Lidil Revue de linguistique et de didactique des langues 59 | 2019 Prononcer le

Lidil Revue de linguistique et de didactique des langues 59 | 2019 Prononcer les langues : variations, émotions, médiations Variabilité inter-individuelle et intra-individuelle dans la prononciation d’étudiants français qui pratiquent l’Apprentissage informel de l’anglais en ligne Inter-Individual and Intra-Individual Variability in the Pronunciation of French Students Who Practice Online Informal Learning of English Kossi Seto Yibokou, Denyze Toffoli et Béatrice Vaxelaire Édition électronique URL : http://journals.openedition.org/lidil/6369 DOI : 10.4000/lidil.6369 ISSN : 1960-6052 Éditeur UGA Éditions/Université Grenoble Alpes Édition imprimée ISBN : 978-2-37747-090-7 ISSN : 1146-6480 Référence électronique Kossi Seto Yibokou, Denyze Toffoli et Béatrice Vaxelaire, « Variabilité inter-individuelle et intra- individuelle dans la prononciation d’étudiants français qui pratiquent l’Apprentissage informel de l’anglais en ligne », Lidil [En ligne], 59 | 2019, mis en ligne le 01 mai 2019, consulté le 05 mai 2019. URL : http://journals.openedition.org/lidil/6369 ; DOI : 10.4000/lidil.6369 Ce document a été généré automatiquement le 5 mai 2019. © Lidil Variabilité inter-individuelle et intra-individuelle dans la prononciation d’étudiants français qui pratiquent l’Apprentissage informel de l’anglais en ligne Inter-Individual and Intra-Individual Variability in the Pronunciation of French Students Who Practice Online Informal Learning of English Kossi Seto Yibokou, Denyze Toffoli et Béatrice Vaxelaire 1. Introduction 1 À l’aune du progrès technologique et grâce aux appareils de communication connectés au web (ordinateurs, tablettes et smartphones), l’accès à des quantités importantes de discours oraux authentiques en langue étrangère devient de plus en plus facile. Cette facilité d’accès modifie les rôles des acteurs du milieu scolaire, puisque ces mêmes ressources sont dorénavant à la portée aussi bien des apprenants que des enseignants. Les apprenants deviennent ainsi utilisateurs actifs de la langue dans des situations d’apprentissage informel, dans lesquelles ils s’exposent à des quantités importantes d’input hors cadres institutionnels (Sockett, 2014). De nombreuses études sur l’OCLL (Out- of-Classroom Language Learning : Benson, 2016) montrent son intérêt, sur des plans divers, allant de l’autonomie à l’identité, des stratégies d’apprentissage aux acquisitions langagières (Kusyk, 2017 ; Cole & Vanderplank, 2016). L’apprentissage informel de l’anglais en ligne (AIAL) concerne plus particulièrement des apprentissages de l’anglais à partir d’activités sur internet en contextes informels qui aboutissent potentiellement à des acquisitions langagières (Toffoli & Sockett, 2015). Il peut aboutir à des apprentissages non conscientisés, voire totalement incidents (Kusyk, 2017). Variabilité inter-individuelle et intra-individuelle dans la prononciation d’... Lidil, 59 | 2019 1 2 Les activités d’AIAL les plus pratiquées comportent le visionnage de films et de séries télévisées à dominante américaines (avec ou sans sous-titres), l’écoute de chansons en anglais et des échanges écrits (notamment sur les réseaux sociaux : Toffoli & Sockett, 2010). Des études sur l’AIAL ont montré de nombreux avantages de ces pratiques pour l’acquisition lexicale et grammaticale chez des apprenants de l’anglais en Europe (Kusyk & Sockett, 2012), au Brésil (Cole & Vanderplank, 2016) et en Corée (Lee, 2017). Toutefois, aucune étude sur l’impact de ces activités en matière de prononciation n’a encore été conduite. 3 La majorité des recherches en acquisition d’une langue étrangère (L2), notamment celles qui portent sur la production de la parole, présente des résultats établis à partir de moyennes. Ces statistiques sont utiles pour dégager des tendances collectives, mais peuvent s’avérer inadaptés dans une logique de compréhension des trajectoires de développement langagier où chaque individu présente en réalité un « pattern » (schéma) unique de production (Smith & Hayes-Harb, 2011). Face à ces différences individuelles, Dörnyei et Skehan (2003) préconisent une évaluation de la variabilité en se basant sur des performances individuelles. 4 Ainsi, dans cette étude exploratoire, notre objectif est de dresser un état des lieux de la prononciation de l’anglais chez quelques étudiants français qui pratiquent l’AIAL. Elle vise la description des différentes relations potentielles entre ces activités et les accents que les utilisateurs adoptent. Nos résultats consolident les données provenant d’un échantillon de dix utilisateurs, ce qui permet de dégager quelques tendances, tout en gardant la trace des productions individuelles, afin de rendre compte des trajectoires réelles des personnes impliquées. 2. L’impact des médias audiovisuels sur l’acquisition phonétique 5 La théorie de la convergence (imitation) phonétique permet d’expliquer les mécanismes qui sous-tendent le développement de certains aspects phonétiques de la langue orale (Markham, 1997). Considérée comme le levier de tout apprentissage phonétique, cette théorie stipule que lorsque deux personnes s’engagent dans une conversation, l’une tend à reproduire les sons que produit l’autre et vice versa. Stuart-Smith et coll. (2011) définissent la convergence phonétique comme des changements dans la production de discours vers l’accent d’un interlocuteur. Pour Pardo et coll. (2012), ce sont les moyens qu’utilise un locuteur afin d’adapter son style de conversation pour être plus proche d’un interlocuteur. L’imitation joue un rôle prépondérant dans l’émergence et le développement des systèmes phonétiques. Elle reposerait sur des processus sensori- moteurs établis depuis la naissance, et également des compétences cognitives et sociales (Rizzolatti & Buccino, 2005). Imiter, c’est donc s’approprier d’une manière volontaire ou involontaire des caractéristiques particulières propres au parler (l’accent/prononciation) d’un autre individu2. 