Insufficient Data for Meaningful Answer Données insuffisantes pour réponse sign
Insufficient Data for Meaningful Answer Données insuffisantes pour réponse significative Maxime Bondu Gaël Grivet Villa du Parc, Annemasse 15/09 - 10/11/2012 catalogue de l’exposition catalogue of the exhibition curateur curator - Emile Ouroumov Emile Ouroumov: Le serveur a trouvé votre requête confuse et ne sait pas comment la traiter. The server found your request confusing and isn’t sure how to proceed. Oeuvres Works Hanna Alkema: Données mouvantes pour réponse incertaine Unstable Data for Indefinite Answer Julie Enckell Julliard: De l’art comme du logogriphe Art as Logogriph Biographies Biographies 6 9 12 44 47 50 53 62 La dernière question fut posée pour la première fois, presque en manière de plaisanterie, le 21 mai 2061, à une époque où l’humanité faisait ses premiers pas dans la lumière. […] “Est-ce que l’humanité sera capable un jour, sans dépense d’énergie, de rendre au Soleil sa jeunesse, même après qu’il sera mort de vieillesse ?” Ou peut-être, plus simplement : “Comment l’entropie de l’univers peut-elle être amenée à décroître massivement ?” Multivac devint aussitôt inerte et silencieux. Le lent clignotement des voyants cessa, les sons lointains des relais se turent. Enfin, au moment où les deux hommes effrayés ne pouvaient plus retenir leur respiration, le téléscripteur fixé à cette partie de Multivac s’anima brusquement. Cinq mots y étaient imprimés : DONNEES INSUFFISANTES POUR RÉPONSE SIGNIFICATIVE.* “DONNEES INSUFFISANTES POUR REPONSE SIGNIFICATIVE” est un constat fait par Isaac Asimov à une époque où l’humanité n’est plus à la hauteur de ses propres découvertes et avancées scientifiques. Ayant progressivement délégué à des cerveaux informatiques la gestion quotidienne d’un monde devenu trop com- plexe, l’homme est désormais en position de servitude et de dépendance vis-à-vis d’un flux de données qu’il ne peut plus maîtriser, voire appréhender. Malgré ses capacités intellectuelles et analytiques censées le différencier de la froideur binaire de l’informatique et la robotique, vient le jour où, tout en étendant progressivement sa maîtrise de l’espace et de l’énergie, il n’est pas capable de répondre à la question la plus importante qui soit : celle de la réversibilité de la mort thermique de l’univers, condition première pour la survie de l’espèce humaine à long terme. Nonobstant une accumulation de données incalculable et exponen- tielle, aucune réponse ne voit le jour avant l’extinction de l’homme. A notre époque, la place de la science et la figure de l’explorateur se retrouvent de plus en plus dans une position similaire. Après une grande et héroïque période de découvertes scientifiques et d’exploration géographique, où le récit romancé des exploits humains compte presque autant que la valeur de découverte, la Emile Ouroumov Le serveur a trouvé votre requête confuse et ne sait pas comment la traiter. 6 * Isaac Asimov, “La dernière question”, in Le Robot qui rêvait, Paris, Flammarion, 1988 [orig: “The Last Question”, in Science Fiction Quarterly, Massachusetts, Columbia Publica- tions, novembre 1956] science d’aujourd’hui est beaucoup plus spécialisée, obscure et cryptique pour celui qui n’en possède pas les clés. Derrière les écrans de contrôle des télescopes, sondes et autres drones, nous ne sommes désormais qu’observateurs de nos prothèses technologiques, explorateurs par délégation. Ou, pour traverser quelques siècles en un trait : Marco Polo, Léonard de Vinci, Christophe Colomb, Isaac Newton, Albert Einstein, Neil Armstrong, Hubble. Et pourtant, historiquement les découvertes ne sont pas systématiquement le produit d’une érudition très construite et focalisée. Le raisonnement inventif en l’absence de données, la sérendipité (faculté de découvrir des phénomènes grâce au hasard et capacité d’interprétation adaptative) ont été des moteurs importants pour la science. Des auteurs revendiquent les bienfaits de la vue d’ensemble et de la distanciation d’une analyse trop proche de son sujet, et réfléchissent sur les confins du champ exploré par la science où même l’arbitraire et l’irrationnel peuvent être considérés, à titre d’hypothèse, faute d’informations suffisantes. Ce qui n’est pas sans rappeler la mise en cause de la méthodologie scientifique à travers le processus de rejet incrédule et de rationalisation ultérieure exprimés par “The Black Swan Theory” (Théorie des cygnes noirs)* qui traite de l’incerti- tude et se réfère au concept selon lequel un événement imprévisible a une faible probabilité de se dérouler, mais s’il se réalise, les conséquences ont une portée considérable et exceptionnelle. Par la suite, l’évènement est rationalisé, alors que la certitude de sa probabilité nulle découlant de séries d’observations parfois millénaires, se trouve ébranlée. A l’origine, une expression latine du tournant du Ier siècle présumait que les cygnes noirs n’existaient pas ; l’observation d’un seul cygne noir aura par la suite (en 1697, Australie) suffi à défaire toute logique et système de pensée inhérents à la