Le Congrès Médecins. Conférence d’Essentiel © 2015 Sfar. Tous droits réservés.

Le Congrès Médecins. Conférence d’Essentiel © 2015 Sfar. Tous droits réservés. PRISE EN CHARGE DU PATIENT ÉLECTRISÉ OU FOUDROYÉ Marc Bertin-Maghit, Amélie Mazaud, Corina Spann, Laure Fayolle-Pivot, Diane Le Quang, Julien Textoris, Thomas Rimmelé. Centre des Brûlés. Service d’Anesthésie Réanimation. Hôpital Edouard Herriot, 5 Place d’Arsonval 69437 Lyon cedex 03. Auteur correspondant : Dr. Marc Bertin-Maghit (marc.bertin-maghit@chu-lyon.fr) Points essentiels  L’électrisation correspond aux différents traumatismes induits par une exposition au courant électrique.  L’électrocution est un arrêt cardio-circulatoire provoqué par contact direct avec l’électricité, le plus souvent par fibrillation ventriculaire.  Trois types de phénomènes physiques sont responsables d’électrisation : les brûlures électriques avec passage interne du courant, l’arc électrique, le flash électrique.  Le foudroiement met en jeu des forces électriques d’intensité et de voltage extrêmes, responsables d’accidents d’une grande hétérogénéité.  Les électrisations par courant de basse tension sont en majorité des accidents domestiques caractérisés par une gravité cardio-vasculaire immédiate.  Les électrisations par courant de haute tension sont en majorité des accidents du travail et sont responsables de brûlures profondes et de lésions délabrantes.  Le passage du courant électrique dans l’organisme se fait entre des points d’entrée et de sortie, sièges de brûlures apparentes nommées marques électriques de Jellineck. Le trajet interne suit préférentiellement les axes vasculo-nerveux, avec un traumatisme thermique responsable de brûlures internes.  La rhabdomyolyse secondaire à l’atteinte musculaire profonde se complique d’une tubulopathie rénale analogue à celle observée dans les crush syndromes.  L’expansion volémique, supérieure à celle calculée à partir de la surface apparente des brûlures, vise à prévenir « l’acute kidney injury ». Elle est associée aux diurétiques et à l’alcalinisation des urines.  Le traitement chirurgical impose des gestes itératifs de décompression, de parage, de régularisation et de reconstruction. 1. INTRODUCTION L’électricité est omniprésente dans l’environnement humain. Sa forme naturelle est responsable d’accidents décrits depuis l’antiquité, dus à la foudre, l’électricité statique, ou certains animaux tels le gymnote ou le poisson torpille. Les recherches scientifiques sur l’électricité ont d’abord concerné l’étude du magnétisme. En 1752, Benjamin Franklin démontrait les liens entre foudre et phénomène électrique, tout en étant également à l’origine de la première démarche de prévention appliquée à ce phénomène par l’invention du paratonnerre. Si la pile électrique a été inventée par le physicien italien Alessandro Volta à la fin du XVIIIème siècle, c’est au cours du siècle suivant que les recherches scientifiques isolées évoluent vers des démarches rationnelles scientifiques aboutissant à l’emploi quotidien de l’électricité par l’homme. Il est possible de citer à titre d’étape symbolique la mise en point de la première lampe par Thomas Edison en 1878, ouvrant l’ère de l’exploitation industrielle du courant électrique. Électricité et risque d’accident humain sont indissociables. Le foudroiement est redouté depuis l’antiquité comme en témoigne la crainte inspirée par les foudres de Zeus. Le premier accident mortel lié à un courant alternatif de bas voltage a été rapporté en 1879. Aujourd’hui, l’électricité est devenue une source d’énergie indispensable, universelle, permanente. Son utilité trouve des champs d’application dans tous les domaines d’activité humaine. Mais cette omniprésence est indissociable de risques accidentels très différents suivant l’origine naturelle, domestique ou industrielle du courant électrique en cause, et selon les caractéristiques physiques de celui-ci. L’étude de la conduite à tenir thérapeutique vis-à-vis d’un patient électrisé ou foudroyé est indissociable des mesures de prévention primaire et secondaire de ces accidents. 2. INCIDENCE ET FACTEURS FAVORISANTS 2.1 Épidémiologie Les études épidémiologiques sont mais imprécises. Les expositions bénignes au courant de basse tension n’entrainent souvent ni consultation ni hospitalisation. Les centres de brûlés occidentaux rapportent entre 4 et 6 % d’hospitalisations pour brûlures électriques. Celles-ci sont grevées d’une mortalité et d’une incidence des complications plus élevées que lors de brûlures thermiques classiques [1]. Les données épidémiologiques récentes confirment des notions déjà soulignées dans les mises au point antérieures : - Les accidents domestiques par courant de basse tension concernent pour 20 % des cas des enfants de moins de 6 ans. La mortalité hospitalière des enfants victimes d’électrisation est nulle aux États-Unis [2]. - Les victimes d’accident du travail en France sont en majorité des hommes adultes. La mortalité observée est de 3 % [3] - L’incidence globale des accidents électriques est en baisse dans les pays occidentaux [2], mais le taux de létalité reste stable. - La fréquence et la gravité de ces accidents sont moins bien connues dans les pays émergents. Les études disponibles sont plus anciennes et rapportent