Aix-Marseille Université UFR Arts, Lettres, Langues, Sciences Humaines Mémoire
Aix-Marseille Université UFR Arts, Lettres, Langues, Sciences Humaines Mémoire de Master 1 : Langues et Cultures Étrangères Mention : Aire Culturelle Asiatique (ACA) Spécialité « Langues, Cultures et Sociétés d’Asie » (LCS) Théories des contraintes et phonologie des mots d'emprunt en japonais Mémoire présenté par : Rémi LAMARQUE Sous la direction d'Alice VITTRANT Année universitaire 2012 - 2013 Théorie des contraintes et phonologie des mots d'emprunt en japonais Table des matières INTRODUCTION :..............................................................................................................................3 I - La phonologie du japonais...............................................................................................................4 A - Les différentes strates du lexique japonais.............................................................................4 B - Le système phonologique......................................................................................................6 1°) Les voyelles...................................................................................................................6 2°) Les consonnes...............................................................................................................7 C - Réalisation des phonèmes......................................................................................................7 1°) Réalisation des voyelles................................................................................................7 2°) Réalisation des consonnes.............................................................................................8 a - Statut des consonnes palatales [ɕ], [ʑ] et [t P ɕ]........................................................8 b - /t/ et /d/..................................................................................................................9 c - /s/ et /z/................................................................................................................10 d - /h/ et /p/...............................................................................................................11 e - /j/ et /w/................................................................................................................12 3°) Structure de la syllabe et segments moriques spéciaux /N/, /Q/ et /R/.......................12 II - Théorie de la structure du lexique en noyau et périphérie............................................................15 A - Présentation du cadre théorique...........................................................................................16 1°) Théorie de l'optimalité.................................................................................................16 2°) Itô et Mester (1995).....................................................................................................19 3°) L'intérêt de l'approche en terme de contraintes...........................................................24 B - Les contraintes qui dominent l'ensemble du lexique...........................................................27 1°) La correspondance segmentale...................................................................................27 2°) Les contraintes concernant la structure syllabique......................................................28 III - Infractions aux contraintes..........................................................................................................34 A - Redistribution des allophones..............................................................................................34 1°) /ɸ/, [v] et /t P s/................................................................................................................35 a - /ɸ/........................................................................................................................35 b - [v]........................................................................................................................36 c - /t P s/........................................................................................................................37 2°) /t/ et /d/........................................................................................................................38 3°) /ɕ/, /ʑ/ et /t P ɕ/.................................................................................................................39 4°) /w/................................................................................................................................40 5°) /Q/................................................................................................................................42 B - Contraintes de distribution de phonèmes dans les morphèmes japonais.............................43 1°) Distribution des obstruantes voisées dans les morphèmes japonais...........................44 a - *#D et *#R..........................................................................................................44 b - La loi de Lyman..................................................................................................44 2°) Distribution du /p/ dans les morphèmes japonais.......................................................45 Conclusion :........................................................................................................................................47 Annexes :............................................................................................................................................51 Bibliographie :....................................................................................................................................58 2/65 INTRODUCTION : Les études menées sur la catégorie des mots d'emprunt dans diverses langues ont mis en lumière la présence de caractéristiques spécifiques à cette couche du lexique. Le développement, dans les années 1970, de la phonologie naturelle (Stampe 1972), qui s'inscrit dans le courant de la théorie générative dérivationnelle (développé par Chomsky), a attiré l'attention sur les spécificités structurelles de ces mots d'emprunts. On notera, dès cette époque, des études phonologiques sur le japonais se focalisant en particulier sur le lexique gairaigo, c'est-à-dire, la catégorie des mots d'emprunts (Lovins, 1973). Puis, en 1993, Prince et Smolensky développent la Théorie de l'Optimalité, selon laquelle tout fait langagier est le résultat d'un conflit entre des contraintes dont la hiérarchie diffère selon les langues. Ce concept de contrainte inspire à son tour de nombreuses théories dans les années 1990 et conforte l'intérêt des mots d'emprunt en tant que thème de recherche, comme en témoigne le grand nombre de travaux à ce sujet : Paradis et