COMITÉ SUR LES INFECTIONS NOSOCOMIALES DU QUÉBEC Mesures de prévention et de co

COMITÉ SUR LES INFECTIONS NOSOCOMIALES DU QUÉBEC Mesures de prévention et de contrôle de la transmission des bacilles Gram négatif multirésistants dans les milieux de soins aigus au Québec Mécanismes de résistance 2 Bacilles Gram négatif d’importance 3 Classes d’antibiotiques pour la détermination de la multirésistance 8 Mesures de prévention et de contrôle de la transmission de BGNMR 9 Mesures particulières en cas d’éclosion 13 Les bacilles Gram négatif (BGN) sont des bactéries fréquemment rencontrées en clinique, tant au niveau des flores normales qu’en tant qu’agent pathogène dans une variété d’infections. Avec l’utilisation des antibiotiques, différents mécanismes de résistance sont apparus et certaines de ces bactéries sont maintenant résistantes à plusieurs classes d’antibiotiques. Ce document a été élaboré dans le but d’aider les équipes de prévention et de contrôle des infections nosocomiales (PCI) à reconnaître les bacilles Gram négatif multirésistants (BGNMR) d’importance ainsi qu’à mettre en place les mesures de PCI pour éviter leur transmission dans les milieux de soins aigus du Québec. Ce document se veut d’abord une référence de base pour les centres qui ne sont pas aux prises avec une éclosion. Alors que les mesures à mettre en place en cas d’éclosion sont souvent rapportées dans la littérature, très peu d’articles mentionnent les mesures pour éviter la transmission hors d’un tel contexte. Les recommandations qui suivent sont donc basées en grande partie sur l’avis du groupe de travail, des collaborateurs et des membres du Comité sur les infections nosocomiales du Québec (CINQ). Elles tiennent compte des données actuelles et devront être révisées selon l’évolution de l’épidémiologie et des connaissances sur les réservoirs et la transmission (Tacconelli, 2014; Agence ontarienne de protection et de promotion de la santé, 2013; ASPC, 2010; Drees, 2014; Cohen, 2008; Harris, 2006; CDC, 2013; Siegel, 2006). En plus des mesures spécifiques, les pratiques de base de PCI, en particulier l’hygiène des mains, ont un rôle primordial dans la prévention de la transmission des bactéries multirésistantes. Les pratiques exemplaires de la campagne québécoise pour les soins sécuritaires sont un outil important dans la lutte contre les infections par ces bactéries (INSPQ, 2014). L’antibiogouvernance a aussi un rôle important, en limitant l’exposition des bactéries aux antibiotiques et en évitant la sélection des bactéries résistantes. Mesures de prévention et de contrôle de la transmission des bacilles Gram négatif multirésistants dans les milieux de soins aigus au Québec 2 Mécanismes de résistance La résistance aux antibiotiques des BGN est causée principalement par quatre mécanismes : la destruction enzymatique, la modification de la cible, la diminution de la perméabilité de la paroi cellulaire et la production de pompes à efflux. Le tableau qui suit décrit brièvement ces mécanismes et mentionne quelques exemples plus caractéristiques. Destruction enzymatique Les BGN sont capables de produire plusieurs enzymes qui modifient ou détruisent les antibiotiques avant que ceux-ci n’aient eu le temps d’agir. La catégorie de ces enzymes la plus connue est celle des ß-lactamases. Ces enzymes sont capables d’hydrolyser (briser) le noyau ß-lactame des antibiotiques de la classe des ß-lactamines de façon irréversible, ce qui les rend inefficaces. La classe des ß-lactamines est généralement divisée en quatre familles d’antibiotiques, soient les pénicillines (ex. ampicilline, pipéracilline), les céphalosporines (ex. ceftriaxone, ceftazidime, cefepime), le monobactam (aztrenam) et les carbapénèmes (ex. ertapénème, imipénème, méropénème). Ces molécules sont parmi les antibiotiques les plus prescrits en médecine humaine et vétérinaire. Il existe des centaines de ß-lactamases différentes (exemple BLSE, ampC, OXA, NDM, KPC, etc.). Chaque enzyme possède son propre profil d’hydrolyse, ce qui signifie que chaque type de ß-lactamase peut détruire une combinaison d’antibiotiques différente. Les carbapénémases sont des ß-lactamases actives contre les carbapénèmes. Les entérobactéries productrices de ces ß-lactamases sont appelées entérobactéries productrices de carbapénémases (EPC). Les ß-lactamases ne sont pas les seules enzymes capables de rendre les BGN résistants aux antibiotiques. Par exemple, il existe aussi un groupe d’enzymes, appelé enzymes modifiant les aminosides (EMA ou AME en anglais). Comme le nom du groupe l’indique, ces enzymes sont capables de modifier les aminosides comme la gentamicine, la tobramycine et l’amikacine, et les empêchent de se lier à leur cible. Cela les rend inefficaces. Il existe quelques dizaines de ces enzymes et elles ne sont pas toutes capables de modifier les mêmes antibiotiques à l’intérieur de la classe des aminosides. L’exemple fréquemment rencontré est une souche de BGN résistante à la gentamicine et à la tobramycine, mais qui demeure sensible à l’amikacine. Modification de la cible Le deuxième mécanisme de résistance présent chez les BGN est la modification de la cible, soit le site d’action de l’antibiotique. Ces modifications sont généralement causées par des mutations dans le gène codant pour la cible. L’exemple le plus