L’UN, CHOSE INVRAISEMBLABLE. LECTURE DES CHAPITRES IX ET X DU SÉMINAIRE … OU PI
L’UN, CHOSE INVRAISEMBLABLE. LECTURE DES CHAPITRES IX ET X DU SÉMINAIRE … OU PIRE Armand Zaloszyc L'École de la Cause freudienne | « La Cause du Désir » 2012/2 N° 81 | pages 112 à 120 ISSN 2258-8051 ISBN 9782905040787 DOI 10.3917/lcdd.081.0112 Article disponible en ligne à l'adresse : -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- https://www.cairn.info/revue-la-cause-du-desir-2012-2-page-112.htm -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Distribution électronique Cairn.info pour L'École de la Cause freudienne. © L'École de la Cause freudienne. Tous droits réservés pour tous pays. La reproduction ou représentation de cet article, notamment par photocopie, n'est autorisée que dans les limites des conditions générales d'utilisation du site ou, le cas échéant, des conditions générales de la licence souscrite par votre établissement. 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Lacan J., Le Séminaire, livre XIX, … ou pire, Paris, Seuil, 2011, p. 132 & 138. Cf. également p. 141, sur la question de l’existence de la licorne. 3. Ibid., p. 134. 4. Ibid., p. 126. 5. Ibid., p. 126-127. 6. Ibid., p. 126 & 139. 7. Ibid., p. 140. 8. Ibid., p. 157-158. 114 L’Un, chose invraisemblable Lecture des chapitres IX et X du Séminaire … ou pire Armand Zaloszyc Les chapitres IX et X du Séminaire … ou pire, auxquels il faut adjoindre aussi le chapitre XI, représentent le moment pivot de l’introduction de l’Un dans ce Séminaire1. Cet Un, nous ne savons pas ce qu’il est – il est donc indiqué de ne pas le présupposer. Nous avons seulement au départ le signifiant « Un » qui nous est donné dans la langue, avec un certain nombre de signifiés. Qu’il y ait de l’Un est une chose distincte, et une « chose invraisemblable », comme nous le dit Lacan2. Invraisemblable, oui – mais pourquoi ? Les dimensions de l’Un Nous ne nous attarderons pas sur les « dimensions » de l’Un3. Mettons de côté le trait unaire qui est le trait de l’identification de la deuxième forme que distingue Freud4. Écar- tons aussi l’Un au sens de l’Un fusionnel où Freud voit le caractère d’Eros5. Notons que le corps de l’individu du vivant est une des formes de l’Un6. Les éléments punctiformes que sont les corps célestes ont pu aussi donner une idée de l’Un7. Enfin, une autre dimen- sion de l’Un s’est encore présentée sous la forme de l’unité des instruments de mesure en géométrie8. © L'École de la Cause freudienne | Téléchargé le 22/01/2022 sur www.cairn.info (IP: 213.45.62.199) © L'École de la Cause freudienne | Téléchargé le 22/01/2022 sur www.cairn.info (IP: 213.45.62.199) 9. Ibid., p. 132. 10. Ibid., p. 144 & 134. 11. Miller J.-A., « La suture (Éléments de la logique du signifiant) », Cahiers pour l’analyse, n° 1 & 2, 1966, p. 39-51. 12. Lacan J., Le Séminaire, livre XIX, … ou pire, op. cit., p. 132-134. 13. Ibid., p. 132-133. 14. Ibid., p. 126. 15. Ibid., p. 134. 16. Ibid., p. 145-146. Cf. Frege G., Fondements de l’arithmétique, Paris, Seuil, 1969, p. 195. 17. Ibid., p. 146. 115 Nous allons plutôt ressaisir cet Un tel qu’il aura surgi « à la fin d’une longue élabo- ration de discours », comme s’exprime Lacan9, désignant ainsi, d’une part l’élaboration de Frege dans ses Fondements de l’arithmétique, d’autre part la théorie des ensembles telle qu’elle a été élaborée par Cantor. Nous verrons que l’Un ne s’unifie pas du tout : il garde plusieurs dimensions, se présentant comme « ambigu » ou « bifide », non « univoque »10. L’Un et le zéro De Frege, nous retenons essentiellement ce qu’il permet de désigner comme le rapport de l’Un au manque. Ce sera d’abord sa théorie de l’engendrement de la suite des nombres entiers naturels, à propos de laquelle Jacques-Alain Miller a donné un éclaircissement qui a fait date au cours de l’année du Séminaire de Lacan sur les « Problèmes cruciaux pour la psychanalyse »11. Rappelons que le mouvement de cette logique inspirée de Frege tient à ce que zéro y compte pour un. Lacan y fait référence essentiellement dans la troisième section du chapitre IX12. Il