QUELQUES INDICATIONS SUR LE ROLE DES ASSOCIATIONS ET LOGES MAÇONNIQUES D’INSPIR

QUELQUES INDICATIONS SUR LE ROLE DES ASSOCIATIONS ET LOGES MAÇONNIQUES D’INSPIRATION FRANÇAISE DANS LA PROPAGATION DES IDEES DE LA REVOLUTION FRANÇAISE EN IRAN LE CAS DE LA LOGE “LE REVEIL DE L’IRAN” L’appartenance à des loges maçonniques a été, surtout depuis la seconde guerre mondiale, très mal jugée en Iran. En effet, non seulement des gens du peuple, mais également l’élite intellectuelle du pays, considèrent encore l’appartenance maçonnique comme une preuve de servitude à l’égard des puissances étrangères. L’exemple d’Esmaïl Râ’in, l’auteur d’une importante recherche qui constitue la principale référence de notre article, illustre bien l’attitude que nous venons de souligner. D’après lui, la franc- maçonnerie iranienne constitue le “cancer “ de la société et du pays. Il reproche aux franc-maçons iraniens d’avoir remis en question l’indépendance du pays en s’alliant aux étrangers et d’avoir eu des contacts réguliers avec “le sionisme et les juifs du monde” (voir la présentation de la deuxième édition de son livre). Durant le règne du Shâh et surtout à partir des années 1960, la dénonciation des francs-maçons au sein de l’appareil étatique constituait le cheval de bataille d’une grande partie de l’opposition au régime impérial. L’opposition laïque et religieuse de toutes tendances cherchait à démontrer la participation des francs maçons à la corruption et à la répression étatique. Des intellectuels célèbres comme Alè-Ahmad, Ali Shariati, Hadj- seyed-Djavadi dénonçaient dans leurs écrits le pouvoir secret des francs maçons dans le régime impérial. Cette attitude pourrait s’expliquer par le fait que la plupart des loges maçonniques existant en Iran, à l’époque du Shâh , étaient d’inspiration anglo-américaine dont les principaux buts consistaient à contrôler le pouvoir politique et la richesse du pays. Une autre explication de cette attitude de rejet relève du fait qu’en raison de la censure politique, la grande majorité des intellectuels iraniens était très peu au courant du fait maçonnique et de son développement. Le résultat de cette méconnaissance historique était paradoxal. D’une part, les élites du pays célébraient la mémoire des personnages comme Déhkhoda, Foroughi, Hakim-Ol-Molk, Al-Afghani, Mirza Jahanguir etc.de l’autre, ils ignoraient que ces hommes avaient appartenu à la franc-maçonnerie et que les idées de la Révolution française - Chères aux intellectuels du pays - s’étaient introduites en Iran grâce, en partie, aux loges maçonniques. Les premiers pas Avec l'arrivée au pouvoir en 1796 de la dynastie Qâjâr, la lutte des élites iraniennes s'accentua en vue de réformer les fondements du système socio-politique du pays. l'introduction de l'imprimerie à partir de 1815 facilita la propagation des idées libérales en Iran. Les premiers journaux firent leur apparition à Tabrîz aux environs de 1837, et contribuèrent au renforcement de la tendance réformatrice à l'intérieur même de l'appareil d'Etat despotique de l'époque. En devenant chancelier d'Etat en 1848, le chancelier Amir Kabir procéda à la réforme du système d'enseignement et renforça également le pouvoir des juridictions civiles au détriment des tribunaux religieux. À partir de la seconde moitié du XIXè siècle et jusqu’au déclenchement de la première guerre mondiale, d’importants membres de l’élite iranienne furent influencés par les associations d’inspiration maçonnique et initiés aux idées propagées par les loges européennes, spécialement le Grand Orient de France. Durant la même période, le débat sur l'avenir de l'Iran, sur son régime politique et ses rapports avec l'Occident se développa au sein des élites. Des intellectuels, pour la plupart liés à l'Etat, se mobilisèrent pour la défense du "progrès", du "modernisme" et de l'"islam progressiste". Ils étaient presque tous membres de groupements d’inspiration maçonnique: Mîrzâ Malkam-Khân (1833-1908), d'origine arménienne, se convertit à l'islam et lutta à partir de l’année 1851. pour la création d'un "Conseil législatif" Conseiller du roi Nasser-ed-Din (1846-1896) et son représentant à Paris et puis à Londres, Mîrzâ Malkam dut s'exiler à Vienne en 1872. Akhûndzâdè (1812-1878) fut écrivain et scénariste. Il traduisit en persan J.S. Mill, Voltaire et Montesquieu. Attaché aux idées socialistes, il dénonça l'"obscurantisme" du clergé et se prononça en faveur d'un régime parlementaire. Il prit position également en faveur d'un "protestantisme islamique" compatible avec la démocratie. Mîrzâ Yûssef Khân (mort en 1895) fut chargé d'affaires à St. Petersbourg et à Paris de 1862 à 1871 et ministre de la justice du Roi en 1871 et en 1873. Il traduisit en persan le code napoléonien et milita pour la réalisation en Iran d'un système politique s'inspirant des principes de la Révolution française. Il fut emprisonné à plusieurs reprises. Cependant, une institution particulière contribua à la propagation des idées progressistes et à la formation des élites intellectuelles. Il s'agit de la Franc-maçonnerie (en persan