6 Lors d’interactions directes, les locuteurs s’imitent mutuellement : ils s’alignent l’un sur l’autre sur les plans gestuel, lexical, syntaxique, rythmique et phonétique. C’est ainsi que Chambers (1998) considère que l’apprentissage phonétique ne peut avoir lieu que pendant les interactions in praesentia et rejette l’idée selon laquelle les médias, qualifiés de sources non interactives, puissent avoir un effet sur l’acquisition phonétique. Variabilité inter-individuelle et intra-individuelle dans la prononciation d’... Lidil, 59 | 2019 2 7 Pourtant, quelques recherches attestent un impact positif de la télévision sur l’accent. Mitterer et McQueen (2009) indiquent la capacité des apprenants d’une L2 à imiter des accents à partir de sources enregistrées. Sanchez, Miller et Rosenblum (2010) ont aussi trouvé que les sources audio-visuelles ont influencé le VOT3 des consonnes occlusives des participants dans deux tests d’imitation phonétique. Stuart-Smith et coll. (2011) ont comparé deux groupes de locuteurs écossais : l’un en interaction directe avec un locuteur natif du Standard British English ; l’autre devant la vidéo de la séance du premier groupe. Les deux groupes ont révélé une imitation phonétique, quoique plus marquée chez le groupe en interaction directe. Les auteurs en concluent que l’imitation phonétique par le biais des médias est bien possible. 8 Stuart-Smith et coll. (2013) confirment également que des visionnages actifs et engagés de séries télévisées accélèrent le changement d’accent : des adolescents de 10 à 15 ans de Glasgow (Écosse) qui regardent régulièrement la série EastEnders s’approprient des éléments de l’accent londonien (le cockney). Androutsopoulos (2014) affirme qu’en sociolinguistique, le rôle des média est de plus en plus perçu comme pouvant intervenir dans le changement linguistique systémique. Nguyen et Delvaux (2015) résument notre position, en affirmant, à la lumière des théories de l’imitation phonétique, que les moyens audio-visuels favorisent l’imitation phonétique et faciliteraient ainsi l’appropriation de la prononciation. 3. Objectifs de l’étude 9 Au vu des travaux cités ci-dessus concernant les effets acquisitionnels de l’AIAL et l’impact des médias en termes d’acquisition phonético-phonologique, nous avons voulu approfondir le ressenti d’un certain nombre d’enseignants d’anglais en contexte universitaire, qui trouvent que l’anglais des étudiants français reflète davantage de marqueurs d’accents américains que par le passé (Toffoli & Sockett, 2015). À partir d’analyses acoustiques et perceptives de trois voyelles postérieures de l’anglais britannique chez deux locuteurs francophones, Exare (2009) émet l’hypothèse que « l’exposition massive de nos jeunes étudiants (à travers le cinéma et la chanson notamment) à des variétés d’anglais comme l’anglais américain (rhotique) a certainement une incidence sur cette propension aux réalisations rhotiques » (paragr. 27). Ayant analysé la production et la perception de l’anglais américain et britannique par des apprenants adolescents norvégiens, Rindal (2010) appelle à des recherches supplémentaires pour investiguer l’influence des média. 10 Ainsi, la présente étude porte sur l’analyse de productions orales de dix étudiants non spécialistes de l’anglais et vise à explorer les différentes relations entre leurs activités informelles en ligne et leur prononciation. 4. Méthodologie 11 Ont participé à cette étude, cinq femmes et cinq hommes de langue première française, âgés de 18 à 33 ans, issus du secteur Lansad4, à l’université de Strasbourg. Leur niveau d’étude va de la licence 1 au master 2 dans diverses filières (scientifiques, littéraires et artistiques). Ils apprennent l’anglais en tant que première L2 depuis 5 à 23 ans, dont 7 à 48 mois à l’université. Variabilité inter-individuelle et intra-individuelle dans la prononciation d’... Lidil, 59 | 2019 3 12 Afin d’assurer la meilleure qualité possible des signaux acoustiques, des enregistrements ont été réalisés en chambre insonorisée de l’Institut de phonétique de Strasbourg. Un enregistreur audio Marantz Professional® (PMD661 MKII) réglé sur le mode « mono » à une fréquence de 44,1 kHz et un microphone Sennheiser® (e845S) ont été utilisés. Les participants ont été au préalable informés des conditions de la prise de sons audio, des consignes et des tâches à accomplir. Au début, installés à quelques centimètres du micro, ils se présentent en anglais. Ensuite, ils prononcent à cinq reprises une série de 13 mots placés dans une phrase porteuse, à vitesse d’élocution normale (celle de leur choix) et à voix haute. Les répétitions permettent non seulement d’obtenir uploads/Management/ yibokou.pdf

  • 10
  • 0
  • 0
Afficher les détails des licences
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise
Partager
  • Détails
  • Publié le Nov 02, 2021
  • Catégorie Management
  • Langue French
  • Taille du fichier 0.5709MB