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1 Plan On date généralement la naissance de la criminologie des tra- vaux acc

1 Plan On date généralement la naissance de la criminologie des tra- vaux accomplis par trois savants italiens dans le dernier quart du XIXe siècle : Lombroso 1, Ferri 2 et Garofalo 3. La criminologie a donc main- tenant plus de 125 ans d’existence. Mais malgré le passé qu’elle possède déjà, la criminologie pose encore une question qui ne reçoit pas toujours une réponse très nette : la criminologie est-elle une science véritable ou bien n’est-elle qu’un ensemble de propositions, plus ou moins cohérentes, qui n’ont pas encore acquis un véritable statut scientifique, voire qu’un sim- ple mythe pseudo-scientifique ? 4 Pour répondre à cette question fondamentale, il convient de s’interroger tour à tour, comme on le fait chaque fois qu’il s’agit de l’introduction à l’étude d’une science et en particulier d’une science de l’homme, sur son objet, sa méthode et ses tendances principales, en ayant également présent à l’esprit que l’enseigne- ment, la recherche et les débouchés professionnels sont eux-mêmes tributaires de cette réponse. Aussi va-t-on diviser cette introduction générale en quatre chapitres : – Chapitre 1 : La définition et l’objet de la criminologie, – Chapitre 2 : La méthode de la criminologie, – Chapitre 3 : Les grandes théories criminologiques, – Chapitre 4 : L’enseignement, la recherche et la profession en criminologie. INTRODUCTION 1. L’ouvrage fondamental de Lombroso est L’homme criminel publié en 1876. 2. Auteur de la Sociologie criminelle parue en 1881 sous le titre Les nouveaux horizons du droit pénal. 3. Garofalo est resté célèbre par son ouvrage La criminologie publié en 1885. On attribue généralement à cet auteur la paternité du terme « Criminologie », mais celui-ci a été, semble-t-il, employé pour la première fois par un médecin anthropologue français du nom de Topinard (1830-1911). 4. J. Cordier, « La criminologie peut-elle être une science ? » dans F. Ringelheim (dir.), Punir mon beau souci. Pour une raison pénale, Bruxelles, 1984, p. 330-346. larvox.com:Université Franco-Haïtienne du Cap Haïtien:2110931158:88817721:200.113.214.228:1675778686 larvox.com:Université Franco-Haïtienne du Cap Haïtien:2110931158:88817721:200.113.214.228:1675778686 ancre chapitre 2 Premières définitions On définit souvent la criminologie comme « l’étude scientifique du phénomène criminel », la « science du phéno- mène criminel », la « science du crime » 1. Ces définitions, qui sont à première vue séduisantes par leur simplicité et leur généralité, sont en réalité purement nominales. Elles recouvrent en effet des notions extrêmement variables de la criminologie (Section 1) dont l’exposé préa- lable est indispensable pour comprendre l’objet spécifique de cette discipline (Sec- tion 2). Ces développements sont aujourd’hui d’autant plus nécessaires que la question a connu ces dernières années, un regain d’intérêt dans la littérature cri- minologique 2. SECTION 1. LA DIVERSITÉ DES DÉFINITIONS DE LA CRIMINOLOGIE 3 Définitions en extension et en compréhension L’examen de la litté- rature consacrée à la définition de la criminologie montre qu’il n’existe pas plus aujourd’hui qu’hier de définition uniforme de celle-ci. Les divergences se manifestent non seulement en ce qui concerne l’extension du concept de criminologie, c’est-à-dire l’étendue de son domaine (§ 1), mais aussi ce qui est plus grave encore à propos de la compréhension de cette notion, c’est-à-dire de ce qui la caractérise et en constitue l’essentiel (§ 2). § 1. La diversité des définitions en extension 4 Les faces multiples de l’action criminelle La diversité des défini- tions en extension de la criminologie est attestée par le fait qu’il y a pres- que autant de conceptions de la criminologie que de criminologues. CHAPITRE 1 LA DÉFINITION ET L’OBJET DE LA CRIMINOLOGIE 1. V. encore tout récemment M. Le Blanc et M. Cusson (dir.), Traité de criminologie empirique, 4e éd., Presses Univ. Montréal, 2010, p. 7 : « La criminologie empirique peut être définie comme l’étude scientifique du phénomène criminel ». 2. Cf. C. Debuyst, « Pour introduire une histoire de la criminologie : les problématiques de départ », Dév. et soc. 1990, p. 347-371; F. Digneffe, « La criminologie et son histoire. Réflexions à propos de quelques questions d’objet(s) et de méthode(s) », RICPT, 1991, p. 299-319; L. Walgrave, « À la recherche de la criminologie », RICPT, 1993, p. 9-22; H. Schuler-Springorum, « Criminology as a Congress Issue », AIC, 1989, p. 27-36. On remarquera toutefois que le mot « criminologie » ne figure pas dans le Dictionnaire de la violence et du crime de R. Dufour-Gompers, éd. Erès, 1992. Ce dic- tionnaire n’emploie le terme qu’assorti d’un qualificatif (anthropologique, clinique, comparative); est-ce l’aveu implicite d’une difficulté insurmontable ou l’expression