Robert Muchamore CHERUB MISSION 1 100 jours en enfer (The recruit) Traduction d
Robert Muchamore CHERUB MISSION 1 100 jours en enfer (The recruit) Traduction de Antoine Pinchot Avant-propos Au cours de la Seconde Guerre mondiale, des civils français s’organisèrent en mouvements clandestins pour combattre les forces d’occupation nazies. Parmi eux, on comptait bon nombre d’enfants chargés d’accomplir des missions de reconnaissance, de transmettre des messages ou de se lier à des soldats allemands souffrant du mal du pays, afin de rassembler les informations nécessaires au sabotage des opérations militaires ennemies. L’espion anglais Charles Henderson, qui se trouvait en France en 1940, mena ainsi plusieurs missions avec de jeunes adolescents. Dès son retour en Grande-Bretagne, fort de cette expérience, il fonda CHERUB, une unité de renseignement composée d’une vingtaine de jeunes garçons. Henderson est décédé en 1946, mais son organisation lui a survécu. Elle compte aujourd’hui plus de deux cent cinquante agents opérationnels âgés de dix à dix-sept ans. Bien que les techniques d’espionnage aient considérablement évolué depuis la fondation de CHERUB, sa raison d’exister n’a pas changé : aux yeux des criminels adultes, les enfants sont insoupçonnables. 1. Un simple accident James Choke détestait les cours de chimie. Avant d’entrer au collège, il s’imaginait que cette discipline consistait à manier des tubes à essai afin de provoquer des jets de gaz et des gerbes d’étincelles. En réalité, il passait chaque leçon, assis sur un tabouret, à recopier les formules que Miss Voolt gribouillait sur le tableau noir, quarante ans après l’invention de la photocopieuse. C’était l’avant-dernier cours de la journée. Dehors, la pluie tombait et le jour commençait à décliner. James somnolait. Le laboratoire était surchauffé, et il avait passé une grande partie de la nuit précédente à jouer à Grand Theft Auto. Samantha Jennings était assise à ses côtés. Les professeurs adoraient son caractère volontaire, son uniforme impeccable et ses ongles vernis. Elle prenait ses notes avec trois stylos de couleurs différentes et couvrait ses cahiers pour les garder en bon état. Mais dès qu’ils avaient le dos tourné, elle se comportait comme une vraie peau de vache. James la haïssait. Elle ne cessait de se moquer ouvertement de l’aspect physique de sa mère. — La mère de James est si grosse qu’elle doit beurrer les bords de sa baignoire pour ne pas rester coincée. Les filles de sa bande éclatèrent de rire, comme à leur habitude. Á la vérité, la mère de James était énorme. Elle commandait ses vêtements dans un catalogue de vente à distance réservé aux personnes souffrant d’obésité. Faire les courses en sa compagnie était un véritable cauchemar. Les gens la montraient du doigt, ou la dévisageaient avec insistance. Les enfants imitaient sa démarche maladroite. James l’aimait, mais il s’arrangeait toujours pour trouver un moyen de ne pas se montrer en sa compagnie. — Hier, j’ai fait un footing de huit kilomètres, dit Samantha. Deux fois le tour de la mère de James. Ce dernier leva la tête de son cahier d’exercices et plongea ses yeux bleus dans ceux de la jeune fille. — Cette vanne est à crever de rire, Samantha. Encore plus drôle que les trois premières fois où tu nous l’as servie. James était l’un des élèves les plus bagarreurs du collège. Si un garçon s’était permis de dire quoi que ce soit sur sa mère, il lui aurait flanqué une dérouillée mémorable. Mais comment devait-il réagir devant une fille ? Il prit la décision de s’asseoir aussi loin que possible de cette vipère dès le cours suivant. — Essaie de te mettre à notre place, James. Ta mère est un monstre. James était à bout de nerfs. Il se dressa d’un bond, si brutalement qu’il renversa son tabouret. — C’est quoi ton problème, Samantha ? cria-t-il. Un silence pesant régnait dans le laboratoire. Tous les regards étaient braqués sur lui. — Qu’est-ce qui ne va pas, James ? demanda Samantha, tout sourire. Tu as perdu ton sens de l’humour ? — Monsieur Choke, veuillez-vous rasseoir et vous remettre au travail immédiatement, ordonna Miss Voolt. — Si tu ajoutes quoi que ce soit, Samantha, je te… James n’avait jamais brillé par sa repartie. — … je te jure que je… Un gloussement stupide jaillit de la gorge de la jeune fille. — Qu’est-ce que tu vas faire, James ? Rentrer à la maison pour faire un gros câlin à maman baleine ? James voulait voir ce sourire stupide disparaître du visage de Samantha. Il la saisit par le col, la souleva de son tabouret, la plaqua face