Paris 8, Département de Philosophie, 2019-2020, Semestre 1. Cours C. Ramond : «
Paris 8, Département de Philosophie, 2019-2020, Semestre 1. Cours C. Ramond : « Introduction à la philosophie moderne : la pensée et l’étendue ». Exemplier, 15/10/2019 5. Henri Bergson, L’évolution créatrice, 1907, p. 70 : « Voyons comment on s’y prendrait pour rendre compte de la similitude de structure de l’œil dans des séries indépendantes au point de vue phylogénétique. / Si Mollusques et Vertébrés ont évolué séparément, les uns et les autres sont restés exposés à l’influence de la lumière. Et la lumière est une cause physique engendrant des effets déterminés. Agissant d’une manière continue, elle a pu produire une variation continue dans une direction constante. Sans doute il est invraisemblable que l’œil des Vertébrés et celui des Mollusques se soient constitués par une série de variations dues au simple hasard. En admettant que la lumière intervienne alors comme instrument de sélection, pour ne laisser subsister que les variations utiles, il n’y a aucune chance pour que le jeu du hasard, même ainsi surveillé du dehors, aboutisse, dans les deux cas, à la même juxtaposition d’éléments coordonnés de la même manière. Mais il n’en serait plus de même, dans l’hypothèse où la lumière agirait directement sur la matière organisée pour en modifier la structure et l’adapter, en quelque sorte, à sa propre forme. La similitude des deux effets s’expliquerait cette fois simplement par l’identité de la cause. L’œil de plus en plus complexe serait quelque chose comme l’empreinte de plus en plus profonde de la lumière sur une matière qui, étant organisée, possède une aptitude sui generis à la recevoir. / Mais une structure organique peut-elle se comparer à une empreinte ? 6. Bergson, L’évolution créatrice, p. 90-92 : « Un artiste de génie a peint une figure sur la toile. Nous pourrons imiter son tableau avec des carreaux de mosaïque multicolores. Et nous reproduirons d’autant mieux les courbes et les nuances du modèle que nos carreaux seront plus petits, plus nombreux, plus variés de ton. Mais il faudrait une infinité d’éléments infiniment petits, présentant une infinité de nuances, pour obtenir l’exact équivalent de cette figure que l’artiste à conçue comme une chose simple, qu’il a voulu transporter en bloc sur la toile, et qui est d’autant plus achevée qu’elle apparaît mieux comme la projection d’une intuition indivisible. Maintenant, supposons nos yeux ainsi faits qu’ils ne puissent s’empêcher de voir dans l’œuvre du maître un effet de mosaïque. Ou supposons notre intelligence ainsi faite qu’elle ne puisse s’expliquer l’apparition de la figure sur la toile autrement que par un travail de mosaïque. Nous pourrions alors parler simplement d’un assemblage de petits carreaux, et nous serions dans l’hypothèse mécanistique. Nous pourrions ajouter qu’il a fallu, en outre de la matérialité de l’assemblage, un plan sur lequel le mosaïste travaillât : nous nous exprimerions cette fois en finalistes. Mais ni dans un cas ni dans l’autre nous n’atteindrions le processus réel, car il n’y a pas eu de carreaux assemblés. C’est le tableau, je veux dire l’acte simple projeté sur la toile, qui, par le seul fait d’entrer dans notre perception, s’est décomposé lui-même à nos yeux en mille et mille petits carreaux qui présentent, en tant que recomposés, un admirable arrangement. Ainsi l’œil, avec sa merveilleuse complexité de structure, pourrait n’être que l’acte simple de la vision, en tant qu’il se divise pour nous en une mosaïque de cellules, dont l’ordre nous semble merveilleux une fois que nous nous sommes représenté le tout comme un assemblage. [...] La nature n’a pas eu plus de peine à faire un œil que je n’en ai à lever la main. » 7. Bergson, L’évolution créatrice, p. 95-96 : « Nous comparions le procédé par lequel la nature construit un œil à l’acte simple par lequel nous levons la main. Mais nous avons supposé que la main ne rencontrait aucune résistance. Imaginons qu’au lieu de se mouvoir dans l’air, ma main ait à traverser de la limaille de fer qui se comprime et résiste à mesure que j’avance. A un certain moment, ma main aura épuisé son effort, et, à ce moment précis, les grains de limaille se seront juxtaposés et coordonnés en une forme déterminée, celle même de la main qui s’arrête et d’une partie du bras. Maintenant, supposons que la main et le bras soient restés invisibles. Les spectateurs chercheront dans les grains de limaille eux-mêmes, et dans des forces intérieures à l’amas, la raison de J’arrangement. Les uns rapporteront la position de chaque grain à l’action