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• • Didier Ga/lot "' liS GRACIS Dl DIEU Albin Michel Le scanclale cles grâces présiclentielles nmx - 2013 nmx - 2013 nmx - 2013 nmx - 2013 LES GRÂCES DE DIEU nmx - 2013 Du même auteur aux Éditions Albin Michel LES FOSSOYEURS DE LA JUSTICE LES FOSSOYEURS DE LA POLICE nmx - 2013 Didier Gallot A LES GRACES DE DIEU Le scandale des grâces présidentielles Albin Michel nmx - 2013 © Éditions Albin Michel S.A., 1993 22, rue Huyghens, 75014 Paris ISBN 2-226-06493-1 nmx - 2013 « La multitude des crimes en assure l'impunité lorsque l'État dépérit. Les fréquentes grâces annoncent que bientôt les forfaits n'en auront plus besoin et chacun voit où cela mène. » J .-J. Rousseau, Le Contrat social. «Ah! tenez, Monsieur, tout cela, c'est trop malin pour moi, et simplement cela ne me plaît pas de voir mon maître faire bande avec ceux qu'on arrête, et défaire avec eux le travail qu'on a fait pour lui. » André Gide, L'Immoraliste. « Le président de la République a le droit de faire grâce. » Art. 17 de la Constitution. nmx - 2013 nmx - 2013 PRÉAMBULE Il n'existe aucune statistique connue sur les grâces présidentielles. L'on sait seulement que le nombre des requêtes a été multiplié par trois en dix ans. Chaque année, plusieurs centaines de grâces indivi- duelles sont octroyées par le président de la Répu- blique. Ces mesures ne font l'objet d'aucune publicité officielle. La direction des affaires criminelles et des grâces est un des postes les plus sensibles de la République française. Ce service a fait l'objet d'un noyautage complet par les hommes et les femmes de la présidence de la République. Les dernières péripéties ayant accompagné le refus par François Mitterrand d'entériner la nomination du procureur de la République du Mans, comme direc- teur des affaires criminelles et des grâces illustrent parfaitement le propos de ce livre. Il faut de toute urgence procéder à l'état des lieux et mesurer l'étendue des dégâts causés en ce domaine. Cet ouvrage a pour but de lancer un débat qui est particulièrement d'actualité. nmx - 2013 nmx - 2013 CHAPITRE PREMIER La grâce et quelques choses que je sais d'elle nmx - 2013 nmx - 2013 Grâce. Rarement terme de la langue française aura exprimé autant de douceur. Beauté, charme, misé- ricorde, la notion de grâce ne souffre aucune inter- prétation malicieuse. Pardon des offenses, bonté rayonnante, élégance des corps et des mouvements, ce mot a le privilège de posséder une puissance d'évocation d'une force étonnante et mystérieuse. Dieu se penche sur les pécheurs et d'un geste efface tout. La grâce est un don du ciel. C'est tout naturellement que ce droit de rémission est devenu le plus bel attribut de la souveraineté. Le Prince, qui a délégué le droit de punir et de faire justice, a conservé celui d'accorder le pardon. Quelles que soient les raisons pour lesquelles l'indulgence s'impose, le souverain, dont la mission est de veiller au bien public, se doit de pardonner quand l'intérêt général le commande. L'utilité publique est en effet la mesure ultime des peines et des sanctions. Le droit de grâce, « exécuté avec sagesse », est une admirable possibilité qui permet de remédier aux rigueurs excessives, voire aux errements d'une insti- tution judiciaire dont le fonctionnement est assuré par des êtres faillibles appliquant des lois souvent bien rigides. nmx - 2013 14 LES GRÂCES DE DIEU C'est la raison pour laquelle le président de Belliè- vre s'était opposé avec force et dignité au roi Louis XIII qui voulait être juge au procès du duc de La Valette. « Votre Majesté voudrait-elle voir sur la sellette un homme devant elle, qui par son jugement irait dans une heure à la mort ? Alors que bien au contraire, la vue seule des rois portait les grâces et levait les interdits des églises. La rigueur de la justice est entre les m~ins des juges, mais le droit de pardonner appartient au monarque. » La grâce c'est aussi cette clause que les cours criminelles ajoutaient jadis au bas de leurs terribles sentences, ordonnant que le condamné soit rompu vif, son corps mis sur une roue ... mais aussi que ses souffrances soient abrégées. Le bourreau devait alors porter ce fameux« coup de grâce »sur la poitrine de l'homme martyrisé afin de l'empêcher de languir plus longtemps. Combien de malheureux, après avoir entendu la lecture de leur condamnation, n'atten- daient plus que ces mots leur assurant une mort plus douce. C'est à la civilisation romaine que nous dey ons, entre autres, le droit de grâce. Transmis par l'Eglise aux rois francs, il fit sa réapparition au xne siècle après une éclipse de près de trois cents ans. C'était le temps où