farâmûsh-khânè, qui signifie littéralement "maison d'oubli"). En effet, entre 1900 et 1920, plusieurs loges maçonniques contribuèrent à la diffusion des idées de progrès (à la française) et de souveraineté nationale et populaire. Dès 1857, la loge “la Clémente Amitié” de Paris procède à l’initiation de plusieurs diplomates iraniens de haut rang. La première loge maçonnique intitulée la "ligue de l'humanité" (Majmà-e-âdamyat) fut fondée par Adamyat en 1886 et dirigée par Malkam Khân, afin de propager l'idée de la démocratie en Iran. Des personnages aussi célèbres que Seyed Jamal-ed-din Assad Abâdi (dit Afghâni) et le Dr. Hakim-ol-Môlk en firent partie. L’influence des idées propagées par des associations d’inspiration maçonnique d’obédience française se retrouve également au niveau de la fondation des partis politiques modernes comme le “Tûdè”. En effet, le fondateur de ce parti fut le Prince Soleiman Mirzâ Eskandari, membre de la loge “Adamyat”, qui a également joué un rôle positif dans la révolution constitutionnelle. La fondation de “Bidâri” Toutefois, la loge maçonnique la plus importante du point de vue de l’influence exercée sur les élites iraniennes par les idées de la Révolution française fut sans doute “Bidâriè Iran” (“Le réveil de l’Iran”). Cette nouvelle loge qualifiée à l'époque de farangui- ma'âb (européanisée) et de "francophile" réunissait plus de 110 personnalités iraniennes. Bidâri fut constitué le 6 novembre 1906, dès que sept maîtres iraniens et français du “Grand orient de France” se déclarèrent prêts pour cette tâche. Elle fut reconnue en novembre1907 par le "Grand Orient de France". Dès la fondation de la loge, la charge de vénérable échoua à Jean-Baptiste Lemaire (1842-1907), Général et chef des musiques de l’armée iranienne (Il résidait en Iran depuis 1868 pour enseigner la musique à l’école Dar-ol-fonun). Le secretaire de la loge fut Paul-Henri Morel (1854-1910), professeur à l’Ecole des Sciences Politiques de Téhéran et éditeur du journal français de Téhéran, “l’Echo de Perse”, fondé en 1885. Parmi les personnalités célèbres membres de la loge “Bidâri”, nous pouvons citer le Dr. Hakim ol-Molk, médecin connu, devenu ministre après la révolution, le mollah Hadji Sayâ, disciple d’Al- Afghâni, le mollah Taqizâdè, futur ministre et député, l’écrivain et encyclopédiste Ali Akbar Dehkhôdâ, le célèbre homme politique et ami d’Atatürk, ministre et premier ministre Mohamad Ali Forûghi, le poète et journaliste Adib ol-Molk Farâhâni, le mollah prédicateur de la révolution “mashrûtè” Seyed Djamâlè Vâèz, le peintre Kamal ol-Molk, le libérateur de Téhéran Samssâm ol- saltanè Bakhtiâri, l’homme politique Ahmad Ghavam, le future membre de la délégtion iranienne auprès de la SDN Paul Kitabtchi Khân,etc. Sur deux photos des membres de la loge, datées de mars 1914, l’on retrouve ensemble les personnes suivantes: Hâdje Seyed Nasrollah Taghavi, Cheikh mortéza Najmabadi, Mohammad-Ali Foroughi Zoka-ol-molk, Abbas-Gholi Ardalân, Homayoun Sayah, Abolhassan Foroughi, Hakim-ol-molk, Arbab Keykhosrow Chahrokh, Yeprem Khân etc. La présence sur ces photos de Hadj Sayah Mahalâti, disciple de Djamal-ed-din Afghâni, est particulièrement à signaler. La qualité du recrutement doit être analysée en rapport avec la révolution constitutionnelle et le programme de réforme revendiqué par les élites iraniennes de l’époque. D’après X. Yacono (son ouvrage“un siècle de la franc- maçonnerie algérienne” est cité par Sabatiennes) la loge comptait à la fin de son existence quelque 108 Iraniens, 7 Français, 2 Belges 2 Arméniens de Turquie et 1 Italien. Ce qui démontre l’implantation des idées véhiculées par la loge parmi l’élite du pays. Par ailleurs, 24 fonctionnaires d’Etat et 22 hommes politiques célèbres du pays appartenaient à "Bidâri". Les Franc- maçons dans la “révolution constitutionnelle Les membres de “Bidâri” jouèrent un rôle décisif dans le déclenchement et la direction de la révolution “mashrûtè” (“constitutionnelle”) de 1906-1911, en popularisant les idéaux de la Révolution française, transmis par l’intermédiaire du “Grand Orient de France”. La lutte déclenchée au début du XXè siècle contre le pouvoir despotique des rois se développa autour de deux mots d'ordre : d'une part l'obtention d'une "maison de justice", ce qui signifiait une remise en question de l'arbitraire, et de l'autre, la reconnaissance de la "liberté de commerce" pour le Bâzâr. Cette exigence correspondait à la remise en cause de la dépendance économique de l'Iran et à une volonté de protéger le commerce et l'artisanat nationaux, dans la mesure où l'Etat despotique monopolisait le commerce extérieur dans l'intérêt des puissances étrangères ( La Russie et l'Angleterre). Le mouvement en faveur des libertés démocratiques s'amplifia à partir de 1890 (la publication du journal iranien "Qânûn" (Loi) à Londres par Malkam- Khân) et aboutit le 15 août 1906 à la promulgation d'une charte constitutionnelle ainsi qu'à des élections générales uploads/Politique/ loges-maconiques-moyen-orient-iran 1 .pdf

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