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la lettre n06 / hiver 2002 de l’Académie des sciences Matière & Univers Editori

la lettre n06 / hiver 2002 de l’Académie des sciences Matière & Univers Editorial Au terme du mandat bisannuel de Prési- dent que mes confrères de l’Académie des sciences m’avaient aimablement confié, il me paraît de bon aloi de présenter une rétrospective synthétique de l’activité de notre compagnie en 2001 et 2002. L ’événement le plus marquant concer- nant notre fonctionnement est le succès de l’action initiée et menée par mes deux prédécesseurs, Jacques-Louis Lions et Guy Ourisson, en vue d’une modification significative de nos statuts. Nous pour- rons ainsi, sur une période de cinq ans, passer d’un effectif de 120 membres (âgés de moins de 80 ans) à 250 mem- bres (âgés de moins de 75 ans). Dès l’année 2002, nous avons disposé de 25 postes et les élections sont en cours. Nous avons pu, grâce à cette ouverture, réserver 9 postes à des disciplines encore trop peu représentées dans notre compagnie. La formulation des intitulés de tels postes pour l’année 2003 est préparée par notre Comité consultatif élargi et sera soumise pour décision au Comité secret. Cette procédure va de pair avec une réflexion d’ensemble sur le mode de partition de nos divisions en sections. L ’Académie dispose, pour mener son programme de relations avec l’étranger, d’une très active Délégation aux Rela- tions Internationales animée avec une grande efficacité par notre confrère Yves Quéré. Notre compagnie est représentée au meilleur niveau dans les instances internationales telles que IAP (Inter Academy Panel), IAC (Inter Academy Council), ALLEA (Alliance européenne des Académies). Nous sommes aussi très présents à l’ICSU (Conseil Interna- tional pour la Science) grâce à François Gros et nous assumons la responsabi- lité du COFUSI (Comité Français des Unions Scientifiques Internationales) présidé par Ivan Assenmacher. Nous avons reçu mandat du ministre de l’Édu- cation nationale pour établir un rapport sur l’intérêt de l’ICSU pour la science française. Cette étude a été remise aux ministres. Elle conduira à une nouvelle définition de la participation française de l’ICSU. La mise en place au sein de l’Académie des sciences d’une Délégation à l’Infor- mation Scientifique et à la Communica- tion est chose faite. La responsabilité de cette DISC est assumée par Madame Dominique Meyer. Les moyens néces- saires à son fonctionnement ont été dégagés. Nous pourrons ainsi beaucoup mieux faire connaître les positions scien- tifiques de notre Académie, ses initia- tives et ses réalisations. Le site Internet sera modernisé. Le jour traditionnel de réunion de l’Aca- démie a glissé du lundi au mardi. Ce changement était motivé par des raisons de planification de l’ensemble des acti- vités de l’Institut en conformité avec les règles de sécurité. Je suis bien conscient de la gêne que peut apporter, pour quelques membres, ce changement de calendrier. Il semble cependant que la date du mardi permette à nos confrères qui ne résident pas en région parisienne une organisation plus confortable de leur emploi du temps. L ’enseignement des sciences est inti- mement lié à la recherche. L ’Académie accroît ses actions dans cette direction, en soutenant le programme « La main à la pâte » mené avec vigueur et succès par plusieurs de nos confrères. La ré- union annuelle des classes lauréates choisies par cette association a lieu dans la grande salle des séances: ce rendez- vous, dans nos murs, d’une jeunesse enthousiasme est un bon moment pour tous. Nos Comités ont été fort actifs au cours de ces deux dernières années. Le Comité de l’Espace a repris vie: il est vrai que les programmes spatiaux suscitent tout naturellement intérêt et discussion. Nous sommes, d’autre part, convaincus de l’instante nécessité de développer les réflexions académiques sur les rapports entre science et société. Nous allons donc proposer formellement au Comité secret de conférer le statut de Comité à notre Groupe Science et Société, présidé par Jean-François Bach, qui aura ainsi un pouvoir de proposition et d’action renforcée. L ’Académie poursuit sans faiblir son acti- vité de rédaction de rapports sur les questions d’actualité. Neuf études sont en cours et cinq ont été publiées au cours des deux années 2001 et 2002, marquant le début d’une nouvelle série après la publication d’une douzaine de rapports pour la série précédente qui prenait fin en 2000. Nous avons organisé cinq colloques en 2001 et cinq autres en 2002 traitant de sujets actuels en biologie, physique, géologie et météorologie. L ’organisation de telles réunions est aussi pour nous l’occasion de sympathiques et fruc- tueuses coopérations avec d’autres académies françaises et étrangères. L ’Académie des technologies issue de notre comité CADAS (Comité Acadé- mique des Applications de