Extrait du livre de Diomède Rutamucero : « Le génocide contre les Tutsi, un cri
Extrait du livre de Diomède Rutamucero : « Le génocide contre les Tutsi, un crime avoué mais impuni », Bujumbura 2009 Chapitre 4. L’assassinat de l’Archevêque Joachim Ruhuna par le Cndd-Fdd. « L’Archevêque de Gitega a vécu jusqu’au bout en parfaite solidarité avec le peuple burundais qu’il aimait et qui souffre. Lui, aussi, victime innocente, est tombé dans une embuscade mortelle comme des milliers de Burundais dont souvent les corps sont brûlés ou jetés dans les rivières ou disparaissent sans laisser de trace… » Comité Permanent de la Conférence des Evêques Catholiques au Burundi, 10 octobre 1996. C’est le 9 septembre 1996 que Monseigneur Joachim Ruhuna, Archevêque de Gitega fut assassiné, à Murongwe sur la rivière Mubarazi dans la Province de Gitega. Il est tombé dans une embuscade tendue par le groupe terroriste génocidaire hutu, le Cndd- Fdd. L’objectif de ce chapitre est de montrer comment ce groupe qui a été hissé à la tête de l’Etat Burundais a commis ce crime, qui entre dans son programme de génocide contre de Tutsi. Avant d’être tué, la journée du 9 septembre 1996 pour l’Archevêque de Gitega Joachim Ruhuna avait été organisée comme suit : il est parti du centre de Gitega pour le Grand Séminaire de Burasira, avec son chauffeur Jean Paul Nkurunziza et la Sœur Irénée Gakobwa, de la Congrégation des Sœurs Bene-Tereziya, qui allait voir sa famille au Camp des déplacés tutsi à Mutaho, un centre situé à une dizaine de kilomètres de Burasira. Il allait voir l’état d’avancement des travaux de réfection à ce grand Séminaire, suite à l’attaque des bandes armées du Cndd-Fdd, quelques mois auparavant. A l’aller, il déposa à Gitongo, paroisse située près du centre de Mutaho , Sœur Irénée et continua sa route. Arrivée à Burasira il a visité le Séminaire et présidé une réunion avec les responsables du Séminaire. Au moment de son départ de Burasira, il prit dans son véhicule Jeep Land Cruiser, deux filles du Lycée de Busiga sur demande de Monseigneur Pierre Antoine Madaraga, le Vicaire Général du diocèse de Ngozi. Sur la route de retour, ils ont repassé à la Paroisse de Gitongo et Monseigneur J. Ruhuna a salué le Curé de la Paroisse Abbé Mvuyishanga Déogratias et le diacre Cyrille Kamana. Ensuite ils sont repartis prendre Sœur Irénée Gakobwa au Couvent des Sœurs Bene-Tereziya à la paroisse Gitongo. L’Archevêque est aussi parti s’entretenir un court moment avec les déplacés. C’est vers 16 heures que l’Archevêque a dit au revoir aux gens de Gitongo pour rentrer à Gitega. Dans la jeep de Monseigneur Joachim Ruhuna, il y avait 7 personnes : deux filles du Lycée de Busiga, Ancile Gateretse et Rebecca Nkurunziza, la Sœur Irénée Gakobwa, Mademoiselle Concessa Ndacikiriwe, membre du Foyer de Charité de Bujumbura, une demoiselle Rose Batorwa, cousine du diacre Cyrille Kamana et comptable à la Commune Shombo en Province de Karuzi, la septième personne était le chauffeur de l’Archevêque Jean Paul Nkurunziza. C’est sur la route Ngozi-Gitega tout près de la station agronomique de l’ISABU à Murongwe qu’une cinquantaine de personnes armées de fusil sortirent de la brousse et demandèrent au chauffeur de s’arrêter en disant : Halte ! L’Archevêque donna ordre au chauffeur de continuer. Le chauffeur n’eut pas le temps d’accélérer parce que les assassins furent feu. La Jeep se trouva dans l’impossibilité d’aller plus loin. L’Archevêque et la Sœur Irénée furent tués sur le coup. Le chauffeur et Mademoiselle Concessa étaient blessés. Cette dernière a succombé de ses blessures quelques instants après. Les rescapés de l’embuscade ont témoigné qu’au premier moment, les assassins ont laissés les morts dans la Jeep qu’ils ont eu soin de brûler. Ils ont amené avec eux tous les autres sur la colline Mwumba. Arrivés sur la colline, un des chefs des tueurs s’est fâché lorsqu’il a constaté qu’ils ne lui ont pas ramené le corps de l’Archevêque. Il leur a dit : « au lieu d’amener les vivants vous auriez dû amener les corps. Monseigneur est un homme très mauvais, c’est le pire de tous ». Il y a même un autre assassin qui a ajouté que si au moins il pouvait lécher son sang. Les tueurs ont dû rebrousser chemin pour aller récupérer les corps inertes qu’ils avaient laissés sur le lieu du crime. Ils les ont par après enterrés sur la colline Mwumba. Les forces de l’ordre ont pris une semaine pour trouver là où les tueurs les avaient enterrés. La dépouille de l’Archevêque était couchée sur celle de la