LE CONTROLE DE GESTION : 1 LE CONTROLE DE GESTION : Pour un pilotage intégrant
LE CONTROLE DE GESTION : 1 LE CONTROLE DE GESTION : Pour un pilotage intégrant stratégie, cognition et finance Sophie MIGNON Robert TELLER LE CONTROLE DE GESTION : 2 Introduction Cet ouvrage développe une vision intégrée du contrôle de gestion qui a pour but un pilotage des organisations intégrant stratégie, cognition et finance. Cette intégration stratégie-cognition-finance semble être, en effet, une piste prometteuse pour redonner du sens à des pratiques managériales « écornées » par une orientation trop centrée sur la valeur actionnariale et l’optimisation uniquement financière. Comme toute pratique, le contrôle de gestion subit les effets des crises et des mutations qui bouleversent les économies globalisées d’aujourd’hui. Le développement de la globalisation et de la financiarisation accentue, en effet, la pression des critères financiers comme éléments décisifs des choix stratégiques. La crise financière récente vient questionner la légitimité des soubassements théoriques jugés jusqu’alors quasi incontestables et notamment l’efficience des marchés financiers et son corpus issu de la théorie micro-économique. D’un autre côté, la prise de conscience de la rareté des ressources et des impacts de la compétition mondiale sur les équilibres de notre planète suppose un renouvellement des enjeux stratégiques de long terme et plaide pour une approche intégrant mieux les diverses parties prenantes. Par ailleurs, le développement de l’économie de la connaissance et l’explosion des ressources liées à l’internet remettent au premier plan la question des stratégies d’acteurs dans la gestion des organisations. Ces lames de fond impactent fortement la structure, les stratégies et les modes d’organisation des entreprises dans le monde. Une telle situation bouscule forcément les approches managériales ainsi que le contrôle de gestion et notamment l’utilisation de certains de ces outils. Il convient de réfléchir à un système de contrôle adapté qui puisse faire l’interface entre les besoins de la planification stratégique et les exigences de plus en plus rigoureuses des contraintes financières ou des budgets opérationnels. A l’origine, le contrôle de gestion prend sa source dans le domaine stratégique mais son rôle peut varier considérablement en fonction de l’environnement et du modèle théorique sous-jacent. Sur la base d’une approche classique de la stratégie fondée sur l’avantage concurrentiel, on assiste à un développement des pratiques de contrôle de gestion à logique stratégico–fonctionnelle. Ce sont des outils de déploiement de la stratégie en actions opérationnelles. L’entreprise est divisée en centres d’activités à partir d’une analyse des processus. L’accent est mis sur la performance globale qui inclut, outre la dimension financière, des aspects non- financiers tels que la qualité, les délais, la valeur pour le client … Il s’agit de contribuer à animer la structure, à accroître la réactivité globale de l’entreprise, à définir un système d’information permettant de comprendre la performance globale de l’entreprise. Son cadre conceptuel est plutôt de type partenarial dans la mesure où il dépasse la vision purement financière de la performance et de l’organisation. Sous la pression de la financiarisation des économies, on assiste à une progression sensible du contrôle de gestion à logique purement financière. Ce mode de contrôle suppose une définition préalable d’un objectif financier global qui est LE CONTROLE DE GESTION : 3 ensuite diffusé dans la structure de l’organisation qui est divisée en centres de profit. La logique d’action est tournée vers la responsabilité individuelle et le contrôle a posteriori des acteurs sur des résultats financiers traduits en termes de création de valeur actionnariale. Le contrôle de gestion à dominante financière est centré sur la création de valeur. Il utilise l’approche financière qui considère que la valeur de l'entreprise dépend de la pertinence des décisions internes et de l’appréciation du marché financier. Son cadre conceptuel est celui de la théorie contractuelle de la firme dans une vision de type « shareholder ». Deux tendances se dégagent alors: une conception asservie aux besoins des marchés financiers d’une part, et une vision plus centrée sur la performance globale et la capacité cognitive des acteurs d’autre part. La première conception, le contrôle de gestion asservi à la finance, résulte de la financiarisation induite par le mouvement de globalisation des échanges. Cette transformation du capitalisme financier a pour origine les mouvements d’OPA menés sur les sociétés qui n'exploitaient pas efficacement leur base d’actifs pour les actionnaires. Ces pratiques ont fourni une visibilité externe à la « discipline du marché » qui a incité les dirigeants à faire plus attention à la création de valeur et à replacer l’actionnaire au centre de la stratégie. L’objectif ultime est la maximisation de la valeur pour l‘actionnaire. La norme est fixée a priori par la direction financière