COMMUNIQUÉ DE PRESSE – 2 DÉCEMBRE 2019 Création d’une chaire Philosophie du lan
COMMUNIQUÉ DE PRESSE – 2 DÉCEMBRE 2019 Création d’une chaire Philosophie du langage et de l’esprit au Collège de France François RECANATI, nommé titulaire de la chaire, prononcera sa leçon inaugurale Philosophie du langage et de l’esprit - le jeudi 12 décembre 2019, à 18h00 - Une nouvelle chaire intitulée Philosophie du langage et de l’esprit est confiée au philosophe François RECANATI. Pragmatique de l’énonciation ; contextualisme ; théorie de la référence directe ; indexicalité mentale et subjectivité ; dossiers mentaux. Autant de concepts et de thèmes majeurs de la philosophie contemporaine auxquels le nom de François RECANATI est étroitement associé. Auteur d’une œuvre riche de onze livres parus chez les plus grands éditeurs universitaires, et de plus de cent cinquante articles parus dans des revues scientifiques ou des ouvrages collectifs, il a contribué à consolider un champ de recherche aujourd’hui très actif internationalement, au croisement de la philosophie du langage et de l’esprit, de la linguistique et des sciences cognitives. Sa recherche nous amène à reconsidérer la relation entre le langage et la pensée. « La pensée verbale est une forme de pensée spécifique, fondée sur un mécanisme de « déférence » et parasitaire par rapport au langage. Reconnaître l’existence d’une telle pensée, c’est reconnaître que le langage ne sert pas seulement à exprimer des pensées formées indépendamment de lui mais qu’il joue un rôle plus fondamental dans la pensée : qu’on pense avec le langage. » François RECANATI. Intervention au Colloque de rentrée du Collège de France sur le thème Langue et science, langage et pensée (19-20 octobre 2018) Membre du CNRS depuis 1979, directeur d’étude à l’EHESS (où il était entré en 1975), cofondateur en 2000 et ancien directeur de l’Institut Jean Nicod, unité de recherche d’une centaine de personnes commune à l’École normale supérieure et à l’EHESS, François RECANATI a produit une œuvre considérable dont le retentissement est mondial, comme en attestent ses invitations à enseigner dans les universités les plus prestigieuses et les nombreuses traductions dont ses travaux font l'objet. Il est un des philosophes français les plus connus dans le monde anglo-saxon. Contact presse / médias : G. Kasperski – +33(0)144271272 / (0)638548087 – mél : presse@college-de-france.fr - diffusion 2/12/2019 2 Depuis toujours, la philosophie s’est souciée du sens des mots, de son caractère naturel ou conventionnel, de la relation des signes à la pensée et aux choses. Pour les philosophes classiques, ces questions relevaient d’une analyse des idées et de la manière dont la structure de l’esprit reflète, à travers la structure du discours, celle des choses. Pour les empiristes, les Idéologues, puis les psychologues du XIXe siècle, il s’agissait de donner une assise scientifique à l’étude de l’acquisition par l’esprit humain des significations et de leur expression dans le langage. Les tournants logico-linguistiques du XXe siècle constituèrent une fin de non-recevoir à une approche faisant du sens le produit des contenus mentaux. Retrouvant au passage certaines conceptions, stoïciennes et médiévales, de la proposition, fleurirent alors des conceptions plutôt objectivistes de la signification. Mais, c’est à la fin du XXe siècle que revient en force, avec le « tournant cognitiviste », la perspective cartésienne ou lockéenne, celle des mots comme miroir des idées, notamment avec l'apport des sciences cognitives et des neurosciences. Le Collège de France, en tant que lieu de croisement et d’émergence des disciplines a joué un rôle important dans ces débats, à travers des figures de la linguistique ou de l’étude des langues, comme Bréal (1832-1915) ou Benveniste (1902-1976), des sciences cognitives, comme Ribot (1839-1916), Jean-Pierre Changeux (1936-) ou Stanislas Dehaene (1965-), et, bien entendu, de la philosophie, dans une perspective d’analyse des théories du sens et du discours, notamment au XXe siècle, de Bergson à Merleau-Ponty et Foucault, en passant par Vuillemin (1901-2001), Granger (1920-2016), Jacques Bouveresse (1940), pour n’en citer que quelques-unes. Couverture de l’ouvrage Perspectival Thought: A Plea for (Moderate) Relativism. 