!" " La stratégie d’imitation: quelle influence du design de recherche ? Résumé

!" " La stratégie d’imitation: quelle influence du design de recherche ? Résumé : La littérature en stratégie reconnaît que les stratégies d’imitation sont extrêmement répandues parmi les organisations. Néanmoins, le cumul des connaissances sur ce thème reste difficile. En particulier, l’influence positive ou négative de ce type de stratégie sur les performances n’a pas reçu de réponse claire. Plutôt que de chercher à faire une méta-analyse des recherches passées, nous cherchons à comprendre les sources possibles de divergence dans la relation imitation / performance. Nous développons en particulier l’idée que le design de recherche adopté dans les différents travaux explique en grande partie cette divergence. L’article débouche sur certaines précautions et préconisations pour les chercheurs qui voudront aborder la question de l’imitation. Mots-clés : stratégie d’imitation, performance, design de recherche, méthodologie Bilal BOURKHA Doctorant en Science de Gestion Université Lille 1 - IAE de Lille LEM (UMR CNRS 8179) bilal.bourkha@ed.univ-lille1.fr " Benoît DEMIL Professeur des universités Université Lille 1 - IAE de Lille LEM (UMR CNRS 8179) benoit.demil@iae.univ-lille1.fr #" " La stratégie d’imitation: quelle influence du design de recherche ? Résumé : La littérature en stratégie reconnaît que les stratégies d’imitation sont extrêmement répandues parmi les organisations. Néanmoins, le cumul des connaissances sur ce thème reste difficile. En particulier, l’influence positive ou négative de ce type de stratégie sur les performances n’a pas reçu de réponse claire. Plutôt que de chercher à faire une méta-analyse des recherches passées, nous cherchons à comprendre les sources possibles de divergence dans la relation imitation / performance. Nous développons en particulier l’idée que le design de recherche adopté dans les différents travaux explique en grande partie cette divergence. L’article débouche sur certaines précautions et préconisations pour les chercheurs qui voudront aborder la question de l’imitation. Mots-clés : stratégie d’imitation, performance, design de recherche, méthodologie $" " La stratégie d’imitation: quelle influence du design de recherche ? Une grande partie de la littérature en stratégie considère qu’une organisation doit se différencier de ses concurrents pour se constituer un avantage compétitif. Il s’agit alors d’adopter un positionnement concurrentiel original (Ansoff, 1987 ; Porter, 1982), d’utiliser des ressources stratégiques auxquelles les concurrents n’ont pas accès (Barney, 1991), d’innover (Porter, 1986) ou d’organiser de façon unique des activités (Porter et Siggelkow, 2008). A contrario, l’imitation, qui consiste à refaire ce qu’un concurrent a déjà fait, ne présenterait qu’un faible intérêt pour les organisations. Bourgeois et Eisenhardt (1988) ont ainsi qualifié l’imitation de stratégie vouée à l’échec. Pour Barreto et Baden-Fuller (2006) ou Cherchem (2012) les entreprises imitatrices se condamnent à des performances médiocres. Les imitateurs s’enfermeraient dans une malédiction des suiveurs (Demil et Lecocq, 2006). Dans leur ouvrage Stratégique, Johnson et al. (2005) affirment également qu’ : « Une entreprise qui a la même stratégie que ses concurrents n’a pas de stratégie ». Tous ces travaux – et ils sont majoritaires dans la littérature stratégique- mettent en cause l’imitation comme une stratégie pertinente et viable pour une organisation. Cependant, d’autres travaux contredisent l’assertion précédente. Ils montrent au contraire une relation positive entre le conformisme, l’imitation, et la performance financière ou commerciale, par exemple dans le secteur informatique américain (Geletkanycz et Hambrick, 1997). L’imitation peut donc être parfois considérée comme une stratégie génératrice de bonnes performances (Ethiraj et Zhu, 2008 ; Lee et Zheng Zhou, 2012), la conformité n’excluant d’ailleurs pas complètement la différenciation (Deephouse, 1999). Le constat serait le même au niveau des produits. Schnaars (1994) a ainsi montré la réussite de vingt-six entreprises imitatrices sur des marchés différents et dans certains cas, comment l’imitation s’accompagne d’une destruction des positions des entreprises innovatrices. Il semble donc que la littérature en stratégie se partage en deux courants de pensée aux résultats contradictoires quant aux effets de l’imitation inter-organisationnelle. Dans cet article, nous ne cherchons pas à défendre l’un ou l’autre de ces courants, ni à privilégier l’un par rapport à l’autre. Notre objectif est plutôt de repérer et de synthétiser les sources de ces résultats contradictoires. Le point de vue adopté dans cette communication est que ces divergences relèvent avant tout de différences dans les designs de recherche mis en place par les chercheurs. Le design est défini ici comme la trame générale de la démarche d’une %" " recherche qui va de la question de recherche à l’analyse des résultats en passant par la revue de littérature et la méthodologie (Royer et Zarlowski, 1999). Le design renvoie donc à une réflexion générale sur l’articulation entre les différentes étapes de la recherche qui vont de la question de recherche à l’observation empirique et la discussion des