c ⃝Christophe Bertault - MPSI Espaces euclidiens Dans ce chapitre, on travaille

c ⃝Christophe Bertault - MPSI Espaces euclidiens Dans ce chapitre, on travaille seulement avec le corps de base R. Les lettres n, p, q . . . désignent des entiers naturels non nuls. 1 Produit scalaire, norme et distance 1.1 Produit scalaire Définition (Produit scalaire, espace préhilbertien réel, espace euclidien) • Soit E un R-espace vectoriel. On appelle produit scalaire sur E toute forme bilinéaire symétrique définie positive, i.e. toute application (·|·) : E × E − →R : 1) bilinéaire : ∀x, y, z ∈E, ∀λ, µ ∈R,    λx + µy z  = λ(x|z) + µ(y|z) x λy + µz  = λ(x|y) + µ(x|z) ; 2) symétrique : ∀x, y ∈R, (y|x) = (x|y) ; 3) définie : ∀x ∈E, (x|x) = 0 ⇐ ⇒ x = 0E ; 4) positive : ∀x ∈E, (x|x) ⩾0. • Un espace vectoriel réel muni d’un produit scalaire est appelé un espace préhilbertien réel. Un espace préhilbertien réel de dimension finie est appelé un espace euclidien.    Explication Par chance, le produit scalaire usuel avec lequel vous avez l’habitude de travailler depuis quelques années est un produit scalaire au sens de cette définition, sur R2 ou R3. Cela dit, en principe, cette définition devrait vous étonner. En début d’année, nous avons défini le produit scalaire de deux vecteurs au moyen de la formule « ⃗ u ⃗ v  = ∥⃗ u∥.∥⃗ v∥. cos(⃗ u,⃗ v) », qui supposait connues les notions de norme d’un vecteur et d’angle de deux vecteurs. Cette fois, nous définissons la notion de produit scalaire indépendamment de ces deux notions. Le comble, dans cette histoire, c’est que les notions de norme et d’angle vont découler naturellement de notre définition du produit scalaire. $ $ $ Attention ! Il existe de nombreux produits scalaires conformes à cette définition dans le plan ou l’espace ; jusqu’ici, nous en avons privilégié un. Par exemple, l’application (·|·) : ( R2 − → R  (x, y), (x′, y′)  7− → 3xx′ + xy′ + yx′ + yy′ est un produit scalaire sur R2, distinct du produit scalaire usuel. En effet La bilinéarité et la symétrie sont évidentes. Pour la définition et la positivité, soit u = (x, y) ∈R2. Alors (u|u) = 3x2 + 2xy + y2 = 2x2 + (x + y)2 ⩾0. De plus ce produit scalaire est nul si et seulement si x = x + y = 0, i.e. x = y = 0. Remarque • La bilinéarité du produit scalaire implique en particulier ceci : ∀x ∈E, (x|0E) = (0E|x) = 0. • La symétrie et la linéarité par rapport à une variable seulement suffisent à montrer la bilinéarité. • Le produit scalaire de deux vecteurs x et y est aussi parfois noté (x, y), x y , x, y ou encore x · y. 1.2 Norme et distance associées à un produit scalaire Définition (Norme) Soit E un espace préhilbertien réel de produit scalaire (·|·). • On appelle norme (euclidienne) sur E associée au produit scalaire (·|·) l’application ∥· ∥: E − →R+ définie par : ∀x ∈E, ∥x∥= p (x|x). • On appelle distance (euclidienne) sur E associée au produit scalaire (·|·) l’application d : E × E − →R+ définie par : ∀x, y ∈E, d(x, y) = ∥x −y∥. 1 c ⃝Christophe Bertault - MPSI $ $ $ Attention ! La notion de distance n’est pas forcément celle que l’on croit ! Quand on travaille dans R2 ou R3 avec le produit scalaire usuel, la définition précédente nous ramène bien entendu à la notion de distance intuitive. Mais si par exemple on travaille avec le produit scalaire  (x, y), (x′, y′)  7− →3xx′ + xy′ + yx′ + yy′, les choses deviennent beaucoup moins intuitives. Par exemple, ∥⃗ ı∥= √ 3 et ∥⃗ ∥= 1. Remarque La norme est homogène ; cela signifie que : ∀x ∈E, ∀λ ∈R, ∥λx∥= |λ|.∥x∥. Théorème (Inégalité de Cauchy-Schwarz, inégalité triangulaire) Soient E un espace préhilbertien réel et x, y, z ∈E. (i) Inégalité de Cauchy-Schwarz : (x|y) ⩽∥x∥.∥y∥. Cette inégalité est une égalité si et seulement si x et y sont colinéaires. (ii) Inégalité triangulaire :    Version norme : ∥x + y∥⩽∥x∥+ ∥y∥ Version distance : d(x, z) ⩽d(x, y) + d(y, z) . Cette inégalité est une égalité si et seulement si x et y sont colinéaires de même sens. Inégalité triangulaire généralisée :        Version norme : ∥x∥−∥y∥ ⩽∥x + y∥⩽∥x∥+ ∥y∥ Version distance : d(x, y) −d(x, z) ⩽d(x, z) ⩽d(x, y) + d(y, z) .    