1 L’interprétation des relations syntaxiques La notion de valence et l’analyse
1 L’interprétation des relations syntaxiques La notion de valence et l’analyse actancielle Dans la théorie de la valence, telle qu'elle a d'abord été conçue par Tesnière (1959), le verbe constitue le centre organisateur de la phrase. Les spécifications lexicales d'un verbe donc sont traduites par ses possibilites combinatoires, c'est-a-dire par les membres nominaux et/ou prépositionnels avec lesquels il se combine: 1 toute comprehension d'un verbe tel que envoyer, par exemple, prend son point de depart dans le fait que ce verbe dénote une situation comportant trois participants qui sont dénotés par les trois membres de phrase avec lesquels se combine ce verbe. De ce fait, la notion de valence n'offre pas seulement une façon simple de classifier les verbes d'une langue donnée, mais aussi une hypothèse sur la structure des phrases de la langue: si c' est le verbe qui détermine la structure de la phrase, la théorie de la valence doit etre construite de telle sorte qu'elle permette l'élaboration d'une typologie de phrases en même temps qu'une analyse et une classification des verbes. On désigne par le terme de valence l’aptitude générale de certaines catégories grammaticales centrales (telles que le verbe, mais aussi l’adjectif et le nom) d’imposer à leur entourage des configurations syntaxiques bien déterminées. C’est ainsi qu’un verbe comme donner est dit trivalent parce qu’il requiert trois actants (constituants participant syntaxiquement au procès spécifique que le verbe dénote): un sujet et deux compléments, l’un direct, l’autre indirect, qui identifient respectivement l’agent d’un transfert, l’objet sur lequel ce procès s’exerce et son bénéficiaire. Les termes de valence et d’actant sont utilisés en un sens résolument syntaxique. Le verbe donner dans la phrase: Saint Martin (act.1) donna la moitié de son manteau (act.2) à un pauvre. (act.3) peut être caractérisé par son schéma actanciel, c’est-à-dire par les relations syntaxiques que ce verbe ouvre et para la nature des constituants qui les occupent. Donc le verbe donner a 3 actants, alors qu’un verbe comme récidiver ne pourrait en avoir qu’un dans Saint Martin a récidivé / a récidivé [=No +V] et deux dans Saint Martin a résolu le problème/ a résolu [=No+V+N1] Les trois actants de la première phrase (prime actant, second actant et tiers actant) assurent respectivement les fonctions de sujet (SM), d’O.D. (la moitié de son manteaux) et d’O.Indirect introduit par la préposition à (à un pauvre). Les différents actants sont soumis à certaines conditions au niveau de l’interprétation des relations sémantiques. Dans une analyse valencielle, le V régit syntaxiquement et contrôle aussi bien ses compléments que son sujet. Fonctions générales, rôles sémantiques et cadres valenciels On peut soupçonner que l’organisation paradigmatique, morphologiquement homogène des systèmes casuels des langues classiques, est responsable de la tendance, en grammaire ou en linguistique, à « paradigmatiser» aussi les quatre positions syntaxiques nominales même dans des langues qui ne disposent pas d’un système casuel. 2 Déjà dans la grammaire antique, les dénominations des différents cas impliquent des analyses sémantiques 8. Et il fait partie d’une ancienne tradition grammairienne d’associer aux formes morphosyntaxiques du nom une gamme de concepts sémantiques relationnels, à savoir les rôles sémantiques, tels que l’agent, le patient, la source ou l’origine, le récepteur, le bénéficiaire , le possesseur, etc. Dans différentes nomenclatures, cette tradition s’est maintenue jusqu’à la linguistique moderne : on peut même avancer que c’est là un des rares traits communs à tous les courants modernes de la syntaxe, des rôles thématiques de la grammaire générative en passant par les cas profonds de la « grammaire des cas » jusqu’aux rôles actanciels prévus par les différents courants de la syntaxe fonctionnelle. Toutes ces théories ont en commun le fait qu’elles se basent sur un inventaire relativement homogène de valeurs sémantiques, de significations relationnelles. Tous les rôles sémantiques sont considérés comme des catégories du même ordre, du même type fonctionnel 9 . Pour parler dans les termes de la grammaire fonctionnelle : les rôles sémantiques se situent tous sur le même plan de la structure de la phrase, à savoir sur le plan logico-propositionnel . Un problème notoire de l’approche des rôles actanciels sémantiques consiste en l’impossibilité de rattacher systématiquement à chaque cas ou à chaque catégorie syntaxique un rôle sémantique précis. 8. Le génitif comme le cas qui désigne l’origine ; le datif qui désigne la personne à qui on « donne » ou le récepteur ; l’ablatif qui désigne la source locale, etc. Initialement, il semble s’agir non pas de définir les significations, mais plutôt de dénominer des collocations typiques pour chaque cas (onomastikè pour donner son nom, genikè pour donner le patronyme, epistaltikè dans la formule d’adresse dans une lettre, etc., suivant une communication personnelle de Markus Stegbauer). 