C. Lalanne & P. Oliviéro IUT (Université Paris 5), Dpt Informatique Une brève i
C. Lalanne & P. Oliviéro IUT (Université Paris 5), Dpt Informatique Une brève introduction aux Sciences Cognitives Sommaire Une brève introduction aux Sciences Cognitives.......................................................................1 1. Introduction........................................................................................................................1 2. Objet et enjeux des Sciences Cognitives............................................................................2 2.1. Historique...................................................................................................................2 2.2. Différentes approches.................................................................................................4 Intelligence Artificielle. .....................................................................................................4 Psychologie cognitive. .......................................................................................................6 Neurosciences.....................................................................................................................7 Linguistique........................................................................................................................7 Philosophie.........................................................................................................................8 2.3. Un nouveau regard sur la cognition ...........................................................................8 2.4. Les domaines d’étude actuels et le concept d’intelligence ........................................9 3. Que sait faire une machine de nos jours ?........................................................................10 3.1. Calculer ....................................................................................................................11 3.2. Raisonner..................................................................................................................11 3.3. Communiquer...........................................................................................................13 3.4. et le reste ?................................................................................................................13 4. Perspectives......................................................................................................................14 1. Introduction L’objet des Sciences Cognitives est l’étude de la cognition (du latin cognitio, connaissance), à plusieurs niveaux : les différentes formes qu’elle revêt, les mécanismes qui la fondent et lui permettent de s’exprimer et d’évoluer, et enfin les possibilités de reproduire l’intelligence naturelle au travers de machines artificielles. On cherche, par exemple, à caractériser les différents niveaux de traitements et de manipulation de l’information symbolique, ainsi que les substrats biologiques qui pourraient sous-tendre de tels traitements chez l’homme. Le programme est vaste puisqu’il vise à acquérir une compréhension globale de l’ensemble des capacités de l’esprit humain, comme, par exemple, le langage, le raisonnement, la perception, les activités motrices, ou la planification (Andler, 2002). Cette compréhension de l’esprit humain passe par la description, l’explication, voire la simulation – lorsque cette dernière n’est pas possible – des processus mis en œuvre dans l’élaboration de nos connaissances. Après l’étude de la matière, dont la discipline maîtresse est sans conteste la physique – et de nos jours la physique quantique, et du corps, au travers de la biologie, celle de l’esprit apparaît comme le défi du vingtième siècle. Les recherches menées dans ce sens font l’objet à l’heure actuelle d’une véritable approche pluri-disciplinaire, puisque différentes disciplines 1 C. Lalanne & P. Oliviéro IUT (Université Paris 5), Dpt Informatique scientifiques participent à ce vaste projet visant à la compréhension de la cognition : intelligence artificielle, psychologie cognitive, philosophie, neurosciences, sociologie, informatique et sciences de l’ingénieur, etc. Malgré la diversité des méthodes et des enjeux théoriques de chacune de ces disciplines, toutes concourent au même programme de recherches : définir la manière dont nous acquérons et utilisons nos connaissances, et utilisons ces capacités pour évoluer de manière adaptée dans notre environnement. Cette notion d’adaptation est bien vite apparue comme un concept central de l’évolution des systèmes naturels (cf. Darwin et sa thèse de la sélection naturelle), mais également des systèmes artificiels (cf. Wiener et les concepts de la cybernétique). À cette adaptation constamment mise à l’épreuve par les variations de l’environnement est naturellement associée une complexification des structures accueillant le système considéré (homme ou machine). L’ordre émergeant de ces structures, en apparence tellement complexes, résulte alors d’un vaste ensemble de processus en interaction (cf. cours sur les Systèmes Adaptatifs Complexes). Mais l’idée maîtresse dans l’étude des systèmes artificiels et naturels demeure celle d’un système capable de traiter et de manipuler de l’information de nature symbolique. L’intérêt porté à l’étude des mécanismes de traitement de l’information apparaît naturel pour les personnes travaillant à l’interface entre l’homme et la machine. L’informaticien doit en effet bien souvent développer un système devant interagir avec l’utilisateur. Cette interaction peut se situer à différents niveaux (interface utilisateur, langage de requête, etc.), peut être de différents types (uni- ou bi-directionnelle, directe ou à distance, etc.), et peut utiliser différents médias de communication (oral, clavier, souris, commande oculaire, etc.). Afin de permettre une interaction pertinente et efficace entre l’homme et la machine, il convient donc de prendre en considération l’ensemble des facteurs susceptibles d’affecter celle-ci. Cela comprend, pour l’homme : ses capacités perceptives (e.g. on ne perçoit les stimulations visuelles ou auditives que dans certaines gammes de fréquences), ses capacités de mémorisation et d’attention (on ne peut guère mémoriser plus de 7 éléments distincts, et on n’arrive pas à effectuer simultanément différentes tâches nécessitant une certaine précision), ses compétences langagières, etc. ; et pour la machine : la limitation de ses modes de communication (e.g. écran) et d’interaction (un langage ou une interface bien déterminés), etc. Les études réalisées dans le domaine de la psychologie cognitive, de la linguistique et de l’ergonomie ont permis de mettre en évidence les conditions nécessaires à l’établissement d’une communication « naturelle » entre deux interlocuteurs, et par extension entre un utilisateur et une machine (cf. cours de Linguistique). 