KLARTHE Records klarthe.com Mo- ving Samuel Andreyev ensemble proton bern Movin
KLARTHE Records klarthe.com Mo- ving Samuel Andreyev ensemble proton bern Moving P 1 KLARTHE Records ensemble proton bern Bettina Berger piccolo / flûte Martin Bliggenstorfer musette / hautbois d’amour / lupophone Richard Haynes clarinette mi/ cor de basset Elise Jacoberger basson Samuel Fried piano (piano 2 sur PLP) Yuka Munehisa piano 1 (PLP) Vera Schnider harpe Brian Archinal percussion Maximilian Haft violon Laurent Camatte alto Jan-Filip Ťupa violoncelle Caleb Salgado contrebasse Matthias Kuhn direction Moving P 2 Moving • Michèle Tosi Canadien d’origine et vivant en France depuis 2003, Samuel Andreyev semble se positionner au croisement fertile de l’éclectisme outre-Atlantique et d’un certain esprit français, plus enclin à catégoriser les genres et à sérier les pratiques. C’est à Toronto, s’entourant d’une bande d’amis musiciens, qu’Andreyev écrit, arrange et produit ses albums de chansons (9 à ce jour), qu’il convient de placer à la frontière poreuse du savant et du populaire. Cet artiste performer, hautboïste de formation, y chante ses propres textes et joue, des claviers électriques et toutes sortes de hautbois — cor anglais, heckelphone — des instruments qui lui sont familiers et que l’on va retrouver au sein de ses compositions, mais dans un espace-temps tout autre. Il s’est formé au Conservatoire Royal de Toronto et ressent le besoin, à 22 ans, d’aborder d’autres horizons. Celui de la France, où il se fixe. Il y reçoit l’enseignement d’Allain Gaussin d’abord, au Conservatoire de Sevran, puis de Frédéric Durieux au CNSMDP, et de l’IRCAM enfin. Autant d’étapes qui lui permettent d’approfondir son savoir-faire et d’acquérir des outils pour avancer dans une voie éminemment personnelle. Perfectionniste jusqu’à l’obsession, il prend le temps de corriger, réviser voire réécrire ses œuvres. Entre 2003 et 2012, il retire de son catalogue près de la moitié de ses compositions et avoue avoir réécrit trois fois Moving (2005-06) avant de confier la partition aux instrumentistes. Cette exigence dans l’adéquation entre la pensée du sonore et son inscription questionne sans relâche l’écriture, qu’il ne cesse d’affiner et de simplifier. Les sept oeuvres de cet album monographique couvrent un champ de douze années de composition, de PLP (2003) au Bern T rio (2015), pièce qui consacre sa relation privilégiée avec l’ensemble proton bern rencontré en 2011. La collaboration avec le collectif bernois va permettre au compositeur de poursuivre son exploration des instruments rares amorcée en 2003, notamment dans le domaine des anches, dont il est fin connaisseur. C’est en 2010 que Martin Bliggenstorfer, hautboïste de l’ensemble proton bern, prend connaissance de PHP (initialement écrit pour heckelphone) et propose au compositeur d’en faire la création l’année suivante, avec un lupophone, hautbois basse d’une facture toute récente. Stimulé par cette démarche pionnière et l’engagement hors norme de l'ensemble proton bern, Samuel Andreyev compose pour l’ensemble, en 2012, V érifications, une des oeuvres les plus atypiques de son catalogue, s’agissant du dispositif instrumental. Andreyev considère l’instrument et son timbre spécifique comme le matériau référentiel de son écriture. « Ses caractéristiques uniques, son histoire, et la façon dont il peut être combiné à d’autres timbres, souligne-t-il, sont à la base de mes réflexions compositionnelles ». Ainsi la forme de l’oeuvre, à l’instar d’un Varèse, devient-elle la résultante de ce processus : « Je découvre mes pièces en les composant » déclare le compositeur. Son désir de donner à entendre le timbre, dans sa singularité et ses fluctuations infimes, engage Samuel Andreyev dans une démarche qu’il qualifie lui-même de « phénoménologie du son ». Ce rapport au son presque physique que le compositeur veut Moving P 3 communiquer à l’auditeur, dans une expérience d’écoute intense et immédiate, l’amène à écarter tout ce qui pourrait entraver ou différer la perception. D’où cette réticence envers la spéculation hors temps, qui échappe à l’audition, et le rejet d’une certaine rhétorique musicale, ensemble de gestes-réflexe ramenant inévitablement aux codes de l’expressivité romantique. Si la pensée formelle est au coeur de l’écriture, il n’y a pas de fil narratif dans la musique d’Andreyev, qui en appelle davantage à la logique du rêve des surréalistes qu’il aime invoquer. Mais on y trouve parfois un petit motif à chantonner, fredon récurrent et obsédant qui circule entre les pupitres et guide notre écoute autant qu’il l’enchante. Samuel Andreyev travaille avec un matériau toujours plus économe, dont il entend éprouver voire épuiser toutes les ressources. Instaurant dans chacune de ses compositions un processus d’exploration de la matière sonore, dans les nuances les plus infimes de la différenciation, il aime faire fonctionner son écriture selon des patterns, susceptibles