Lebel (1994), Paradis et LaCharité (1997), Yip (1993), Itô et Mester (1995) entre autres. Parmi ces théories, nous avons choisi de nous intéresser plus particulièrement à celle développée par Itô et Mester en 1995. Celle-ci s'inscrit dans le courant générativiste et s'inspire des travaux de Paradis et Lebel (1994). Elle décrit la structure du lexique comme un ensemble de cercles concentriques. Plus le lexique respecte les contraintes de la langue et plus il se rapproche du centre de la structure, aussi appelé le noyau. Au contraire, plus le lexique enfreint de contraintes, plus il s'éloigne du noyau et se situe en périphérie. Cette idée, nous permet d'établir une hiérarchie dans les contraintes de la langue et ainsi expliquer les processus d'adaptation des mots d'emprunts. Nous expliquerons ceci plus en détail, notamment dans la deuxième partie de notre travail. Dans ce cadre théorique, l'étude de la catégorie des mots d'emprunt s'avère particulièrement intéressante puisqu'il s'agit de la catégorie située le plus en périphérie. De ce fait, seules les contraintes au sommet de la hiérarchie s'appliquent à elle. Ainsi, les mots d'emprunt nous permettent de distinguer entre les contraintes inviolables et celles qui sont plus permissives, situées plus bas dans les échelons de la hiérarchie. Afin de faire ressortir les particularités des mots d'emprunt par rapport aux autres couches du lexique, nous apporterons tout d'abord quelques explications sur le fonctionnement de la phonologie du japonais, en excluant le lexique gairaigo. Puis nous apporterons des précisions concernant le cadre théorique suivi dans notre travail en soulignant l'intérêt d'une approche par les théories des contraintes. Enfin, en comparant les règles phonologiques détaillées en première partie 3/65 aux particularités des mots d'emprunt, nous tenterons d'établir une hiérarchie parmi l'ensemble des contraintes de la langue. Dans cette étude sur le japonais moderne, nous nous appuierons sur un corpus1 dont nous extrairons, dans la mesure du possible, des exemples pour illustrer nos propos. Ce corpus, d'une centaine de mots d'emprunt, a été constitué à partir de cinq sources différentes : un roman, un magazine de prépublication de manga, un manuel scolaire, un blog internet et un journal. Dans chacune de ces sources, nous avons extrait les 20 premiers mots d'emprunt qui apparaissaient. Ce corpus est donc basé sur les formes écrites des mots en question. Notons toutefois que le système d'écriture du japonais nous fournit des informations fiables sur la transcription phonologique des mots, dont il est très proche. Un tableau des hiragana et katakana est disponible en annexe. Il est possible, en comparant les réalisations phonétiques des caractères à leur équivalent phonologique d'avoir un aperçu de la majorité des règles phonologiques qui régissent la langue. Nous avons également demandé à un locuteur natif de prononcer les mots du corpus afin de confirmer les informations fournies par l'écrit. Ces formes écrites ne sont donc pas dénuées de pertinence dans le cadre de notre travail. Les exemples tirés de ce corpus seront indiqués en gras : /rizumu/ [ɾizumu], 'rythme'. I - La phonologie du japonais A - Les différentes strates du lexique japonais Les règles phonologiques de la langue ne s'appliquent pas uniformément sur l'ensemble du lexique. Dans notre travail, nous allons comparer les différentes couches du lexique japonais, en nous concentrant sur les spécificités des mots d'emprunts. Pour cela, nous devons tout d'abord définir quels sont les différents types de lexique que l'on peut distinguer et quels sont leurs caractéristiques principales. Les linguistes s'accordent sur au moins trois lexiques différents, qui se distinguent, entre autres, par leur origine, leur comportement phonologique le système d'écriture dans lequel ils sont transcrits. – Le lexique Yamato ou wago : Il s'agit du lexique indigène japonais. C'est le noyau du lexique japonais, l'ensemble des contraintes phonologiques de la langue y sont respectées. Les mots Yamato s'écrivent à l'aide des hiragana2, l'un des deux syllabaires du japonais, complétés par les caractères chinois. 1 Voir annexe 1 « Corpus » 2 Voir annexe 2 « Tableaux des hiragana et katakana » 4/65 – Le lexique sino-japonais ou kango : Ce sont des morphèmes empruntés au chinois ancien depuis le IVème siècle. Cette catégorie de mots tolère certaines distributions de segments qui ne sont pas admises en Yamato. Les mots sino-japonais s'écrivent à l'aide des caractères chinois. – Le lexique des mots d'emprunt ou gairaigo : Il correspond aux emprunts lexicaux aux langues étrangères autres que le chinois ancien. Les premiers emprunts de ce type remontent aux premiers échanges avec l'Occident, autour du XVème siècle. Il s'agissait essentiellement d'emprunts à l'espagnol, au portugais ou au hollandais. De nombreux emprunts à d'autres langues, telles que l'anglais, font leur apparition depuis le XIXème siècle. De nos jours, 80,8% du lexique gairaigo est composé de mots empruntés à l'anglais. Cette couche du lexique autorise un nombre important de combinaisons de phonèmes interdites dans toutes les autres couches. Les mots du lexique gairaigo s'écrivent en katakana2, un autre syllabaire japonais. Certains ajoutent à cette liste les mots mixtes, mêlant des morphèmes de diverses strates, qu'ils considèrent comme appartenant à une couche du lexique à part. Nous en avons un exemple dans notre corpus : /kaɾaoke/ [kaɾaoke] 'karaoké'. Ce mot est composé d'un morphème Yamato /kaɾa/ 'vide' et d'un morphème gairaigo /oke/ qui est l'abréviation de /o:kesutoɾa/, forme empruntée de l'anglais |ɔːkɪstrə|3. Une telle séparation ne nous paraît pas pertinente et nous préférons considérer que, dans le cas des mots mixtes, chaque morphème appartient à une couche différente. En revanche, il nous paraît intéressant de considérer les mots mimétiques comme une couche du lexique à part. Il s'agit d'une catégorie de mot qui regroupe les onomatopées (giseigo) et les idéophones (gitaigo). Ces mots sont parfois assimilés au lexique Yamato car leur origine est, pour la grande majorité, indigène. Cependant on remarque dans ces mots mimétiques certaines combinaisons de phonèmes qu'on ne trouve pas en Yamato, telles que /ɾ/ ou une obstruante voisée à l'initiale. On trouve même des cas de combinaisons qui n'existent ni en Yamato, ni dans le lexique sino-japonais, comme par exemple des /p/ géminés ou en position initiale. Cela semble indiquer que les mots mimétiques appartiennent à une strate à part, plus éloignée encore du noyau que les mots sino-japonais. De plus, cette couche du lexique était reconnue par Itô et Mester et uploads/Philosophie/ memoire-lamarque-1.pdf
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- Publié le Jui 12, 2022
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