Phonologie, Master LFA, semaine 1 – Prof. : André THIBAULT - 1 - Phonologie, Ma

Phonologie, Master LFA, semaine 1 – Prof. : André THIBAULT - 1 - Phonologie, Master LFA Professeur : André THIBAULT Semaine 1. 1. Introduction. 1.1. Adresse du site internet : http://pagesperso-orange.fr/andre.thibault/ 1.2. Distinction phonématique ≠ morphonologie : dans le cadre de ce cours, nous nous limitons à la phonologie telle qu’on l’entend dans les milieux fonctionnalistes, c’est-à- dire essentiellement l’étude des phonèmes (la phonématique) et éventuellement des prosodèmes (la prosodie) ; il ne s’agit pas de faire de la phonologie comme on l’entend dans le cadre de la grammaire générative-transformationnelle. La phonologie générative est en fait une sorte de morphonologie dont l’étude déborderait amplement des limites de ce qu’il nous est possible de faire dans un cours d’une heure/semaine. 1.3. Présentation du plan de cours et de l’évaluation. Voir la page d’accueil de mon site internet pour télécharger le plan de cours. 1.4. Présentation de la bibliographie (v. encore ci-dessous 2.1.). Voir la page d’accueil de mon site internet pour télécharger la bibliographie. 1.5. Prérequis : je m’attends à ce que vous ayez déjà suivi un cours de phonétique française ou générale (ou à tout le moins quelques semaines consacrées à ce sujet dans un cours d’introduction à la linguistique), ne pouvant pas tout reprendre à zéro dans le cadre de ce cours. Si cela n’est pas le cas, la lecture d’un bon ouvrage d’introduction à la phonétique vous est fortement recommandée (voir la bibliographie). 2. Avertissements méthodologiques Nous allons, avant même d’entrer dans le vif du sujet, présenter pour commencer quelques avertissements méthodologiques au public étudiant ; il s’agit d’abord de prendre conscience du fait que les sources que l’on est amené à consulter doivent être abordées avec esprit criti- que ; ensuite, on se mettra d’accord sur quelques principes de transcription sans lesquels il n’y a pas moyen d’exprimer clairement sa pensée en matière de graphématique, de phonétique et de phonologie. 2.1. Désaccords et contradictions entre les différentes sources consultées. À votre niveau, vous devez accepter le fait que les différentes sources que je vous recomman- de en bibliographie présentent souvent de nombreuses divergences ; cela est parfaitement nor- mal et fait partie de la vie scientifique. Il faut cesser de croire, comme on a tendance à vous le faire croire à l’école, au lycée, etc., que la science est une sorte de vérité révélée, un texte sa- cré qui serait tombé du ciel. La science est au contraire un dialogue, qui avance péniblement, lentement, mais sûrement, de la confrontation des différents points de vue. D’ailleurs, ce sont en général les points de désaccord qui présentent le plus d’intérêt théorique, car c’est à partir d’eux que les théories progressent. Cela dit, les divergences ne sont pas toutes du même or- dre ; certaines s’avèrent plus triviales. Elles peuvent porter : 2.1.1. Sur la nature des phénomènes, du strict point de vue descriptif, factuel. Au niveau même de l’observation et de la description des données, les auteurs ne sont pas toujours d’accord entre eux. Cela peut être dû au fait, par exemple, que les relevés Phonologie, Master LFA, semaine 1 – Prof. : André THIBAULT - 2 - sont incomplets dans le temps, l’espace, les classes sociales, etc. ; cela peut aussi, dans un domaine comme la phonétique, dépendre des qualités de discrimination auditive de l’oreille de chacun (qualités fortement déterminées par le système phonologique du sujet ; on y reviendra dans quelques semaines). Par exemple, de nombreux traités de phonétique/phonologie française négligent complètement de commenter l’opposition brève ≠ longue qui permet de distinguer des mots comme faites ≠ fête dans certaines régions (Suisse romande, Canada, etc.), ou se contentent de décréter qu’elle est dispa- rue, ce qui révèle simplement que « chacun voit midi à sa porte », comme on dit.1 2.1.2. Sur leur interprétation à l’intérieur d’un cadre théorique donné. Même lorsque les auteurs sont d’accord sur l’existence et la nature des phénomènes décrits, le cadre théorique retenu pour rendre compte de l’organisation de ces unités en système (puisque c’est, en gros, une des tâches de la phonologie) peut varier. Il y a désaccord, par exemple, sur le statut de phonème de certains sons du français (le schwa [appelé traditionnellement « e muet »], le « yod » d’un mot comme yacht ou le « wau » d’un mot comme ouate, la nasale palatale d’un mot comme agneau, la nasale vélaire d’un mot comme jogging, etc.). Que ces sons existent en français est un fait reconnu ; qu’on leur accorde le statut théorique de phonème à part entière, et non sim- plement de variante d’un autre phonème, voilà qui ne fait pas l’unanimité, comme nous aurons l’occasion de le voir dans quelques semaines. 