Leucodystrophies de l’adulte F. Sedel Le terme de leucodystrophies désigne, en

Leucodystrophies de l’adulte F. Sedel Le terme de leucodystrophies désigne, en pratique clinique, des affections génétiques diverses dont le point commun est une atteinte de la myéline du système nerveux central. Les progrès des techniques diagnostiques, que ce soit en imagerie, en biochimie ou en génétique ont permis de dénombrer un nombre croissant de leucodystrophies. Bien qu’elles débutent le plus souvent dans l’enfance, la plupart de ces maladies ont des formes cliniques plus insidieuses qui peuvent se révéler à l’âge adulte. Certaines sont accessibles à un traitement et leur diagnostic paraît donc indispensable. La démarche diagnostique doit être guidée par l’examen clinique (neurologique, ophtalmologique et général), l’électromyographie et l’imagerie par résonance magnétique (IRM), ainsi que par la recherche des causes potentiellement traitables. © 2007 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. Mots clés : Leucodystrophie ; Leucoencéphalopathie ; Génétique ; Erreurs innées du métabolisme Plan ¶ Introduction 1 Généralités 1 Orientation diagnostique devant une leucodystrophie de l’adulte 2 ¶ Leucodystrophies avec neuropathie 2 Maladies lysosomales 2 Xanthomatose cérébrotendineuse 5 Troubles de la reméthylation de l’homocystéine 5 Cytopathies mitochondriales 6 Porphyrie aiguë intermittente 6 Maladie de Pelizaeus-Merzbacher 6 Maladie à dépôts de polyglucosans 7 Maladie de Charcot-Marie-Tooth (CMT X) 7 ¶ Leucodystrophies sans polyneuropathie 7 Leucodystrophies sus-tentorielles 7 Leucodystrophies touchant la fosse postérieure 9 ¶ Leucodystrophies avec lésions vasculaires 9 « Cerebral autosomal dominant arteriopathy with subcortical infarcts and leucoencephalopathy » 9 Maladie de Fabry 10 ¶ Conclusion 10 ■Introduction Généralités Le terme de leucodystrophie décrit stricto sensu une maladie d’origine génétique évoluant de façon progressive et responsable d’un défaut de développement ou d’une destruction progressive de la myéline encéphalique (revues dans [1-3]). L’approche diagnostique des leucodystrophies a été profondément modifiée au cours des dix dernières années avec la découverte de gènes responsables de nouvelles leucodystrophies et le développement de l’imagerie cérébrale qui a permis l’identification de nouvelles entités clinicoradiologiques. En raison de ces progrès et de la quasi-disparition en pratique clinique de la biopsie cérébrale à visée diagnostique, la classification des leucodystrophies, qui était fondée traditionnellement sur des critères neuropathologi- ques, repose désormais sur des critères cliniques, radiologiques et moléculaires. Progressivement, le terme de leucodystrophie est devenu synonyme, en pratique clinique, de « leucoencépha- lopathie génétique » qui englobe un groupe de maladies héréditaires au cours desquelles on peut observer des anomalies diffuses de la substance blanche en imagerie par résonance magnétique (IRM) (Tableau 1). Dans une première tentative de classification pragmatique nous avions distingué : • les leucodystrophies diagnostiquées grâce à une approche métabolique ; • les leucodystrophies diagnostiquées par une approche généti- que ; • les leucodystrophies définies sur le plan clinique et radiologi- que mais pour lesquelles l’anomalie génétique ou métaboli- que causale n’était pas encore identifiée [4]. Dans cette revue, nous avons tenté de privilégier une classi- fication reposant sur la clinique, l’électromyogramme (EMG) et l’IRM, plus proche du raisonnement du clinicien et ce, dans le souci d’ébaucher une démarche diagnostique devant une leucodystrophie. Ainsi, nous avons distingué : Tableau 1. Leucoencéphalopathies potentiellement réversibles après traitement. Maladie Test de dépistage Déficit en