Article soumis à Revue Staps : Le football amateur sous le choc économique de l
Article soumis à Revue Staps : Le football amateur sous le choc économique de la crise de la Covid-19 en France The economic shock of Covid-19 on French amateur football Résumé La propagation du Coronavirus (Covid-19) a entraîné l’arrêt des championnats professionnels et amateurs de football. L'objectif de l’article est de mettre en évidence le choc instantané et violent de cette crise sur le modèle de financement des clubs de football amateur en comparant leurs comptes avant la crise et à la fin de de la saison en cours. Les mesures gouvernementales de soutien au sport sont prises en compte pour voir combien les clubs y ont eu recours. Mots-clés : football, clubs amateurs, financement, crise économique, Covid-19 Abstract The spread of Coronavirus (Covid-19) has put an earlier end on professional and amateur football championships. The article aims at highlighting whether the instant and violent shock of this crisis has affected the financing model of amateur football clubs by comparing their accounts before the crisis and at the end of the current season. Government’s measures to support sport activity are taken on board to check how much clubs have resorted to them. Keywords : football, amateur clubs, financing, economic crisis, Covid-19 1 Introduction La propagation du coronavirus (Covid-19) entraîne depuis le début de l’année 2020 une crise sanitaire dans le monde entier. A l’instar de tous les autres secteurs de l’économie, le sport professionnel et amateur est confronté à cette crise. En France, les clubs connaissent une suspension des championnats professionnels et amateurs depuis le 12 mars 2020, date du début du confinement. Au fur et à mesure de l’évolution de cette pandémie, toutes les fédérations et ligues sportives ont été contraintes à l’arrêt définitif des compétitions pour la saison 2019/20. La Fédération Française de Football (FFF) et la Ligue du Football Professionnel (LFP) ont voté la fin des compétitions amateurs et professionnelles. Pareille situation est inédite dans l’histoire du football. Même pendant la Première Guerre mondiale, les clubs français ont continué à disputer leurs matches. La Coupe de France a même été créée en 1917. Durant la Seconde Guerre mondiale, le nombre d’équipes françaises de football participant à la Coupe Charles Simon connaît même un record. Pour l’heure, il manque une recherche détaillée estimant précisément, par l’observation des comptes des clubs de football amateurs, les effets potentiels d’une crise sanitaire avec confinement sur leurs finances, même si le risque de vulnérabilité financière a déjà été souligné dans trois sports d’équipe (Terrien & Dufau, 2020). Un accès privilégié aux acteurs et aux documents comptables et financiers des clubs de football amateurs1 de National et de National 2 permet de retracer dans cet article les effets de cette crise sur différentes variables caractérisant leur modèle économique et sur leur stabilité financière à court terme. L’article se lit comme suit. Après avoir spécifié la crise du Covid-19 par rapport à l’évolution économique du football au 21e siècle (section 1), la section 2 analyse la structure du financement et des coûts du championnat de National (N1) et de National 2 (N2), à partir 1 Sur la période étudiée, ce sont en moyenne 67 clubs de National et de National 2 (ayant le statut sportif amateur) qui ont été suivis par la commission fédérale de contrôle des clubs au sein de la FFF. 2 d’une synthèse des données financières disponibles de 2008 à 2019. La section 3 rappelle les mesures prises en faveur du football amateur face au choc économique de la crise de la Covid-19 et précise quelle proportion des clubs concernés a eu recours à ces mesures. La Section 4 donne à voir les effets immédiats de la crise en comparant les comptes des clubs à l’issue de la saison 2019/20 avec le modèle économique identifié pendant les dix années précédentes. Une brève conclusion marque la différence entre les résultats comptables et le discours des clubs pour bénéficier des mesures de soutien. 1. Le football et la spécificité économique de la crise de la Covid-19 Un problème se pose quand on veut estimer les effets d’une crise sur l’économie du sport, et du football en particulier, à savoir quelle est la situation de référence par rapport à laquelle on va comparer une déviation importante supposée être causée par la crise. Peut-on considérer les deux premières décennies du 21e siècle comme une situation économique «normale» du football à laquelle rapporter les observations faites depuis le début de la pandémie de la Covid-19? La réponse n’est pas simple car le football a traversé plusieurs crises déclenchées par des facteurs internes ou externes. Si l’on suppose que la «norme» d’une économie saine du football et d’une bonne gestion des clubs est qu’ils atteignent au moins le point mort dans leurs comptes, i.e. ne font pas de déficit et donc évitent de s’endetter, alors le football professionnel européen est en crise depuis le début du siècle2, avant même la crise des subprimes. Le football français y compris (Andreff, 2007), crise qui dure jusqu’à présent (Andreff, 2018). Or les comptes agrégés des clubs amateurs présentent aussi un résultat net négatif, tant en N1 qu’en N2, pendant toute notre période d’observation, de 2008/09 à 2018/19. 