Ecole nationale d’administration Promotion Copernic Séminaire Energie et sociét
Ecole nationale d’administration Promotion Copernic Séminaire Energie et société Groupe 9 La maîtrise de l’énergie Janvier 2002 1 TABLE DES MATIERES 1. UNE POLITIQUE NÉGLIGÉE AUX RÉSULTATS DÉCEVANTS 1.1. Soumise à des contraintes fortes, la maîtrise de l’énergie n’a pas été prioritaire dans les grands choix publics 1.1.1. Une politique intrinsèquement difficile..............................................................4 1.1.2. Des choix de société défavorables......................................................................6 1.2. Les progrès enregistrés masquent de fortes disparités sectorielles 1.2.1. Des résultats positifs dans l’industrie ...............................................................13 1.2.2. Des potentiels inexploités dans les transports et le secteur résidentiel-tertiaire14 1.2.3. Un intérêt limité pour les énergies renouvelables.............................................17 2. UNE LÉGITIMITÉ RENOUVELÉE 2.1. La libéralisation des marchés transforme le cadre de la maîtrise de l’énergie 2.1.1. Un rééquilibrage en faveur de la demande .......................................................20 2.1.2. Des conséquences incertaines sur la maîtrise de l’énergie ...............................21 2.1.3. De nouvelles missions pour les régulateurs......................................................22 2.2. La maîtrise de l’énergie trouve une nouvelle légitimité dans le long terme 2.2.1. Des interrogations toujours actuelles sur la sécurité des approvisionnements.23 2.2.2. Les préoccupations environnementales liées au protocole de Kyoto...............24 2.2.3. Un lien plus étroit avec le développement durable...........................................26 2.3. La maîtrise de l’énergie fait l’objet d’une relance qui reste insuffisante 2.3.1. Plusieurs programmes d’action, en France comme à l’étranger.......................29 2.3.2. Un scepticisme persistant .................................................................................32 2 3. VERS UNE POLITIQUE RÉNOVÉE DANS SES ACTEURS ET SON APPROCHE 3.1. Mobiliser l’ensemble des niveaux territoriaux 3.1.1. Impliquer plus fortement l’échelon local pour agir sur les gisements diffus d’économies d’énergie................................................................................................35 3.1.2. Affirmer le rôle de coordination et d’impulsion de l’échelon européen ..........40 3.2. Intégrer la maîtrise de l’énergie dans les stratégies et les comportements 3.2.1. Impliquer l’ensemble des ministères et recentrer l’action de l’ADEME .........45 3.2.2. Introduire la maîtrise de l’énergie dans les choix des entreprises à partir d’accords négociés......................................................................................................49 3.2.3. Agir sur les comportements individuels ...........................................................52 3.3. Recentrer les politiques sectorielles 3.3.1. Faciliter le financement de la maîtrise de l’énergie dans les PMI....................56 3.3.2. Réduire l’usage de la route ...............................................................................57 3.3.3. Agir sur les logements existants et relancer la maîtrise de la demande d’électricité .................................................................................................................58 3.3.4. Faciliter l’accès au marché des énergies renouvelables ...................................59 3 Associée historiquement à un contexte de crise, à partir du choc pétrolier de 1973, la maîtrise de l’énergie a d’abord été perçue dans la société comme une contrainte sur le mode de vie et, en forçant le trait, comme une nouvelle forme de rationnement. La maîtrise de l’énergie a donc dès l’origine une signification sociale qui lui est a priori peu favorable. Au-delà de cette connotation quelque peu datée, le mot « maîtrise » indique une capacité d’infléchir, d’orienter, avec des degrés plus ou moins forts. Maîtriser l’énergie signifierait contrôler sa production, choisir les sources d’approvisionnement et le type d’énergie, comme contrôler son usage, dans les différents secteurs consommateurs. Dans son acception courante, « maîtrise de l’énergie » désigne une action sur la consommation d’énergie et le développement