2. Objet et enjeux des Sciences Cognitives 2.1. Historique On s’accorde généralement à définir comme point de départ de la formalisation du programme des Sciences Cognitives un célèbre colloque qui eut lieu en 1946 à Macy (et qui fut suivi par d’autres jusqu’en 1953). Lors de cette réunion de chercheurs issus de différentes disciplines (neurophysiologie, informatique, mathématiques), il fut décidé d’adopter un programme commun de recherches sur la cognition, et plus particulièrement sur l’intelligence humaine et le rapport de l’homme à la machine et à son propre cerveau. Ce programme visait à termes à pouvoir caractériser un comportement « intelligent » et à le simuler à l’aide d’un programme informatique. L’idée fondamentale était donc celle de créer une intelligence « artificielle ». De nouvelles disciplines scientifiques virent le jour, notamment l’intelligence artificielle, les neurosciences et la psychologie cognitive. Les grands noms associés à la naissance des Sciences Cognitives sont sans conteste : 2 C. Lalanne & P. Oliviéro IUT (Université Paris 5), Dpt Informatique – N. Wiener (1894-1964), mathématicien et fondateur de la 1ère cybernétique1, s’est intéressé, entre autres, aux conditions permettant à un organisme artificiel de s’adapter à son environnement, et plus généralement de manifester des capacités de communication. L’influence de ce courant de pensée (par exemple, le concept de « feedback négatif », ou rétrocontrôle) s’étendra aux recherches sur la cognition naturelle et artificielle pendant près de vingt ans et donnera naissance à de nombreuses disciplines spécialisées. Dans l’ouvrage Sciences Cognitives – Textes Fondateurs, de A. Pélissier et A. Tête, on peut lire la remarque suivante : « La cybernétique aura : introduit la conceptualisation et le formalisme logico-mathématiques dans les sciences du cerveau et du système nerveux ; conçu l’organisation des machines à traiter l’information et jeté les fondements de l’intelligence artificielle ; produit la « métascience » des systèmes, laquelle a laissé son empreinte sur l’ensemble des sciences humaines et sociales, de la thérapie familiale à l’anthropologie culturelle, en passant par l’économie, la théorie des jeux, la sociologie, les sciences du politique et bien d’autres ; fourni à point nommé à plusieurs ‘révolutions scientifiques’ du XXe siècle, très diverses puisqu’elles vont de la biologie moléculaire à la relecture de Freud par Lacan, les métaphores dont elles avaient besoin pour marquer leur rupture par rapport à un ordre ancien. » – W. McCullogh (1892-1969), psychologue et neurologue, s’est intéressé à la manière dont l’homme réalise des calculs et des déductions logiques. Il a pour cela proposé une équivalence entre le calcul des propositions de Whitehead et Russell et les règles régissant les interactions (excitation et inhibition) entre neurones dans le cerveau. Il est à l’origine du neurone formel, un modèle simplifié de neurone biologique reposant sur des règles d’activation booléennes. – J. von Neumann (1903-1957), mathématicien, a d’abord travaillé dans le domaine des mathématiques appliquées, en tant que consultant du gouvernement (en guerre à l’époque), puis s’est intéressé à la modélisation des réseaux neuronaux à l’aide d’automates finis. – D. Hebb (1904-1985), neurophysiologiste de formation, est considéré comme le père de la psychobiologie cognitive, qui vise l’étude des grandes fonctions mentales et de leur implémentation/régulation au sein du cerveau et du corps. – C. Shannon (1916-2001), ingénieur en télécommunication aux laboratoires Bell, fondateur de la théorie de la communication, a développé la notion de capacité d’un canal de communication, et des concepts associés de bruit et de signal exprimés en fonction d’une mesure précise de l’information. – A. Turing (1912-1954), mathématicien de renom, a remis en question la thèse de Hilbert selon laquelle les mathématiques devaient être (1) complètes, (2) consistantes, et (3) décidables2. Il s’est illustré avec la conception de la machine qui porte son nom, une machine universelle capable d’effectuer la même tâche que n’importe quelle autre machine, mais surtout avec l’affirmation que tout ce qui peut être calculé par l’homme peut également l’être par une machine de ce type. 1 La 2ème cybernétique est plus récente et doit son renouveau à l’arrivée des modèles connexionnistes. Certains auteurs considèrent que ces deux courants de pensée réunis forment l’essence des Sciences Cognitives. 2 A cette époque, Gödel venait de démontrer l’incomplétude de l’arithmétique (i.e. il existe des propositions qui, bien que vraies, ne peuvent ni être démontrées ni être infirmées). Turing a surtout travaillé sur la propriété de décidabilité, en montrant qu’il ne pouvait y avoir de méthode (ou, plus tard, ce qui allait devenir la fameuse machine de Turing) définie pour résoudre tous les problèmes mathématiques. 3 C. Lalanne & P. Oliviéro IUT (Université Paris 5), Dpt Informatique N. Wiener J. von Neumann D. Hebb C. Shannon A. Turing Figure 1 : Quelques-uns des grands chercheurs à l’origine des Sciences Cognitives En 1960, J. Bruner uploads/Science et Technologie/ une-breve-introduction-aux-sciences-cognitives.pdf
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- Publié le Oct 13, 2021
- Catégorie Science & technolo...
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