Échos d'Orient La question du Purgatoire au concile de Ferrare-Florence Martin

Échos d'Orient La question du Purgatoire au concile de Ferrare-Florence Martin Jugie Citer ce document / Cite this document : Jugie Martin. La question du Purgatoire au concile de Ferrare-Florence. In: Échos d'Orient, tome 20, n°123, 1921. pp. 269-282; doi : https://doi.org/10.3406/rebyz.1921.4283 https://www.persee.fr/doc/rebyz_1146-9447_1921_num_20_123_4283 Fichier pdf généré le 14/04/2018 La question du Purgatoire au Concile de Ferrare-Florence Le savant archevêque d'Athènes, S. Exe. Msr Louis Petit, vient d'entreprendre la publication d'une série de documents inédits relatifs au concile de Florence. On sait dans quel état fragmentaire nous sont parvenus les Actes de ce concile. On ne possède plus, ou, du moins, on n'a pas encore retrouvé les procès-verbaux officiels des sessions. La collection de Mer Petit comblera en partie ces lacunes regrettables et rendra un service signalé à la science catholique. Le premier fascicule de documents, qui vient de paraître dans la Patrologia orientalis de Graffm-Nau (ι), et s'ouvre par une longue et magnifique dédicace à Sa Sainteté le Pape Benoît XV, fait bien augurer de toute la série. Il a pour titre : La question du Purgatoire à Ferrare. C'est un recueil de six pièces d'un prix inestimable pour l'histoire de la controverse entre Grecs et Latins sur les fins dernières. Une savante introduction de vingt-quatne pages nous renseigne sur leur provenance, et nous donne de leur contenu un bref résumé, fait non pour dispenser de la lecture directe, mais pouf en inspirer l'attrait. A cet attrait, nous n'avons pas résisté, et nous donnons au lecteur le résultat d'un premier coup d'œil jeté sur ces documents. La question du Purgatoire fut le premier des points controversés entre les deux Églises qui vint en discussion à Ferrare. Les Grecs le voulurent ainsi. Depuis le début du xme siècle, ils se battaient avec une ardeur digne d'un sujet plus important contre le feu du Purgatoire, et ils espéraient sans doute remporter sur cette Kainotomie latine une victoire facile. Les Latins se prêtèrent de bonne grâce à leur désir, et commencèrent par fournir, à la cinquième réunion privée, qui eut lieu (i) Documents relatifs au concile de Florence. I. La question du Purgatoire à Ferrare. Documents I-VI. Textes édités et traduits par S. Exe. Mct Louis Petit, archevêque latin d'Athènes. Patrologia orientalis, Graffin-Nau, t. XV, fasc. I, grand in-8° de 168 pages. Paris, Firmin-Didot, 1920. Prix : 12 fr. 85 (augmentation provisoire de 20 %). Par une heureuse innovation sur les précédents volumes de la Patrologia orientalis, les pages du présent fascicule sont disposées sur deux colonnes portant, l'une le teste original, l'autre la traduction, comme dans la Patrologie de Migne. L'exécution typographique est d'une perfection rare. Les lignes du texte original sont numérotées. De plus, les Documents relatifs au concile de Florence ont leur pagination spéciale, qui permettra leur publication en volumes séparés, indépendants de la série des fascicules de la Patrologia orientalis. 27O ÉCHOS D'ORIENT le 5 juin 1438, un exposé aussi court que lucide de Ja doctrine occidentale. Cet exposé, dû à la plume du cardinal Julien Cesarini, est le premier document de la collection publiée par Mer Petit. André de Santa-Croce l'avait inséré, mais avec de graves lacunes, dans sa Col- latio XXII. Nous le trouvons ici avec son texte intégral, accompagné de la traduction grecque, restée inconnue jusqu'à ce jour. Le cardinal Julien commence par transcrire le passage de la Profession de foi dite de Michel Paléologue relatif aux fins dernières. Ce passage déborde la question du Purgatoire proprement dit, et exprime le dogme catholique sur l'ensemble des fins dernières. Le mot même de Purgatoire ne s'y trouve pas, et il n'y est pas question du feu du Purgatoire, mais simplement de peines purificatrices qu'ont à subir les défunts de l'état intermédiaire, avant le jugement .dernier. Il devait être inséré tel quel dans le .décret d'union, sauf une petite addition sur la nature de la béatitude des âmes saintes, rendue nécessaire par les discussions qui eurent lieu à ce sujet et dont nous parlerons tout à l'heure. Si les Latins s'en étaient tenus là, le débat sur le Purgatoire proprement dit eût été vite clos, car l'ensemble des Grecs, y compris Marc d'Éphèse, admettaient les deux seuls points définis dans l'Église catholique, de nos jours encore, sur le Purgatoire: à savoir l'existence d'un état intermédiaire entre le .ciel et renier, et l'utilité des suffrages des vivants pour les âmes placées par la justice divine dans cet état, qui ne doit pas se prolonger au delà du jugement dernier. Sur ces deux points capitaux il y avait entente entre les deux