-culturalité qui donnent sens aux divers territoires. Enfin, il faudrait interroger un éventuel mouvement de convergence ou de divergence des modèles. Ce mouvement exprimerait non seulement une concurrence entre les entreprises et les économies nationales mais également une concurrence entre les modèles du management. Comparer ces modèles reviendrait alors à s’interroger sur les résistances du local aux vents du « global », d’une « programmation mentale » (la culture au sens de Hofstede) à une autre 1 Publié dans « Michel Barabel, Olivier Meier, (2010), Manageor, Les meilleures pratiques du management, 2e édition, Dunod, p. 229-239 (ISBN 978-2-10-054561-2) » 2 « programmation mentale » (le management néolibéral) portée par les « bonnes » pratiques du management. Au-delà de ces précisions ou de ces précautions qui montrent la complexité, l’intérêt mais aussi les limites de toute comparaison, il nous semble qu’il serait plus utile de comparer les éventuelles « cultures » que les pratiques managériales. Les premières seraient non seulement à l’origine des secondes mais elles seraient également moins éclatées et plus propices à une analyse en termes d’« idéaltype ». Tout en étant conscient des risques de culturalisme lié à l’esquisse d’un idéaltype culturel tunisien, la question principale devient alors : Si les formes et les manifestations managériales peuvent diverger que peut-on dire de la (ou des) matrices institutionnelles et culturelles productrice(s) de celles-ci ? Afin de répondre à cette question, nous allons commencer par présenter une rapide esquisse des caractéristiques de l’environnement politique, sociale et économique des affaires en Tunisie. Nous nous arrêterons par la suite sur certaines des principales caractéristiques culturelles du management en Tunisie en conclurons par l’analyse des pratiques au niveau de l’organisation, de la gestion des ressources humaines et des choix de stratégie. I. Le contexte du management tunisien A. Le contexte politique Les problématiques chères à la transitologie de la modernisation de la société et de la démocratisation du régime, trouvent, en Tunisie, une expression particulière liée aux rapports complexes entre l’Etat (ou les institutions et individus qui l’incarnent) et la société (et ceux qui prétendent parler en son nom). En effet, la volonté de construire un Etat fort, organique et capable de transformer d’en haut la société a débouché sur un volontarisme et un interventionnisme qui, paradoxalement, en maintenant la société civile en état de dépendance, ont nourri l’autoritarisme et le clientélisme tout aussi corporatiste que personnel (Redissi, 2006)2. La stabilité politique de la Tunisie coïncide aujourd’hui avec une nouvelle légitimité pour le parti toujours quasi unique (le RCD) basée non plus sur l’indépendance du pays mais sur l’efficacité technocratique. Cette stabilité intervient dans un contexte de chute de l’idéal communiste (1990), de crise du discours panarabe (guerres du Golfe) et d’engagement internationaux qui prennent en compte la dimension politique des évolutions du pays (accord d’association à l’Union européenne). Les caractéristiques du contrat social en Tunisie (Banque mondiale, 2004: 27) donnent la préférence à l’État planificateur plutôt que le marché pour la gestion de l’économie nationale (forte composante interventionniste). En adoptant un modèle d’industrialisation par la substitution à l’import et la protection des marchés locaux vis-à-vis de la concurrence internationale, cet Etat offre la sécurité et la protection économique (et parfois sociale) contre une complicité (ou parfois une neutralité) politique des groupes d’intérêt. Il offre également une certaine sécurité de l’emploi à une minorité de travailleurs en contrepartie d’une stagnation ou d’une faible évolution des salaires et des niveaux de vie. La préférence pour la redistribution et l’équité dans la politique économique et sociale apparait dans l’importance des transferts sociaux qui ont représenté 58.8 pour cent du budget, soit 19 pour cent du PIB en 2007. Face à cet Etat, dominé et parfois instrumentalisé par son administration, les autres acteurs de la société civile ont une faible marge de manœuvre et adhérent volontiers à une représentation 2 Redissi Hamadi (2006), Etat fort, société civile faible, in Démocratie, développement et dialogue social, publication du département des études et de la documentation Union Générale Tunisienne du Travail 3 de la scène politique faisant de celle-ci l’expression de l’unité organique de la nation, plutôt que le lieu de la contestation politique. L’Union Générale Tunisienne du Travail (UGTT, fondée en 1946) et l’Union Tunisienne de l’Industrie du Commerce et de l’Artisanat (UTICA, né en 1947, premier de son genre dans le monde arabe et revendiquant actuellement près de 75000 affiliés) restent des structures centralisées, hiérarchiques et étroitement réglementées. Ces deux structures assistent, depuis quelques années, à l’émergence d’une nouvelle élite qui n’a pas participé aux luttes anticoloniales et qui trouve, elle aussi, dans l’efficacité et la capacité de mobiliser les ressources financières et humaines (notamment les jeunes et les femmes), de nouvelles sources de légitimité. Tout en se déclarant apolitiques, ces structures constituent des « espaces politiques de substitution » qui, en monopolisant la défense des intérêts des salariés et des patrons, souffrent de leur bureaucratisation et de l’incapacité de réformer les coalitions pour un véritable changement. Ainsi, tout en bénéficiant du statu quo et de la rente liée à la régulation gouvernementale, les principaux acteurs de ces structures s’adaptent aux réformes plutôt qu’ils ne les remettent en cause (de façon à continuer à profiter des rentes). Selon Redissi (2006 : 157), « l’Etat leur concède une certaine autonomie, mais surtout il leur attribue un privilège régalien : le monopole de la représentation socioprofessionnelle, de sorte qu’aucune organisation compétitive ne sera reconnue ou autorisée dans uploads/Management/ partie-3-le-management-en-tunisie.pdf

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  • Publié le Jul 16, 2022
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