1 Illustration de couverture : Tables Claudiennes, cliché Ch. Thioc, Musée gall
1 Illustration de couverture : Tables Claudiennes, cliché Ch. Thioc, Musée gallo-romain de Lyon, Département du Rhône. Ce texte a été orthographié en suivant les recommandations du Conseil supérieur de la langue française approuvées à l'unanimité par l'Académie française le 3 mai 1990 et que celle- ci a souhaité, le 17 janvier 1991 soumettre « à l'épreuve du temps ». Ces modifications portent surtout sur des simplifications d'accent, absence d'accent circonflexe sur le i et sur le u et des régularisations, évènement comme avènement, mise du tréma sur la lettre qui doit être prononcée (ambigüité ou le u se prononce, contre fatigue où il ne se prononce pas) 2 Introduction La question du latin ne se pose plus guère dira-t-on puisque son enseignement ne joue plus le rôle principal qu'il a longtemps joué. Françoise Waquet a fort bien décrit cette longue baisse qui a conduit à la suppression du latin en 6e par Edgar Faure en 1968 et, pour elle, l'enseignement du latin étant réduit à une « teinture », la question du latin ne se pose plus en tant que telle1. Elle se pose cependant : un enseignement de latin est toujours donné et on n'a jamais autant initié d'enfants au latin qu'aujourd'hui puisque près d'un quart de la classe d'âge fait du latin la première année où cette option est proposée. Pourcentage d'élèves en première année de latin 10,0 15,0 20,0 25,0 30,0 1970 1974 1978 1982 1986 1990 1994 1998 2002 2006 Année Sur ce graphique est portée la proportion de ceux qui débutent l'enseignement du latin, en 4e jusqu'en 1995, en 5e depuis la réforme Bayrou de 1996. On voit bien une croissance régulière jusqu'en 1990, puis une diminution depuis cette date malgré le sursaut qu'a été l'introduction du latin en 5e en 1996 et la stabilisation actuelle (Source Ministère de l'Éducation nationale : ensemble public et privé). C'est une évolution récente et considérable que l'on peut repérer en comparant trois situations : les effectifs de latinistes en 4e en 1920, au beaux jours du lycée classique ; en 1965, où le Collège d'enseignement secondaire de type lycée vit ses 1 Françoise Waquet, Le latin ou l'empire d'un signe,XVIe-XXe siècle, Paris, Albin Michel, 1998, p.322 3 dernières années avant l'unification de 1975 (Réforme Haby) et en 2004. On a les effectifs suivants : 1920 10.000 1965 100.000 2004 160.000 Cette croissance est aisément explicable : en 1920 l'enseignent secondaire ne concerne qu'une faible partie de la population. Si en 1965, la proportion de ceux qui font du latin en 4e est proche de la proportion pour la même population en 2004, l'évolution des effectifs vient simplement du fait qu'aujourd'hui l'enseignement secondaire touche l'ensemble de la classe d'âge. Cependant, si l'enseignement du latin au collège n'est pas un phénomène marginal, dès la seconde année, le pourcentage baisse, malgré le contrat annoncé pour l'option latin qui est prise en principe jusqu'en 3e : 5e 22,6 % 4e 19,5 % 3e 16,3 % Rentrée 2006 : public + privé Au lycée la baisse est beaucoup plus forte : en 2006, les latinistes ne sont plus que 5,5 % en seconde, 4,2 % en première et 3,6% en terminale. On notera que les sections S (6,7 %) et L (7,9 %) s'opposent à la section ES où ils ne sont que 2,4 %. Second cycle 0,0 2,0 4,0 6,0 8,0 10,0 12,0 14,0 16,0 18,0 20,0 1984 1986 1988 1990 1992 1994 1996 1998 2000 2002 2004 2006 Année % latin Seconde P remière Terminale Pourcentage d'élèves prenant l'option latin. Source Ministère de l'Éducation nationale : ensemble public et privé 4 Les enseignants rénovateurs Face à cette situation, de petits groupes d'enseignants de langues anciennes se sont regroupés dans une association nationale, la Cnarela et se sont constitués en groupe de pression pour faire évoluer les objectifs de l'enseignement. Cnarela : Coordination Nationale des Associations Régionales des Enseignants de Langues Anciennes. Les associations régionales regroupent près de la moitié des enseignants de langues anciennes, ce qui rend leur coordination très représentative et reconnue comme telle par le Ministère qui en fait un interlocuteur privilégié. Ces associations produisent des bulletins qui associent des réflexions et des conseils sur les problèmes réglementaires (actualité des circulaires, des normes administratives) et sur l'action à mener pour défendre les classes de langues anciennes ; des citations de textes parus ailleurs (prises de positions et témoignages) et une partie pédagogique : étude de textes, dossiers, etc., qui sont disponibles pour tous les enseignants. L'objectif nouveau de l'enseignement du latin n'est plus la seule version mais la compréhension en profondeur