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1 LA SYMBOLIQUE CHRETIENNE DE LA LUMIERE 1- Quelques notions scripturaires Au point de départ, la symbolique de la lumière n’est pas une notion exclusivement chrétienne ou biblique. C’est une notion que l’on rencontre dans à peu près toutes les religions, associant les éléments physiques de clarté avec des connotations morales, souvent formulées de manière antithétique : bien / mal, lumière / ténèbres. Rien d’étonnant à ce que la Bible utilise ce fond commun des représentations religieuses pour exprimer le mystère divin et la participation humaine à ce mystère. Dans le livre de la Genèse, le premier acte créateur est de « séparer la lumière et les ténèbres » (Gn 1, 3), mettant ainsi fin au chaos primitif. La lumière, créature de Dieu, n’existe que par lui et lui est entièrement soumise ; il en fait ce qu’il veut : « Il envoie la lumière, elle part ; il la rappelle, elle obéit en tremblant. » (Baruch, 3, 33). Plus que les autres êtres crées, la lumière est signe de la présence divine : Dieu « s’en revêt comme d’un manteau », au dire du psaume (103, 3) : amictus lumine sicut vestimento. Les théophanies s’accompagnent de lumière et des autres éléments associés : feu, éclair, clarté aveuglante. Les derniers livres bibliques dépassent cette imaginaire encore très matériel pour faire de la lumière une analogie capable d’exprimer l’essence divine : la Sagesse de Dieu est ainsi qualifiée de «reflet de la lumière éternelle, un miroir sans tâche de l’activité de Dieu, une image de son excellence.» (Sg 8, 26). Attribut divin, la lumière est aussi employée pour décrire les dons de Dieu : Il faire luire sur l’homme « la lumière de sa face » (Ps. 4,7) ; la parole divine est, pour le croyant, « une lampe pour mes pas, une lumière sur ma route » (Ps. 118, 105) ; Dieu lui-même est pour lui « lumière et salut », (Ps. 26, 1), et la lumière est le premier des signes annonciateurs des temps messianiques : « Le peuple qui marchait dans les ténèbres a vu se lever une grande lumière, et sur les habitants du pays de l’ombre une lumière a resplendi » (Is. 9, 1). Dans le Nouveau Testament, cette lumière eschatologique promise dans les écrits prophétiques est devenue une réalité. C’est par la précédente citation d’Isaïe que Mathieu ouvre le ministère de Jésus en Galilée (Mt. 4, 14-17) ; Luc axe tous ses récits de l’enfance sur l’annonce de cette épiphanie lumineuse, « soleil levant qui vient nous visiter » pour Zacharie (Lc 1 78-79), « Lumière qui se révèle aux nations » pour Siméon (Lc 2, 32) ; à l’autre extrémité de son récit l’évangéliste fait dire à Paul devant le roi Agrippa qu’il a été envoyé aux nations païennes afin « qu’elles reviennent des ténèbres à la lumière », tout comme le Christ, dans sa résurrection, a apporté « la lumière au peuple et aux nations païennes » (Ac. 26, 17 et 23). Les actes et les paroles de Jésus le font apparaître lui-même comme lumière du monde. Les récits de guérison d’aveugles jouent un rôle particulier à cet égard ; en particulier, dans l’évangile de Saint Jean, le récit de la guérison de l’aveugle né (Jn 9 1-40), déjà précédé, quelques lignes plus haut, par la déclaration de Jésus : « Je suis la lumière du monde ; celui qui marche à ma suite aura la lumière de la vie » (Jn 8, 12). Déjà dès le prologue de son Evangile Jean présente le Verbe de Dieu comme la lumière véritable, celle qui « illumine tout homme venant en ce monde », non sans laisser entrevoir l’affrontement de cette lumière avec les « ténèbres » du péché et de mal (Jn 1, 4-9). On ne peut pas ne pas noter enfin les récits de la transfiguration, dans lesquels les synoptiques reprennent en partie les images des théophanies de l’ancien testament ; les vêtements de Jésus « éblouissants comme la lumière » (Mt. 17, 2) annoncent déjà la gloire du ressuscité. Au matin de Pâques l’ange annonciateur de 2 la résurrection a lui-même cette apparence lumineuse – « il avait l’aspect de l’éclair, et sa robe était blanche comme neige » (Mt 28, 3) ; c’est entouré de la même lumière éblouissante que Jésus apparaît à Paul sur le chemin de Damas (Ac 9, 3). Au terme, l’épître aux Hébreux peut reprendre les termes du livre de la Sagesse et les appliquer au Fils, « resplendissement de la gloire du Père et effigie de sa substance » (He 1, 3). Les mêmes métaphores lumineuses désignent