Ill LA TRANSCRIPTION LOGISTIQUE DU RAISONNEMENT (Suite et fin *) (N° 20. Les rè

Ill LA TRANSCRIPTION LOGISTIQUE DU RAISONNEMENT (Suite et fin *) (N° 20. Les règles logistiques ramenées à leur fondement logique et appliquées aux objets de tout ordre). 20. — Aux deux interprétations des rapports d'idées, interprétation comprehensive et interprétation extensive, correspondent deux corps distincts de règles de déduction et de formules logiques. A. — Sous le premier aspect, qui est primordial, les lois logiques porteront sur des fonctions propositionnelles et des propositions prises en compréhension. Toute déduc tion entre propositions ou fonctions propositionnelles se fait par voie d'implication ; les lois fondamentales de la logis tique seront donc les lois des diverses formes d'implication. A la logique des propositions (nos 8-9) répondront approximativement les lois do Y implication matérielle (la relation qu'au n° 17 nous avons appelée tout court « impli cation » et d'après laquelle il n'y a alternative qu'entre la fausseté d'une proposition antécédente p ou la vérité d'une *) Voir Revue Nio Scolastique de Philosophie, août et novembre 1924, pp. 299- 324; 417-451. 62 R. Feys proposition conséquente q). C'est en vertu d'une implication matérielle entre deux propositions qu'on peut déduire la seconde de la première ; l'implication matérielle intervient donc dans tout raisonnement mis en forme logistique l). Par contre les rapports de concepts se traduisent par l'affirmation d'une implication formelle (n° 17) (ceci pour la proposition universelle) ou par la négation d'une telle implication (ceci pour la proposition particulière 2). L'im plication formelle (x). yx o tyx de deux fonctions yœ et §x- énonce que pour toute valeur de x, yx implique matérielle ment §x. Dans toute implication formelle on affirme qu'une implication matérielle se vérifie universellement : l'implica tion formelle énonce donc plus qu'une simple implication matérielle ; elle ne peut être ramenée à une telle implica tion et jouit de propriété? différentes. Tout raisonnement peut être traduit « en compréhension » et justifié par les règles des deux formes de l'implication ; mais les démonstrations de cette espèce sont extrêmement longues et compliquées 3). 1) Les principales lois de l'implication matérielle, dont les logisticiens ont fait une analyse très fouillée, se trouvent récapitulées dans Principia mathematica, I, p xiv ; Burali-Forti, Logica matematica, 2e éd., pp 249-251. Elles se déduisent (Russell) d'une série de propositions primitives et de la définition de l'implication donnée au n° 17, ou bien (Burali-Forti) de propos itions qui conduisent à la même conception de l'implication. L'implication matérielle se vérifie dès que de deux propositions p et q la pre mière est fausse ou la seconde vraie ; son acception est beaucoup plus large que celle de la relation P < Q que nous avons définie au n° 9 et qui traduit le sens ordinaire de la proposition conditionnelle. D'où toute une série de propositions paradoxales qui ont soulevé de vives critiques. L'implication stricte de M. Lewis {The calculus of strict implication. Mind, avril 1914, pp. 240 248) correspond exactement au sens usuel delà proposition conditionnelle. Il semble parfaitement possible de fonder la logistique sur l'implication stricte; il y a d'ailleurs toujours moyen de traduire les implications matérielles en termes d'implication stricte. 2) Puisqu'une proposition universelle se traduit par une implication formelle, la proposition particulière, qui est la contradictoire d'une proposition universelle, peut se rendre par la négation d'une implication formelle. 3) Les démonstrations7 des logisticiens sont ordinairement abrégées. On trou vera des exemples de démonstrations in extenso dans Peano, Formulaire, 4e éd., p. 15, et Revue de Mathématiques, tome VU, p. 18; Couturat, Revue de Meta- La transcription logistique du raisonnement 63 B. — En ce qui concerne la logique des classes (qu'ils appliquent exclusivement aux rapports de concepts) les logisticiens ont effectué un double travail ; ils ont fondé la logique des classes sur la logique des fonctions proposition- nelles ; ils ont étendu la logique des classes à des domaines nouveaux. 1° Définissant chaque classe par une idée, chaque rap port de classes par un rapport d'idées, ils déduiront les lois des classes en partant des lois des rapports d'idées, qui se ramènent pour eux aux lois de l'implication. Nous n'entrerons pas dans le détail de ces démonstrations 1). 