MTHFR Homocystéine Cbl C Homocystéine Xanthomatose cérébrotendineuse Cholestanol Aminoacidopathie Chromatographie des acides aminés Acidurie organique Chromatographie des acides organiques Porphyrie aiguë intermittente Porphobilinogène, acide d aminolévulinique Noter qu’au cours des mutations de la connexine 32 et d’exceptionnelles adrénoleucodystrophies on peut également observer une leucoencéphalopathie spontanément réversible. MTHFR : méthylène tétrahydrofolate réductase. ¶ 17-066-A-70 1 Neurologie • les leucodystrophies avec polyneuropathie ; • les leucodystrophies isolées que nous avons subdivisées en leucodystrophies sus-tentorielles et leucodystrophies touchant la fosse postérieure ; • les leucodystrophies avec lésions vasculaires. Cette classification est forcément imparfaite et l’existence de formes atypiques doit mettre en garde contre une lecture trop stricte. Il faut garder à l’esprit que les leucodystrophies sont des pathologies en cours de description et que nos connaissances sont régulièrement remises en question. L’identification des anomalies géniques responsables de certaines leucodystrophies a permis de montrer qu’il existait un continuum entre les formes pédiatriques sévères et des formes modérées pouvant parfois débuter à des âges avancés de la vie et prenant alors souvent un aspect différent de celui de l’enfant. Nous réduirons ici notre propos aux seules formes de l’adulte et de l’adolescent. Orientation diagnostique devant une leucodystrophie de l’adulte La démarche diagnostique devant une suspicion de leucodys- trophie doit toujours débuter par la recherche de toutes les causes acquises, potentiellement réversibles, pouvant être responsables d’un aspect de leucoencéphalopathie diffuse en IRM. Ces causes sont très nombreuses et peuvent être de nature inflammatoire, infectieuse, métabolique acquise, paranéoplasi- que tumorale, ou vasculaire (Tableau 2) [5]. Une fois éliminées ces causes, on retient souvent par défaut le diagnostic de leucodystrophie. La plupart des signes neurologiques observés au cours des leucodystrophies de l’adulte sont peu spécifiques : troubles psychiatriques, atteinte cognitive de type sous-cortical, paraparésie spastique, ataxie cérébelleuse, crises d’épilepsie. Certains d’entre eux sont cependant évocateurs de quelques étiologies et il faut s’attarder à la recherche d’une polyneuropa- thie, de myoclonies du voile (maladie d’Alexander), d’un nystagmus multidirectionnel (maladie de Pelizaeus Merzbacher), d’épisodes neurologiques aigus inexpliqués (Tableau 3). En revanche, les signes extraneurologiques, lorsqu’ils sont présents, ont une valeur d’orientation décisive (Tableau 3) : des kystes osseux orientent vers une maladie de Nasu-Hakola, une ichtyose vers un syndrome de Sjögren-Larsson ou une maladie de Refsum, des xanthomes vers une xanthomatose cérébrotendi- neuse, une insuffisance surrénale vers une adrénoleucodystro- phie, des troubles digestifs vers une xanthomatose cérébrotendineuse, un syndrome MNGIE (mitochondrial neuro- gastrointestinal encephalomyopathy) ou une porphyrie aiguë intermittente. L’EMG, l’examen ophtalmologique éventuelle- ment complété par un électrorétinogramme et des potentiels évoqués visuels ainsi qu’une spectro-IRM, quand elle est possible, permettent d’orienter ensuite le diagnostic. Toutefois, 50 % des leucoencéphalopathies génétiques restent sans dia- gnostic (Tableau 3) étiologique chez l’enfant et probablement plus chez l’adulte. On ne saurait proposer un bilan biologique systématique devant toute leucoencéphalopathie mais il faut avoir à l’esprit que certaines leucodystrophies sont accessibles à un traitement et le bilan étiologique doit permettre de ne pas passer à côté de ces causes curables. Enfin, du fait de la rareté et de la complexité de ces pathologies, un