9. Ceci est vrai même pour les rôles thématiques de la grammaire générative, qui, sur le plan syntaxique, attribue des statuts fondamentalement distincts aux différents syntagmes nominaux. Ainsi, le nominatif ou le sujet peut désigner tantôt le rôle d’agent, tantôt le rôle de patient, tantôt celui de récepteur ou d’expérient, selon la nature du verbe qui l’accompagne. Le datif ou le COI peut désigner tantôt le récepteur ou expérient, tantôt la source d’une influence sensorielle, etc. La source peut aussi être représentée par le COD, qui, le plus souvent, exprime le patient ou l’objet effectué. Le génitif ou le CN peut désigner tantôt le possesseur, tantôt l’agent, tantôt le patient, et ainsi de suite. Il existe deux stratégies possibles pour affronter ce « défi »: le structuralisme européen, réticent par rapport à un élément qui n’ait pas de valeur systématique, a pris pour tâche de définir des « significations fondamentales » ou des « valeurs générales » pour les différents cas 10. La seconde solution, communément acceptée aujourd’hui, est de renoncer, au moins en partie, à accorder une signification directe aux différentes catégories syntaxiques ou aux différents cas, et de leur attribuer une fonction purement abstraite, grammaticale, distinctive, qui ne permet une analyse sémantique qu’à partir du contexte concret d’un verbe particulier. Ainsi, il dépend des lexèmes verbaux plaire et aimer et de leurs cadres valenciels respectifs, lequel des deux rôles qui sont en jeu, source ou expérient, va apparaître en position de sujet, lequel en position de complément. Et c’est l’effet des cadres valenciels des verbes s’approcher et s’éloigner que les rôles respectifs indiqués par la préposition de semblent se contredire (je m’approche/éloigne de 3 quelque chose). Chaque lexème verbal est donc accompagné d’un schéma distributeur, déposé dans le lexique, qui décide de la corrélation entre forme morphosyntaxique et rôle sémantique. Cette organisation confère une fonction purement distinctive aux catégories morphosyntaxiques, laissant au lexique la tâche d’apporter une signification relationnelle. Les exemples montrent que ces cadres valenciels sont en principe arbitraires. Ils sont soumis à des évolutions historiques, obéissant parfois plus à des normes qu’à des principes systématiques. Néanmoins, la distribution des rôles sémantiques par rapport aux différents cas ou positions syntaxiques suit des tendances générales. Les verbes tendent à former des classes, où certains traits sémantiques s’accompagnent de certains cadres valenciels (verbes d’action, de perception, du dire, de don, etc.). Ceux-ci, à leur tour, se regroupent dans des schémas plus généraux. La typologie des langues a étudié à fond ces schémas distributeurs pour définir des systèmes de participation ou d’actance possibles et pour établir les principes universaux qui régissent les corrélations entre les rôles sémantiques et les formes morphosyntaxiques sous forme d’assignment hierarchies. Parmi les résultats les plus importants il faut mentionner la théorie de la transitivité, les principes du marquage différentiel de l’objet et surtout l’animacy and individuation hierarchy (échelle de définitude et d’humanitude). Les notions de transitivité ou de marquage différentiel de l’objet expliquent moins la sémantique du sujet ou du COD que le contraste entre ces deux positions actancielles. Finalement, ces schémas partent de la même idée d’un inventaire de fonctions sémantiques homogènes, en principe interchangeables entre les différentes positions syntaxiques. Le caractère morphosyntaxiquement hétéroclite des différentes positions syntaxiques justifie l’idée qu’il s’agit aussi de fonctions hétéroclites. Entre le nom et le verbe: les rôles textuels Sous le terme de rôle textuel, H.Weinrich englobe les communicants (rôles communicatifs) et les actants (rôles actanciels). Les communicants (“personnes grammaticales”) se déduisent de la situation de communication élémentaire. Celle-ci existe lorsqu’une personne tient le rôle du locuteur (dans la communication écrite, le scripteur ou l’auteur) et qu’une autre personne tient le rôle d’auditeur (dans la communication écrite, le lecteur). Tous les autres objets ou personnes sont intégrés sous le rôle du référent. La catégorie du référent ne peut se définir de façon positive qu’à partir d’informations supplémentaires puisées dans le contexte ou dans la situation, et introduites par la référence Les actants (rôles actanciels) se déduisent d’une situation actancielle élémentaire qu’il faut également considérer sous l’angle communicatif, comme étant une co-actance. On parlera ainsi de situation actancielle lorsqu’au moins deux personnes agissent ensemble par rapport au même objet. La personne à l’origine de l’action, c’est le “sujet”; le co-actant est désigné comme “partenaire”. L’”objet” de l’action est constitué par une personne ou une chose par rapport à laquelle la co-actance a lieu. 4 Dans la uploads/Management/ valenced.pdf
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- Publié le Apv 28, 2021
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