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"l e s o r ie n t a t io n s pr é s e n t e s , DE LA PENSÉE RELIGIEUSE " Les problèmes de théologie et de philosophie religieuse qui semblaient autrefois l’apanage d’une élite d’initiés sont en voie de conquérir une audience de plus en plus étendue. Le succès de collections comme Théologie ou U nain sanctam., l’apparition de revues telles que Dieu vivant ou la Maison- Dieu, le développement de centres de haut enseignement religieux destinés aux laïcs comme le Centre universitaire catholique ou les Conférences du Couvent de Saint-Jacques, sont à cet égard des indices significatifs. Les causes du fait sont multiples, mais il est permis d’en signaler deux principales. La première est le renouveau de la vie chrétienne dans les pûtes et l’exigence d’une nourriture doctrinale et spirituelle plus substantielle qui en est le fruit normal. La seconde est la virulence des formes actuelles d’athéisme, qui mettent en question non tel ou tel aspect du christianisme, mais sa vision totale du monde, ce qui oblige les chrétiens à une prise de conscience plus totale aussi de l’originalité de leur doctrine. Or, il faut bien l’avouer en commençant, et d’autant plus volontiers que nous dirons ensuite que l’avenir est plein de promésse, ce grand appel des esprits et des âmes qui demandent une pensée chrétienne vivante fait sentir d’une manière plus aiguë, et cette fois-ci décisive, ce que l’enseignement théolo gique ou apologétique ou exégétique actuel présente trop souvent d’insuflisant. Si Ton demande à la théologie d être prè^ sente au monde de la pensée, c’est sans doute qu’elle en était absente. Le P. de M ontcheuil le notait dans un de ses cours de l’institut catholique : « En maniant les vérités les plus valables et les plus actuelles, la théologie donne une impres sion d’absence et d’irréel. » Non pas qu’il s’agisse pour elle.de s’adapter au goût du j o ur, mais, ce qui est plus sérieqx, de répondre "aux ’besoins des âmes vivan t de nos jours. Comme le - 6 LES ORIENTATIONS PRÉSENTES DE LA PENSÉE RELIGIEUSE disait encore le P. de M ontcheuil : « Quand on demande à une théologie de se renouveler, on ne lui demande pas de s’expri mer dans une nouvelle philosophie, mais de s’assimiler l’expé rience spirituelle d’où est née cette philosophie. » Le sentiment de la rupture entre la théologie et la vie a été éprouvé naguère d’une manière aiguë par la génération où est né le mouvement que l’on a appelé le modernisme. Comme dans toutes les crises religieuses, ce qui est discutable dans le modernisme, ce n’est pas le problème qu’il a posé, mais la réponse qu’il a apportée. Car le problème posé était bien réel. Ce dont le modernisme témoigne, c’est en effet d’une double tare de la pensée religieuse de son temps, qui semble apparemment contradictoire : d’une part, la perte du sens de la transcendance de Dieu par une théologie rationalisée qui trai tait Dieu comme un objet quelconque de pensée ; de l’autre, la momification d une pensée qui restait figée dans ses formes scolaires et avait perdu contact avec le mouvement de la philosophie et de la science. Mais en voulant réagir contre la première, le modernisme est tombé dans l’agnosticisme, et en cherchant à remédier à la seconde, il a abouti aux abus de l’exégèse critique. Aussi, par ses excès mêmes, comme c’est souvent le cas, il a gêné, plus qu'il ne l’a aidé, le renouvelle ment de la pensée religieuse. Au lieu d’un renouvellement, il a amené un raidissement. Devant le danger d’agnosticisme, le néo-thomisme a accusé encore le rationalisme théologique. Par ailleurs, les excès des critiques, de Loisy en particulier, ont créé autour des études bibliques une atmosphère de sus picion que seule la récente encyclique sur Γ Écriture sainte a · enfin commencé à détendre. Or, il faut le dire, cette atmo sphère de crainte, ce danger perpétuel de dénonciation para lysent le travail des chercheurs chrétiens; plusieurs des hommes qui font honneur à PÉglise depuis le début du siècle ont été de leur vivant plus ou moins suspects, et le malentendu si regrettable des élites chrétiennes pensantes et de la hiérarchie est loin d’être totalement résolu. Au vrai, cette sévérité provisoire était nécessaire. Il s’agis sait de parer aux dangers créés par le modernisme. ! Le néo thomisme et la Commission biblique ont été ces garde-fous. Mais il est bien clair que des garde-fous ne sont pas des * LES ORIENTATIONS PRÉSENTES DE LA PENSÉE RELIGIEUSE 7 réponses. Je reprendrai ici encore un mot du P. de M ontcheuil : « Le modernisme ne sera pas liquidé tant qu’on n’aura pas donné satisfaction