4/28/15, 11:33 PM Table ronde (1924) - René Guénon, Ferdinand Ossendowski et Ja
4/28/15, 11:33 PM Table ronde (1924) - René Guénon, Ferdinand Ossendowski et Jacques Maritain. Page 1 of 11 about:blank Table ronde (1924) - René Guénon, Ferdinand Ossendowski et Jacques Maritain. LE SALUT QUI VIENT DE L’ORIENT ? Une heure avec Ferdinand Ossendowski l’homme qui a vu le Bouddha vivant, par Frédéric LEFEVRE. Compte-rendu dans le journal 4/28/15, 11:33 PM Table ronde (1924) - René Guénon, Ferdinand Ossendowski et Jacques Maritain. Page 2 of 11 about:blank Les nouvelles littéraires du 26 juillet 1924 L’arrivée à Paris de M. Ferdinand Ossendowski, qu’on a appelé le Robinson Crusoé du vingtième siècle, et dont tous les critiques sont unanimes à considérer Bêtes, Hommes et Dieux, son premier ouvrage traduit en français comme un livre prodigieux, le plus passionnant récit de voyage qu’ils aient jamais lu, ne pouvait passer inaperçue. Nous avons eu la bonne fortune de nous entretenir avec M. Ossendowski, l’homme qui a vu le Bouddha vivant, et nous avons eu la chance non moins précieuse de pouvoir le faire rencontrer avec les trois personnalités françaises qui semblent les mieux désignées pour affronter leurs doctrines et leur science à ses expériences, et pour juger, à la lumière des concepts occidentaux, la somme incroyable d’observation qu’il a rapportée de sa dramatique randonnée à travers l’Asie. J’ai nommé l’historien de l’Asie, M. René Grousset, que nous avons présenté à nos lecteurs il y a quelques semaines ; Jacques Maritain, le philosophe catholique, à qui est dû en grande partie le renouveau thomiste dans ce pays, et M. René Guénon, l’hindouiste, dont les méditations nous ont valu ce livre remarquable, l’Introduction aux doctrines hindoues, et qui publie ces jours-ci sur les questions qui angoissent la conscience européenne, un petit précis riche de substance, Orient et Occident. (F. Lefèvre fait alors état de la carrière de M. Ossendowski, puis il se remémore le débat :) Ferdinand Ossendowski est surtout sollicité par la question politique comme tous ceux qui furent victimes de la révolution russe. Il nous a fait d’intéressants rapports sur la Russie et le monde jaune. Il avait peine à répondre à toutes nos questions. Le philosophe catholique Jacques Maritain n’était ni le moins curieux ni le moins impatient. Essayons, au hasard de nos souvenirs de reconstituer ce chassé- croisé : J. Maritain. - N’y a-t-il pas alliance entre le monde asiate et les Soviets ? Ossendowski. - Pour répondre à cette question il faut remonter dans l’histoire. Le dernier descendant de Gengis Khan, Amoursana-Khan, qui était aussi empereur de Chine, se réfugia en Russie quand la dynastie Daotzin triompha de la dynastie Youan. En gage de reconnaissance, il transféra tous ses droits de Khan suprême à l’impératrice Catherine II. 4/28/15, 11:33 PM Table ronde (1924) - René Guénon, Ferdinand Ossendowski et Jacques Maritain. Page 3 of 11 about:blank C’était, vous le savez, au XVIIIe siècle. Il lui donna aussi la sainte pierre de la prophétie, sorte d’agathe noire qui était toute couverte de lichens. Aussi longtemps qu’elle était restée à Ourga, jamais la maladie ni le malheur n’avaient touché les Mongols, ni leurs animaux. Depuis qu’elle a quitté l’Asie, le peuple mongol a commencé lentement à mourir. - Les tsars utilisèrent-ils ce titre de Khan suprême et la sainte pierre de la prophétie grada-t-elle en Russie tout son pouvoir ? Ossendowski. - Catherine II n’utilisa pas ce titre, mais Alexandre Ier, conscient des devoirs qu’il lui imposait, aida - diplomatiquement - les Mongols dans leurs révoltes contre la Chine et depuis lors, Mongols et Chinois, font suivre les titres du tsar du nom de Khan blanc (Tzagan- Khan). Aussi quand Semionoff, général de l’armée de Koltchak, devint vice-roi de l’Extrême-Orient, il demanda au Bouddha vivant d’Ourga le titre de grand Khan de Mongolie. Il l’obtint. Le baron Ungern n’était pas étranger à un aussi rapide acquiescement. - Semionoff est-il toujours le grand Khan de Mongolie ? Ossendowski. - Il l’est, mais il n’exerce plus le pouvoir effectif. Il vit maintenant au Japon, à Nagasaki. Il combattait contre les bolcheviki, au district d’Oussouri, sur les bords du Pacifique, quand il fut séparé d’Ungern. Le pouvoir effectif revint alors à Ungern dont la première démarche fut de faire adresser par le Bouddha vivant à tous les peuples asiatiques une bulle où il ordonnait la lutte contre les « bolcheviki, mauvais diables, mandait-il, qui vont tuer la moralité et l’âme de toute l’humanité. » Semionoff avait d’ailleurs été contacté par le Dalaï-Lama qui avait envoyé un message au Bouddha vivant lui ordonnant dès 1921 d’entreprendre la lutte pour la défense de l’humanité. C’est alors que le Bouddha vivant avait commencé la