contre le mur puis la fit pivoter pour lui dire droit dans les yeux ce qu’il pensait de son attitude. Alors, il se figea. Un flot de sang ruisselait sur le visage de la jeune fille, jaillissant d’une longue coupure à la joue. Puis il aperçut le clou rouillé qui dépassait du mur. Terrorisé, il fit un pas en arrière. Samantha porta une main à sa joue, puis se mit à hurler à pleins poumons. — James Choke ! s’exclama Miss Voolt. Cette fois, tu as été trop loin ! Les élèves présents dans la salle murmurèrent. James n’eut pas le courage d’affronter l’acte qu’il venait de commettre. Personne ne croirait qu’il s’agissait d’un accident. Il se précipita vers la porte. Miss Voolt le retint par le bras. — Eh, où vas-tu, comme ça ? — Poussez-vous ! cria James en lui administrant un violent coup d’épaule. Stupéfaite et choquée, la femme chancela vers l’arrière en battant vainement des bras. James détala dans le couloir. Les grilles du collège étaient closes. Il les franchit d’un bond et quitta l’établissement par le parking des professeurs. *** Il marchait sous la bruine comme un automate. Sa colère avait peu à peu cédé la place à l’anxiété. Jamais il ne s’était fourré dans une situation aussi dramatique. Son douzième anniversaire approchait, et il se demandait s’il vivrait assez longtemps pour le célébrer. Il allait être exclu du collège, car ce qu’il avait commis était impardonnable. En outre, il était certain que sa mère allait l’étrangler. Lorsqu’il atteignit le petit parc de jeux situé près de chez lui, il sentit la nausée le gagner. Il consulta sa montre. Il était trop tôt pour rentrer à la maison sans risque d’éveiller les soupçons. Il n’avait pas un sou en poche pour s’offrir un coca à l’épicerie du coin. Il n’avait d’autre solution que de se réfugier dans le parc et se mettre à l’abri sous le tunnel en béton. Celui-ci était plus étroit que dans ses souvenirs. Les parois étaient recouvertes de tags, et il exhalait une révoltante odeur d’urine canine. James s’en moquait. Il avait le sentiment de mériter ce séjour dans une cachette glacée et malodorante. Il frotta ses mains pour les réchauffer. Alors, des images du passé lui revinrent en mémoire. Il revit le visage de sa mère, mince, éclairé d’un sourire, apparaissant à l’extrémité du tunnel. Je vais te manger, James, grondait-elle. Les mots résonnaient sous la voûte de béton. C’était chouette. — Je ne suis qu’un pauvre minable, murmura James. Ses paroles résonnèrent en écho. Il remonta la fermeture Éclair de son blouson et y enfouit son visage. Une heure plus tard, James parvint à la conclusion que deux possibilités s’offraient à lui : il devait se résoudre à croupir dans ce tunnel jusqu’à la fin de ses jours, ou rentrer à la maison pour affronter la fureur de sa mère. *** Dans le vestibule, il jeta un œil au téléphone posé sur la tablette. 12 appels en absence À l’évidence, le directeur de l’école s’était acharné à joindre sa mère. James se félicita qu’il n’y soit pas parvenu, mais il se demandait pourquoi elle n’avait pas décroché. Puis il remarqua la veste de l’oncle Ron suspendue au portemanteau. Ce type avait surgi dans sa vie alors qu’il n’était encore qu’un bébé. C’était un véritable boulet qui fumait, buvait et ne quittait la maison que pour picoler au pub. Il avait eu un job, une fois, mais s’était fait virer au bout de deux semaines. Si James avait toujours su que Ron était un bon à rien, sa mère avait mis du temps à en prendre conscience et à se résoudre à le mettre à la porte. Hélas, il avait eu le temps de l’épouser et de lui faire un enfant. Pour quelque raison étrange, elle conservait de l’affection pour lui et n’avait jamais demandé le divorce. Ron se pointait une fois par semaine, sous prétexte de voir sa fille Lauren. En réalité, il faisait son apparition lorsqu’elle se trouvait à l’école, dans le seul but de soutirer quelques billets. Sa mère, Gwen, était affalée sur le sofa du salon. Ses pieds étaient posés sur un tabouret. Elle portait un bandage à la cheville gauche. Ron, lui, était avachi dans un fauteuil, les talons sur la table basse, les orteils saillant de ses chaussettes trouées. Ils étaient tous deux ivres morts. — Maman, tu sais bien que tu n’as pas le droit de boire, avec ton traitement, protesta James, oubliant aussitôt tous ses problèmes. Ron se redressa uploads/Religion/ robert-muchamore-cherub-tome-1-100-jours-en-enfer.pdf
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- Publié le Mai 14, 2021
- Catégorie Religion
- Langue French
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