significatif chez les BGN demeure les mutations dans le gène de la gyrase (gyrA) et de la topoisomérase (parC) qui sont les cibles des fluoroquinolones comme la ciprofloxacine, la lévofloxacine et la moxifloxacine. Ces mutations peuvent s’accumuler et ainsi produire un niveau de résistance de plus en plus important. Perméabilité de la paroi La paroi cellulaire des BGN est assez imperméable à plusieurs molécules, dont certains antibiotiques. Comme les cibles de ces derniers sont souvent à l’intérieur de la cellule, les antibiotiques doivent emprunter des protéines de la paroi, souvent appelées porines, qui sont littéralement des tunnels qui traversent la paroi cellulaire et permettent à certaines substances de pénétrer dans la bactérie. Dans certaines circonstances, dont en présence d’antibiotiques, certains BGN sont capables de diminuer la quantité de porines produites ou de modifier le type de porines. Cette diminution de la perméabilité de la membrane aux antibiotiques entraine une plus faible concentration d’antibiotique à l’intérieur de la bactérie et rend l’antibiotique moins efficace ou inefficace. L’exemple le plus connu de ce phénomène chez les BGN est la perte de la porine OprD chez le Pseudomonas aeruginosa qui entraine une résistance de ce dernier à l’imipénème. Ce phénomène peut se produire dans environ 25 % des cas d’infection à P. aeruginosa traités par cet antibiotique. Il existe plusieurs types de porines. Certaines modifications des porines peuvent empêcher un seul antibiotique de pénétrer dans la cellule, alors que d’autres bloquent l’entrée de plusieurs antibiotiques de plusieurs classes différentes. Pompe à efflux Le dernier mécanisme de résistance des BGN est la pompe à efflux. Ces pompes sont des protéines de la paroi cellulaire qui sont capables de prendre des substances qui sont entrées dans la bactérie et de les repousser à l’extérieur. La structure moléculaire de ces pompes est souvent complexe et il existe plusieurs familles de protéines différentes qui agissent comme pompe à efflux. Les pompes à efflux sont généralement produites ou activées dans des circonstances particulières, dont en présence de certains antibiotiques. Ces pompes ont comme particularité d’être actives simultanément contre plusieurs classes différentes d’antibiotiques comparativement aux trois premiers mécanismes de résistance qui sont actifs contre un seul antibiotique ou quelques-uns d’une même classe. Par exemple, la pompe MexXY-OprM de P. aeruginosa diminue la sensibilité de ce dernier au méropénème, aux aminosides, aux fluoroquinolones, ainsi qu’aux pénicillines et aux céphalosporines, contribuant grandement à un phénotype de multirésistance. Mesures de prévention et de contrôle de la transmission des bacilles Gram négatif multirésistants dans les milieux de soins aigus au Québec 3 Acquisition et transmission de la multirésistance Les différents mécanismes de résistance peuvent être intrinsèquement présents dans une espèce bactérienne. Par exemple, les Stenotrophomonas maltophilia possèdent dans leur chromosome une ß-lactamase appelée L1 qui est capable d’hydrolyser les carbapénèmes, alors que les Pseudomonas aeruginosa ne possèdent normalement pas de ß-lactamase capable d’hydrolyser ces antibiotiques. Les BGN sont également capables d’acquérir de nouveaux mécanismes de résistance par des mutations ponctuelles, tel que mentionné ci-haut. Une deuxième façon est par l’acquisition d’éléments mobiles contenant de nouveaux gènes de résistance. Ces éléments mobiles sont appelés transposons, intégrons et plasmides et ils permettent aux bactéries de la même espèce, du même genre ou même aux bactéries de genres différents de s’échanger du matériel génétique. Par exemple, le Pseudomonas aeruginosa peut acquérir un plasmide contenant une carbapénémase et ainsi devenir résistant aux antibiotiques de cette classe. À l’exception des pompes à efflux et de quelques porines, la majorité des mécanismes de résistance n’attaquent pas plusieurs classes différentes d’antibiotiques. Ainsi, un seul élément de résistance rend rarement un BGN multirésistant à lui seul. La plupart du temps, il s’agit d’une combinaison de mécanismes. Par exemple, plusieurs Enterobacter spp. résistants aux carbapénèmes rencontrés en milieu hospitalier sont considérés multirésistants à cause de la combinaison d’une très haute production de leur ß-lactamase de type ampC et d’une perte de porine. Les éléments mobiles mentionnés ci-haut sont également responsables de beaucoup de multirésistance. En effet, ces derniers permettent d’accumuler plusieurs gènes de résistance différents dans un même plasmide qui peut alors se propager de bactérie en bactérie. Bacilles Gram négatif d’importance Entérobactéries Agent infectieux et réservoir  Les entérobactéries font partie de la flore normale, en particulier au niveau intestinal et se retrouvent fréquemment dans les spécimens cliniques de toute origine (Mandell, 2015). Résistance aux antibiotiques  Les entérobactéries peuvent présenter différentes résistances, selon la bactérie en question et selon la pression uploads/Sante/ 2022-prevention-controle-transmission-gram.pdf

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  • Publié le Aoû 08, 2021
  • Catégorie Health / Santé
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