guerre, le baron Ungern étant son généralissime. On appelait Ungern le Dieu de la guerre, et j’ai vu, dans son armée, des représentants de toutes les tribus asiatiques. Ils luttèrent d’abord contre la Chine, pour l’autonomie de la Mongolie. Ils furent victorieux. Une fois libre, la Mongolie proposa à la Chine de prendre la tête de ce mouvement panasiatique contre les bolcheviki d’abord, et la race blanche ensuite. Mais la Chine est dans un tel état d’anarchie qu’elle ne put accepter. Elle est toute partagée en petits royaumes qui sont aux mains de généraux aventuriers. Devant son refus, la Mongolie prit le commandement de ses alliés et entreprit une lutte que le succès ne couronna guère. Ungern fut trahi par ses 4/28/15, 11:33 PM Table ronde (1924) - René Guénon, Ferdinand Ossendowski et Jacques Maritain. Page 4 of 11 about:blank officiers, livré aux forces bolchéviques en Transbaïkalie et tué. Depuis lors, ce sont les Soviets qui ont revendiqué les droits des tsars sur l’Asie. Depuis cinq ans, il y a eu à Petrograd onze congrès panasiatiques, et l’université de propagande de Moscou, où il y a deux cent mille étudiants, compte quarante mille étudiants asiatiques (les plus nombreux sont les Indiens des Indes britanniques ; les Chinois viennent ensuite, puis les Perses et les Turcs). La propagande bolchéviste est d’ailleurs fort habile. Le communisme n’est pas pour elle une doctrine d’exportation. L’Orient y répugne absolument. Elle présente la Russie comme l’avant-garde du monde jaune prêt à fondre sur la race blanche. Mais le Bouddha vivant et sa femme, sa femme surtout, faisaient obstacle à cette propagande. Les bolcheviki n’hésitèrent pas ; ils empoisonnèrent la femme du Bouddha il y a environ deux ans. Ne pouvant plus ouvertement lutter contre les bolcheviki, le Bouddha vivant se borne à maintenir le contact de tous les peuples pour former, l’heure venue, un grand royaume asiatique central. Le parti monarchique de Chine est en relations étroites avec le Bouddha vivant et, s’il triomphait, il forcerait la Chine à se joindre à ce mouvement antibolchevik et antirace blanche. - C’est dire que vous ne croyez pas les bolchevistes capables d’organiser un mouvement panasiatique ? Ossendowski. - Je ne le crois pas. Ils ne s’appuient pas sur des éléments aussi purement asiates. J. Maritain. - Y-a-t-il des rapports entre le Bouddha vivant d’Ourga et Gandhi. Ossendowski. - Oui ; ils sont en relation, mais si une volonté de lutte contre la race blanche les unit, leur système est différent. Le Bouddha vivant est guerrier, Gandhi est pacifiste. Le mouvement suscité par lui n’est pas encore guerrier. - Connaissez-vous Rabindranath Tagore ? Ne critique-t-il pas cette lutte à outrance contre la civilisation occidentale ? Dans trois messages fort significatifs que Cecile Georges-Bazile vient de traduire en français sous le titre Nationalisme, on relève des déclarations formelles : « l’Occident est nécessaire à l’Orient. Nous sommes complémentaires l’un de l’autre par nos différents aspects de vérité, c’est pourquoi, s’il est vrai que l’esprit de l’Occident s’est abattu sur nos champs comme un orage, il sème néanmoins çà et là des graines vivantes qui sont immortelles. Et 4/28/15, 11:33 PM Table ronde (1924) - René Guénon, Ferdinand Ossendowski et Jacques Maritain. Page 5 of 11 about:blank quand dans l’Inde nous deviendrons capables d’assimiler ce qui est permanent dans la civilisation occidentale, nous serons en position pour amener une réconciliation de ces deux grands mondes. » Tagore est une intelligence nourrie de toutes les cultures du monde et ailleurs il déclare : « Je crois en la vraie union de l’Orient et de l’Occident. Toutes les gloires de l’humanité sont miennes. Aucun peuple ne peut faire son salut en se détachant des autres ». S’il a pour Gandhi une affectueuse estime, il redoute les gandhistes… Ossendowski. - J’ai vu Tagore à Londres. C’est un Asiate. Dans ses yeux noirs, vous ne pouvez rien voir. Quand je regarde leurs yeux, j’ai toujours l’impression d’un écran qu’il faudrait soulever. René Guénon. - Tagore est un Asiate bien occidentalisé. Ossendowski. - Ne vous y fiez pas trop. J. Maritain. - Avez-vous rencontré en Mongolie des traces d’évangélisation catholique ? Ossendowski. - Non. Quelques franciscains, mais sans aucune importance. René Guénon. - Pourtant les missionnaires catholiques seuls pourraient trouver audience auprès de l’âme bouddhiste. Malheureusement, ils commettent tous, à mon avis, la grosse erreur de s’adresser uniquement aux parias, aux castes non cultivées, et de ce fait méprisées. Ils limitent ainsi uploads/Philosophie/ table-ronde-1924-guenon-ossendowski-maritain.pdf
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- Publié le Aoû 29, 2021
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