1 0. Introduction 1. L’intitulé « Histoire et critique des sciences » L’intitul
1 0. Introduction 1. L’intitulé « Histoire et critique des sciences » L’intitulé « Histoire et critique des sciences » sous- entend qu’il y a un travail d’histoire et un autre de critique des sciences à effectuer. 0.1.1. Le travail de l’histoire Le travail d’histoire consiste en la reconstitution, le plus fidèlement possible, de l’évolution du processus de la constitution de la science, depuis l’antiquité jusqu’{ notre époque actuelle. C’est dire que la science, en tant que corpus de connaissances et également comme manière d’aborder et de comprendre le monde, s’est constituée progressivement depuis des millénaires. L’histoire des sciences est donc l’étude du mouvement progressif de transformation des spéculations et d’accumulation des connaissances qui accompagne ce mouvement. A ce titre, elle a un rôle essentiellement épistémologique (théorie critique de la science) et philosophique. Elle ne doit pas être confondue { la chronique d’une série de découvertes scientifiques, ou { l’histoire des techniques. Bref, l’histoire des sciences n’est pas, simplement, une chronique des découvertes scientifiques, mais un effort intellectuel consistant à rétablir le mouvement progressif de transformations des connaissances, le plus fidèlement possible, étape par étape, depuis les origines jusqu’{ la phase de maturation. Nous remontons les débuts de notre histoire des sciences { l’antiquité grecque, période où, d’un certain point de vue, l’esprit humain est véritablement arrivé { se débarrasser des mythes et des empirismes comme modes d’explication pour s’appuyer sur des concepts, c’est-à-dire des modes de pensée abstraite et universelle, une pensée organisée, un savoir systématique et désintéressé. L’histoire de la science s’est raffermie et a pris un réel envol à partir des Temps modernes, notamment à la suite de la découverte de la méthode expérimentale, laquelle a mis au point des instruments d’observation et de mesure, tels que le télescope, le microscope, le thermomètre 1 . La science moderne repose sur des certaines idées directrices, notamment : (1) La nature est autonome, (2) Le déterminisme est certain, (3) Le temps et l’espace sont neutres, (4) Le monde est intelligible. 1 J.C. baudet, Histoire de la chimie, p. 2. 2 A l’époque contemporaine, précisément { partir du XIXe, la science s’est développée à un rythme plus soutenu et a connu un plus grand essor, notamment dans les domaines des mathématiques, de l’optique, de l’électricité, d la chimie, de la médecine, de la biologie. Cette époque est aussi caractérisée par la professionnalisation de la science. En effet, c’est { cette époque que la science s’est réellement professionnalisée. A partir du XXe siècle, on assiste à une plus grande accélération des découvertes scientifiques grâce, notamment, à l’amélioration des instruments, { l’application de certaines découvertes, la mondialisation des échanges qui a entrainé une mise en commun des efforts intellectuels et scientifiques et, surtout, le développement rapide de l’informatique, qui a rendu possible le traitement d’une grande masse d’informations. Au cours de la même époque, la physique a connu de grandes avancée, notamment dans le domaine de l’atome avec la découverte de la structure du noyau atomique, la théorie de la relativité restreinte d’Albert Einstein, la physique quantique, la biologie moléculaire avec la découverte de l’ADN, … 0.1.2. Le travail de la critique La critique des sciences se présente comme une sorte d’éthique, autrement dit de réflexion sur les limites et sur les conditions de validité de la science et sur ses prétentions dans la conquête et dans l’exploration du réel. Autrement dit, c’est une pensée sur la science, c’est-à-dire une façon de concevoir la science et le rôle qu’elle est appelée { jouer au sein de nos sociétés, dans nos vies, La critique des sciences cherche à savoir jusqu’où peut aller la science, quelles en sont les limites ainsi que les conséquences sur l’humanité. La critique des sciences permet d’instituer un dialogue critique entre les acteurs de la production scientifique et les consommateurs. Se confondant avec l’épistémologie et la méthodologie, la critique des sciences s’intéresse à la question du sens, du progrès ou de l’évolution de la science, c’est-à-dire à la question de savoir comment justifier le passage, la préférence ou l’abandon d’une théorie, considérée comme ancienne ou désuète au profit d’une nouvelle théorie scientifique jugée plus compétitive et plus compétente. 