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Tous droits réservés © Laval théologique et philosophique, Université Laval, 1994 Ce document est protégé par la loi sur le droit d’auteur. L’utilisation des services d’Érudit (y compris la reproduction) est assujettie à sa politique d’utilisation que vous pouvez consulter en ligne. https://apropos.erudit.org/fr/usagers/politique-dutilisation/ Cet article est diffusé et préservé par Érudit. Érudit est un consortium interuniversitaire sans but lucratif composé de l’Université de Montréal, l’Université Laval et l’Université du Québec à Montréal. Il a pour mission la promotion et la valorisation de la recherche. https://www.erudit.org/fr/ Document généré le 17 mai 2021 21:01 Laval théologique et philosophique La définition et la démonstration dans la logique d’Aristote Raynald Valois Hommage à Edward Schillebeeckx Volume 50, numéro 2, juin 1994 URI : https://id.erudit.org/iderudit/400843ar DOI : https://doi.org/10.7202/400843ar Aller au sommaire du numéro Éditeur(s) Faculté de philosophie, Université Laval ISSN 0023-9054 (imprimé) 1703-8804 (numérique) Découvrir la revue Citer cet article Valois, R. (1994). La définition et la démonstration dans la logique d’Aristote. Laval théologique et philosophique, 50(2), 349–361. https://doi.org/10.7202/400843ar Laval théologique et philosophique, 50, 2 (juin 1994) LA DÉFINITION ET LA DÉMONSTRATION DANS LA LOGIQUE D'ARISTOTE Raynald VALOIS RÉSUMÉ : La définition est l'opération logique qui permet d'expliquer ce qu'est une chose. Cette explication se fait d'abord par la découverte des prédicats essentiels. Mais en ce qui concerne les propriétés des choses, et, d'une certaine façon, la substance elle-même, c'est dans la démonstration qu'on montre ce qu'elles sont. Il y a donc un lien étroit de dépendance entre la définition et la démonstration. D ans la logique d'Aristote, la question de la définition est soulevée à de nombreux endroits et traitée selon de multiples points de vue. Au contraire, un certain enseignement traditionnel présentait un résumé simpliste de VOrganon, le ramenant à deux parties en apparence bien cloisonnées : 1) la définition, dont l'étude relève des traités qui visent tous à mettre de l'ordre entre les concepts (tout ce qui appartient à la première opération de l'intelligence), et 2) la syllogistique, qui concerne l'art de raisonner, de prouver (tout ce qui appartient à la deuxième et la troisième opération de l'intelligence). Mais l'approfondissement des différents traités d'Aristote nous révèle une toute autre image et nous permet de constater que son souci de systématiser cohabite avec une attention scrupuleuse aux moindres subtilités aussi bien du réel que de l'esprit qui l'explore. On s'aperçoit, entre autres, que les opérations de définition et de démonstration se compénètrent et constituent un tout organique dont la fonction finale est la connais- sance intellectuelle complète de la réalité. La définition ne peut se comprendre en profondeur si on la coupe de la démonstration, de même que cette dernière est inintelligible sans la première. C'est principalement l'étude de l'œuvre maîtresse de VOrganon, les Seconds Analytiques, qui nous permet de discerner cet aspect englobant de la théorie d'Aristote. En effet, dans ce traité, il analyse en détail les différents liens qui unissent les notions logiques abordées selon des perspectives diverses dans le reste de son œuvre. On y retrouve la clef qui permet d'articuler des points de vue en apparence difficiles à réconcilier. 349 RAYNALD VALOIS C'est le rôle intégrateur de ce traité que nous allons tâcher de mettre en évidence dans cet article. Le point central qui retiendra notre attention consiste dans l'étroite relation établie par Aristote entre les notions d'essence et de cause, car c'est autour d'elles que se structure l'ensemble de la théorie. Il est en effet courant de définir la science comme la recherche des causes, d'une part, et comme tentative d'expliquer l'essence des choses, d'autre part. Comment la démonstration, qui constitue le syl- logisme proprement scientifique, peut-elle en même temps mettre en évidence la cause des phénomènes et Vessence de ces mêmes phénomènes ? Telle est, à peu près, la question que se pose Aristote dans la première partie du second livre de son traité et auquel il consacre une discussion approfondie, mais dont le déroulement n'est pas facile à suivre, étant donné le style extrêmement concis et elliptique de ce texte. I. DIVERS OBJETS DE LA RECHERCHE SCIENTIFIQUE Comme nous l'avons déjà indiqué, une approche superficielle de la logique aris- totélicienne peut laisser l'impression que la recherche de la définition est complètement étrangère au