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Tous droits réservés © Recherches amérindiennes au Québec, 2016 Ce document est protégé par la loi sur le droit d’auteur. L’utilisation des services d’Érudit (y compris la reproduction) est assujettie à sa politique d’utilisation que vous pouvez consulter en ligne. https://apropos.erudit.org/fr/usagers/politique-dutilisation/ Cet article est diffusé et préservé par Érudit. Érudit est un consortium interuniversitaire sans but lucratif composé de l’Université de Montréal, l’Université Laval et l’Université du Québec à Montréal. Il a pour mission la promotion et la valorisation de la recherche. https://www.erudit.org/fr/ Document généré le 19 sept. 2021 20:39 Recherches amérindiennes au Québec Ossements animaux dans l’art autochtone actuel Discours sur la mort, la résurgence et la guérison Animal bones in contemporary aboriginal art Reflections on death, liberation and healing Osamentas animales en el arte indígena actual Discursos sobre la muerte, el resurgimiento y la sanación Gabrielle Marcoux Identités, savoirs, archéologie… Volume 45, numéro 2-3, 2015 URI : https://id.erudit.org/iderudit/1038039ar DOI : https://doi.org/10.7202/1038039ar Aller au sommaire du numéro Éditeur(s) Recherches amérindiennes au Québec ISSN 0318-4137 (imprimé) 1923-5151 (numérique) Découvrir la revue Citer cette note Marcoux, G. (2015). Ossements animaux dans l’art autochtone actuel : discours sur la mort, la résurgence et la guérison. Recherches amérindiennes au Québec, 45(2-3), 25–32. https://doi.org/10.7202/1038039ar Résumé de l'article Les ossements animaux occupent des fonctions pratiques et rituelles extrêmement variées et complexes au sein des cultures ancestrales atikamekw et innue, que ce soit sur le plan spirituel, alimentaire, artistique ou autre. Encore aujourd’hui, en plus d’évoquer le trépas, les ossements font référence aux pratiques de communication avec les esprits animaux – comme la scapulomancie – et à la vision holistique du monde chez les peuples algonquiens. En intégrant des peaux et des fragments de squelettes animaux à leurs oeuvres portant sur des réalités contemporaines de pertes et de négociations intimes et collectives d’ordre culturel et territorial, les artistes Sonia Robertson et Eruoma Awashish parviennent à réactualiser le pouvoir de guérison et de résurgence traditionnellement associé aux ossements. Ainsi, la mise en scène d’os permet à ces créatrices de réécrire l’histoire de lieux chargés de sens et de réaffirmer l’importance actuelle de notions spirituelles, identitaires et culturelles autochtones ancestrales dans un contexte de réaffirmation collective et individuelle. 2 5 r e c h e r c h e s a m é r i n d i e n n e s a u Q u é b e c , x l v, n o s 2 - 3 , 2 0 1 5 Il faut connaître l’animal, de l’os jusqu’à l’esprit. Le bon chasseur est un animiste scrupuleux. (Bouchard 2004 : 21) L es rituels et les notions spirituelles et culturelles autochtones reliés aux ossements animaux sont nom- breux et complexes : l’os peut servir à la fois d’outil, de matériel artistique, d’objet de rituel, de dispositif de com- munication avec les esprits, de source de nourriture, etc. Les questions con­ cernant le mode de vie, la terri­ torialité, la mort, l’âme, l’animisme et la reli- gion catholique sont autant de notions qu’il faut aborder afin de tenter de comprendre l’importance multidimen­ sionnelle accordée aux ossements chez les différentes nations autoch- tones. Plusieurs artistes amérindiens utilisent encore aujourd’hui panaches et osselets afin de réaliser des pipes, des bijoux et d’autres objets d’art à l’image de leur culture visuelle ances- trale. D’autres créateurs actuels insèrent des ossements et des peaux d’animaux à leurs œuvres tridimensionnelles afin de réactualiser leur portée symbolique et de proposer un discours critique de résurgence identitaire s’inscrivant dans une relecture de lieux chargés sur les plans historique et social et une dénonciation active de situations de déséquilibres sociaux, politiques, culturels et spirituels impliquant les peuples autochtones. Dans le recueil Reclaiming Indi­ genous Voice and Vision, dirigé par Marie Battiste, les auteurs James Sákéj Youngblood Henderson (2000) et Edward J. Chamberlin (2000) se pen­ chent sur les divers impacts découlant de l’aliénation des nations autoch- tones face à leurs langues ancestrales, et par le fait même face à leurs épisté- mologies, leurs récits et, de façon plus large, leur « sens de la réalité » (Chamberlin 2000 : 127). Alors que les récits ancestraux permettent d’éta- blir et de comprendre les relations complexes unissant les hommes, les esprits et le territoire selon une vision holistique du monde, les diverses ten- tatives d’assimilation et d’effacement de ces dispositifs de formation identi- taire dans le cadre de la colonisation ont mené à une aliénation territoriale, certes, mais aussi à une aliénation des peuples autochtones face à eux-mêmes (Chamberlin 2000 : 127 ; Henderson 2000 : 268). Plusieurs artistes autoch- tones se consacrent aujourd’hui à exprimer une résistance face à l’impo- sition de systèmes épistémologiques exogènes à leurs nations. Cette résis- tance passe par le biais d’une résur- gence et d’une réactualisation de récits, de symboles et de pratiques spiri- tuelles et sociales parfois mises de côté – voire carrément criminalisées – dans le contexte colonial. Dans le cadre de Vol. xLv , Nos 2-3, 2015 Gabrielle Marcoux Doctorante, Département ­ d’histoire de l’art et d’études cinématographiques, Université de Montréal Note de recherche Ossements animaux dans l’art autochtone actuel Discours sur la mort, la résurgence et la guérison 2 6 r e c h e r c h e s a m é r i n d i e n n e s a u Q u é b e c , x l v, n o s 2 - 3 , 2 0 1 5 cette courte étude, nous nous intéresserons particulière- ment à deux œuvres de la jeune artiste atikamekw Eruoma Awashish qui propose, par le biais de mises en scènes ­ d’ossements, de revisiter de façon critique certaines ren- contres conflictuelles sur les plans politique, territorial, culturel et spirituel ayant eu lieu entre des nations autoch- tones et le peuple allochtone. Nous nous pencherons égale- ment sur une installation complexe de l’artiste innue Sonia Robertson qui, une dizaine d’années plus tôt, proposait quant à elle la réécriture de l’histoire d’un lieu, d’une famille et d’une jeune femme en redonnant une seconde vie à des ossements et à des fourrures. Si toutes deux mettent de l’avant une réactualisation de notions et de pratiques ances- trales entourant les ossements animaux dans une visée de guérison collective et intime, il sera intéressant de se pen- cher sur le rôle différent accordé par chacune d’elles aux parties animales utilisées. Avant de nous plonger dans une analyse des discours critiques d’Awashish et de Robertson, nous proposons tout d’abord d’exposer brièvement certains principes de base plutôt répandus parmi certaines nations autochtones de l’est du Canada, et plus précisément chez des nations algon- quiennes, concernant l’utilisation et la symbolique spiri- tuelle de l’ossement animal. Malgré le fait que nous soyons contrainte de présenter ici une étude partielle et fragmen- taire d’œuvres fort complexes, nous sommes d’avis qu’un tel processus analytique permettra de démontrer que ces artistes autochtones, qui mettent en scène de façon diffé- rente, des fragments d’animaux s’inscrivent dans une démarche de décolonisation et de guérison à la fois indivi- duelle et collective, plutôt que dans un discours essentielle- ment morbide, passéiste ou pessimiste. À travers l’analyse de la démarche créative et discursive de ces créatrices, nous aborderons principalement les notions de la mortalité, de la relation aux esprits et du dialogue déséquilibré entre autochtones et allochtones entourant des problématiques territoriales et spirituelles. En d’autres mots, nous affirmons que les ossements et peaux mis en scène par ces créatrices dépassent une simple référence au trépas et évoquent plutôt des réalités culturelles et spirituelles ancestrales dont ­ l’expression nouvelle et personnelle permet une réaffirma- tion identitaire critique pour les artistes concernées et leur nation. Nomadisme et animisme : l’ossement animal comme outil de communication synallagmatique Les peuples innu et atikamekw ont en commun qu’ils ont été, jusqu’au milieu du xxe siècle dans le cas de certaines communautés, essentiellement nomades ou semi-nomades. Divisés en groupuscules vivant principalement de la chasse au gros gibier pendant une partie considérable de l’année, ces peuples se déplaçaient dans des territoires selon les sai- sons et la disponibilité des ressources fauniques, puis se réunissaient en des lieux préétablis lors de la saison chaude (Beaulieu 1995 : 16 et 27 ; Gélinas 2000 : 41-48 ; Lacasse 2004 : 31). Du fait que les peuples innu et ­ atikamekw ont longtemps partagé un même territoire, parlent des langues de souche algonquienne et ont en commun des systèmes sociopolitiques similaires, les nombreux échanges et inter­ actions possibles entre ces populations ont permis une large « circulation des pratiques et des croyances » (Gélinas 2000 : 36). Ainsi, bien que nous n’ignorions pas les différences qui distinguent le mode de vie et les conceptions spirituelles de ces nations, ces transmissions interculturelles nous permettent de traiter ici de quelques notions identi- taires générales partagées par ces peuples. Ultimement, « les croyances et les rituels traditionnels » des Innus étaient, selon les termes de l’historien Alain Beaulieu (1995 : 27), « intimement liés au mode de vie nomade ». En effet, les peuples montagnais, dont la survie dépendait presque entièrement des uploads/Religion/ ar.pdf

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  • Publié le Mai 07, 2021
  • Catégorie Religion
  • Langue French
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