une proportion de brûlés hospitalisés plus élevée après un accident d’électrisation, et des séquelles plus lourdes. Les catastrophes naturelles, par exemple le tremblement de terre de 2010 en Haïti, sont des facteurs favorisants compte tenu de la destruction partielle des réseaux de distribution de l’électricité. Des circonstances particulières, comme les surfeurs de train, jeunes gens voyageant sur les toits des wagons au Brésil ou en Afrique, sont également à souligner [2]. - Le foudroiement reste un accident rare, responsable de 0,2 à 1,7 décès par million de personnes et par an dans le monde [4], et grevé d’une mortalité hospitalière de 18% [5]. La foudre frappe plus certains pays, différents reliefs, sous des climats propices, ou lors d’activités sportives ou professionnelles spécifiques. Des études rapportent ainsi une incidence élevée dans la partie sud de l’Afrique ou les états méridionaux des USA [6]. Les risques spécifiques liés à la pratique de l’alpinisme ou la navigation de plaisance justifient depuis longtemps des mesures de prévention particulières. Des spécificités épidémiologiques sont liées aux caractéristiques physiques du courant incriminé. Les accidents domestiques concernent des enfants dans 2/3 des cas. Les électrisations par courant de haute tension sont dominées par les accidents du travail, avec une prédominance masculine due aux caractéristiques professionnelles du secteur concerné [2]. 2.2 Caractéristiques physiques Trois catégories de courant électrique peuvent entrainer des accidents : - Le courant domestique de basse tension, sous sa forme monophasée à 220 volts (V), ou triphasée à 380 V, est omniprésent dans les locaux d’habitation et les établissements collectifs, - Le courant de haute tension supérieur à 1000 V est rencontré sur ses lieux de production, dans les équipements de transport et d’alimentation électriques, et dans l’environnement industriel et les transports, - L’électricité naturelle sous sa forme majeure la foudre libère en un temps très court, de l’ordre de quelques millisecondes, un courant d’intensité de 10000 à 25000 ampères avec une tension de 10 à 100 millions de volts. L’importance des lésions induites par l’électricité est en rapport direct avec les caractéristiques physiques du courant en cause. Les différents paramètres se définissent par : - L’intensité I du courant mesuré en ampères, - La tension U exprimée en volts, - La somme des résistances R mesurée en ohms, - Le temps de contact t avec le courant mesuré en secondes, - La chaleur produite E exprimée en joules. Les lois physiques d’Ohm (U = RI) et Joule (E = RI2t) permettent d’évaluer le dégagement de chaleur responsable du traumatisme électrothermique.  Intensité du courant Elle est difficile à préciser. Elle varie selon les différents niveaux de résistance rencontrés au passage du courant électrique. C’est l’intensité qui est responsable des phénomènes de contraction musculaire, de sidération neuronale, et de dysfonctionnement des cellules nodales myocardiques. Pour un courant alternatif distribué à 50 Hz selon les standards européens, l’importance des lésions organiques et de dysfonctionnement cellulaire est proportionnelle à l’intensité du courant en cause : - 1 à 2 milliampères (mA) : seuil de perception, - 5 mA : douleur, - 10 mA : contraction soutenue, réversible après interruption de l’électrisation, - 30 à 100 mA : tétanisation diaphragmatique, si le trajet du courant traverse verticalement le tronc, - 30 mA : limite inférieure du risque d’arythmie ventriculaire en cas de passage intracardiaque concomitant à la phase électrique vulnérable du cycle cardiaque. Les accidents plus graves peuvent être responsables d’un tableau de mort subite, par fibrillation ventriculaire, laryngospasme asphyxique ou sidération des centres bulbaires [7]. Cela illustre le concept de « l’intensité qui tue ».  Tension du courant Plus la tension en cause est haute (> 1000 V), plus le dégagement de chaleur le long du parcours interne du courant sera important. C’est le principe des « volts qui brûlent ». Les caractéristiques physiques des courants responsables d’électrisation conduisent donc à opposer les électrisations de bas voltages < 1000 volts, accidents domestiques responsable d’un risque cardiovasculaire instantané et de discrètes brûlures, et les électrisations de haut voltage (> 1000 V) marquées par des lésions tissulaires et viscérales profondes et sévères.  Résistances corporelles Ce paramètre varie selon les tissus concernés. Pour la peau, la résistance augmente avec l’épaisseur de la couche cornée et diminue selon l’humidité de la zone de contact. Dans l’organisme, la résistance est décroissante depuis l’os, puis la graisse, les tendons, la peau, les muscles, le sang et enfin les nerfs. Le trajet du courant électrique suit donc en règle les axes vasculo-nerveux.  Temps d’exposition et surface de contact À voltage constant, l’intensité délivrée aux tissus augmente avec la surface de contact entre la peau et le conducteur. uploads/Sante/ prise-en-charge-du-patient-electrise-ou-foudroye-39-bertin-maghit-1442329293.pdf

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  • Publié le Mar 27, 2022
  • Catégorie Health / Santé
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