Échos d'Orient La coexistence initiale du corps et de l'âme dans l'homme d'aprè
Échos d'Orient La coexistence initiale du corps et de l'âme dans l'homme d'après saint Grégoire de Nysse et saint Maxime l'Homologète E. Stéphanou Citer ce document / Cite this document : Stéphanou E. La coexistence initiale du corps et de l'âme dans l'homme d'après saint Grégoire de Nysse et saint Maxime l'Homologète. In: Échos d'Orient, tome 31, n°167, 1932. pp. 304-315; doi : https://doi.org/10.3406/rebyz.1932.2723 https://www.persee.fr/doc/rebyz_1146-9447_1932_num_31_167_2723 Fichier pdf généré le 15/04/2018 La coexistence initiale du corps et de l'âme d'après saint Grégoire de Nysse et saint Maxime THomologète Le problème de l'origine de l'âme est longtemps resté une question de controverse dans l'Église. Les tâtonnements des premiers siècles ont proposé plusieurs solutions qui pratiquement se ramènent à trois : la création ab aeterno, la création in tempore, le traducia- nisme (i). Une question connexe à celle, plus générale, de l'origine est celle de l'union, dans le temps, de l'âme et du corps en vue de la constitution du composé humain, et c'est cette question, plus particulièrement, que nous voudrions envisager chez deux Pères de l'Église, grands penseurs et philosophes reconnus, saint Grégoire de Nysse et saint Maxime l'Homologète. Saint Grégoire de Nysse. — Voici les passages principaux qui nous livrent la pensée du Saint sur la question : i° Les chapitres XXVIII et XXIX du Περί κατασκευής άνθρωπου (2) tenté par saint Grégoire dans le but de donner un complément à l'œuvre de saint Basile sur l'Hexaméron. 20 Un passage très éloquent du De Anima et Resurrectione (3). Nous écarterons comme étrangers à notre saint les ouvrages suivants, où cependant la même question est touchée. i° Le Περί ψυχή; (4) qui n'est qu'un chapitre pris tel quel dans l'ouvrage de Némésius d'Emèse, sur la nature de l'homme (5). Nous savons, en effet, pertinemment que l'évêque de Nysse condamne la théorie de la préexistence. Or, l'auteur du De Anima se prononce catégoriquement en faveur de cette théorie et c'est avec conviction qu'il présente les impossibilités philosophiques de la création successive des âmes et du génératianisme (6). 20 L'opuscule. Περί του τί εστί το κατ' εικόνα Θεοΰ και καθ' ό[Λθίωσιν (7) qui appartient probablement à Anastase le Sinaïte. L'auteur présente comme ressem- (1) Cf. Dictionnaire de théologie catholique, au mot âme, par J. Bainvel, une longue iste d'écrits patristiques gréco-latins consacrés à l'âme. (2) P. G., XLIV, 123-256. (3) P. G., XL VI, 125-128. (4) P. G., XLV, 187-222. (5) P. G., XL. 5o3-5i8. (6) P. G., XLV, 205. (7) P. G., XLIV, i328-i345. LA COEXISTENCE INITIALE DU CORPS ET DE L'AME 3o5 blance divine le caractère tout mystérieux de l'âme dont nous ignorons jusqu'à l'origine; « aussi, conclut-il, voyons-nous combien grossièrement se sont trompés ceux qui tentèrent d'en élu- cider le mystère », et il énumère les opinions soutenues par les différents âges (1). Saint Grégoire ne se serait pas, assurément,, démenti ainsi. C'est dans le De Hominis Opificio que l'évêque de Nysse aborde la question de l'origine de l'âme pour la traiter ex professo (διεξε- τάσαι). Il n'ignore pas que dans l'Église elle est encore objet de controverse (το αμφίβαλλόριενον εν ταϊς έκκλησίαις). Cependant, pour lui, toutes ces opinions qui disloquent le composé humain par la position successive dans le temps de ses parties constitutives sont à rejeter. ι . A la doctrine de la préexistence des âmes (2), il oppose les conséquences ridicules et monstrueuses de la métempsycose à laquelle il la dit attachée {της δε τοιαύτης άτοπίας (de la métempsycose) αυτή εστίν ή αίτια, το προϋφεστάναι τας ψυχας ο'ίεσθαι) (3). En effet, il n'est pas logique que, du monde incorporel, les âmes chutent dans la matière, sous prétexte de purification, car la vie corporelle étant plus propice au péché et à la souillure, il s'ensuivra que l'âme ira,, de chute en chute, jusqu'à sa destruction complète et même jusqu'à son anéantissement (προς το |λή ov... ή ψυχή μεταχωρήσεί.) (4). D'ail- leurs, affirmer la possibilité d'un relèvement après la chute, c'est admettre la supériorité de la vie corporelle et sensible sur la vie incorporelle, si l'une est occasion de chute et l'autre de salut (5). 2. Contre la postériorité de l'âme dans le composé humain, saint Grégoire oppose ses difficultés : i° L'âme venant après le corps serait créée pour le corps et dans le seul but de l'animer; elle lui serait donc inférieure puisque son être serait ordonné à lui, παν το δια τι γινό[λενον, άτιριότερον πάντως εστί του δι' δ γίνεται (6). 