1 In! : Michel FRANCARD, Geneviève GERON & Régine WILMET (dir.). 2001. Le franç
1 In! : Michel FRANCARD, Geneviève GERON & Régine WILMET (dir.). 2001. Le français de référence. Constructions et appropriations d’un concept. Actes du colloque de Louvain-la-Neuve (3-5 novembre 1999), Volume II! : Cahiers de l’Institut de Linguistique de Louvain, 27 (1-2), pp. 57-73. LE FRANÇAIS DE RÉFÉRENCE DANS L’ENSEIGNEMENT DU FRANÇAIS ET EN FRANÇAIS AU TOGO Colette NOYAU Université de Paris X 1. INTRODUCTION Ce travail est une tentative de réponse empirique à ce qui constitue un “français de référence”, à partir d’une approche acquisitionnelle de l’appropriation du français langue de scolarisation en Afrique de l’ouest. Ce projet1 fait partie d’une Action de Recherche Concertée de l’AUPELF sur “L’état du français en francophonie”, et porte plus précisément sur “La dynamique de l’appropriation du français langue seconde en pays francophone d’Afrique de l’ouest, au Bénin et au Togo”. Les données sont tirées de la pré-enquête menée depuis 1996. Nous abordons donc la question du “français de référence” à partir d’une pré-enquête sur les situations de transmission et d’appropriation du français langue seconde au Bénin et au Togo. Le paradoxe de ces situations, c’est que l’enfant a souvent comme seul ou principal environnement francophone la salle de classe, et comme français de référence le parler de ses enseignants, lui-même acquis dans des conditions similaires d’accès, où le parler du “locuteur autorisé” servant de référence à la fois jouit d’un statut de compétence et d’autorité, et est affecté d’insécurité linguistique. C’est dans ces conditions que la représentation du français de référence se constitue, pour les élèves, essentiellement à travers les pratiques langagières de la classe, les supports d’activités pédagogiques, et les interventions métalinguistiques du maître. À partir d’un échantillon d’enregistrements de classes d’établissements du premier et du second degré au Togo, lors d’activités de français et d’autres matières, nous tentons de retracer la constitution et la circulation de cette représentation d’un français de référence. 1! Il associe des linguistes de l’Université Paris X-Nanterre, de l’Université du Bénin (Lomé, Togo) et de l’Université Nationale du Bénin (Cotonou, Bénin). 2 Notre approche de cette situation est acquisitionniste: nous interrogeons le corpus • sur la nature et les spécificités de la langue en usage qui alimente l’appropriation de la langue, • sur les situations d’utilisation de la langue en classe dans leur dimension interactionnelle, à partir des interactions maître-élèves en classe, • et sur les représentations de la langue induites par les activités de classe et les régulations effectuées par le maître, notamment sur la nature des relations entre connaissances actives pour la communication et connaissances déclaratives ou réflexives. 2. LE FRANÇAIS DE RÉFÉRENCE DANS L’APPROPRIATION DU FRANÇAIS PAR ET POUR L’ÉCOLE Du point de vue de l’acquisition d'une langue étrangère (L! E), selon Corder (1971), on peut opposer la grammaire mentale qui est l’ensemble des règles dont dispose un sujet à un moment donné du développement de sa langue, ces règles définissant l’état de la langue (nous dirions aujourd'hui: le lecte de l’apprenant): c’est la grammaire utilisée dans la communication spontanée — et la grammaire de référence définie comme la “connaissance explicite et raisonnée de la structure formelle de la langue”. Nous n’allons pas retenir ici cette conception restrictive, liée à un moment de la linguistique où langue équivalait à la grammaire (formelle). Nous poserons, d’entrée de jeu, que la langue de référence en tant que représentation, pour les usagers, ne constitue pas un système complet, mais seulement un ensemble de traits sur lesquels porte l’attention normative — à l’école, pour les usagers maîtres et élèves, un ensemble de traits sur lesquels porte l’effort d’inculcation et l’évaluation normative. On peut réfléchir sur les types de traits et les niveaux d’organisation de la langue qui sont focalisés dans cette constitution / transmission d’une langue de référence. Ainsi, pour Gadet (ici même), en français, la phonologie est le niveau d’organisation le moins standardisé, la syntaxe l’est davantage mais sans qu’on puisse circonscrire l’ensemble des formes en concurrence, alors que la morphologie est le niveau le plus standardisé, toute forme non sélectionnée comme standard étant réputée “faute”. Dans notre cas d’acquisition et d’usage du français, on peut cerner la langue de référence indirectement: a)! à travers le choix de variété (cf. Gadet ici même); b)! à partir de l’enseignement, qui a besoin de référence (on peut examiner ce qui est inculqué, et en se fondant sur quelle référence); c)! à partir des traces de surveillance dans le discours (reprises et reformulations, corrections et auto-corrections) (cf. Noyau 1980b). 