2.1.3. Sur leur valeur normative. Dans ce domaine, encore une fois, chaque auteur a tendance à voir midi à sa porte. Il y a fort à parier, par exemple, qu’un phonologue parisien décrètera que l’opposition entre la nasale qu’on écrit ‹in› et celle qu’on écrit ‹un› est en voie de disparition, voire carrément disparue de la norme du français contemporain de France, alors que dans la plus grande partie du pays (sans compter le reste de la francophonie), elle se maintient sans faiblir. 2.1.4. Enfin, les différentes sources ne sont pas d’accord entre elles sur des détails de terminologie et de notation (ou transcription) phonétique et phonologique. Le r français, par exemple, est tantôt noté [r], tantôt [Â] ; selon la plupart des sources, le premier signe correspond à une vibrante uvulaire, le second à une constrictive post- vélaire ou uvulaire, mais on trouve parfois l’inverse (eh oui !). Dans la plupart des cas, l’auteur ne retient que l’une des deux variantes, sans s’expliquer sur son articula- tion précise. Par exemple, le Petit Robert choisit le symbole de la vibrante uvulaire, probablement pour ne pas effrayer ses lecteurs avec « une lettre à l’envers », mais on aurait tort d’y voir une intention de la part de ses auteurs de présenter le r grasseyé à battements multiples comme le plus neutre et le plus fréquent en français contempo- rain. 1 Sur ce problème, cf. MORIN, Yves Charles, « Le français de référence et les normes de pro- nonciation », dans M. FRANCARD (éd.), Le français de référence : Constructions et appropria- tions d’un concept, Actes du colloque de Louvain-la-Neuve, 3-5 novembre 1999, publiés dans Cahiers de l’Institut de Linguistique de Louvain, Louvain-la-Neuve : 2000, 91-135. Phonologie, Master LFA, semaine 1 – Prof. : André THIBAULT - 3 - 2.2. Principes de transcription. Distinction entre graphèmes et sons ; entre sons et phonèmes. Pour bien savoir de quoi on parle et ne pas confondre les différents niveaux d’analyse, il est primordial que l’on distingue bien, par des recours typographiques, le type d’éléments auquel on se réfère. La confusion conceptuelle dénotée par le recours indifférencié à n’importe quel système de transcription est l’une des erreurs les plus fréquentes relevées dans les travaux d’étudiants ; on ne le répétera jamais assez : une lettre n’est pas un son. Il faut que cela res- sorte clairement. 2.2.1. Distinction graphème ≠ son. Graphèmes : c’est ce que l’on appelle traditionnellement les lettres de l’alphabet – considé- rées en tant que telles, c’est-à-dire comme symboles écrits arbitraires et conventionnels, et dont la correspondance (et la non-correspondance !) avec la prononciation dans une langue comme le français est passablement complexe, et s’explique essentiellement par l’histoire. Par convention, on transcrit les graphèmes entre chevrons simples : ‹ ›. Si dans l’histoire des grandes langues de culture, l’alphabet était souvent au début très proche d’une transcription phonologique, le caractère conservateur de l’écriture a toujours provoqué un décalage progressif avec la prononciation. La correspondance entre graphèmes d’une part, et sons et phonèmes d’autre part, n’est donc pas univoque. Nous allons examiner ci-dessous les cas de figure où une non-correspondance s’observe. Par convention, on note les sons entre crochets : [ ]. L’alphabet retenu ici est l’API (Alphabet Phonétique International). Pour le français, vous trouverez les principaux symboles dans les pages liminaires de n’importe quel Petit Robert), mais il existe d’autres systèmes de transcrip- tion phonétique, que nous aborderons plus tard dans le semestre. - À un même son peuvent correspondre plusieurs graphèmes selon les mots : [k] correspond à ‹c› dans cou, à ‹k› dans képi. - À un même graphème peuvent correspondre plusieurs sons selon les mots : ‹c› correspond à [k] dans cou, mais à [s] dans ceci. - Un graphème peut correspondre à une suite de deux sons : ‹x› se prononce [ks] dans taxi, ou [gz] dans examen. - Un son peut être transcrit par une suite de deux graphèmes, que l’on appellera digram- me. Ex. : le son [f] est transcrit ‹ph› dans téléphone ; le son [u] est transcrit ‹ou› dans un sou. La langue française nous fournit également de nombreux exemples de combinaisons de plusieurs graphèmes (trois, quatre, voire davantage) correspondant à un seul son : ‹aient› pour [E] dans ils avaient ; ‹eaux› pour [o] dans oiseaux. L’immense majorité de ces exemples de non-correspondance entre graphie uploads/Philosophie/ phonologie-semaine-1.pdf

  • 53
  • 0
  • 0
Afficher les détails des licences
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise
Partager