partis, comme cela ressort clairement des documents publiés par Msr Petit. Pourquoi donc la discussion dura- t-elle si longtemps et arriva-t-elle à s'étendre à d'autres sujets? Ce furent les preuves apportées par le cardinal Cesarini pour établir spécialement la doctrine du Purgatoire et l'existence d'un feu. purificateur, qui alimentèrent la controverse. Ces preuves se réduisaient à trois textes scripturaires (// Mach, xii, 46; Matth. xii, }2, comparé à Marc, m, 29, et à Luc. xn, 10; / Cor. m, 13-15), à la pratique universelle de la prière pour les morts, à l'au* torité de l'Eglise romaine, à plusieurs passages patristiques empruntés à saint Augustin, à saint Ambroise, à saint Grégoire le Grand, à saint Basile, à saint Grégoire de Nysse, au pseudo-Denys, à saint Épiphane, à saint Jean Damascene, à Théodoret, et enfin à une raison de convenance tirée de la justice divine, qui ne laisse aucune faute, aucun désordre impunis. Plusieurs de ces preuves parlaient expressément du feu, mais la plupart ne visaient qu'à établir le point vraiment important, l'existence d'un état intermédiaire. Il semble que les Latins auraient dû LA QUESTION DU PURGATOIRE AU CONCILE DE FERRARE-FLORENCE 27 I distinguer nettement ces deux questions et assigner à chacune son importance respective. Ils ne le firent pas et présentèrent tout sur le même plan. Les Grecs ne manquèrent pas de tirer avantage de cette faute de tactique, et tout le poids de leur offensive fut dirigé contre l'existence d'un feu purificateur de nature matérielle. Marc d'Éphèse et Bessarion de Nicée furent chargés de répondre au nom des Grecs à l'exposé des Latins. Ils rédigèrent chacun un travail spécial, qui fut ensuite fondu en une réponse collective, présentée par Bessanon au nom des siens dans la séance du 14 juin. La dissertation de Marc nous est parvenue dans son intégrité. Elle constitue le numéro II de la collection de Msr Petit et le premier discours de l'archevêque d'Éphèse sur le Purgatoire. De la réponse de Bessarion nous n'avons que ce qui en est passé dans la réponse collective (document III) et qui est facilement reconnaissable par le fait que le document officiel fut une simple juxtaposition de morceaux empruntés aux deux théologiens. On donna la préférence au travail de Bessarion pour le préambule et l'exposé de la question, tandis que Marc obtint la palme pour l'argumentation proprement dite. Ce qui lui appartient en propre saute aux yeux par la simple collation des deux documents. M%T Petit raconte par le détail l'histoire vraiment curieuse de cette réponse collective, qui paraît être le seul document vraiment officiel présenté par les Grecs comme expression de leur doctrine, les deux autres discours de Marc ne nous livrant sans doute que la pensée personnelle de leur auteur. Les premières éditions ou traductions qui en furent faites au xvie siècle portaient un titre relativement exact; mais, à partir du xvne siècle, sa véritable origine se perd. Les uns l'attribuent à Nil ou à Nicolas Cabasjlas, d'autres à Barlaam. C'est comme production du Calabrais que Pierre Arcudius la réfute dans son De Purga- torio igné adversus Barlaam, publié à Rome en 1637. Allatius est si scandalisé de son contenu que, en vertu de la critique interne, il ne craint pas d'y voir un faux d'un protestant du xvie siècle. M?r Petit ■remet toutes choses au point et établit par des preuves péremptoires la véritable origine du document. Le lecteur nous saura gré d'en donner ici un bref résumé. Sur un ton très courtois, Bessarion commence par faire espérer une heureuse issue de la controverse, parce que, de part et d'autre, on cherche non à remporter un vain triomphe, mais à découvrir la vérité; puis il indique d'une manière très nette les points sur lesquels Grecs et Latins sont d'accord, et le point spécial sur lequel ils ne s'entendent pas. Les Grecs félicitent les Occidentaux d'avoir clairement distingué 272 ÉCHOS D'ORIENT trois catégories de défunts, à savoir : les saints, les damnés et ceux qui sont dans un état intermédiaire. Ces derniers, ces μέσο;, ayant quitté le monde sans péché mortel, ne méritent pas l'enfer, mais ils ne partagent pas non plus, aussitôt après la mort, le sort des âmes saintes. A leur sujet trois questions se posent : i° Est-ce qu'ils obtiennent, après la mort, la rémission des péchés véniels qu'ils ont commis? Et Bessarion répond par un oui catégorique. 20 Est-ce que cette rémission s'obtient par un châtiment (διακολάτεο>ς) que ces âmes doivent subir, ou bien est-elle due uniquement à la bonté de Dieu, uploads/Religion/ la-question-du-purgatoire-au-concile-de-ferrare-florence-martin-jugie.pdf

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  • Publié le Aoû 29, 2022
  • Catégorie Religion
  • Langue French
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