s'affirmait le pouvoir royal. P~ndant quelques siècles, la monarchie capétienne et l'Eglise catholique se disputèrent encore le droit de pardonner. En 1498, pourtant, l'ordonnance de Blois permet à Louis XII de le classer définitivement dans les accessoires de la monarchie. Les évêques nmx - 2013 LA GRÂCE ET QUELQUES CHOSES QUE JE SAIS D'ELLE 15 d'Orléans conservèrent cependant longtemps le pou- voir de donner des lettres de grâce à tous les criminels qui venaient se rendre dans les prisons d'Orléans à l'occasion de leur entrée solennelle dans le diocèse. La Grande Encyclopédie nous apprend que, si dans les premiers temps, il ne s'en trouva que deux ou trois, les choses se gâtèrent rapidement. En 1707, ils étaient 900 vauriens à solliciter la clémence de leur pasteur; en 1733, 1200 chenapans et malandrins profitèrent de l'aubaine épiscopale. Aussi, un édit royal de 1753 devait-il préciser utilement la répartition des prérogatives de chacun : il n'appartient qu'à la puissance souveraine de faire grâce. Les rois de France, reprenant les traditions des empereurs chrétiens, ont coutume de faire droit aux demandes des évêques, mais il ne s'agit là que d'une dérive des indulgences accordées aux pécheurs par les autorités religieuses. Le monarque, constatant que l'usage ne puise pas sa source dans des titres d'une indiscutable autorité, en fixe désormais des limites aussi étroites territoria- lement que substantiellement. Dorénavant, seuls les crimes ou délits commis dans le diocèse d'Orléans seront pardonnables par l'évêque lors de son entrée solennelle. De plus, un certain nombre de faits graves tels que l'assassinat, le meurtre, ou les atteintes portées à l'autorité judiciaire sont exclus du bénéfice de cette mesure. L'Église avait en effet usé et abusé d'un « droit d'intercession » qu'elle tenait de la lointaine époque où elle seule assurait un semblant de continuité au milieu du chaos institutionnel. Ses interventions s'étaient multipliées et avaient abouti à de nombreux nmx - 2013 16 LES GRÂCES DE DIEU excès. L'on se rappelle ce fameux droit d'asile dans les églises du royaume qui était généralement suivi de la grâce de celui qui avait ainsi réussi à échapper aux sergents du roi. Mais le droit de grâce était aussi devenu le moyen idéal de soustraire un coupable bien entouré et soigneusement protégé au sort commun des délin- quants et criminels ordinaires. Les choses n'ont au demeurant guère changé, comme nous allons le découvrir plus loin. , Le peuple n'appréciait pas ces passe-droits. Les Etats généraux tenus de 1560 à 1614 dénoncèrent à quatre reprises les pratiques royales. Les lettres d'abolition étaient l'institution la plus critiquée. Il existait sous l'Ancien Régime une multi- plicité de possibilités offertes au souverain d'accorder ~a grâce. La grande ordonnance criminelle d'août 1670 distingue l'abolition de la rémission et du pardon, le tout étant regroupé sous le terme généri- que de grâce. La lettre de pardon permet d'exonérer de toute responsabilité un homme qui s'est trouvé mêlé à une affaire criminelle sans en être ni l'auteur ni le complice. Tout juge connaît encore de nos jours ces cas de bagarres généralisées, à l'issue desquelles un cadavre demeure sur le terrain. Le Prince, jadis, pouvait accorder son pardon au participant s'il n'était pas le responsable direct du meurtre et s'il n'y avait point aidé. La rémission était octroyée à celui qui avait commis un homicide involontaire ou se trouvait en état de légitime défense ou bien pouvait bénéficier d'un autre fait justificatif. nmx - 2013 LA GRÂCE ET QUELQUES CHOSES QUE JE SAIS D'ELLE 17 Mais l'abolition s'appliquait aux crimes qui n'étaient pas de nature à être remis. La grâce était alors accordée et ne visait que la peine, laissant subsister la culpabilité. Toute une procédure relativement lourde fut orga- nisée par l'ordonnance de 1670 et ménageait un rôle important à l'institution judiciaire. Le bénéficiaire de la lettre d'abolition devait se constituer prisonnier en attendant que se déroule la procédure d'entérinement devant le Parlement. Celle-ci prévoyait la présenta- tion des lettres à l'audience, à genoux et tête nue, puis la reconduite du gracié en prison jusqu'à l'enregistre- ment par la juridiction de la mesure de clémence. La grande ordonnance criminelle excluait formelle- ment certains crimes du champ de l'exercice du droit de grâce. Si la procédure d'entérinement faisait appa- raître que la bonne foi du souverain avait été uploads/s1/ gallot-didier-les-graces-de-dieu-1993.pdf

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  • Publié le Fev 14, 2022
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