du monde antique, grâce à l'étude de textes authentiques et longs, avec l'aide d'une documentation rigoureuse et en vue, à long terme, d'une prise de position critique face au monde tel qu'il est. On comprend qu'un tel objectif puisse motiver puissamment des enseignants. Le principe est que l'on travaille sur un texte authentique que l'on veut, non d'abord traduire, mais comprendre : pourquoi ce rejet du texte fabriqué pour faciliter l'apprentissage à la manière du célèbre De viris2. La réponse est d'abord une réaction contre l'apprentissage antérieur ou l'exercice de traduction n'avait que son efficacité propre de gymnastique de l'esprit. Un texte artificiel est un texte vide de sens humain et culturel : la nouvelle finalité de l'étude d'un texte en latin « doit être la découverte la plus précoce possible, par la lecture et la compréhension directes du plus grand nombre possible de textes, de l'histoire, de la culture, de la civilisation latines posées 2 Charles François Lhomond (1995), De viris. Les grands hommes de Rome, Latin/Français, traduit et présenté par Jacques Gaillard, Arles, Actes Sud. 5 comme objets de référence et de comparaison pour une réflexion sur le monde contemporain »3. Il ne s'agit pas de donner aux élèves une motivation utilitariste, et l'étude des comparaisons de vocabulaire est utilisée plus comme aide pédagogique que comme but, ni de donner les connaissances nécessaires pour la compréhension du patrimoine artistique et littéraire, bien que cela ne soit pas refusé. Il s'agit, par l'étude des textes d'une civilisation qui est fondatrice de la nôtre, de se la réapproprier d'une manière citoyenne en faisant à travers elle l'expérience forte de la distance culturelle. C'est la distance et non plus la proximité aux Anciens qui devient formatrice. L'action de ce groupe a été efficace : ces nouveaux objectifs ont été largement diffusés et se sont traduits par une nouvelle forme d'examen au bac comme en témoignent les nouvelles directives de 1995. La version existe toujours mais ne représente plus que la moitié de l'évaluation : le texte à traduire est donc bref. Un texte long est donné avec sa traduction : l'élève doit répondre à des questions à propos de ce texte concernant la grammaire, la traduction, l'histoire ou la civilisation romaine. Cependant le programme officiel des langues anciennes au collège reste traditionnel : si le but annoncé est culturel, le moyen en est la lecture et la connaissance de la langue : Fondé sur la lecture des textes d'auteurs latins ou grecs, cet enseignement vise avant tout l'acquisition des références culturelles qui continuent de nourrir notre imaginaire (notamment les grands mythes de l'Antiquité) et notre réflexion politique et philosophique. Savoirs et compétences devant être acquis à la fin du collège — maîtriser un lexique de 800 à 1 000 mots en latin ; d'environ 300 mots en grec ; — lire un texte en latin ou en grec à partir de ce lexique et le traduire oralement ou par écrit ; — élaborer et analyser une traduction ; — connaître quelques grandes références culturelles, notamment sur la vie quotidienne, politique et artistique à 3 Georges Cauquil et Jean-Yves Guillaumin (1984), Vocabulaire de base du latin, Besançon, ARELAB, p. 4. 6 Rome, sur les mythes et l'histoire, sur la cité athénienne au Ve siècle.4 On a donc une population scolaire non négligeable et un programme d'apprentissage soutenu par un groupe professionnel ayant su renouveler les finalités de l'apprentissage d'une langue ancienne : on pourrait penser que tout se déroule bien et qu'il n'y a pas de question du latin. Pourtant le débat existe : l'association professionnelle des enseignants de langues anciennes lutte activement pour que leur enseignement soit maintenu car leur survie ne va pas de soi. Par exemple beaucoup pensent que cet enseignement est inutile et que de plus il ne sert qu'à donner une marque de distinction sociale. Les arguments s'échangent vite : grec thérapeutique contre élitisme, niveau nul des élèves opposé à la gymnastique de l'esprit ; on met aussi en avant l'inappétence des élèves rendant impossible l'initiation à la culture classique. Les thèses de ce livre Le présent livre est un livre de sociologie et, comme tel, utilise la posture qui est celle aujourd'hui de nombreux sociologues qui ont abandonné la posture critique et qui tentent cependant de proposer des solutions aux problèmes rencontrés en les enracinant dans la situation sociale dont ils sont issus. C'est la posture de l'École de Chicago et de son uploads/s1/ enseigne-ment-latin-cibo-is.pdf
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- Publié le Oct 31, 2021
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