phrase. L’impossibilité perçue se trouve ainsi dénuée de validité scientifique, quoique procédant originellement d’un système de validation à l’œuvre dans la science. Données insuffisantes pour réponse significative entend fournir quelques données très parcellaires et insuffisantes pour prolonger ces questionnements. Sous la forme d’une exposition “stéréographique”, elle établira une conversation rappro- chée entre deux jeunes artistes, Maxime Bondu et Gaël Grivet. S’ils partagent des intérêts et des thématiques communes, leurs méthodes d’approche varient sensiblement. Maxime Bondu (né en 1985, vit à Gaillard, France) met en œuvre une esthétique spéculative de la découverte qui est contemplée, interprétée et déformée à travers le vortex spatio-temporel d’un miroir mimétique. Si son travail se situe fréquemment dans le voisinage de la réplique, le terrain qu’il lui attribue produit des formes inattendues relevant de la réinvention empirique ou d’une tautologie à contre-emploi, l’une et l’autre finalement productrices d’angles d’approche diver- gents. Loin du discours agencé ou du commentaire avisé, le champ de tension ainsi introduit par l’artiste échappe à la simple immatriculation du fait historique ou social, s’orientant davantage vers une proposition ouverte de mise en fébrilité des lacunes ou doutes déjà présents. Pour la méthodologie de Gaël Grivet (né en 1978, vit à Genève, Suisse), les notions de démarche comparative, d’extraction et de processus sont centrales, alimentées par des données au demeurant intègres mais aboutissant à des résultats décon- certants quand ils ne sont pas purement hallucinatoires. Dans son travail, 7 * Taleb, Nassim Nicholas, Le Cygne Noir, La puissance de l’imprévisible, Paris, Les Belles Lettres, 2008 [orig: The Black Swan: The Impact of the Highly Improbable, New York, Random House, 2007] le perceptible n’est qu’une instance de l’invisible. Le non-dit, le stroboscopique, le motif infini sont quelques-unes des apparitions issues de processus de réverbé- ration, déclenchés eux-mêmes par la mise en boucle d’un répertoire des connaissances. Les certitudes rétiniennes se désintègrent face à une succession accélérée de formules scientifiques et données historiques, cédant ainsi leur place à une réalité “amplifiée”. Cette conversation pourrait avoir lieu autour des chapitres suivants : TABLE DES MATIÈRES * * Les Grands Lacs, ou des chaises pour contempler les fissures de l’atome – Étymologie d’un gâteau objectif – Safari en simili-cuir – Le challenge panoptique – L ’exploration vers le futur – Où il est question de l’Illusion, l’Infini, la Partie – Polyèdre et les règles de l’aléatoire – D’Antalya aux Ports-Francs en compagnie d’un cercueil sous couvert – L ’exploration vers le passé – Phoebus, ou l’obscurantisme appliqué à la lumière – La tragique expérience, ou Un grand saut pour l’Humanité – Projection tautologique, ou l’ontologique narcissisme d’une ampoule – Les pneumatiques d’Heidegger, mon cher Wat- son – Une trace guère solide – Un Pacifique imaginaire – Passé violent, présent calme, futur incertain : voyage saccadé entre les cratères du Nouveau Monde – Vicissitudes d’une dépêche – À la une, politiques du langage objectif – La corporation plus humaine que l’humain – Une conquête des sables mouvants – Fiat Entropia!, ou une monumentale résignation à l’enfoncement inéluctable – Transmission interceptée – “Houston, We’ve Got a Problem” – Circonférence d’un cercle vicieux. 8 9 The last question was asked for the first time, half in jest, on May 21, 2061, at a time when humanity first stepped into the light. […] “Will mankind one day without the net expenditure of energy be able to restore the sun to its full youthfulness even after it had died of old age?” Or maybe it could be put more simply like this: “How can the net amount of entropy of the universe be massively decreased?” Multivac fell dead and silent. The slow flashing of lights ceased, the distant sounds of clicking relays ended. Then, just as the frightened technicians felt they could hold their breath no longer, there was a sudden springing to life of the teletype attached to that portion of Multivac. Five words were printed: INSUFFICIENT DATA FOR MEANINGFUL ANSWER.* “INSUFFICIENT DATA FOR MEANINGFUL ANSWER” is a statement made by Isaac Asimov at a time when humankind is no longer up to its own scientific discoveries and progress. Having gradually delegated the day-to-day management of a world become too complex to computerized brains, man is henceforth in a position of bondage and dependence with regard to a flow of data which he can no longer master, or even grasp. Despite intellectual and analytical human capacities supposed to differentiate humanity from the binary coldness of computer science, the day is dawning uploads/Science et Technologie/ donnees-insuffisantes-pour-reponse-significative 1 .pdf
Documents similaires










-
28
-
0
-
0
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise- Détails
- Publié le Jan 05, 2021
- Catégorie Science & technolo...
- Langue French
- Taille du fichier 4.3745MB