que les grains voisins exercent sur lui : ce seront des mécanistes. D’autres voudront qu’un plan d’ensemble ait présidé au détail de ces actions élémentaires : ils seront finalistes. Mais la vérité est qu’il y a tout simplement eu un acte indivisible, celui de la main traversant la limaille : l’inépuisable détail du mouvement des grains, ainsi que l’ordre de leur arrangement final, exprime négativement, en quelque sorte, ce mouvement indivisé, étant la forme globale d’une résistance et non pas une synthèse d’actions positives élémentaires. C’est pourquoi, si l’on donne le nom d’« effet » à l’arrangement des grains et celui de « cause » au mouvement de la main, ou pourra dire, à la rigueur, que le tout de l’effet s’explique par le tout de la cause, mais à des parties de la cause ne correspondront nullement des parties de l’effet. En d’autres termes, ni le mécanisme ni le finalisme ne seront ici à leur place, et c’est à un mode d’explication sui generis qu’il faudra recourir. Or, dans l’hypothèse que nous proposons, le rapport de la vision à l’appareil visuel serait à peu près celui de la main à la limaille de fer qui en dessine, en canalise et en limite le mouvement. » 8. Molière, Le Malade imaginaire (1673), cérémonie finale : « Mihi a docto Doctore / Domandatur causam et rationem quare / Opium facit dormire / A quoi respondeo / Quia est in eo/ Virtus dormitiva / Cujus est natura / Sensus assoupire » 9. Molière, Le médecin malgré lui (II, 4) : « SGANARELLE : Mon avis est qu’on la remette sur son lit, et qu’on lui fasse prendre pour remède quantité de pain trempé dans du vin. GÉRONTE : Pourquoi cela, Monsieur ? SGANARELLE : Parce qu’il y a dans le vin et le pain, mêlés ensemble, une vertu sympathique qui fait parler. Ne voyez-vous pas bien qu’on ne donne autre chose aux perroquets, et qu’ils apprennent à parler en mangeant cela ? GÉRONTE : Cela est vrai ! Ah ! le grand homme ! ». 10. Lettre de Descartes à Mersenne, du 26 avril 1643 (AT III 649 7-11) : « […] les philosophes n’ont supposé ces qualités réelles qu’à cause qu’ils ont cru ne pouvoir expliquer autrement tous les phénomènes de la nature ; et moi je trouve, au contraire, qu’on peut bien mieux les expliquer sans elles. » 11. Spinoza, Éthique, Partie 5, préface : « Tel est l’avis de cet homme très célèbre [Spinoza parle de Descartes (premier zone : mécanisme, quantité, espace, définir les vivants, le corps peut être divisible par deux à l’infini, étendue, extension, les forces)(deuxième zone : l’âme, la pensée n’est pas divisible par deux à l’infini, la conscience de soi, une pensée n’est pas étendue, on ne peut pas utiliser le mécanisme pour expliquer la pensée, comment on peut expliquer la pensée, par la doute, nier les choses, une pensée n’est pas accrochée par le corps, 1650 les questions de l’âme), vient de donner son nom et de citer plusieurs articles des Passions de l’âme] (pour autant que je le conjecture de ses propos), et j’eusse eu peine à croire qu’il eût été soutenu par un si grand homme, s’il n’avait été si pénétrant. Et je ne puis assez m’étonner, certainement, de voir un Philosophe, après avoir fermement décidé de ne rien déduire que de principes connus par soi, et de ne rien affirmer qu’il ne perçût clairement et distinctement, et après avoir si souvent reproché aux Scolastiques de vouloir expliquer les choses obscures par des qualités occultes (propriété cachées, vertus, aristoticien, Aristocratique (qualité), son article catégorie donne le définition de qualité, de propriété), adopter une hypothèse plus occulte que toute qualité occulte. <Profecto mirari satis non possum, quod vir philosophus, qui firmiter statuerat, nihil deducere, nisi ex principiis per se notis, et nihil affirmare, nisi quod clare et distincte perciperet, et qui toties Scolasticos reprehenderat, quod per occultas qualitates res obscuras voluerint explicare, hypothesin sumat omni occultâ qualitate occultiorem> Qu’entend-il, je le demande, par union de l’âme et du corps ? Quel concept clair et distinct a-t-il, dis-je, d’une pensée très étroitement unie à une certaine petite portion d’étendue ou quantité ? Je voudrais bien qu’il eût expliqué cette union par sa cause prochaine. Mais il avait conçu l’âme tellement distincte du corps qu’il ne put assigner aucune cause singulière, ni à cette union ni à l’âme elle-même, mais dut recourir à la cause de tout l’univers, c’est-à-dire Dieu ». Descartes : distinction entre pensée et étendue, mais uploads/Philosophie/ 10 .pdf
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- Publié le Fev 18, 2022
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