Bulletin de la Société d'histoire de la pharmacie Émile Monal : Les maîtres apo
Bulletin de la Société d'histoire de la pharmacie Émile Monal : Les maîtres apothicaires de Nancy au dix-septième siècle Paul Dorveaux Citer ce document / Cite this document : Dorveaux Paul. Émile Monal : Les maîtres apothicaires de Nancy au dix-septième siècle. In: Bulletin de la Société d'histoire de la pharmacie, 5ᵉ année, n°17, 1917. pp. 294-298. http://www.persee.fr/doc/pharm_0995-838x_1917_num_5_17_1298_t1_0294_0000_1 Document généré le 29/09/2015 294 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ ===== REVUE DES LIVRES EMILE MonâL. Les Maîtres Apothicaires de Nancy au dix-septième siècle. Nancy, 1917, in-8°, VIII-237 p. 5 pi. La thèse que vient de soutenir M. MONAL devant l'Ecole supérieure de Pharmacie de Nancy présente un réel intérêt en ce qui concerne les anciens apothicaires de cette ville et même de la Lorraine toute entière. La réglementation de leur profession ne se fit que graduellement par une série d'ordonnances datées de 1615, 1623, 1624, 1620 et 1640. Après cette dernière parurent les statuts définitifs comprenant tous les précédents règlements avec, exi plus, de nombreuses additions. En résumé, ce sont les seuls qui nous intéressent. Notons, tous d'abord, que les règlements sont toujours soumis à l'appréciation des médecins avant d'être communiqués au Procureur général. Dans leur demande, les maîtres apothicaires, d'accord avec eux, supplient le duc de Lorraine de maintenir les privilèges déjà obtenus. C'est ainsi qu'ils désirent que les officines ne soient plus qu'au nombre de huit ou neuf- Us veulent également que les médecins fassent un nouveau dispensaire, mais refusent 'de renouveler leurs drogues comme ils l'ont déjà demandé. Le règlement comprend 50 articles, dont la plupart ne diffèrent point de ceux que l'on rencontre dans les divers statuts des apothicaires de France. Il en est cependant quelques-uns que" l'on ne retrouve point ailleurs. Le premier concerne le maintien de la confrérie sous l'invocation de la « Très Sainte Vierge Mère de Dieu et le titre de sa Nativité ». La Nativité de la Vierge n'est guère célébrée dans les corporations des maîtres apothicaires. On y rencontre plutôt les fêtes de Sainte Marie-Madeleine, aussi bien à Nîmes qu'à Poitiers et à Lille. Parfois, c'est Saint Michel, mais bien rarement. Ajoutons que les cérémonies auxquelles assistent les maîtres, à Nancy, ne diffèrent point de celles que l'on rencontre ailleurs, aussi bien pour le jour même de la fête que pour le lendemain. Tous les maîtres en exercice auront le droit de continuer leur profession. Chaque année, ils éliront deux de leurs confrères en qualité de jurés. Le plus ancien d'entre eux prendra le titre de D'HISTOIRE DE LA PHARMACIE 295 premier juré pendant une année, puis devra se retirer. Il sera remplacé par le second, et ce dernier par un autre confrère. Toutefois, personne ne pourra devenir juré avant cinq ans d'exercice professionnel. Cet article nous rappelle qu'il en fut ainsi chez les maîtres chirurgiens, de 1692 à 1723. En revanche, dans les communautés d'apothicaires, il ne nous a pas été encore donné de rencontrer une pareille disposition. Enfin, les réunions sont toujours secrètes et leur divulgation en coûte 8 francs. Les médecins devront faire un dispensaire contenant les remèdes propres à soigner les maladies du pays: Les apothicaires sont obligés d'avoir ces remèdes, mais restent dispensés, s'ils le veulent, d'en tenir d'autres. Cette restriction des médicaments à une liste donnée par les docteurs en médecine pour être agréables aux apothicaires de Nancy! ne se rencontre guère ailleurs. Les maîtres ne seront pas plus de dix, limitation qu'admet parfaitement le droit féodal appliqué dans l'Est, mais que le Droit romain, que l'on retrouve surtout en France, ne saurait admettre. Les visites des pharmaciens ont lieu deux fois l'an, en avril et août. Il en est de même pour les droguistes, les épiciers et les surs de charité, ce qui est une règle d'ordre général pour les premiers seulement. Autrement intéressant est l'article 10, qui prescrit de séparer les substances vénéneuses des autres, de les tenir renfermées sous clef, et enfin d'écrire sur un registre, en présence de témoins, si possible, les noms des personnes qui les achètent. C'est la première fois qu'il nous est donné de trouver l'armoire aux poisons, avec toutes les obligations qu'elle comporte en ce qui concerne le débit des substances vénéneuses. L'article 11 prescrit aux charlatans et autres guérisseurs de composer leurs remèdes devant les maîtres, assistés d'un médecin. Semblables obligations leur furent parfois imposées par les polices municipales des villes, mais ne figurèrent point dans les statuts des apothicaires. L'exercice de la pharmacie est interdit à toute personne non munie du diplôme d'apothicaire, sous peine de confiscation des marchandises et 300 francs d'amende. Tous ceux qui vendent des remèdes dans les bourgs et villages du duché de Lorraine possédant des pharmaciens ne pourront continuer qu'après examen passé devant les maîtres de Nancy, en présence du doyen des médecins- Il en sera de même à l'avenir pour ceux qui exerceront illégalement- L'amende de 200 francs qu'ils devront payer sera distribuée moitié à l'hôpital Saint-Julien et moitié à la communauté des apothicaires de Nancy. 