de révéler à chaque occurrence, et à l’oreille attentive qui s’y colle, rien moins que « des choses infimes ». Le titre de La pendule de profil est tiré d’un commentaire de Marcel Duchamp (1887–1968) au sujet de son œuvre La mariée mise à nue par ses célibataires, même1. Le quintette très atypique ici convoqué situe la pièce dans un registre médium grave que seuls l’alto et le cor de basset pourront transgresser. Soliste des premières pages de la partition, l’alto donne à entendre de nouveaux 1. « Une horloge vue de profil, de telle sorte que le temps dis- paraisse, en concevant l’idée d’un temps autre que linéaire. » espaces microtonaux qui fibrent la texture sonore. Dans cette pièce d’un seul tenant, le jeu instrumental et ses traitements multiples participent des modes de mouvement. Ainsi trilles, trémolos, flatterzunge, glissandos, ricochets et autres notes répétées sont autant de modes d’animation et de signaux dynamiques au sein de la trajectoire. Au niveau architectonique, le compositeur organise le continuum sur un principe de contrastes énergétiques, signalés par des changements fréquents de tempos et des relances expressives (violent, féroce, ffff ) qui propulsent le discours musical et fondent la dramaturgie. L’avant-dernière section, notée Diaphane, renvoie plus directement à Marcel Duchamp et sa recherche d’un espace-temps non linéaire. Eminemment virtuose, l’enchevêtrement polyphonique des lignes du quintette, qui densifie l’espace sonore sans en altérer la transparence, projette une sorte d’« objet cubiste » selon les termes du compositeur. C’est sur la sonorité flexible et racée du cor de basset que s’achève la pièce, libérant une indicible émotion. Aux côtés de l’alto et du piano, le trio Moving fait appel à la musette (hautbois piccolo), l’instrument des stridences lumineuses dont Samuel Andreyev fait valoir la coloration dans le grave de la tessiture, et l’étonnante souplesse du jeu qu’éprouve une écriture très virtuose. Le titre Moving joue sur l’ambiguïté du mot anglais : entre ce qui bouge et ce qui est émouvant2. La dramaturgie à l’oeuvre dans la partition, du « presque rien » des premières 2. Le titre fait référence au recueil de poésies du même nom, du poète anglais Tom Raworth. Moving P 4 mesures à « l’extrêmement violent » de la fin s’inscrit dans un processus général activant différents modes de mouvement. A chacun d’eux Andreyev assigne un caractère spécifique — fragile, strident et sauvage, éparpillé, violent, explosif , diffracté, féroce... — soulignant, étape par étape, l’avancée vers l’explosion annoncée. La violence outrée (tutta la forza) des dernières mesures porte la tension expressive à un seuil très rarement atteint dans l’oeuvre du compositeur. Fin stratège, Andreyev fait attendre l’entrée de la musette qui, si elle n’est pas à proprement parler l’instrument soliste au sein d’un trio très solidaire, n’en suscite pas moins l’émotion première. Lui est réservé d’ailleurs le premier solo de la partition, dont l’écriture cursive et raffinée relève d’un art de l’arabesque dont le compositeur se fait le chantre. Le second solo est dévolu à l’alto (diffracté), juste avant l’éclatement final. On y relève pas moins de dix modes de jeu différents dans un laps de temps d’une minute : autant de ressources pour éprouver les potentialités timbrales d’un instrument pour lequel Andreyev composera quelques années plus tard une pièce soliste. Ecrit pour piano solo et sept instruments, À propos du concert de la semaine dernière est la première oeuvre concertante du compositeur. A la harpe et au trio à cordes, Samuel Andreyev associe la flûte (ou piccolo) et la clarinette mi, des instruments aigus dont il aime exploiter le registre grave où ils acquièrent une autre identité. Au sein du pupitre de percussions, les quatre sonnettes de comptoir, le grand grelot suspendu, comme la pièce de monnaie posée sur la note fa aigu du vibraphone sont autant de qualités vibrantes et résonnantes ; elles sont dispensées sans surenchère sonore cependant, au sein d’une écriture délicate et transparente. Le piano toujours conducteur est joué le plus souvent sans pédale, l’entretien du son étant assumé par un jeu de notes itératives presque constant, qui se répercute aux autres instruments. Dans la couleur microtonale, ces derniers ont à charge, façon « table d’harmonie », de réverbérer et d’iriser la partie de piano, et d’en enrichir le spectre déployé dans l’espace de résonance. Dans la seconde partie, véritable marqueterie sonore, Andreyev juxtapose les séquences sans jamais les développer. Une figure rythmique intervenant dans des dynamiques variées mobilise périodiquement tous les instruments et accuse la discontinuité du propos. Juste avant la coda, la cadence attendue du soliste est une musique de uploads/s3/ 01-12-digital-booklet-moving.pdf
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- Publié le Jui 15, 2021
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