des énergies renouvelables ; c’est la définition retenue dans ce rapport. Même ainsi circonscrit, le concept dépasse la notion plus ancienne d’économies d’énergie. Il ne s’agit pas de réaliser toutes les économies techniquement possibles sans se soucier de leur coût et de leur impact social : la maîtrise de l’énergie recherche un optimum, une gestion raisonnée de l’énergie disponible pour satisfaire les besoins exprimés par la société. Maîtriser l’énergie s’est justifié aisément dans une période où la quantité d’énergie disponible était réduite en raison de son prix élevé, suite aux chocs pétroliers. Quelle est la légitimité de cette ambition dans le contexte énergétique des années 2000 ? La maîtrise de l’énergie se réduit-elle à une notion des années 1980, à une préoccupation du passé ? Il faut s’interroger sur l’actualité de ce concept, sur ses fondements présents. Comme ce rapport cherchera à le montrer, la maîtrise de l’énergie demeure une nécessité. Celle-ci doit cependant être mieux comprise aujourd’hui. Son succès dépend de son appropriation par l’ensemble de la société. La maîtrise de l’énergie, difficile par sa nature même, est restée longtemps secondaire dans une action publique qui a privilégié la politique d’offre, d’où un bilan aujourd’hui assez décevant (I). Elle bénéficie cependant depuis peu d’un contexte plus favorable, dans lequel elle trouve une nouvelle légitimité et qui se traduit par une relance récente mais insuffisante de cette politique (II). La maîtrise de l’énergie doit désormais faire l’objet d’une approche renouvelée, avec de nouveaux acteurs territoriaux, un souci d’une meilleure intégration dans les stratégies des administrations, des entreprises et les comportements des particuliers, et un recentrage des politiques actuelles (III). 4 1. UNE POLITIQUE NÉGLIGÉE AUX RÉSULTATS DÉCEVANTS 1.1. Soumise à des contraintes fortes, la maîtrise de l’énergie n’a pas été prioritaire dans les grands choix publics 1.1.1. Une politique intrinsèquement difficile 1.1.1.1. Des contraintes fortes liées à l’objet même de la maîtrise de l’énergie !" La consommation d’énergie, qu’il s’agisse de la source choisie (pétrole, gaz, électricité, etc.) ou de la quantité consommée, dépend principalement de deux paramètres : la technologie employée (un moteur électrique, par exemple, peut être plus ou moins efficace pour une même consommation d’énergie) et l’usage fait des biens consommateurs d’énergie (rouler plus ou moins vite, plus ou moins souvent). La politique énergétique considère souvent les technologies et les comportements comme des facteurs exogènes, et s’intéresse donc principalement à l’offre d’énergie. La maîtrise de l’énergie, de son côté, se place du point de vue de la demande, qu’elle ne considère pas comme une donnée mais sur laquelle elle cherche au contraire à agir. Alors que la politique de l’offre porte sur la quantité d’énergie disponible et la répartition entre les diverses sources d’énergie (pour substituer du gaz à du pétrole, par exemple), la maîtrise de l’énergie recherche à la fois l’« efficacité énergétique » – ce qui renvoie aux processus de production et aux technologies – et l’« utilisation rationnelle de l’énergie » – ce qui implique une action sur les comportements mêmes. Le champ même de la maîtrise de l’énergie, par son étendue, représente une première source de difficulté pour cette politique. !" L’énergie intervient en outre dans la plupart des activités humaines : elle représente le moyen de répondre à des besoins essentiels, tels que le chauffage, l’éclairage ou le transport. Aussi la quantité d’énergie consommée est-elle souvent jugée difficilement compressible, sauf à réduire son niveau de vie. Elle revêt ainsi une dimension sociale très forte et l’accès à l’énergie n’est d’ailleurs pas sans lien avec les politiques d’insertion : les dispositifs de lutte contre l’exclusion comportent fréquemment un volet énergétique, par exemple pour faire prendre en charge par les pouvoirs publics une partie de la facture énergétique des plus défavorisés. Les implications sociales de la maîtrise de l’énergie en accroissent donc encore la difficulté. !" D’un point de vue économique, la maîtrise de l’énergie intervient dans un marché imparfait, ce qui représente une troisième source de difficulté. Tout d’abord, la consommation d’énergie est