G. Jouassard Une intuition fondamentale de saint Cyrille d'Alexandrie dans les

G. Jouassard Une intuition fondamentale de saint Cyrille d'Alexandrie dans les premières années de son épiscopat In: Revue des études byzantines, tome 11, 1953. pp. 175-186. Citer ce document / Cite this document : Jouassard G. Une intuition fondamentale de saint Cyrille d'Alexandrie dans les premières années de son épiscopat. In: Revue des études byzantines, tome 11, 1953. pp. 175-186. doi : 10.3406/rebyz.1953.1081 http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/rebyz_0766-5598_1953_num_11_1_1081 UNE INTUITION FONDAMENTALE DE SAINT CYRILLE D'ALEXANDRIE EN CHRISTOLO&IE DANS LES PREMIÈRES ANNÉES DE SON ÉPISCOPAT L'étude de la christologie qu'a pratiquée saint Cyrille d'Alexandrie durant la période antérieure à 428 est à l'ordre du jour, du fait en particulier de l'ouvrage, a tous égards important, de M. Liébaert (1). Ce dernier a l'impression (2), ce n'est pas nous qui l'en blâmerons, mais bien au contraire, que la clé pourrait être là de l'interprétation à donner de saint Cyrille dans cette matière. Cela même est notre sentiment depuis bientôt vingt-cinq ans. Nous voudrions précis ément le mettre ici en lumière sur un point particulier mais capital à notre avis. Si nous y arrivions, ce serait sans doute réaliser œuvre agréable au jubilaire que nous fêtons. Il a tant fait pour les études patristiques, ainsi, il est vrai, que dans quantité d'autres domaines. Puisse cet hommage que nous lui destinons, si modeste soit-il, lui prouver la reconnaissance que la Faculté de théologie de Lyon garde à son Professeur honoraire pour cette collaboration longue et intime qu'il a bien voulu lui assurer. Il ne conviendrait guère que dans une telle circonstance nous entrions en discussion avec M. Liébaert sur les points nombreux où, malgré notre estime pour le travail qu'il a fourni, nous sommes dans l'incapacité de le suivre. Il faudrait d'ailleurs pour cette revue cr itique une très longue étude, tant les problèmes soulevés sont délicats, complexes et importants. Nous préférons faire ici œuvre positive en disant comment nous comprenons saint Cyrille sur la question envisagée et comment, croyons-nous, il est nécessaire de le comprendre pour rester fidèle à sa pensée et à la lettre de ses écrits. (1) J. Liébaert, La doctrine de saint Cyrille d'Alexandrie avant la querelle nestorienne, Lille, 1951. (2) Op. cit., p. 9. 176 MÉLANGES MARTIN JUGIE Pour qu'on ne puisse contester notre exégèse quant à la date que nous nous sommes fixée, les premières années de Fépiscopat, nous nous référerons en ordre principal à deux épîtres pascales de saint Cyrille, qui sont spécialement en évidence du point de vue christologique au cours de cette période : l'épître pascale pour 420 (1) et l'épître pour 423 (2). Nous nous permettrons en outre de ren voyer par endroit, à titre généralement de complément d'information, à des passages qui figurent dans les ouvrages suivants : De adora- tione (3), Glaphura (4), Commentaires sur les prophètes (5). Quelle que soit la date de ces ouvrages (6), il est clair, si on veut les examiner en bloc, qu'ils présentent deux caractéristiques communes, lesquelles les classent à part : 1° ils ne manifestent de la part de leur auteur aucun intérêt particulier pour la polémique sur le terrain dogmat ique (7), spécialement pour la polémique contre l'arianisme; 2° ils relèvent tous d'une théologie très simple, voire rudimentaire, en (1) C'est la pièce capitale. On la lit dans P. G. 77, 553-577 sous le titre doublement inexact d'Homélie VIII. Il s'agit en réalité d'une lettre et qui devait porter le n° 7, puisque la pre mière épître connue qu'ait rédigée Cyrille pour annoncer la Pâque est celle de l'année 414 (ib., 401-426), les autres ayant suivi en série continue, sans l'interruption que les éditeurs ont imaginée et que Migne signale (ib., 451-452). Le morceau qui importe pour nous dans cette lettre n° 7 se trouve col. 565 C-577 A. (2) Horn. XI dans Migne, ib., 633-665. Il s'y rencontre vers la fin (661 D-665 A) un rappel discret de la doctrine proposée dans la lettre pour 420. (3) P. G. 68, 131-1125. (4) P. G. 69, 9-678. (5) P. G. 71, 9-1061 et 72,9-364 pour les petits prophètes, et mieux dans P. E. Pusey, Sancti Patris nostri Cyrilli Archiepiscopi Alexandrini in XII Prophetas, 2 vol., Oxford, 1868. Pour Isaïe, P. G. 70, 9-1449. (6) Nous avions pris position sur ce point et assigné à ces ouvrages une date antérieure à 423-424 (L'activité littéraire de saint Cyrille d'Alexandrie jusqu'à 428. Essai de chronologie et de synthèse dans Mélanges E. Podechard, Lyon, 1944, p. 161-174). Le R. P. N. Charlier, reprenant des vues de Mgr Lebon, a contesté ces conclusions dans sa thèse de Louvain, dont un extrait a paru dans la Revue d'histoire