qui encadre le contrôle de gestion. Cette application stricte de la discipline de la valeur a pour principal avantage de mettre systématiquement le coût des capitaux utilisés en regard des modalités d’appréciation de la performance. On a, alors, assisté à un glissement significatif du contrôle stratégico-fonctionnel vers le contrôle à logique financière. Ce mouvement a bénéficié du succès des concepts associés à la création de valeur. Popularisés par les cabinets de consultants, les concepts de valeur ajoutée économique (EVA) ou de valeur ajoutée de marché (MVA) se sont largement diffusés dans les grands groupes et ont contribué à la financiarisation des outils du contrôle de gestion stratégique. Ce glissement du contrôle de gestion stratégico-opérationnel a pu aller jusqu’à ce que l’on a appelé le contrôle de gestion asservi à la finance. Toutefois, ce mouvement n’a pas été un franc succès même si les outils de management par la valeur financière restent incontournables. On peut parler, à cet égard, d’un succès relatif de ces outils qui restent tout à fait indispensables dans un univers financiarisé mais dont l’utilité reste limitée notamment dans les entreprises où la composante « capital humain » est importante. Il est clair, en effet, que si les outils du contrôle de la valeur financière sont très utiles pour éclairer et modéliser les impacts sur la création de valeur, ces outils ne sont guère pertinents pour aider à la compréhension et à la formalisation des véritables inducteurs de la valeur (innovation, compétence, image de marque, fidélisation et gestion du portefeuille client, …). Par ailleurs, les limites liées à la pertinence du coût du capital et à l’hypothèse de rationalité basée uniquement sur l’incitation financière sont apparues comme une évidence avec la généralisation de la dernière crise financière. De même, les nombreux scandales financiers (Enron, Worldcom …) ont mis en lumière les limites de l’information financière et les effets des LE CONTROLE DE GESTION : 4 incitations uniquement axées sur la valeur de l’action. On peut même parler d’un mouvement « politique » de contestation du soubassement conceptuel d’un capitalisme trop financiarisé… Ce constat permet de mettre l’accent sur l’intérêt du concept de contrôle de gestion intégré. Cette approche repose sur une logique qui reconnaît l’importance de la création de valeur mais l’analyse comme le résultat d’une intégration de la valeur financière et stratégique. Cette dernière dépend étroitement de la valeur organisationnelle et concurrentielle. Elle met en avant des concepts comme ceux de compétences fondamentales, de savoir-faire, d’avantage compétitif. Elle suppose une intégration de la comptabilité de gestion comme cadre conceptuel de la valeur stratégique à partir d’une gestion de la base de processus. Le contrôle de gestion a, dans cette optique, un rôle majeur de conception du système d’information et d’aide à l’évaluation de l’ensemble des facteurs de la performance globale (voire sociétale). Le concept de contrôle de gestion intégré n’a pas de périmètre bien stabilisé. Il peut se concevoir comme un mode complémentaire du contrôle à logique financière ou comme un mode alternatif à ce dernier. Ces deux conceptions ont chacune leur logique et leur légitimité. Elles impliquent, toutefois, une déclinaison spécifique des référentiels mis en œuvre qui peut conduire à repenser les fondements du contrôle de gestion ou à proposer un réaménagement de ses outils. La conception du contrôle de gestion intégré en tant que mode complémentaire au contrôle de gestion à logique financière présente l’avantage de rappeler la contrainte de la « gestion par la valeur » qui apparaît aujourd’hui difficilement contournable. Il semble, en effet, difficile de se passer du financement, de l’apport des marchés de capitaux, des mécanismes assurantiels et de couverture des risques. De plus, sous réserve d’une meilleure régularisation et d’un contrôle plus strict, la plasticité et la réactivité des marchés financiers restent un facteur indispensable du développement de l’innovation et donc de la croissance. Le mode alternatif du contrôle de gestion intégré insiste sur l’autonomie de « l’entité – entreprise » dans le cadre d’un réseau de parties prenantes. Il est plus ouvert aux nouvelles préoccupations liées aux aspects sociétaux du management: prise en compte du développement durable et de l’ensemble des relations partenariales, développement d’outils spécifiques tels que le « stakeholder’s report » ou les mesures d’impact environnemental, gestion spécifique du capital humain … L’approche alternative remet en cause de façon explicite la pertinence du dogme de la « Shareholder Value » et propose, d’emblée, des concepts alternatifs autour de la « Stakeholder Value ». L’orientation stratégique du modèle intègre le fait que la valeur est d’abord construite uploads/Management/le-controle-de-gestion-pour-un-pilotage.pdf
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- Publié le Mai 07, 2021
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