la Science) s’est mise en place et a déjà pris un bon nombre d’initiatives très utiles. Les rela- tions entre l’Académie des sciences et l’Académie des technologies sont étroites et confiantes. Ce mini-bilan est publié dans la Lettre de l’Académie des sciences: excellente occasion qui m’est donnée de remercier son rédacteur en chef, Jean-Didier Vincent qui a bien voulu, depuis 2001, se charger de la mise sur pied de cette publication qui nous fait honneur. L ’Académie des sciences a l’ambition de promouvoir la science et de représenter dignement et utilement les acteurs de la recherche. Avec humilité et confiance, nous nous en remettons à votre appré- ciation par Hubert Curien Président de l’Académie des sciences, professeur émérite à l’université Pierre et Marie Curie. Sommaire Éditorial Esquisse de bilan pour deux années académiques Hubert Curien page 2 Dossier De la Physique Édouard Brézin page 3 De la micro-électronique aux composants quantiques Emmanuel Rosencher page 6 Les dimensions de l’Univers Entretien avec Pierre Binétruy par Paul Caro page 10 Frustration, désordre, systèmes complexes: la physique statistique hors des murs Marc Mézard page 13 La manipulation de molécules isolées Jean-François Allemand, Vincent Croquette, David Bensimon page 14 Questions d’actualité Les anticorps monoclonaux humains: de la souris… à la vache Dominique Bellet page 15 Mémoire et apprentissage chez l’abeille Minh-ha Pham-Delegue page 16 La vie des séances Les enjeux scientifiques et tech- niques de la gestion durable des écosystèmes forestiers Yves Birot page 17 Aimants et supraconducteurs: un nouveau champ d’action pour la chimie supramoléculaire Peter Day page 18 La vie de l’Académie Rapport RST 13: Les plantes génétiquement modifiées page 18 Le sommet de Johannesbourg et la Science Yves Quéré page 19 27ème Assemblée générale de l’ICSU à Rio François Gros page 19 Carnet page 20 Esquisse de bilan pour deux années académiques 2 la lettre n06 / hiver 2002 de l’Académie des sciences 3 Dossier tions les plus délicates en montrant que si l’on suivait cette mécanique jusqu’au bout, il devait exister des états quan- tiques “intriqués” impliquant plusieurs corps, dans lesquels la mesure était une opération “non séparable” dans l’espace. Signe certain d’une théorie incomplète pour Einstein, cela a conduit quelques- uns à proposer des descriptions alter- natives du monde qui, croyait-on, avait les mêmes conséquences expérimen- tales que la mécanique quantique, mais une “interprétation” distincte en termes de paramètres qui nous resteraient cachés. Or aujourd’hui théorie et expé- rience ont tranché: la description quan- tique de la non-séparabilité de la me- Par Edouard Brézin1 C e monde quantique est pourtant bien étrange, comme cela a été souvent souligné. C’est Einstein et ses collaborateurs qui ont soulevé les ques- sure, est devenue un fait d’expérience. Ce qui était paradoxe est aujourd’hui réalité, et a même conduit récemment à des dispositifs de “cryptographie quan- tique”. Le domaine lié des “qu-bits”, éléments quantiques susceptibles de calculs plus riches que la simple logique binaire usuelle, dont nul ne sait encore s’il conduira effectivement à des ordi- nateurs révolutionnaires, fait l’objet d’in- tenses recherches de base, sous le signe de l’intrication quantique et de la cohé- rence. De même les nanosciences sont entrées dans un monde où les compor- tements quantiques n’ont plus rien de commun avec celui de la matière ordi- naire. 1 Membre de l’Académie des sciences, professeur à l’uni- versité Pierre et Marie Curie et à l’École polytechnique. P rétendre évoquer la physique d’aujourd’hui en quelques phrases, condamne imman- quablement à la superficialité; le propos ne vise donc ici qu’à situer, à travers quelques exemples, le climat intellectuel d’aujourd'hui. Nous avons vécu un vingtième siècle marqué par la mécanique quantique. Des plus petites distances accessibles dans les mondes atomiques, nucléaires, subnucléaires, jusqu’aux confins de l’univers (pour qui veut, par exemple, com- prendre les premiers instants après le big bang ou la formation des galaxies), cette mécanique s’est imposée. Elle est même devenue la grande science à la base de la technologie, puis- qu’elle est présente des semi-conducteurs jusqu’aux lasers et aux nanotechnologies émergentes. Il ne faut pas croire que le transistor CMOS (Complementary Metal Oxyde Semiconductor) par exemple, dont l’impact sur notre vie de tous les jours peut se comparer à celui de la distribution de l’électricité, soit né du travail inspiré d’un bricoleur de génie dans son garage. Cette découverte est bien le fruit de la compréhension progressive et fondamentale de la nature quantique des propriétés électroniques des solides. 4 Dossier Mais la route est encore bien longue pour comprendre toutes les implications uploads/Science et Technologie/ lettre-6.pdf