A Isabelle Safa et Joseph Vebret pour toute l’aide qu’ils m’ont apportée, ainsi

A Isabelle Safa et Joseph Vebret pour toute l’aide qu’ils m’ont apportée, ainsi qu’à Marie-José Sfeir-Tyan pour le temps consacré à la relecture du manuscrit. Table des matières Couverture Page de titre Page de Copyright Dédicace Table des matières Avant-propos PREMIÈRE PARTIE Aux origines du chiisme 1. La mort du Prophète et les premiers califes 2. Ali, le quatrième calife : des guerres fratricides 3. La mort d’Ali et sa succession 4. Le martyre de Hussein DEUXIÈME PARTIE Divergences doctrinales et particularités du chiisme 5. Le chiisme : courant principal et courants minoritaires 6. Chiisme vs sunnisme 7. Le tazieh 8. Le sigheh 9. Le chiisme des origines à nos jours TROISIÈME PARTIE Géopolitique du chiisme actuel 10. La Révolution islamique d’Iran 11. Etat des lieux 12. La montée du chiisme 13. Les quatre pôles du pouvoir iranien 14. Faut-il avoir peur de l’Iran ? Conclusion Annexe 1 : Repères chronologiques Annexe 2 : L’arbre de l’islam Annexe 3 : Cartes Bibliographie indicative Avant-propos Chaque fois que l’homme s’est senti supérieur à un autre, cela a abouti à une tragédie ; chaque fois qu’un clan, une tribu a convoité les biens et les richesses d’un autre clan ou d’une autre tribu, cela a fini par un massacre. Chaque fois que la force s’est exprimée, elle l’a fait au détriment de l’individu, des peuples, et du droit ; mais chaque fois que le droit a voulu s’imposer, il s’est montré impuissant face à la force. Chaque fois que l’homme, dans l’histoire de l’humanité, s’est pris pour Dieu ou s’en est proclamé le porte-parole, ce fut la catastrophe. Rien n’a changé au cours des siècles. La révolte arabe qui a déferlé sur le Moyen-Orient au début de l’année 20111 s’inscrit dans le cadre de cette confrontation généralisée. Cela a commencé dans la région dès le lendemain de la Seconde Guerre mondiale. Les pays nouvellement indépendants ou en voie de l’être avaient conservé des liens forts avec les Etats colonisateurs, comme la France et la Grande-Bretagne, cette dernière s’appliquant à mettre des bâtons dans les roues de la politique française au Proche- Orient. Après avoir découpé ce Levant pour le plus grand bénéfice des intérêts britanniques, faisant fi parfois des frontières naturelles comme en Irak, la perfide Albion va essayer de susciter des troubles dans les pays tombés dans l’escarcelle française : Liban et Syrie. Mais leurs politiques conjuguées ne laisseront sur place que guerre et destruction : Chypre, Palestine, Irak, Kurdistan… Les deux grandes puissances de l’époque rêvent sans doute alors d’installer ce qu’elles appelaient pompeusement une démocratie dans ces pays où des peuples restés près de quatre cents ans sous le joug ottoman, sujets de la Sublime Porte, se réfugiaient dans une citoyenneté communautaire, ne se sentant aucunement membres d’un vaste empire. La communauté pouvait être religieuse mais également tribale, clanique ou familiale. Se pose alors la question de l’exportation d’une citoyenneté sur le modèle d’une démocratie occidentale : elle semble au début réussir, notamment au Liban, en Syrie, en Egypte, sans doute en raison de la présence de nombreuses congrégations religieuses qui inculquent aux gens de ces pays connaissances et savoirs dès le plus jeune âge, à l’école, au collège, au lycée et à l’université. Mais cet enseignement privé, réservé à une élite, a eu du mal à s’ancrer dans les couches modestes des populations, délaissées et souvent marginalisées. Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, la création de l’Etat d’Israël provoque un véritable tremblement de terre dans la région. Tous les régimes sont ébranlés, que ce soit en Egypte, en Syrie, ou bien entendu en Irak. Il ne s’agit bientôt plus d’exporter la démocratie, mais de défendre les intérêts occidentaux dans l’espace arabe ; intérêts fortement attaqués en raison du soutien occidental au nouvel Etat hébreu. Nasser qui « règne » en Egypte promeut le concept de nationalisme arabe, appelle à l’unité des peuples, à l’unification de la culture… La nationalisation du canal de Suez déclenche la guerre du même nom, menée par deux grandes puissances à bout de souffle. La France et la Grande-Bretagne entraînent avec elles l’armée de ce tout jeune Etat nouvellement créé : Israël, qui se verra désormais gratifié du label d’« excroissance du monde occidental » dans la région. A la sortie de la guerre de Suez, qu’on appelle encore dans nos manuels scolaires « expédition de Suez », les deux grandes puissances perdent ce titre au profit de deux nouvelles : les Etats-Unis et l’Union soviétique. Le monde est coupé en deux, la Guerre Froide s’installe. Après avoir tenté de