la vocation chrétienne : Dieu nous appelle « des ténèbres à son admirable lumière » (I P. 2, 9) ; c’est lui seul qui nous appelle à partager « le sort des saints dans la lumière » (Col. 1, 12) ; dans le mystère baptismal, qui est lui-même « illumination » (He 6, 4) s’accomplit ce passage : « autrefois vous étiez ténèbres, maintenant vous êtes lumière dans le Seigneur » (Eph. 5, 8). Le chrétien est désormais « fils de lumière » (Eph. 5,8) dont il a « revêtu les armes » (Rm. 13, 12). Les épîtres johanniques, en cohérence avec le quatrième évangile, développent le même thème : le disciple est invité à « marcher dans la lumière » pour être en communion avec Celui qui est « lui-même dans la lumière » (I Jn 1, 7). L’accomplissement de tout se produira dans la Jérusalem céleste : « Elle peut se passer de l’éclat du soleil et de la lune, car la gloire de Dieu l’a illuminée, et l’Agneau lui tient lieu de flambeau » (Ap. 21, 23) ; cette clarté de la cité définitive rejaillira sur les élus : « de nuit, il n’y en aura plus ; ils se passeront de lampe ou de soleil pour s’éclairer, car le Seigneur Dieu répandra sur eux sa lumière, et ils régneront pour les siècles des siècles »(Ap. 22, 5) 2- Symbolique de la lumière et liturgie Là encore, les rituels juifs ou chrétiens ne présentent pas un caractère d’exclusivité : utiliser le phénomène naturel de la lumière et l’exploiter à des fins religieuses est un trait commun de très nombreuses traditions religieuses. C’était d’autant plus évident aux époques antérieures - et jusqu’à la généralisation de l’éclairage électrique : le monde antique ou médiéval est un monde plongé dans l’obscurité en dehors des heures diurnes ; l’éclairage artificiel est difficile, rare et cher ; l’éclairage public est inexistant, les « illuminations » sont la caractéristique des moments privilégiés et des grandes réjouissances ; la pauvre lampe domestique est à elle seule le symbole de l’existence, fragile et précaire. La liturgie du temple utilise déjà la symbolique de la lumière. L’Exode nous décrit (Ex. 25 31-40) le chandelier à sept branches, la menorah, dont la lumière doit briller « à perpétuité devant le Seigneur » (Ex. 27, 21). Cette lumière perpétuelle a son équivalent dans la liturgie domestique du Sabbat ; le vendredi soir, avant le coucher du soleil, la maîtresse de maison allume une lampe en l’honneur de l’Eternel. De même, dans la liturgie synagogale, la première des bénédictions du matin, à l’heure où s’effacent les ombres de la nuit et où revient la clarté, est une action de grâces pour la lumière : « Sois loué, Eternel, notre Dieu, roi de l’univers, auteur de la lumière …pour la magnificence de tes œuvres et les lumières brillantes que tu as crées … ». La liturgie chrétienne s’est tout naturellement insérée dans ce cadre. Lorsque Paul célèbre, à Troas, la liturgie dominicale, le texte des Actes qui raconte la « résurrection » d’un jeune garçon - tombé de la fenêtre pendant que Paul parlait - note qu’il y avait « bon nombre de lampes dans la chambre » où les disciples étaient réunis (Ac. 20,7). Au fur et à mesure qu’elle gagnait en importance et en liberté, l’Eglise accompagnait ses célébrations de lampes et de flambeaux, surtout la liturgie pascale, dont une homélie ancienne nous dit qu’elle est 3 resplendissante de la lumière des cierges, cereorum splendet ornatus.1 La tradition apostolique d’Hippolyte de Rome nous rapporte le rite du lucernaire qui précède le repas rituel de l’agape : le diacre apporte la lampe ; l’évêque debout au milieu des fidèles rend grâces en ces termes : « Nous te rendons grâces, Seigneur, par ton Fils Jésus-Christ notre Seigneur, par qui tu nous as éclairés en nous révélant la lumière incorruptible. Puisque nous avons passé la durée du jour et que nous sommes parvenus au début de la nuit, en nous rassasiant de la lumière du jour que tu as crée pour notre satisfaction, et puisque maintenant, par ta grâce, nous ne manquons pas de la lumière du soir, nous te louons et te glorifions par ton Fils Jésus-Christ notre Seigneur par qui à toi gloire, puissance, honneur, avec le Saint-Esprit, maintenant et toujours et dans les siècles des siècles. uploads/Religion/ symbolique-de-la-lumiere 1 .pdf
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- Publié le Nov 03, 2022
- Catégorie Religion
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