2° L'homme venant à l'être par étapes ou par morceaux, dans (1) Ibid., i332 D. . (2) Saint Grégoire vise ici spécialement l'origénisme et le Ilept αρχών qu'il cite d'ailleurs. Ibid., 229 Β. (3) Ibid., 232 Β et XL VI, 1 25 Α. (4) P. G., XLIV, 232 D, 233 A. (5) Ibid., 233 A, Β. ■ (6) Ibid., 229 C, D; 233 C. ν ι 3o6 échos d'orient son corps, puis dans son âme, serait un indice de l'impuissance du Créateur qui pour le créer devrait s'y prendre comme à deux fois (i). 3° Si l'âme n'accompagne pas le principe corporel, celui-ci doit être inanimé (αψυχον), c'est-à-dire mort (νεκρόν). Or, le semen vit, et la preuve en est qu'il est chaud et qu'il se meut (2). 4° L'être de l'homme venant à l'existence par morceaux serait disloqué. 3. Saint Grégoire préfère rester à égale distance de ces deux extrêmes et adopter le synchronisme de position dans l'être du composé humain. Sa grande raison est que l'unité de l'être humain réclame ('une unité de principe, car l'homme ne peut être antérieur ou postérieur à lui-même. Qu'il préexiste dans la pensée de Dieu, nul doute, mais quand vient l'heure de la création, c'est tout entier et non par morceaux qu'il apparaît dans l'être (3). Cependant, pas plus que l'épi de blé, il n'atteint, dès le premier instant, son plein développement. Tout l'homme est là dans le semen dès le premier instant, comme tout l'épi est dans le grain de blé ; aucun de ses constituants n'a préexisté et nul n'est besoin d'un secours extérieur pour la perfection de son être, qui est affaire de temps (où προσλαμβάνουσάν τι των έξωθεν εις άφορ|/.ήν τελειώσεως) (4). Car c'est à mesure que le corps s'organise que l'âme se développe et se manifeste dans ses facultés (5), d'abord nutritive, puis sensible, enfin raisonnable. Mais il y a plus : l'âme trahit sa présence dans le mouvement même qui organise la matière séminale car elle est, elle-même, la créatrice de sa propre habitation. Il est impossible, en effet, dit saint Grégoire, d'imaginer l'âme s'adaptant a une demeure étrangère comme il est impossible à l'empreinte du sceau dans la cire de s'adapter à une autre figure (6). 4. Nulle part dans l'exposé de cette théorie, saint Grégoire ne suppose ou laisse entendre la création immédiate de l'âme indivi- (ι) Ibid., 236 Α. (2) Ibid., 236 D, 237 A. XL VI, 1 25 A, 128 Α. (3) P. G., XLIV, 233 D. (4) Ibid., 236 A, B; 240 A, B. (5) Τή <τα»ματΐκη αΐ/ξή-σ« <τυμ·προΐοΰσΛ... καΐ τα ς τή< ψυχής ένίργείας τώ mv«»!*«^ συναύξεσθαι... ή τής ψυχής ενέργεια καταλλήλως έμφυομένη τω υποκείμενη, συνϊβιδ/δωσι καΐ συναύξεται. / id., 236 C, D; 237 Β, C. XLVI, 128 Α. (6) XLIV, 257 Β. Έν τω κατασκευάζειν αυτήν έαυτη δια τής έντ£6είση.ς 5λη< το προσηνές οΐκητήριον. Oûôk γαρ εϊναι δυνατόν λογιζόμεθα, άλλοτρίαις οΐκοδομαΐς την ψυχην Ιναρμόζίσ9«[, ώς ουκ Ιστι την έν τω κηρω σφραγίδα προς άλλοτρίαν άρμοσθήναι γλυφήν. m Y^m/sp LA COEXISTENCE INITIALE DU CORPS ET DE l'aME 3θ7 duelle par Dieu. Il exclut, au contraire, tout apport extérieur, comme nous venons de le voir, et, après avoir répété la nécessité d'un principe unique pour le composé humain, il affirme que ce prinr cipe est à un point de vue supérieur la volonté première de Dieu, et à un point de vue secondaire la naissance (i). Dans le De Anima et Resurrectione, postérieur, quoique de peu, au De Hominis Opi- ficio (a), la pensée et l'expression se précisent et l'origine de l'âme trouve son explication dans l'exemple d'un jeune rejeton fiché en terre et qui s'acquiert une vie individuelle et indépendante ; et saint Grégoire de continuer : ούτω φαρ,έν, καΐ το εκ του άνθρωπου αποσπώ [χενον προς ανθρώπου φυτείαν, και αυτό τρόπον τ«.να ζώον είναι, εξ εμψύχου ευ,ψυχον, εκ τρεφομένου τρεφόυ-ενον (3). Ainsi donc, d'après cette doctrine, ce sont les parents qui communiquent à l'enfant son âme aussi bien que son corps. Et voici qui corrobore encore ce point de vue : Cette communication de l'âme de parents à enfants ne peut persister infiniment et, un jour, elle cessera de se produire. La raison en est que toute nature intellectuelle arrivée à sa plénitude s'arrête dans son développement (πάτης της νοητής φύσεως εν τφ ίδίφ πλήρωμα« έστώσης). Or, la nature humaine participe de l'ordre intellectuel. Il viendra donc un jour où le flux successif de la nature humaine s'arrêtera (στήσεται πάντως ή ροώδης αυτή τής φύσεως κίνησις) ; il n'y aura plus alors ni génération ni corruption, ce sera la vie stable et indissoluble à laquelle se uploads/Religion/ e-stepanou-la-coexistence-initiale-du-corps-et-de-l-x27-ame-d-x27-apres-saint-gregoire-de 1 .pdf
Documents similaires
-
23
-
0
-
0
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise- Détails
- Publié le Sep 18, 2021
- Catégorie Religion
- Langue French
- Taille du fichier 0.8797MB