généralement invisible dans l’instant et se mesure a posteriori, sur la facture. Par ailleurs, celle-ci ne permet pas de distinguer les coûts liés à chaque appareil et d’identifier les économies possibles. Peu informé, le consommateur est en outre largement captif : la consommation d’énergie dépend beaucoup d’un environnement social, culturel et technologique, qui détermine les décisions individuelles. Ainsi, prendre sa voiture pour se rendre sur le lieu de travail peut être indispensable, en raison notamment de l’organisation de l’espace urbain ; dans l’industrie, la fabrication de certains produits comme l’aluminium requiert une quantité d’énergie incompressible. On est donc confronté, lorsqu’on cherche à réduire sa consommation, à un certain nombre de contraintes techniques, voire physiques. 5 Enfin, qu’il s’agisse d’un ménage ou d’une PME, la part de l’énergie dans les coûts est souvent insuffisante pour entraîner, à elle seule, des investissements d’efficacité énergétique. Au niveau microéconomique, la maîtrise de l’énergie ne présente donc pas toujours d’intérêt évident. On se trouve ainsi dans un « équilibre de Nash » : s’il existe un intérêt collectif à maîtriser l’énergie, l’intérêt individuel dans ce sens n’est pas perçu comme suffisant. Les contraintes évoquées ci-dessus réduisent, au niveau individuel, l’incitation à s’engager dans une démarche d’économies d’énergie. C’est là une contrainte majeure pour la politique de maîtrise de l’énergie, dont la légitimité n’apparaît pas clairement aux consommateurs d’énergie pris individuellement. Si la demande est imparfaite, l’offre se caractérise de son côté par des monopoles naturels aux coûts fixes élevés, par des prix traditionnellement réglementés (péréquation tarifaire d’EDF par exemple), mais aussi des obligations extra-économiques, telles que les missions de service public : l’électricité doit être disponible sur l’ensemble du territoire, à un prix abordable et avec une qualité suffisante. La structure de l’offre d’énergie dépend aussi de préoccupations de sécurité d’approvisionnement et d’indépendance énergétique. L’offre ne répond donc pas aux mécanismes classiques de marché. Enfin, le produit énergie se distingue par des effets externes1 importants, en particulier sur l’environnement à travers la construction d’infrastructures (oléoducs, centrales électriques, etc.) ou des rejets polluants (émission de dioxyde de carbone notamment). Ces externalités sont aujourd’hui insuffisamment prises en compte par le marché : maîtriser l’énergie suppose d’agir sur un bien qui ne répond, stricto sensu, ni à la définition uploads/Politique/ maitrise-energie.pdf
Documents similaires
![](https://b3c3.c12.e2-4.dev/disserty/uploads/preview/bOl4dBPQnrsTxjOM4vusu7iRn8CuE0yvDZocZ4NJkCMhrqILOEMD3AxWZcu1retoYicmJAD4Zn5X8PbgDFxPnlSx.png)
![](https://b3c3.c12.e2-4.dev/disserty/uploads/preview/rmWG37udfLO7x4x1KWtx19PdLSvme6d00YBiDZ9B3TEEw8RmhNAKlxkyaNYzMBGiMawYGsOtMlvdq04WFK8R99N2.png)
![](https://b3c3.c12.e2-4.dev/disserty/uploads/preview/vvkC3LKPsBjfkl0iXO85rwmlhwxtTGdLtsQWmhqfdgzbwBXONenkgQZIxaVgyB9L4BqTTBOoYvVodGtcBLGCtjMt.png)
![](https://b3c3.c12.e2-4.dev/disserty/uploads/preview/NmNZJJDadyp07Rgak7L4yougge91uHMWEIrvHAqPiXemjk1bS4HuisXwBFjfx0Teukpul8UhvDj2BjVxssJWvJZ5.png)
![](https://b3c3.c12.e2-4.dev/disserty/uploads/preview/CGfmxeY4zBEpQGbFUWGEvGz1iqOh0vd0Oyf5uhrwSEcL99EJnAn8K8uIoA1nRmRoeCyVn7D2oT92IgbramJJivds.png)
![](https://b3c3.c12.e2-4.dev/disserty/uploads/preview/gNYXHwosVrKDr8BouFVnvBPim6mXv7owGGiG2F9QHE8xBckF4cQoS8TYFtDaHeHLPQE7S4ktyN6bpvDSZBzvlgKE.png)
![](https://b3c3.c12.e2-4.dev/disserty/uploads/preview/Tctkv3S3aiVzxfYvux2aPxIsYYDFomFhv4Euf9epcSUqVDkPxdYNPPxYDGIcqmjGp85rP2yMWArLKAmahYCVgwIv.png)
![](https://b3c3.c12.e2-4.dev/disserty/uploads/preview/GEmC5JcCd2Mq9h9mJY0UkxkiUuVpShhMkfcNHU2cqa5fvVsfT89rh5tdCBzpD3i4sE7uk6Jma1fDOi1habodVwZX.png)
![](https://b3c3.c12.e2-4.dev/disserty/uploads/preview/36s8AEEJZXXNCcEqIpPHW53gvVIh3WhU6VCYYp8bhRO2aajgcBwx1n7gvSas6UhPzkN48qT0oPJg3vOgHpvNc5VH.png)
![](https://b3c3.c12.e2-4.dev/disserty/uploads/preview/ka9w2LkEifTLOjZMprZyE44yYj6HzMZ5ss8kQLwxomOvTMFr08sy80zkHr6NXoaBR9fCsNFL4UqErEKwZXTmjpHc.png)
-
21
-
0
-
0
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise- Détails
- Publié le Fev 03, 2022
- Catégorie Politics / Politiq...
- Langue French
- Taille du fichier 1.2730MB