domaine de la syllogistique, surtout de la démonstration. Il est bien connu que la définition est le produit propre de la première opération de l'intelligence1. Elle a en effet comme fonction de signifier l'essence simple des choses et d'en fournir l'explication. Ceci est clairement exprimé par Aristote au chapitre 4 des Catégories, où il pose le sujet de ce traité, à savoir les choses qui sont signifiées « sans aucune liaison2 » : « Aucun de ces termes en lui-même et par lui-même n'affirme, ni ne nie rien ; c'est seulement par la liaison de ces termes entre eux que se produit l'affirmation ou la négation3. » Or ce traité constitue l'instrument le plus essentiel à l'art de la définition. Quant aux traités sur les Prédicables4 et la Division5, qui sont aussi ordonnés à la définition, ils ont également comme objet l'ordre à établir entre les indivisibles. Il y a évidemment tout le traité des Topiques qui est aussi ultimement ordonné à la définition, et il s'agit d'un traité qui fait partie de l'art de l'argumentation. Mais comme la dialectique, qui fait l'objet de ce traité, porte sur ce qui n'est que simplement probable, elle ne conduit pas à la connaissance certaine de la définition et ne relève pas immédiatement du discours scientifique. Il semble donc que la définition soit obtenue par une démarche intellectuelle qui ne doit rien au raisonnement, sinon dans une phase exploratoire, où la dialectique 1. Celle qui a comme objet les indivisibles, comme il est exposé au chapitre 6 du IIIe livre du traité de l'âme : «L'intellection des indivisibles a lieu dans les choses où le faux ne peut trouver de place. Mais dans celles qui admettent le faux et le vrai, il y a déjà une composition de notions comme si ces notions n'en formaient qu'une» (430 a 26-28). En effet la deuxième opération a comme objet ces choses qui comportent une composition et sont signifiées dans le discours par l'affirmation ou la négation. 2. Ib25. 3. 2a4-7. 4. De PORPHYRE. 5. De BOÈCE. 350 LA DÉFINITION ET LA DÉMONSTRATION DANS LA LOGIQUE D'ARISTOTE cherchera quels sont les prédicats qui doivent le plus probablement servir à sa construc- tion. Pourtant Aristote commence le IIe livre des Seconds Analytiques6 en expliquant comment la recherche de l'essence coïncide avec la recherche de la cause : Les questions que l'on se pose sont précisément en nombre égal aux choses que nous connaissons. Or nous nous posons quatre sortes de questions : le fait, le pourquoi, si la chose existe, et enfin ce qu'elle est. 1 ) Chercher \zfait c'est se demander si une chose a telle qualité, tel comportement, etc. Ainsi nous pouvons nous demander si la lune subit ou non une éclipse. Nous cherchons alors à savoir si un terme (subir une éclipse) est attribué à un autre terme (la lune). 2) Quand nous connaissons \zfait, nous cherchons le pourquoi : pourquoi la lune subit ou ne subit pas une éclipse ? 3) Parfois nous n'envisageons pas une pluralité de termes, mais un seul dont nous nous demandons s'il existe : est-ce que Dieu existe ? 4) Quand nous avons découvert que cette chose existe, nous nous demandons ce qu'elle est : qu'est-ce que Dieu ? Or toutes ces questions concernent la cause, qui est le moyen terme servant à prouver qu'une chose existe ou qu'elle a telle ou telle propriété. En effet, quand on se demande si une chose existe ou si elle a telle propriété, on cherche s'il y a un moyen terme pouvant le prouver. Quand on cherche ensuite le pourquoi ou ce qu'est une chose, on se demande quel est ce moyen terme ou cette cause : Le résultat, écrit Aristote, c'est que dans toutes ces recherches, nous nous demandons soit s'il y a un moyen terme, soit quel est le moyen terme. En effet, le moyen c'est la cause, et c'est lui l'objet de toutes nos recherches7. L'aspect le plus surprenant de cette explication c'est l'identité de traitement du pourquoi et du ce que c'est (l'essence). Il est assez facile de concevoir que la découverte de la cause apporte la preuve de l'existence d'une propriété qui est attribuée à un sujet quelconque. Par exemple, la découverte de l'interposition de la terre entre le soleil et la lune apporte bien la preuve que l'assombrissement de la lune est une éclipse et que la lune subit un tel phénomène, qu'elle a une telle propriété. Ce qui est moins évident c'est que l'essence (le ce que c'est) d'une chose soit en même temps la cause de son existence et le moyen terme servant à prouver cette existence. Pour mettre en évidence cet autre aspect de la question, Aristote utilise encore le même exemple, mais en posant le problème d'une autre façon. Supposons, dit-il, que l'on cherche uploads/Philosophie/ de-finition-et-demonstration 1 .pdf

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