Explication • En début d’année, nous n’avons même pas pris la peine d’énoncer l’inégalité de Cauchy-Schwarz car elle était alors complètement triviale. En effet : ⃗ u · ⃗ v = ∥⃗ u∥.∥⃗ v∥. cos(⃗ u,⃗ v) ⩽∥⃗ u∥.∥⃗ v∥, car la fonction cosinus est bornée entre −1 et 1. A présent, notre définition abstraite du produit scalaire rend cette inégalité non triviale et précieuse. • Ci-dessous, deux petits dessins pour justifier l’appellation « inégalité triangulaire » : à gauche, la version norme (où x, y, z sont considérés comme des vecteurs) ; à droite la version distance (où x, y, z sont considérés comme des points). b b x + y x y b b b x z y Démonstration (i) L’inégalité de Cauchy-Schwarz est évidente si y = 0E ; supposons donc y ̸= 0E. On a, pour tout t ∈R : ∥x + ty∥2 = x + ty x + ty  = ∥x∥2 + 2t(x|y) + t2∥y∥2. La fonction t 7− →∥x+ty∥2 est donc polynomiale de degré 2 et positive ou nulle sur R tout entier. Conclusion : son discriminant (réduit) est négatif ou nul. Bref : (x|y)2 −∥x∥2.∥y∥2 ⩽0. C’est l’inégalité de Cauchy- Schwarz. Comment s’interprète enfin le cas d’égalité (x|y) = ∥x∥.∥y∥? (x|y) = ∥x∥.∥y∥ ⇐ ⇒ Le discriminant de la fonction polynomiale t 7− →∥x + ty∥2 est nul ⇐ ⇒ La fonction polynomiale t 7− →∥x + ty∥2 possède un zéro ⇐ ⇒ ∃t0 ∈R/ ∥x + t0y∥2 = 0 ⇐ ⇒ ∃t0 ∈R/ x + t0y = 0E ⇐ ⇒ x et y sont colinéaires. (ii) La version distance est immédiate à partir de la version norme. Calculons. . . ∥x + y∥2 = x + y x + y  = ∥x∥2 + 2(x|y) + ∥y∥2 Cauchy-Schwarz ⩽ ∥x∥2 + 2∥x∥.∥y∥+ ∥y∥2 = ∥x∥+ ∥y∥ 2. Un petit coup de racine carré, et l’inégalité triangulaire est démontrée. Notre preuve montre par ailleurs que cette inégalité est une égalité si et seulement si (x|y) = ∥x∥.∥y∥. Si c’est le cas, alors en particulier x et y sont colinéaires via (i). Quitte à permuter x et y, il existe donc λ ∈R tel que y = λx. Aussitôt : λ∥x∥2 = (x|λx) = (x|y) = ∥x∥.∥y∥= ∥x∥.∥λx∥= |λ|.∥x∥2, de sorte que soit x est nul, soit λ = |λ|, i.e. λ ⩾0. Dans les deux cas x et y sont colinéaires de même sens. La réciproque est immédiate. L’inégalité triangulaire généralisée découle de l’inégalité triangulaire « de base ». Si vous n’êtes pas convain- cus, retournez mettre votre nez dans notre chapitre sur les nombres complexes. ■ 2 c ⃝Christophe Bertault - MPSI Théorème (Identités du parallélogramme et de polarisation) Soient E un espace préhilbertien réel et x, y ∈E. (i) Identité du parallélogramme : ∥x + y∥2 + ∥x −y∥2 = 2 ∥x∥2 + ∥y∥2 . (ii) Identités de polarisation : (x|y) = 1 2  ∥x + y∥2 −∥x∥2 −∥y∥2 = 1 4  ∥x + y∥2 −∥x −y∥2 .    Explication L’identité du parallélogramme affirme que la somme des carrés des côtés d’un parallélo- gramme est égal à la somme des carrés des longueurs de ses diagonales. b b x + y x −y x y Démonstration Tout commence avec les relations :    ∥x + y∥2 = ∥x∥2 + 2(x|y) + ∥y∥2 ♣ ∥x −y∥2 = ∥x∥2 −2(x|y) + ∥y∥2 ♠ . (i) Pour l’identité du parallélogramme, on additionne ♣et ♠. (ii) La première identité de polarisation n’est qu’une réécriture de ♣. La seconde s’obtient en soustrayant ♠ de ♣. ■ 1.3 Exemples Exemple (Produit scalaire canonique sur Rn) L’application      Rn × Rn − → R  (xk)1⩽k⩽n, (yk)1⩽k⩽n  7− → n X k=1 xkyk est un produit scalaire sur Rn appelé le produit scalaire canonique sur Rn. Il est équivalent de définir ce produit scalaire sous la forme matricielle  Rn × Rn − → R (X, Y ) 7− → tXY . En effet La bilinéarité et la symétrie sont évidentes. Pour la définition et la positivité, soit X = (xk)1⩽k⩽n ∈Rn. Alors (X|X) = n X k=1 x2 k ⩾0, et l’égalité n’a lieu que si xk est nul pour tout k ∈J1, nK, i.e. si X = 0. Exemple L’application      Rn[X]2 − → uploads/Marketing/ espaces-euclidiens 1 .pdf

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  • Publié le Jan 29, 2021
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