PROBLEMATIQUE ELECTORALE ET SCENARIOS DE SORTIE DE CRISE A la veille des électi

PROBLEMATIQUE ELECTORALE ET SCENARIOS DE SORTIE DE CRISE A la veille des élections présidentielles et législatives de 2007, prévues, en principe, en février et en juin, le Sénégal connaît incontestablement un climat politique délétère, pernicieux, dont la perpétuation voire la dégradation, pourrait durablement altérer le climat démocratique national. Le désarroi et l’inquiétude viennent de ce que le Sénégal a, jusque-là, paru avoir initié des pratiques politiques qui l’ont longtemps fait passer pour une exception dans un continent dont bien des régimes politiques ont eu du mal à se plier aux exigences de l’Etat de droit et à de saines et incontestables compétitions électorales. L’exception sénégalaise, déjà sérieusement remise en question par certains développements récents de la situation politique nationale, pourrait, si l’on n’y prend garde, ne plus être qu’un leurre. La tolérance en politique, ainsi qu’une certaine forme d’éthique dans la conduite des affaires publiques ont, en effet, longtemps constitué une sorte de « marque de fabrique » nationale. L’espace politique sénégalais, au contraire de bien d’autres en Afrique, n’a jamais été vraiment caractérisé, en droit sinon en fait, par l’absence durable de compétition entre prétendants au pouvoir. Depuis 1789, année où la « colonie » sénégalaise envoyait un « Cahier de doléances » aux états généraux qui se tenaient à Versailles – et d’où sortira la révolution française-, aux élections des années 2000, en passant par les joutes pour la désignation de députés, dans la seconde moitié du XIXè siècle (1871), le pays a presque toujours baigné dans l’atmosphère de la concurrence politique. Et si, dans certaines périodes de l’histoire politique nationale, une formation partisane a pu « écraser » d’autres courants de pensée, nantie qu’elle était des moyens de l’Etat et bénéficiant d’une sorte de consensus sur l’unité du pouvoir d’Etat, consensus typique des nations en construction, le sens ou le sentiment du « libre choix » n’a jamais été réellement évincé de l’esprit des citoyens. Le Sénégal n’a, à vrai dire, jamais connu le syndrome du parti unique sur dominant, celui qui débouche sur « l’Etat totalitaire », lequel prétend façonner l’être ou la conscience des citoyens. En un mot, il n’ y a jamais eu, dans le pays, de régime « policier ». Seules quelques phases de « crispations » ou de dégradation du climat politique peuvent être relevées au cours de notre histoire politique. La fin des années 80 et le début des années 90 sont typiques de ces moments de crise. Les élections de 1988 furent gagnées par le pouvoir, mais les violences qui les ont suivi ont conduit à l’instauration d’un « état d’exception » dont 1 un bon fonctionnement de la démocratie ne s’accommode pas. En 1993, le pays a renoué avec les mêmes lendemains électoraux tourmentés : le pouvoir l’emporta, mais une sorte de décalage se manifesta à nouveau, entre l’évidence supposée du verdict des urnes et la rapidité de la propagation d’une « crise sociale » et politique dont l’assassinat d’un juge constitutionnel fut le signe le plus éloquent de l’exaspération. Par cet acte, sans précédent dans la vie politique sénégalaise, et qui visait, au-delà de la personne de la victime, l’institution juridictionnelle chargée de proclamer les résultats électoraux, il faut bien deviner la rupture de la confiance entre les acteurs du jeu politique, mais aussi une sorte de discrédit jetée, à tort ou à raison, sur une des institutions fondamentales de la République. Une première brèche était ainsi ouverte dans la tradition politique de notre pays. Jusque-là, les joutes électorales demeuraient circonscrites au champ strictement politique, et ne mettaient en scène, effectivement, que les protagonistes du jeu, c’est-à-dire les partis politiques. Désormais, des institutions censées être politiquement neutres se retrouvaient, à leur corps défendant, jetées dans les batailles politiques. Cette péripétie de la vie démocratique nationale est fondamentale pour comprendre la situation actuelle : la « mise à l’index » de ces organes républicains a sa part dans l’impasse que nous connaissons aujourd’hui, à la veille des élections. Certes, le Sénégal n’a pas connu, depuis les événements que voilà, une continue « descente aux enfers ». L’alternance survenue en 2000 a été comme une sorte d’événement catalyseur, l’arrivée de l’opposition au pouvoir, acceptée de façon naturelle par les vaincus, a redonné espoir aux observateurs du pays, non pas tant dans la perspective de la solution des problèmes sociaux que dans la forte assurance de l’enracinement de la démocratie. Le changement voulu par le pays et « enregistré » par les hommes politiques de tous bords a été comme l’attestation de la maturité de la démocratie sénégalaise, et le réel espoir que les démons d’un « retour au passé » étaient conjurés. De plus, des progrès démocratiques ont été accomplis dans certains secteurs, ce qui a conforté le sentiment que l’alternance de 2000 ouvrait réellement une ère de nouvelles conquêtes citoyennes : - une nouvelle Constitution a été adoptée, qui inscrivait au fronton de la République de nouveaux droits : droit à la marche pacifique, droit pour l’opposition de bénéficier d’un « statut » notamment - un nouvel organe de surveillance des élections a vu le jour, face aux carences, unanimement admises, d’un ONEL qui s’était honorablement acquitté de sa mission depuis sa mise en place il y a quelques années. La classe politique dans son entier 2 approuva le projet et son adoption par l’Assemblée nationale ne fut qu’une formalité. Au-delà de la naissance de la CENA, il faut comprendre que c’est le processus électoral, objet de crispations récurrentes, qui avait vocation à être assaini : le nouvel organe fut doté de pouvoirs de sanction, les conditions de l’audit du fichier électoral gagnèrent en fiabilité et les partis politiques furent plus étroitement associés aux diverses opérations électorales. Si entre 2000 et 2005 le climat politique fut, à intervalles réguliers, dominé par des tensions, celles-ci ont toujours eu pour caractéristique essentielle de porter sur les pratiques du pouvoir en place, sur son mode de gouvernance, pris en tous ses aspects. Ce qui est nouveau, à partir de la fin de l’année 2005, c’est que la critique des autorités en place déborde cet objet, elle ne se limite plus à la question du « savoir- faire » du pouvoir, mais prend un aspect nouveau, mais beaucoup plus inquiétant pour le bon fonctionnement de la démocratie : ce pouvoir manquerait de morale républicaine en cherchant, dans la perspective des élections, à « instrumentaliser » les institutions, en changeant « la règle du jeu ». Il est évident qu’un tel grief renvoie à une sorte de rupture du consensus démocratique et constitue donc un désaccord de fond, désaccord sur la légitimité même du « système » ou de son fonctionnement. En termes clairs, l’opposition et le pouvoir ne se font plus confiance, et c’est bien ce qui explique bien l’existence d’une « problématique électorale » et rend pertinente la recherche de « scénarios de sortie de crise ». Pour se livrer à une telle recherche, il faut d’abord passer en revue les « pommes de discorde », les sujets de désaccords. Cette étape est importante car un certain brouillard caractérise la situation politique actuelle. Une recherche de « scénarios de sortie de crise » ne peut certainement pas en faire l’économie. L’identification de l’objet du désaccord permet à tout « médiateur » de renvoyer les acteurs politiques à leurs propres responsabilités. Elle a la vertu de poser clairement les termes du problème, en évitant le piège des débats « généraux » qui génèrent la confusion. C’est seulement après, dans un deuxième temps, que de possibles moyens de surmonter la crise pourront être proposées. Les sujets de désaccord et la dégradation de la situation politique : - On peut considérer que c’est avec la loi du 16 décembre 2005 portant prorogation du mandat des députés que l’opposition a commencé à « suspecter » le pouvoir de menées 3 déloyales. La justification de cette « prorogation » est connue : il s’agit, estiment les autorités, de faire de « coupler » les élections présidentielles et législatives pour réaliser des économies qui iraient aux populations frappées par les inondations consécutives à l’hivernage 2005. Le Conseil constitutionnel a été saisi, il a rendu une décision le 18 janvier 2006, par laquelle il estime de rien trouver à redire dans la procédure juridique qui a été utilisée pour valider la prorogation du mandat des députés. Malgré tout, des formations de l’opposition ont considéré que l’Assemblée nationale avait perdu toute légitimité et, en conséquence, ont décidé de quitter l’Hémicycle à la date de l’expiration normale de leur mandat. Une institution de la République, celle qui incarne précisément la représentation du peuple, voyait son fonctionnement directement remis en question par des tiraillements politiques - Le processus électoral a ensuite donné lieu à un certain nombre de divergences, que l’on peut évaluer à 5 : 1. la mention « a voté » sur la carte d’électeur ; 2. le bulletin de vote unique pour l’élection présidentielle ; 3. la répartition des sièges aux élections législatives ; 4. l’introduction d’un second tour uploads/Politique/ problematique-electorale 1 .pdf

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