dans la méthode théologique aux exigences d’où est né le modernisme. » Et ceci pour la simple raison que le modernisme n’a été lui-même que l’expression malheu reuse d’exigences authentiques. A ces aspirations il faut en ajouter une dernière, et qui, elle, caractérise parfaitement le moment présent. Les spéculations théoriques, séparées de l’action et n’engageant pas la vie, ont fait leur temps. C’est un axiome commun à des philosophies d’ailleurs antagonistes, comme le marxisme et l’existentialisme, que d’être des pensées engagées. La même tendance se fait sentir à l’intérieur de la pensée chrétienne. Ainsi, la théologie présente est en face d’une triple exigence : 1 jet, mais este quand et elle doit comme le Sujet par exce comme il veut, et par suite être d’abord pénétrée d’esprit de religion ; elle doit répondre aux expériences de lame moderne et tenir compte des dimensions nouvelles que la science et l’histoire ont données à l’espace et au temps, que la littérature et la philosophie ont données à l’âme et à la société ; elle doit enfin être une attitude concrète devant l’existence^ une réponse, umière intérieure non comme un en sera, qu’il en est en train de et de redevenir une, qui engage 1 homme tout entier d’une action où la vie se joue tout entière. La théologie ne sera vivante que si elle répond à ces aspirations. Les pages qui suivent tendent à montrer comment les lignes qui se dessinent actuellement nous permettent d’espérer qu’il est déjà ainsi, et que la pensée théologique reprendre sa place dans la vie intellectuelle présente à notre temps. Le Retour aux Sources Un premier trait marquant de la pensée religieuse contem poraine est le contact repris avec les sources essentielles que sont la Bible, les Pères de Γ Eglise, la liturgie. Certes, ce contact en théorie n’avait jamais été perdu. Mais depuis le treizième siècle, la théologie, qui jusque-là avait été essen tiellement commentaire de la Bible, s’est constituée en science 8 * J I ·> « I H LES ORIENTATIONS PRÉSENTES DE LA PENSÉE RELIGIEUSE autono^üf. Autonomie qui fut en son temps facteur de progrès. Mais il en est résulté une rupture progressive entre l’exégèse et la théologie (chaque discipline se développant selon sa méthode propre) et un dessèchement progressif de la théo logie. Le protestantisme manifeste entre autres choses un violent retour à la Bible, en désaveu d’une théologie purement ÿ scolastique. Dans cette restitution de la Bible à sa fonction centrale dans la pensée chrétienne, les cinquante dernières années ont marqué une première étape. Il s’agissait en effet, d’abord, de mettre la science catholique au fait des acquisitions des diverses sciences bibliques, archéologie, philologie, critique littéraire. Il y a dans ce domaine un énorme labeur accompli. Hier, le P. Lagrange ou le P. de Grandmaison, aujourd’hui, le chanoine Coppens,M . Podechard ou M. Robert font honneur à la science tout court. Mais ce travail préparatoire acquis,— et il doit se continuer,— reste une seconde étape à franchir et qui est de faire bénéficier la pensée théologique de cette redé couverte de la Bible. Car si la Bible est un ensemble de docu ments historiques d’une valeur inestimable et qui doivent être étudiés comme tels, elle est bien plus encore une Parole de Dieu à nous actuellement adressée et contenant des ensei gnements pour les hommes d’aujourd’hui. Ce travail de théologie biblique est actuellement au centre des perspectives des chercheurs. Il est fort avancé déjà en ce qui concerne le Nouveau Testament. L’impulsion a été donnée ici par les travaux des protestants de l’école de 1’ «Histoire des Formes », Bultmann, Dibelius, Cullmann, K. L. Schmidt, etc. Appliquant à l’exégèse les procédés de la phénoménologie, ils ont porté leur effort à analyser le contenu des grandes catégories religieuses de l’Ecriture. Des études comme celles de Kittel sur Logos, de Schmidt sur Royaume de Dieu ont enrichi la théologie. La science catholique est entrée dans la même voie avec des travaux comme la Théologie de Γ Église selon saint Paul de M. Cerfaux. C’est là une orientation féconde qui fait communiquer théo logie et exégèse en s’inspirant des méthodes de la philosophie contemporaine. La question est plus délicate en ce qui concerne Γ Ancien LES ORIENTATIONS PRÉSENTES DE LA PENSÉE RELIGIEUSE 9 9 Testament. On se trouve ici en uploads/Religion/ d-danielou-sj-les-orientations-presentes-de-la-pensee-religieuse-etudes-249-1946-5-21-ocr.pdf
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- Publié le Jul 08, 2021
- Catégorie Religion
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