silencieuse de l’inexistence de la discipline pour cet auteur ? larvox.com:Université Franco-Haïtienne du Cap Haïtien:2110931158:88817721:200.113.214.228:1675778686 4 INTRODUCTION Il faut cependant se garder de croire que ce phénomène est dû à la fantaisie et à l’indiscipline des criminologues. Il s’explique au contraire par le fait que le phé- nomène criminel est un phénomène à facettes multiples, qui met en jeu un nom- bre important de faits et d’activités se déroulant sur une période parfois fort étendue (existence d’une législation pénale, infraction à celle-ci, intervention de l’appareil policier et judiciaire, exécution de la condamnation, voire aujourd’hui au-delà). Certains auteurs ont alors prétendu regrouper l’ensemble des disciplines qui étudient ces divers aspects du phénomène criminel sous le vocable de criminolo- gie, tandis que d’autres ont réservé ce terme à l’étiologie et à la dynamique crimi- nelles. Il en est résulté tantôt des définitions larges (A) et tantôt des définitions étroites de la criminologie (B). A. Les définitions larges de la criminologie 5 Les trois grandes orientations Les définitions larges de la crimi- nologie se caractérisent par le fait que le terme de « criminologie » y recouvre un nombre plus ou moins grand de sciences criminelles. Il s’agit bien souvent plus d’une étiquette apposée sur un flacon au contenu divers que d’une véritable délimitation d’une science distincte et auto- nome. 6 La conception de Ferri Dans cette perspective la définition la plus large est celle de l’un des fondateurs de la criminologie, l’Italien Enrico Ferri (1857-1929) 1. Pour Ferri en effet, la « sociologie criminelle », terme qui doit être entendu dans son œuvre comme synonyme de « cri- minologie », est la somme de toutes les sciences criminelles. Elle englobe notamment le droit pénal qui n’est rien d’autre que le chapitre juridique de cette science plus générale qu’est la sociologie criminelle. Cette conception a été reprise par un élève de Ferri, V.V. Stanciu 2 et par certains sociologues dont notamment M. Denis Szabo 3, 4. 7 L’école encyclopédique Parmi les conceptions larges de la criminolo- gie, on trouve encore celle qui a été développée par l’école autrichienne encyclopédique de Hans Gross, Roland Grassberger 5 et Ernst Seelig 6. Sans doute, ces auteurs se séparent-ils de Ferri en ce qu’ils distinguent 1. E. Ferri, La sociologie criminelle, 4e éd. 1900, trad. française, 1905. La 3e éd. de 1891 tra- duite en français par E. Ferri lui-même en 1893 a été republiée en 2004 par les éd. Dalloz avec une présentation de R. Gassin, 648 p. 2. M. Laignel-Lavastine et V. V. Stanciu, Précis de criminologie, Payot 1950; V. V. Stanciu, « Qu’est-ce que la criminologie ? », Et. int. psycho-socio. crim. 1956, 52-58; V. V. Stanciu, Essais de psycho-sociologie criminelle, Éd. Anthropos, 1980, p. 23-25. 3. D. Szabo, Criminologie, 24-27. Adde : « Tendances actuelles en criminologie », RICPT, 1979, p. 231-237. 4. V. encore pour une conception englobante contemporaine, F. Mantovani, Il problema della criminalita Compendio du scienze criminali, Cedam, 1984, 682 p., CR RSC, 1988, p. 172-174. 5. R. Grassberger, « Qu’est-ce que la criminologie ? », RICPT, 1949, p. 3-9. 6. E. Seelig, Traité de criminologie, PUF 1956, p. 3-14. larvox.com:Université Franco-Haïtienne du Cap Haïtien:2110931158:88817721:200.113.214.228:1675778686 LA DÉFINITION ET L’OBJET DE LA CRIMINOLOGIE 5 soigneusement le droit pénal de la criminologie. Selon eux en effet, il faut différencier deux aspects dans le phénomène criminel : les aspects normatifs qui relèvent du droit pénal et les aspects réels ou positifs qui seuls font partie de la criminologie. Mais au-delà de cette distinction, le champ de la criminologie demeure extrêmement vaste et fait de celle-ci une science composite puisqu’elle comprend non seulement l’étiologie criminelle, mais également la criminalistique et la science pénitentiaire. De là son appellation d’école encyclopédique 1. En France, cette concep- tion du contenu de la criminologie semble avoir été retenue par J. Larguier 2. 8 L’école américaine classique C’est encore dans une perspective étendue, quoique d’orientation différente, que se situe la définition de la criminologie donnée par l’américain Sutherland 3. Partant de cette idée que la « criminologie est la science qui étudie l’infraction en tant que phénomène social », il lui assigne un vaste domaine englobant « les pro- cessus de l’élaboration des lois, de l’infraction aux lois et des réactions provoquées par l’infraction aux lois », qui constituent trois aspects d’une suite d’interactions constantes. De la sorte la criminologie se diviserait en trois branches principales : la sociologie du droit pénal, l’étiologie crimi- nelle et la pénologie 4. Cette conception a certainement influencé en France la représentation de la criminologie que se faisait uploads/Science et Technologie/ intro-partielle.pdf