3 Quelles sont les tensions qui se font jour dans l’usage du français à l’école au Togo? (cf. Gueunier ici même). Existe-t-il une tension centrifuge vers des normes endogènes? Constate-t-on une tension centripète, vers un français de référence général? Pour répondre à ces questions, il faut associer l’étude des pratiques (ce que nous faisons ici), et celle des représentations (Gueunier ici même) - ce qui constituera un volet ultérieur de l'étude, à mener à partir d'entretiens avec les enseignants. Le projet global dont cette étude fait partie analyse la genèse du sujet francophone à travers la scolarisation en français, et le fonctionnement du français dans ce cadre, en associant une sociolinguistique qualitative (gestion des langues, de la variation et des genres textuels oraux comme écrits par les locuteurs dans les situations d’interaction ordinaires et institutionnalisées), et la psycholinguistique de l’acquisition — étude des étapes de l’appropriation du français dans cet environnement, c.-à-d. majoritairement à travers la scolarisation, par et pour des activités langagières concrètes (cf. Klein 1989). Il vise à étudier les modalités de l’acquisition et de la mise en œuvre par les enfants du français, à travers la scolarisation et les expériences de communication en environnement plurilingue, en milieu rural et en milieu urbain. On suit chez des groupes d’enfants le développement des capacités cognitives et des connaissances, parallèlement à l’apprentissage de la langue de scolarisation, depuis l’entrée au CP1, jusqu’à la fin de la classe de 3ème, d’où doivent sortir de jeunes adultes bilingues. Les situations linguistiques d’Afrique subsaharienne n’ont à notre connaissance pas encore fait l’objet d’études du point de vue des processus d’acquisition linguistique. Et la situation d’acquisition du français qui s’y donne, où l’école est le principal — parfois le seul — lieu d’exposition à la langue française, et où le français doit dès le début de son acquisition par l’enfant servir de véhicule à l’acquisition de l’ensemble des connaissances scolaires, est un défi à relever par l’enfant, par l’enseignant, et par le chercheur (Noyau 1998). Il s’agit pour nous d’étudier l’impact de l’organisation des situations d’enseignement-apprentissage sur les processus d’appropriation du français. On caractérise les pratiques d’enseignement utilisées dans les classes enquêtées, pour le français et pour les autres matières scolaires, en tant qu’élément de l’exposition à la langue (cf. Noyau 1980a), pour examiner leurs conséquences spécifiques sur la structure de l’acquisition (point de vue diagnostique). Par ailleurs, l’accent est mis sur l’acquisition de la langue orale, l’écrit — acquisition de la lecture et de l’écriture, fonctions de l’écrit en classe et en dehors — n’étant examiné que comme élément de l’expérience langagière des enfants, non en tant que canal spécifique avec ses spécificités d’acquisition et de traitement. L'appropriation de la langue française dans cet environnement s'effectue majoritairement à travers la scolarisation, par et pour des activités langagières et dans des interactions concrètes. La situation linguistique de ces enfants est complexe, puisque, comme dans la plupart des pays d’Afrique subsaharienne, ils 4 grandissent au sein d’un environnement qui ne sera pas celui de leur langue de scolarisation, et pour la plupart d'entre eux, la première vraie rencontre avec le français se fait lors de leur entrée à l’école primaire. La situation linguistique étudiée se caractérise par une expérience fortement asymétrique du français et de la (des) langue(s) première(s). On adopte une approche intégrée des capacités langagières, en prenant pour matériaux des activités de communication (de production et de compréhension, orales et écrites), dans lesquelles on examine le développement et le rôle des différents niveaux d’organisation linguistique, pour comprendre et pour produire. Il s’agit ainsi de comprendre les processus d’appropriation du français langue seconde chez les enfants à partir de leur expérience de cette langue comme langue d’enseignement en milieu scolaire, parallèlement au développement cognitif et à la découverte et l’appropriation des savoirs et savoir-faire auxquels cette langue sert de véhicule. On veut à terme cerner les atouts et les difficultés de cette situation spécifique d’acquisition langagière, qui peut être rapprochée d’autres situations d’acquisition mieux connues et contrastées avec elles: apprentissage de la langue seconde en immersion scolaire dans des pays comme le Canada, acquisition du français par la scolarisation en France par les enfants de familles récemment immigrées, apprentissage précoce des langues étrangères à l’école de base. Dans les deux pays concernés par l’étude, le français, langue officielle, est à l’heure actuelle le seul médium d’enseignement. La plupart des enfants qui entrent au CP1 doivent acquérir cette langue en même temps qu’ils apprennent à lire, et on attend d’eux à la fin du primaire qu’ils sachent lire, écrire, comprendre et parler couramment le français. Au uploads/Management/la-francais-de-reference-dans-lenseignem.pdf
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- Publié le Sep 16, 2022
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