3 0.2. Pourquoi une Histoire et une Critique des sciences ? L’histoire des sciences renseigne sur les lieux, l’évolution ainsi que sur les circonstances de l’éclosion de la science en tant que mode d’explication rationnelle. En tant que telle, elle permet de : - Reconstituer la mémoire de la science ainsi que les étapes de son évolution ; - Définir la portée et l’influence des connaissances et découvertes antérieures sur les connaissances et les découvertes actuelles ; - Rétablir la vérité sur l’apport et la contribution de chaque peuple et de chaque époque { l’éclosion des sciences particulières et de la culture scientifique universelle ; - Reconstituer le processus de la création scientifique et retracer le chemin emprunté par les différentes disciplines scientifiques pour arriver { se constituer et { s’affirmer comme telles ; - Canaliser et orienter l’innovation, en évitant les redites. En revanche, la critique permet d’éviter l’usure de la science et de rendre compte de son dynamisme, c’est-à-dire du processus de son évolution, c’est-à-dire comment justifier le passage ou l’abandon d’une théorie au profit d’une nouvelle théorie qui s’est révélée plus compétitive, plus agissante et plus opératoire. En effet, le risque de l’usure est réel, dans la mesure où la science moderne tend de plus en plus à devenir utilitaire et à abandonner sa vocation et sa conception initiale héritée des anciens d’être une recherche désintéressée, autonome et indépendante de la vérité. Déjà, au XVIIe siècle, l’industrie moderne ainsi que la science qu’elle présuppose ont commencé { réaliser le rêve de domination de la nature. La technologie vint ainsi au monde parce que les princes avaient besoin de techniciens et d’argent. Comme les princes avaient soif de puissance, ils influencèrent ainsi la recherche scientifique dans le sens de leurs projets. Bien plus qu’au XVIIe, actuellement, la science a cessé d’être une discipline neutre pour se mettre, résolument, au service des influences extérieures matérielles, politiques, financières, industrielles ou autres, perdant ainsi, de manière plus prononcée, de son autonomie et de sa neutralité. 4 La critique des sciences aide ainsi à tirer la sonnette d’alarme pour que ceux qui s’adonnent { la formation et à la culture de l’esprit ne cèdent point { l’utilitarisme, mais qu’ils continuent { défendre l’idéal de neutralité de la science. A cet effet, elle s’impose comme une nécessité éthique qui vise à orienter le pouvoir de la science vers le bien. Car, dit-on, science sans conscience n’est que ruine de l’âme (Rabelais). Elle permet de relativiser la prétention absolutiste de la science et son caractère positiviste à se considérer comme la seule source de remède possible et crédible aux problèmes de l’humanité. Bref la critique des sciences permet donc de : - Contrôler le développement de la science; - Porter un jugement critique sur les prétentions de la science ; - Réfléchir sur l’impact de la science pour l’humanité ; - Repenser le sens du progrès en sciences. 0. 2. Articulation du cours Notre cours d’Histoire et critique des sciences est articulé en trois chapitres : - L’unité plurielle de la science ; - L’histoire des sciences ; - Le sens du progrès en sciences. 0. 3. Objectifs éducationnels A la fin du cours d’Histoire et critique des sciences, l’étudiant doit être capable de : - Reconstituer l’itinéraire historique suivi par une théorie ou discipline scientifique ; - Expliquer l’évolution actuelle de la science par rapport { l’histoire ; - Tirer les leçons du passé pour orienter l’avenir ; - S’ouvrir { l’interdisciplinarité et saisir l’interaction entre les sciences ; - Etre attentif aux facteurs internes ou externes qui influencent la production scientifique, et aux différents mouvements progressifs de transformation des spéculations, et d'accumulation des connaissances scientifiques. 0.4. Bibliographie - BAUDET, J. C., Histoire de la chimie, Paris, Bibliothèque Nationale de Paris, 2017. 5 - BLAY, M., Critique de l'histoire des sciences, Paris, CNRS Editions, 2017, 301 p. - BARBEROUSSE, A., KISTLER, M., et LUDWIG, P., La philosophie des sciences au XXe siècle, Paris, Flammarion, 2000. - BACHELARD, G., La formation de l'esprit scientifique, Paris, Vrin, 1990. - BRAUNSTEIN, J.-F., (dir.), L'histoire des sciences : méthodes, styles et controverses, Paris : Vrin, 2008. - CANGUILHEM, G., Le normal et le pathologique, PUF/Quadrige, 2005. - GINGRAS, Y. , Peter Keating et Camille Limoges, Du scribe au savant : les porteurs du savoir de l'Antiquité à la révolution industrielle, Boréal, Montréal/PUF, Paris, 1998. - HACKING, I., Entre science et réalité : la construction sociale de quoi ?, trad. Baudouin Jurdant, Paris, La Découverte, 2001. - KUHN, T., S., La Structure des révolutions scientifiques, trad. Laure Meyer, Paris, Gallimard, 1983. - LAKATOS, I., Preuves et réfutations : essai sur la logique de la découverte mathématique, trad. N. Balacheff et J.M. Laborde, Paris, Hermann, 1984. - LATOUR, B., La Science en action : introduction à la sociologie des sciences, Paris, Gallimard, 1995. - LECOURT, D., (dir.), Dictionnaire d'histoire et uploads/Science et Technologie/ cours-histoire-et-critique-des-sciences-fac-sciences-2022.pdf
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- Publié le Nov 03, 2021
- Catégorie Science & technolo...
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