2 Voir les deux numéros du Journal of Sports Economics, 7(1), 2006) et 8(6), 2007 consacrés à la crise financière du football européen. 3 Si l’on déplace le curseur à un niveau plus micro-économique que la ligue, celui de chaque club de football, sa situation de crise peut déboucher sur une faillite avec mise en liquidation. Or, bien avant la Covid-19, 79 clubs de football français ont été déclarés insolvables de 1970 à 2014 (Scelles et al., 2018), dont 28 clubs de N1 entre 1993 et 2014. Entre la saison 2008/09 et la saison 2018/19, 17 clubs de National et de National 2 ont fait faillite (Carin, 2019)3. Quant aux causes externes ou exogènes de crise du football, ce qu’est la Covid-19, elles sont plus rares, mais l’on peut mentionner un précédent. La crise des subprimes (2008), et la Grande Récession qui s’ensuivit – le taux de croissance du PIB de la France fut de +0,2% en 2008, -2,7% en 2009 et +1,4% en 2010 –, ont déclenché un sérieux choc exogène sur l’économie du sport et le football (Andreff, 2009). Elle s’est traduite par une perte de pouvoir d’achat pour les ménages, lesquels ont diminué leurs dépenses sportives en 2009, tant pour la pratique sportive (licences) que pour le spectacle sportif. L’affluence a baissé dans toutes les ligues du football professionnel européen pendant les saisons 2008/09 et 2009/10, de manière plus ou moins significative, sauf dans l’English Premier League (Andreff, 2012), avec un effet négatif sur les recettes de billetterie des clubs. Les collectivités territoriales les plus endettées ont réduit leurs subventions, dont en faveur du sport. Plusieurs sponsors en difficulté financière se sont retirés du sport, y compris dans le football; certains clubs ont perdu leur sponsor en 2009 - Aston Villa, Sheffield Wednesday, Leicester -, les revenus sponsoring d’Anderlecht ont chuté de 20% la même année. Toutefois, Barget et Brocard (2015) observent que les ligues et les clubs riches ont été les moins touchés par la récession et ont retrouvé dès 2011 leur rythme de croissance antérieur à la crise, sauf en Grèce. On note des effets similaires, légèrement retardés, dans les comptes agrégés des clubs de football amateur français, avec un niveau amoindri des recettes de billetterie en N1 (-42% en 3 Sète, Libourne Saint-Seurin, Strasbourg, Gueugnon, Cassis-Carnoux, Besançon, Gap, Rouen, Vannes, Uzès, Istres, Arles-Avignon, Moulins, Luçon, Colmar, Paulhans, Limoges. 4 2010, -32% en 2011) et en N2 (-49% en 2011). Les revenus du sponsoring baissent en 2011 en N1 (-33%) et en N2 (-4%)4. En revanche, les subventions des collectivités territoriales ont continué à progresser et à soutenir les clubs en difficulté à l’époque. C’est de la crise des subprimes que celle de la Covid-19 peut être comparée, mais il faut souligner deux différences importantes. D’une part, la crise de la Covid-19 entraîne une totale cessation d’activité sportive et économique dans presque tous les sports. Suite à la pandémie mondiale, les décisions prises par le gouvernement français en matière d’organisation d’événements et de déplacement des personnes ont obligé les fédérations et les ligues sportives à arrêter les compétitions avant la fin de la saison 2019/20, ce dont le Tableau 1 rend compte pour cinq sports d’équipe majeurs. Tableau 1: Décisions prises pour les cinq sports d’équipe majeurs en France Sport Championnats amateurs Championnats professionnels Basket Arrêt des championnats amateurs, coupes Suspension des championnats jusqu'en septembre (reprise éventuelle en septembre pour terminer la saison sportive 2019/20) Football Arrêt des championnats amateurs y compris Championnat National 1-National 2 et D1 Féminine Arrêt des championnats de Ligue 1 et de Ligue 2 Volley Ball Arrêt définitif des championnats amateurs et professionnels pour la saison 2019/20 Hand Ball Arrêt définitif des championnats amateurs et professionnels pour la saison 2019/21 Rugby Arrêt des championnats amateurs Arrêt du championnat de Top 14 et de Pro D2 La seconde différence est que la crise économique uploads/Sports/ lefootballamateursouslechoceconomiquedela-covid-19-en-francerevuestaps.pdf
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- Publié le Dec 19, 2021
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