2° Les logisticiens ne se sont pas contentés de repenser « en compréhension » et de redémontrer la logique des classes dans son application aux notions absolues 2). Leur grande innovation a été de créer un calcul parallèle, beaucoup plus complexe et plus vaste, pour les classes de couples, traduisant des relations binaires 3). physique et de Morale, 1906, p 238; Burali-Forti, Logica matematica, p. 234 sq ; Pnnapia Mathematica, I, pp 104 sq 11 faudrait des pages entières de symboles pour rendre la démonstration Russellienne du modeste syllogisme en Barbara. 1) Principia Mathematica, I. pp. 143-175 et 196-216. 2) L'exposé de Padoa, La logique deductive. Paris, Gauthier Villars, 1912, donne une très bonne idée de cette partie de la logique exposée d'après les prin cipes de Peano. La comparaison sera instructive avec Y Algèbre de la Logique de Couturat, rédigée d'après les principes de Schroder. 3) Les principes du calcul des relations, posés par l'américain Peirce, ont été mis en œuvre par Schroder dans le 3e volume de ses Vorlesungen, paru en 1895, œuvre puissante et définitive à beaucoup de points de vue, mais restée malheu reusement inachevée. Schroder traite les relations « en extension », comme classes de couples ; il en déduit les lois logiques en partant de « coefficients » (Vorlesungen, III, pp. 22 sq.) qui constituent de véritables fonctions proposi- tionnelles, à cette différence près qu'au lieu d'être calculées «en compréhension» elles le sont « en extension » selon les principes indiqués aux nos 8 et 9. Les logisticiens italiens abordent les relations par un autre biais, comme fonctions descriptives. Tel est entre autres le point de vue de Peano, For mulaire, 3e éd., pp. 32 38; 5e éd., pp 73-82, développé et quelque peu modifié par Buraii Forti, Logica matematica, pp 1 10 228. Russell a synthétisé les deux conceptions dans ses articles de la Revue de Mathématiques (voir surtout t. VII, pp. 115-121) puis dans ses Principles of Mathematics, et dans les Principia Mathematica, où la logique des relations est étroitement rattachée à celle des fonctions propositionnelles. 64 R. Feys Sur le détail du calcul des relations, nous ne pouvons que renvoyer aux grands ouvrages de Schroder et de Russell. Nous nous bornerons à faire ressortir le caractère propre des opérations relatives, ce caractère expliquant à la fois la complexité et la fécondité de la logique des relations. Deux lois dominaient, disions-nous, l'emploi de l'addition et de la multiplication logiques. C'étaient (n° 10. A) la loi de tautologie et la loi à! absorption. En vertu de la loi de tautologie, l'addition ou la multiplication logique d'une classe a avec elle-même nous rend identiquement la classe a. Les expressions « a ou a » «a et a» constituent de pures tautologies, nous ramènent toujours à a. Il est donc imposs ible de construire des notions nouvelles par multiplication ou addition logique de a avec lui-même. Or la loi de tautologie n existe pas pour la multiplication relative. Le produit relatif R | R d'une relation R par elle- même n'est ordinairement pas identique à R ; la multipli cation relative répétée de R par R engendre une série de relations R \ R, R | R | /?..., qui sont ordinairement de plus en plus complexes et que, par analogie avec les puis sances d'un nombre, on peut appeler les puissances R2, R3 ... Rn de la relation R. Pour prendre un exemple famil ier, la relation R, « être père de quelqu'un » donne lieu aux relations./?2 (être grand-père paternel àe)R3 (être arrière grand-père de) et ainsi de suite. Si S est la relation de deux nombres entiers (0, 1), (1, 2), (2, 3)... qui se suivent immédiatement, £2 est la relation de deux nombres entiers (0, 2), (1, 3)... qui ont entre eux un terme intermédiaire, S3 est la relation de deux nombres entiers (0, 3), (1, 4)... qui ont entre eux deux termes intermédiaires, et ainsi indéfiniment 1). 1) Des considérations analogues, fondées sur la non-applicabilité de la loi d'absorption, conduisent Schroder à construire des relations en combinant par multiplication ou addition relative une relation donnée R avec les relations tout à fait générales qui correspondent pour les classes de couples aux classes w et o La transcription logistique du raisonnement 65 Nous pouvons raisonner a priori sur toute la suite des puissances de R dès que la signification de R se maintient invariable (en tout ou en partie), ou se reproduit périod iquement dans la suite de ces puissances. Ceci prouvé — et c'est ce qui fait l'intérêt épistémologique de ces calculs — ce qui sera établi pour R le sera pour toutes les puissances de R ; et par exemple ce qui vaudra pour le nombre qui suit immédiatement tel autre vaudra indéfiniment pour tous ceux qui le suivent, quel que soit l'intervalle qu'ils ont avec lui. Les relations se partagent en diverses classes quant à uploads/Philosophie/feys-1925-la-transcription-logistique-du-raisonnement3.pdf

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