296 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ Les apothicaires de la cour du duc ou des princes de Lorraine ne pourront exercer en ville sans avoir fait le chef-d'uvre. Une semblable impartialité est digne de remarque à cette époque, car elle ne se pratiquait point à la cour de France. L'apprenti devra être catholique, posséder la langue latine et passer trois ans chez un maître, qui lui délivrera son certificat de sortie. Si ce maître vient à mourir, il ira chez un second ou restera chez la veuve du premier, à condition que la pharmacie soit dirigée par un serviteur approuvé. Cette dernière prescription ne se trouve nulle part ailleurs, du moins dans les statuts que nous connaissons. Après trois années d'apprentissage à Nancy ou autre ville jurée de Lorraine, une année de stage est exigée à l'étranger avant d'être admis à subir les examens de maîtrise, en présentant des certificats de catholicitéj de bonne renommée et de fidélité dans l'exercice de "l'art. Aucun maître ne prendra, sans sa permission, le serviteur du confrère voisin. Les veuves gardent le droit de tenir boutique ouverte, avec un garçon approuvé par les maîtres. L'article 22 dit que les apothicaires ne pourront traiter aucune maladie de conséquence sans appeler un médecin. On leur permet ainsi de donner des consultations aux clients pour des affections bénignes. Cet article, qui consacre un usage courant en pharmacie, est singulièrement libéral. Aussi ne se retrouve-t-il nulle part en France. En revanche, deux fois par an, les apothicaires doivent montrer au doyen des médecins, assisté de l'un de ses confrères, les prix d'achat et de vente de leurs drogues pour en établir, avec les jurés, une taxe raisonnable- Cet article est le résultat de la limitation de la pharmacie, qui fait de l'apothicaire un véritable fonctionnaire, tout en donnant pleine sécurité au. public. Les examens se passent : le premier, sur les préparations pharmaceutiques; le secondi sur la botanique. Si l'herborisation ne peut avoir lieu par suite de mauvais temps, le résultat en est quand même acquis au candidat. Le troisième comprend la matière médicale, et le dernier comporte le chef-d'uvre, composé de cinq préparations. Après réception, en présence d'un médecin, le nouveau maître est tenu de prêter le serment habituel, dont le texte est toujours le même partout. Il verse ensuite 16 francs à la confrérie et 50 francs à la bourse de la communauté. Les fils et gendres d'apothicaires ne passent que les deux der- D HISTOIRE DE LA PHARMACIE 297 niers examens et ne font qu'une seule préparation pour le chef- d'uvre. De plus, ils ne payent que la moitié des droits. Les articles 41 et suivants concernent la confrérie de N.-D. de la Nativité. Le règlement ressemble à tous les autres, en y comprenant la messe de Requiem le lendemain de la fête.\ En cas de décès d'un maître ou de sa femme, les autres maîtres devront assister à leur enterrement et faire dire ensuite une messe à leur intention. A côté des jurés est élu un maître de la confrérie, chargé de l'administrer et d'en tenir les comptes.- C'est un emploi spécial qu'il n'est point d'usage de rencontrer dans les autres communautés- Pour terminer, l'article 50 et dernier règle la tenue des assemblées, ce qui, du reste, est toujours fort utile à toutes les époques entre gens d'une même profession. « Celui qui jurera, mutinera ou querellera, l'agresseur en sera pour 6 gros et l'agressé pour 3, s'il soutient. » C'est ce qu'on appelle de la justice distributive. Chacun en prend un peu pour son compte. Tel est le règlement des apothicaires de Nancy et de Lorraine. Il nous présente certaines particularités singulièrement curieuses et intéressantes. Il ne faut point oublier que le duché se trouvait, au XVIIme siècle, sous une double influence : l'une venant de l'Est et l'autre de l'Ouest. La première représentait le droit féodal avec toutes ses restrictions, et la seconde le Droit romain avec toutes ses libertés. Les statuts que nous venons d'étudier portent la marque incontestable de cette double influence. Au point de uploads/Sante/ apothicaires-nancy.pdf
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- Publié le Mai 11, 2021
- Catégorie Health / Santé
- Langue French
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