mettre sur pied le mouvement des non-alignés avec le Yougoslave Tito et l’Indien Nehru, Nasser se laisse entraîner dans le giron des Soviétiques par ressentiment contre ces Américains qui lui avaient opposé une fin de non-recevoir lorsqu’il avait demandé leur aide afin de construire le barrage d’Assouan, censé augmenter l’arabilité des terres en Egypte. « Tu n’as même pas une goutte de pétrole à nous proposer », lui diront les frères Dulles, Allen, le directeur de la CIA, et John Foster, le chef du Département d’Etat dans l’administration Eisenhower. Nasser voulait initialement construire un Etat moderne sur le modèle occidental, une République d’inspiration française ; il inaugure son mandat en enfermant tous les Frères musulmans. Mais ce n’est pas lui que choisira l’Occident ; il lui préférera l’Arabie Séoudite, où le Coran fait figure de Constitution et la loi islamique de droit civil et pénal, où une lecture littéraliste du Coran s’impose, mais avec laquelle les Etats- Unis, puissance prépondérante du monde dit « libre », avaient contracté une alliance stratégique. Celle-ci mènera au problème de la déferlante islamiste et salafiste à laquelle nous assistons aujourd’hui. Mais ces courants ne sont animés que par les valeurs défendues par l’école juridique et théologique hanbalite2, la quatrième école, retenue par le monde sunnite, et dont la doctrine pourrait se résumer à : « après le Prophète, rien de nouveau ». Cependant, les Etats-Unis avaient tout lieu d’être satisfaits : ils contrôlaient désormais le premier producteur mondial de pétrole, et le deuxième avec l’Iran du Chah. Ce dernier, renversé en 1979 par les mollahs perses, trouvera refuge après moult difficultés auprès de capitales occidentales, et en Egypte, celle de Sadate, où il décédera. L’irruption de l’Iran chiite et perse sur la scène arabe est venue brouiller les cartes. Désormais, disposant d’une diplomatie contestataire bâtie avec la Syrie, la nouvelle Perse a pour la première fois réussi, en instrumentalisant le chiisme, seconde branche de l’islam en termes démographiques (9 % des musulmans dans le monde), à s’implanter dans l’espace arabe ; le chiisme avait enfin son « Vatican ». Le « Vatican » sunnite, lui, jusque-là dominé par l’Arabie Séoudite depuis les accords égypto-israéliens de Camp David en 1978, se voit aujourd’hui contesté par le Qatar, cette « grenouille qui veut se faire aussi grosse que le bœuf » pour exister ; par l’Egypte, également, dont le président élu appartenant aux Frères musulmans annonce à qui veut l’entendre le retour de son pays sur la scène arabe ; et enfin par la Turquie, où les fantasmes d’une renaissance de l’Empire ottoman habitent les rêves les plus fous des dirigeants d’Ankara. Aujourd’hui, et ce depuis 1992, l’affrontement fratricide entre les deux branches de l’islam a ressurgi. Et c’est à une véritable guerre mondiale que nous assistons, qui oppose le sunnisme au chiisme. Ce ressentiment – le mot est faible – remonte à l’an 632, date du décès du prophète Muhammad3. La bataille de la succession est ouverte. Et malgré Muhammad et le Coran, socle commun au sunnisme et au chiisme, il s’agit en réalité de deux religions profondément différentes qui ont engagé les croyants sur des chemins totalement séparés. Les passions se sont ravivées en 1992, lorsque le commandant Massoud, figure mythique de la résistance afghane à l’Armée rouge4, magnifié par les intellectuels occidentaux qui voyaient en lui un parangon de la démocratie, a attaqué la tribu à 90 % chiite des Hazaras5 au centre du pays, massacrant six mille personnes et violant trois s en une semaine, ce qui n’a pas manqué d’attiser les rancœurs et cette haine tenace des chiites à l’égard des sunnites6. Il faut rappeler, s’il en est besoin, que Massoud défendait l’ethnie tadjike7 alors qu’en face, tous les autres groupes était issus de l’ethnie pachtoune8, l’ethnie la plus importante non seulement en Afghanistan, mais également au Pakistan. Quelques mois plus tôt, une réunion tournait au tragique : les Américains annonçaient en effet leur retrait d’Afghanistan. Un homme se sent trahi : le sunnite Oussama Ben Laden, que les émissaires de l’Oncle Sam ont soutenu depuis dix ans, qu’ils ont armé et aidé à s’organiser, se transforme désormais en un ennemi redoutable. Il considère, plus encore que les autres clans ou fractions afghans, que les Américains sont des traîtres qui l’abandonnent. Il n’aura pas tort : pendant quatre ans, jusqu’à la victoire finale des Talibans, le pays est en proie à une guerre civile sans précédent. Ben Laden, qui avait fait de l’Afghanistan une uploads/Politique/ antoine-sfeir-lislam-contre-lislam-wawacity-best.pdf

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