résultats : « Le design de la recherche est un dispositif de planification pour les composants et les procédures de structuration de la recherche empirique dans le contexte des questions de recherche et la théorie des organisations » (Grunow, 1995). Le recours au design pour expliquer cette divergence nous permet de tirer des recommandations concernant les précautions à prendre pour mener une recherche plus fiable sur le thème de l’imitation. Nous commençons par présenter dans un premier temps les différents courants ayant traité de la question de l’imitation en stratégie. Dans un deuxième temps, nous développerons les éléments de design de recherche qui peuvent expliquer les divergences observées entre échec et réussite de l’imitation. Nous en tirerons au final des préconisations pour les chercheurs. 1. La stratégie d’imitation : un échec programmé pour les organisations ? Deux critiques principales sont généralement adressées à l’imitation inter-organisationnelle : des effets contre performants pour les organisations imitatrices et des effets négatifs à un niveau plus collectif. Pour illustrer le premier point, nous nous penchons en particulier sur les travaux consacrés à l’avantage du premier entrant et aux analyses de Porter. L’idée qui ressort de ce panorama est que les organisations ont intérêt à se différencier, à innover et à pratiquer l’anticonformisme. Mais les retombées des stratégies d’imitation à un niveau collectif seraient également négatives. L’imitation est en effet susceptible d’homogénéiser les offres d’une industrie et de mettre en difficulté la survie des concurrents. Au final, l’imitation détruirait l’avantage concurrentiel des organisations innovatrices et pourrait mettre fin à l'existence même d'une industrie. 1.1. Les dangers collectifs de l’imitation A un niveau collectif, les stratégies d’imitation amèneraient une activité dans une situation peu enviable. En se référant à la matrice BCG 2ème version, les processus de diffusion des connaissances quant au processus de production et d’imitation des offres des différents concurrents poussent en effet à une situation dite « d’impasse » (Thiétart, 1990). Dans ce type de secteur, il devient difficile pour une entreprise d’obtenir un avantage décisif sur ses concurrents que ce soit sous forme de différenciation ou de coût. Cette situation résulte d’une escalade concurrentielle qui voit chaque avantage d’un concurrent rapidement détruit, avec le &" " risque qu’aucune entreprise ne parvient plus à développer un avantage particulier dans un secteur et que les marges s’érodent pour tous les concurrents (D’Aveni, 1994). Dans cette situation, les offres deviennent assimilables à des produits de commodité pour lesquels seuls les prix deviennent un facteur discriminant, thème développé largement par D’Aveni (2010). Cette tendance à la commodité est liée aux évolutions du secteur où une certaine standardisation des offres va progressivement s’imposer et les meilleures pratiques être imitées par tous les concurrents. Cependant, D’Aveni insiste avant tout sur les choix concurrentiels de certaines entreprises comme facteur numéro un dans la tendance à la commodité de certains secteurs. Ce n’est évidemment pas une tendance naturelle. Des acteurs vont proposer plus de bénéfices à leurs clients à un prix égal ou inférieur à la moyenne du marché, vont multiplier les offres pour couvrir une multitude de combinaison prix / valeur ou vont transformer un marché plutôt haut de gamme en marché de masse en baissant les bénéfices de l’offre et son prix. Et c’est l’imitation de ce type de mouvements stratégiques qui va engager l’ensemble du secteur vers la commodité. 1.2 Les résultats médiocres de l’imitateur Les chercheurs en Science de Gestion insistent sur le caractère non-productif des stratégies d’imitation pour les organisations imitatrices. De nombreux raisonnements stratégiques (analyses de Michael Porter et les travaux consacrés au « first-mover advantage ») partent du principe que les organisations ont, davantage, l’intérêt à se différencier ou à innover. Selon ces écoles de pensée l’imitation est considérée comme une stratégie non-intéressante pour les organisations qui imitent leurs concurrents. Les recherches consacrées à l’avantage au premier entrant considèrent que les imitateurs qui arrivent tardivement ont du mal à réaliser des performances équivalentes à celles réalisées par les innovateurs (Kerin et al., 1992 ; Lieberman et Montgomery, 1988 ; Szymanski et al., 1995 ; Demil, 2009). Le désavantage au l’imitateur débouche sur une part de marché faible que celle obtenue par l’innovation (Kerin et al., 1992), à laquelle les résultats financiers positifs sont corrélés (Mueller, 1997). Les organisations imitatrices, à la position des suiveuses, doivent en effet supporter des coûts importants afin de conquérir une position concurrentielle durable (Bowman et Gatignon, 1996). Comme l’explique l’approche « Resource-based view », les organisations imitatrices peuvent être gênées uploads/Management/les-dangers-lies-a-la-strategie-d-x27-imitation.pdf

  • 29
  • 0
  • 0
Afficher les détails des licences
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise
Partager
  • Détails
  • Publié le Oct 07, 2022
  • Catégorie Management
  • Langue French
  • Taille du fichier 0.5152MB