évoque « l’insuffisance de toute déduction logique du 1, puis- qu’il faut qu’elle passe par le 0, dont on ne peut tout de même pas dire que ce soit le 1, et c’est pourtant de ce 1 qui manque au niveau du 0 que procède toute la suite arith- métique. Parce que déjà, ajoute-t-il, de 0 à 1, ça fait deux. Dès lors, ça en fera trois parce qu’il y aura 0, 1 et 2. Et ainsi de suite »13. Mais ce Frege-là est présent tout au long du chapitre et vous le trouvez déjà mentionné dès les premières pages sous la figure « de l’Un et du Pas-un, c’est à savoir zéro »14, dyade qui vient ici pour bousculer la dyade freudienne Eros et Thanatos. Et vous trouvez encore le même point venu de Frege exprimé, cette fois, dans le vocabulaire de la théorie des ensembles, sous la dénomination de « l’Un de l’ensemble vide qui, chose curieuse, ajouterait deux à notre numération d’éléments »15. Le ressort de cette référence à Frege est de mettre en rapport le 1 avec le 0, et nous en trouvons encore le principe avec une référence ultérieure aux Fondements de l’arith- métique où Frege illustre, par l’usage de la correspondance biunivoque que pratique le maître d’hôtel, le surgissement de l’un à partir du manque d’un lorsqu’il confronte « un par un chacun des éléments d’un ensemble de couteaux avec un ensemble de four- chettes »16. « À partir du moment où il y en aura encore un d’un côté et plus rien de l’autre, il apparaîtra quoi ? Que l’Un commence au niveau où il y en a un qui manque ». Et Lacan poursuit : « L’ensemble vide est donc proprement légitimé de ceci, qu’il est […] la porte dont le franchissement constitue la naissance de l’Un »17. La Cause du désir no81 Armand Zaloszyc Lecture des chapitres IX et X du Séminaire … ou pire © L'École de la Cause freudienne | Téléchargé le 22/01/2022 sur www.cairn.info (IP: 213.45.62.199) © L'École de la Cause freudienne | Téléchargé le 22/01/2022 sur www.cairn.info (IP: 213.45.62.199) 18. Ibid., p. 134. 19. Ibid., p. 133-134 &143. 20. Ibid., p.144. 21. Ibid., p. 164. 22. Plus précisément, dans l’axiomatique de Zermelo-Frænkel. 116 Lacan passe ainsi à une référence à la théorie des ensembles qui ajoute aux dimensions de l’Un un « surgissement » qui n’est pas univoque18 : nous sommes conduits, en effet, à considérer que l’Un que constitue l’élément d’un ensemble et l’Un que constitue l’en- semble comme tout sont à distinguer ; que les éléments d’un ensemble comptent chacun pour un, pour peu qu’ils soient purement et simplement distincts19 ; que même l’élé- ment comme Un, dans la théorie des ensembles, est « marqué, dit Lacan, comme devant être fondé sur la pure et simple différence »20. Et tout cela se fonde sur le fait que l’élé- ment comme un est équivalent à l’ensemble vide21. La référence à la théorie des ensembles permet donc à Lacan d’accentuer d’une part l’équivoque de l’Un entre l’Un de l’ensemble, l’Un de l’élément et l’Un de l’ensemble vide. Elle le conduit d’autre part à faire un certain usage du nombre transfini. Ce cursif passage en revue des références de Lacan à Frege et à l’axiomatique de la théorie des ensembles – qui, toutes, se condensent dans le rapport du Un et du zéro – nous amène précisément à la question de l’Aleph, que Lacan entremêle aux précédentes, au titre qu’il s’agit de la théorie des ensembles, mais qui doit en être distinguée suffisamment main- tenant, ne serait-ce que parce que c’est par là que s’introduit la question de l’infini qu’il ne nous a pas été nécessaire d’examiner jusqu’ici. L’Un et l’infini Nous avons peu à savoir sur ce qu’est ℵ0. Je rappelle seulement qu’il s’agit du cardinal de l’ensemble dénombrable, dont le type est l’ensemble des nombres entiers. Cantor a résolu avec une élégante simplicité la question de l’infini actuel en distinguant des infinis de puissances graduées, dont la première, ℵ0, ouvre sur une gradation d’alephs supé- rieurs. Ce sont les nombres transfinis qu’il a inventés. En particulier, il y a uploads/Philosophie/ lcdd-081-0112.pdf
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- Publié le Jan 25, 2021
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