2007. © Oxford university Press Les cours de François RECANATI au Collège de France débuteront cette année le 9 janvier sur le thème Dossiers mentaux (voir p. 7). Son séminaire se tiendra sous la forme d’un colloque les 24-26 juin 2020 sur le thème The Force/Content Distinction. Sa leçon inaugurale se déroulera le jeudi 12 décembre à 18h. Elle sera ouverte au public et retransmise en direct depuis le site web de l’établissement. L’ensemble de son enseignement sera rendu accessible largement sous forme de vidéos diffusées par le Collège de France sur www.college-de-france.fr. Contact presse / médias : G. Kasperski – +33(0)144271272 / (0)638548087 – mél : presse@college-de-france.fr - diffusion 2/12/2019 3 Philosophie du langage et de l’esprit Par François RECANATI Il y a eu trois grandes phases dans le développement de la philosophie du langage depuis la fin du 19ème siècle. La première phase est marquée par l’invention de la logique mathématique, issue des efforts d’un grand nombre de savants et surtout de ces deux héros intellectuels que furent Frege et Russell. Ces deux mathématiciens-philosophes fondèrent et la logique mathématique et la philosophie du langage telle que nous la connaissons. On a parlé, à propos de cette phase initiale, de philosophie du langage idéal. De fait, les philosophes de cette époque sont animés par une ambition qui remonte à Leibniz : construire un langage parfait, un langage conceptuel qui épouse la pensée et, pour ainsi dire, la remplace dans le raisonnement et l’administration de la preuve. Toutefois, à travers les langages artificiels qu’ils construisent et dont ils étudient les propriétés, ces philosophes s’intéressaient au langage en général. Leurs travaux ont eu un impact très significatif sur la linguistique contemporaine, à travers l’émergence de la sémantique formelle. Celle-ci vise à expliciter les règles en vertu desquelles le sens se transmet des mots aux énoncés, expliquant ainsi qu’il suffise, pour comprendre un énoncé quelconque (fût-il entièrement nouveau) parmi un ensemble infini d’énoncés possibles, de comprendre les mots qui le composent et sa structure syntaxique. D’abord appliquée aux langages artificiels de la logique, pour lesquels on dispose d’une syntaxe explicite, la sémantique formelle a pu être appliquée aux langues parlées en exploitant les progrès obtenus, grâce à la grammaire générative (Chomsky), dans l’élaboration d’une syntaxe explicite de ces langues. Ainsi a-t-on assisté, dans l’espace de vingt années, à deux révolutions successives qui ont changé la face de la linguistique au 20ème siècle : la révolution de la syntaxe à partir des années cinquante, avec l’apparition des grammaires génératives; puis, à partir des années soixante et soixante-dix, la révolution de la sémantique, rendue possible par les avancées de la philosophie du langage. Une troisième révolution de la linguistique, la révolution pragmatique, fut également d’origine philosophique. Elle correspond à la deuxième des « phases » que j’ai distinguées dans l’évolution de la philosophie du langage depuis le début du 20ème siècle. A partir des années 30 et 40, tout un courant de la philosophie du langage s’est attaché à souligner ce qui distingue les langues parlées des langages formels de la logique. Ce mouvement a culminé dans les années 50 avec ce qu’on a nommé la philosophie du langage ordinaire. L’idée était qu’il fallait décrire le langage ordinaire, au lieu d’essayer de le réformer à la lumière d’un idéal logique étranger à sa réalité fondamentale. Décrire et non prescrire ; regarder le langage tel qu’il est, et non tel qu’il devrait être. Ce qui distingue radicalement les langues parlées des langages formels de la logique, c’est, en particulier, la dimension pragmatique : le fait qu’en parlant nous accomplissons des actes sociaux, qui vont au delà de la communication de propositions vraies ou fausses. La théorie des actes de parole et plus généralement ce qu’on a appelé la « pragmatique » s’est imposée comme un composant nécessaire d’une théorie globale du langage. La linguistique contemporaine a récupéré, dans un esprit œcuménique, et les idées des philosophes du langage idéal (essentiellement le programme d’une sémantique formelle) et celles des philosophes du langage ordinaire (l’ambition descriptive et la prise en compte des phénomènes pragmatiques). Chaire Philosophie du langage et de l’esprit Pr François RECANATI Contact presse / médias : G. Kasperski – +33(0)144271272 / (0)638548087 – mél : presse@college-de-france.fr - diffusion 2/12/2019 4 Aujourd’hui, tant la sémantique formelle que la pragmatique sont enseignées dans les départements de linguistique des universités du monde entier. Pendant que la linguistique s’appropriait les idées des philosophes du langage, cependant, ceux-ci se tournaient vers de nouveaux objets. (C’est à la « troisième phase » que j’annonçais plus haut.) Comme l'écrivait Martin Davies en 1990 dans une revue au titre caractéristique (Mind and Language) "les philosophes du langage des années soixante-dix sont devenus les philosophes de l'esprit des années quatre-vingt et quatre-vingt-dix". Ce déplacement de la philosophie du langage vers la philosophie de l’esprit n’a rien de surprenant étant donné tout ce que la pensée a en commun avec le langage, et qui motive la métaphore traditionnelle d’un langage de la pensée. La période contemporaine se caractérise donc par un double mouvement : d’un côté, appropriation et validation par la linguistique contemporaine des idées issues de la philosophie du uploads/Philosophie/ entree-de-f-recanati-au-cdf.pdf
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- Publié le Nov 28, 2022
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