ecclésiastique, 1950, p. 25-81, sous le titre : Le « Thesaurus de Trinitate » de saint Cyrille d'Alexandrie. Questions de critique littéraire. Le P. Charlier estimait que ledit Thesaurus serait le plus ancien ouvrage de l'évêque. M. Lié- baert a adopté à son tour ces conclusions dans l'ouvrage précité, alors que précédemment, dans sa thèse ronéotypée soutenue à Lille en 1948 (Saint Cyrille d'Alexandrie et l'Arianisme. Les sources et la doctrine du Thesaurus et des Dialogues sur la Trinité), il n'envisageait point une telle solution. Il en est résulté pour son ouvrage imprimé, et du fait du changement de titre survenu en outre, une modification considérable de la perspective initiale, laquelle modification rend ce travail imprimé justiciable de critiques nombreuses et importantes. Nous nous refusons à nous lancer ici dans ces critiques ; ceux qui compareront ces quelques pages au travail de M. Liébaert verront aisément ce qui nous sépare de lui pour l'essentiel. Nous ne prétendons pas davantage justifier dans ces mêmes pages notre point de vue per sonnel quant, à la chronologie des œuvres antérieures à 428-429. Nous enregistrerons seul ement qu'un examen nouveau de la question nous a amené à maintenir ce point de vue. (7) Juifs et païens sont, attaqués dans ces ouvrages comme il arrive fréquemment dans les lettres pascales antérieures à 424. Il est très rare au contraire que des erreurs doctrinales soient signalées de part et d'autre. Quand elles le sont, c'est brièvement. L'exception la plus notable se trouve justement dans le morceau cité plus haut de la lettre pascale pour 420. UNE INTUITION FONDAMENTALE DE SAINT CYRILLE D'ALEXANDRIE 177 matière trinitaire et christologique. Il serait aisé d'ajouter une tro isième caractéristique et de prouver que c'est la même christologie et la même théologie trinitaire qu'on trouve dans tous. A peine découvrirait-on dans tel ou tel d'entre eux quelques expressions ici ou là qu'on ne pourrait appuyer de parallèles plus ou moins nom breux (1). Il reste que c'est dans les lettres pascales susnommées que nous puiserons avant tout, afin, nous le répétons, qu'on ne puisse aucunement contester que les formules que nous utiliserons sont anciennes, sinon parmi les plus anciennes qu'on puisse atteindre de saint Cyrille (2). Ces lettres pascales offrent un autre avantage, celui de nous présenter des développements christologiques, non pas extrêmement longs chacune, mais beaucoup plus longs sans aucun doute, incomparablement plus longs dans l'épître pour 420, que tous ceux qu'on trouverait dans les ouvrages que nous énumérions ci-dessus. L'épître pour 420 offre même cet intérêt particulier d'avoir été manifestement rédigée avec dessein exprès de donner une leçon de christologie, donc, à n'en pas douter, avec une attention très spé ciale. Car, par exception, le document vise dans une portion notable (3) certaine erreur christologique que Cyrille, à cette date, semble-t-il, a rencontrée sur sa route, sans qu'on puisse dire au reste comment il l'a fait (4) ni qui il vise exactement (5). Quel qu'ait pu être l'adversaire envisagé, l'exposé amène son auteur à considérer en face le Christ, comme il arrive à Cyrille plus d'une fois. Le Christ dans sa réalité constitutive, et non pas seulement, (1) La chose est peu fréquente, de fait, et s'explique sans peine, là où elle se produit, si l'on songe que jamais en dehors des lettres pascales précitées, Cyrille, dans le lot envisagé, ne traite de christologie ex professo. C'est par le jeu des circonstances, d'un texte à commenter par exemple, qu'il aborde le sujet. Généralement il le fait en peu de mots, souvent par simple allusion en passant. (2) Nous n'aborderons pas ce dernier point; il nous faudrait discuter ces questions de chronologie relative que nous avons systématiquement écartées de nos perspectives présentes de façon à éviter au maximum ce qui pourrait ressembler à de la polémique. (3) A partir de P. G. 77, 568 D; mais sans doute déjà un peu avant, Cyrille avait-il en vue cette erreur. (4) A lire certaine réflexion qu'on lit col. 572 Β (ζίπιρ τ;ν;ς όλως ε'.σί), on pourrait même se demander si l'évèque d'Alexandrie est très sûr qu'il existe réellement des person nages tels que ceux qu'il a en vue. Peut-être, il est vrai, veut-il simplement se poser la ques tion : vont-ils en définitive jusqu'au point qu'il a envisagé? (5) L'erreur à laquelle il en a, est le fait de gens qui diviseraient le Christ en deux. L'objec tion cependant qui lui arrive de ces gens-là (col. 568 D), uploads/Religion/ une-intuition-fondamentale-de-saint-cyrille-d-x27-alexandrie-dans-les-premieres-annees-de-son-episcopat.pdf

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  • Publié le Jui 07, 2021
  • Catégorie Religion
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