Sœur Irénée dans une fosse commune. Le caractère génocidaire de cet attentant s’est aussi manifesté au moment de l’interrogatoire des survivants de l’embuscade. D’après le témoignage de Mademoiselle Rose, les tueurs leur ont demandé « s’ils sont tous tutsi ». Ils ont répondu « qu’ils sont des Hutu ». Les génocidaires ont exprimés des soupçons envers le chauffeur Jean Paul Nkurunziza qui était tutsi. Il a fallu que le diacre Cyrille Kamana vienne témoigner le lendemain qu’il n’est pas tutsi et que le chauffeur mente en parlant des faux parentés hutu de Gitega qu’il connaissait ; s’il avait été reconnu tutsi, les assassins l’aurait aussi tué. Le premier suspect arrêté dans l’assassinat de l’Archevêque Joachim Ruhuna fut le diacre Cyrille Kamana. Cyrille Kamana état diacre à la Mission Catholique de Gitongo. La mission où l’Archevêque a pris les derniers passagers et où il s’était arrêté l’avant-midi, avant de partir à Burasira. Le diacre Cyrille Kamana, fils de Ntahompagaze Martin et de Wakana Rosalie est né en 1967 à Gitongo, Commune Mutaho, Province Gitega. Il a été arrêté le 11 septembre 1996. Au cours de son deuxième interrogatoire par le Commandant de Brigade de Gitega, Kiziba Léonidas, le diacre Cyrille Kamana a dit qu’ « après le passage de l’Archevêque à la Mission de Gitongo : il est parti à la maison chez ses parents » Parce que, déclarait-il, ses parents lui avaient demandé de passer, étant donné que son petit frère s’était marié le 7 septembre 1996 et qu’il y avait les visiteurs de la famille de la mariée qui allaient venir. Il a ajouté que lui-même avait promis d’aller les voir. A la question de savoir qui était au courant de son départ de la mission. Il a dit qu’il a averti l’abbé Mvuyishanga Déogratias (hutu). Plus tard ce dernier déclara que Cyrille Kamana ne lui avait pas parlé de son départ. A la question du Commandant sur la manière dont il a su la mort de l’Archevêque, il a répondu « Normalement moi je n’ai pas entendu les coups de fusils. J’ai vu les gens courir et je les ai interrogés. Certains m’ont dit qu’ils ont entendu ces coups de feu tout près du pont sur la rivière Mubarazi. Les autres m’ont dit qu’ils ont entendu ces coups de feu alors qu’il y avait un véhicule qui descendait vers la rivière Mubarazi. Mais par après ils n’ont pas revu la voiture de l‘autre côté de la rivière. Je n’ai reconnu personne de ces gens, mais j’ai pensé que c’était le véhicule de Monseigneur, parce que c’est lui qui venait de partir. J’ai continué à descendre doucement, j’ai rencontré deux garçons, qui transpiraient. Quand je leur ai demandé de quoi il s’agissait, ils m’ont dit qu’ils étaient de l’autre côté de la rivière quand ils ont entendu les coups de fusils. Ils se sont cachés. Après ils ont entendu que les fusils se taisaient. Ils ont vu une grande fumée et une voiture entrain de brûler. Ils se sont encore cachés. Quand ils ont vu qu’il n’y avait personne, ils sont approchés du véhicule et ont vu que Monseigneur était gravement blessé. Il y avait aussi une sœur sur le siège de derrière qui était morte. Ils ont dit qu’il y avait aussi dans le véhicule une autre personne qui criait pour qu’on l’aide ». Dans son troisième interrogatoire, le 13 septembre 1996, à la question de comment le diacre Cyrille Kamana est arrivé la 1ère fois à l’endroit où ils ont tué Monseigneur Ruhuna et comment cela s’est passé, il a répondu : « Moi comme je vous l’ai dit, quand Monseigneur est parti je suis allé à la maison, mais je n’avais pas demandé la permission, comme je vous l’avait dit ». Il a continué à raconter ce qui s’est passé comme au deuxième interrogatoire. Plus loin il raconte qu’il a rencontré «un garçon » alors qu’au deuxième interrogatoire il avait parlé de garçons. Il dit qu’avec ce garçon « nous sommes descendus » doucement jusqu’aux arbres de l’Isabu. Mais je ne voyais personne. Nous avons continué de descendre, jusqu’à ce que nous ayons vu un véhicule où il y avait Monseigneur. Il avait cogné le bord de la route du côté aval de la route…. A ce moment le véhicule avait toutes les portes ouvertes. Il y avait de la fumée du côté du chauffeur. Nous nous sommes approchées du véhicule. Nous avons trouvé Monseigneur couché devant dans le véhicule. Sur le siège de derrière il y avait la Sœur Irénée uploads/Religion/ assassinat-de-mgr-ruhuna-extrait-du-livre-de-diomede-rutamucero 1 .pdf
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- Publié le Jan 05, 2023
- Catégorie Religion
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