avis spécialisé pluridisciplinaire demeure essentiel devant toute leucodystro- phie non identifiée. ■Leucodystrophies avec neuropathie Maladies lysosomales Les lysosomes sont des organelles intracellulaires contenant des enzymes dont la fonction essentielle est de dégrader des molécules complexes afin d’en assurer le recyclage ou l’élimina- tion. Les déficits en enzymes lysosomales sont donc essentielle- ment responsables de maladies « de surcharge ». Deux maladies lysosomales sont responsables, chez l’adulte, d’une atteinte primitive de la myéline centrale et, en général, périphérique : la leucodystrophie métachromatique et la maladie de Krabbe. Par ailleurs, un aspect de leucoencéphalopathie peut s’observer au cours de la mucolipidose de type IV ou la maladie de Fabry. Ces maladies seront décrites au cours des paragraphes suivants. Leucodystrophie métachromatique La leucodystrophie métachromatique, de transmission auto- somique récessive, est due à un déficit en arylsulfatase A, enzyme lysosomale impliquée dans la dégradation des sulfatides qui sont des composants essentiels de la myéline. La surcharge en sulfatides est responsable d’une dégénérescence oligodendro- cytaire et d’une démyélinisation progressives. Les formes débutant à l’âge adulte représentent 20 % des cas et l’âge de début peut atteindre la 7e décennie [6, 7]. Ces formes de l’adulte débutent le plus souvent par des troubles psychiatriques puis apparaissent progressivement un syndrome sous-cortico-frontal, une paraparésie spastique, une ataxie cérébelleuse, des crises convulsives, une atrophie optique, une polyneuropathie démyélinisante souvent asymptomatique [8, 9]. Des formes monosymptomatiques ont été décrites, se résumant parfois à une polyneuropathie motrice isolée [10] ou à un tableau psy- chiatrique pur sans polyneuropathie [11]. L’IRM met en évidence une leucoencéphalopathie bilatérale et symétrique touchant la substance blanche périventriculaire sus-tentorielle, à prédomi- nance frontale et épargnant relativement les fibres en U (Fig. 1). La spectroscopie par résonance magnétique (spectro-IRM) peut montrer une diminution du pic de N-acétyl-aspartate, signe de perte axonale progressive, ainsi qu’une augmentation du pic de myo-inositol, témoignant de la gliose réactionnelle [12]. Diagnostic et traitement Le diagnostic repose sur le dosage de l’arylsulfatase A dans les leucocytes. Ce test diagnostique n’est cependant pas suffisant car 1 à 2 % de la population est porteuse d’un pseudodéficit en arylsulfatase A sans traduction clinique. Le diagnostic doit donc être confirmé par la mise en évidence d’une accumulation de sulfatides dans les urines. Le diagnostic définitif sera confirmé par l’analyse moléculaire du gène de l’arylsulfatase A. Le seul traitement qui peut être discuté à l’heure actuelle est la greffe de moelle osseuse qui, grâce à la sécrétion d’arylsulfatase par les macrophages provenant du donneur, permet de restaurer en partie le déficit enzymatique [13]. Le bénéfice de la transplanta- tion est à mettre en balance avec le risque de mortalité (environ 10 % pour un donneur human leucocyte antigen [HLA]- compatible, 25 % pour un donneur HLA-non compatible). Maladie de Krabbe La maladie de Krabbe, de transmission autosomique récessive, est due à un déficit en galactocérébrosidase responsable d’une Tableau 2. Causes acquises de leucoencéphalopathies (d’après Filley et al. [5]). Infectieuses VIH, CMV/VZV, panencéphalite sclérosante subaiguë, Lyme, rubéole, leucoencéphalopathie multifocale progressive Tumorales Paranéoplasique, lymphome, uploads/Sante/ leucodystrophies-de-l-x27-adulte.pdf

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  • Publié le Jui 16, 2021
  • Catégorie Health / Santé
  • Langue French
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