CAHIERS DE L'AARS - N°6 - Mai 2001 APROPOS DES SIGNES LIBYCO-BERBERES ENIGMATIQ
CAHIERS DE L'AARS - N°6 - Mai 2001 APROPOS DES SIGNES LIBYCO-BERBERES ENIGMATIQUES SAHARIENS, SAHELIENS ET CANARIENS Mohamed AGHALI-ZAKARA Communication presentee lors de la reunion de l'AARS, Grenoble, 2-3 Juin 2000 Les signes libyques, les signes sahariens dits "anciens" et les tifinagh, alphabets contemporains actuellement en usage, meritent une attention particuliere, notamment dans les inscriptions associees on non aux gravures rupestres sahelo-sahariennes. Dans ce bref expose, il ne s'agit pas de revenir sur ce que l'on sait concemant les ecritures libyco-berberes, mais de reflechir plutöt sur les questions que l'on se pose face acertains signes enigmatiques ou ambigus, car non encore elucides. En effet, si les caracteres libyques semblent bien attestes gräce aux publications de plusieurs auteurs tels que Chabot (1940; cf. Table I), Galand (1966), Camps (1977), Prasse (1972), Chaker & Hachi (2000), force est de constater qu'il n'en est pas de meme quant a la denomination et a la valeur reelle de certaines representations graphiques, pro visoirement appeIees "signes enigmatiques". INVENTAIRE DES PROBLEMES Assurant la continuite scripturaire bien vivante du libyque, a notre epoque, les tifinagh - caracteres de I'ecriture des Touaregs - sont egalement parfaitement connues avec leurs specificites regionales caracrerisees par quelques variantes locales. Le tableau suivant presente cinq principaux alpha bets tifinagh (Table 11). Les regles traditionnelles de I'ecri ture originelle sont pratiquees par tous les usagers ayant une bonne connaissance de ce systeme graphique, quel que soit le parler: il s'agit d'une notation abase consonantique pouvant s'effectuer dans les quatre orientations comme le rappelle la Table III (alphabet de l'Ahaggar). Pour retrou ver le sens de l'ecriture qui est aussi celui de la lecture d'une inscription rupestre, on dispose de reperes constitues par divers incipit, par exemple le plus frequent, WNK dans I'incipit awa nak : 1:- "ceci moi = c'est moi", suivi, en general, du nom du graphiste, ou HRy ! 0: "je suis a la trace"; soit on se fonde sur I'orientation des signes tels que : C E Ei: m ~ ... M, D,T, S, Y... dont I'ouverture est tou jours dans le sens de l'ecriture et de la lecture quel que soit le support ou selon le choix du graphiste de l'une des quatre orientations possibles : de bas en haut, de haut en bas, de droite agauche, de gauche adroite, pouvant se pre senter aussi en boustropMdon. Alors que les formes et les valeurs des alphabets libyques (cf. Chabot Table I) et tifinagh (Table III) sont confrrmees, on reste dubitatifface aux signes sahariens dits "signes anciens". C'estacet ensemble epigraphique que l'on peut rattacher les signes dont on sait peu de chose et dont les valeurs restent encore inconnues pour certains, peu sOres pour d'autres. Lignes Lignes Transcription Transcription horizontales verticales punique (Chabot) se Iisant-+ se Iisant i 0 0 , 8 ...... ~ !\ G n c '\ D = 11 \ u m ~ i. H IH ~ "Z - - ~ Z ~ 1111 ~ T ~ N /1f I ....>. ""7 1~ 1 K 11 - - ~ L :J) u lfJ M I I ., N X ( X X t><X "'&J( , S F I I ~ C ~ Q 0 0 '\ R ~ W""" ~ S + + + T !I -oE $ TI - 111= ~~"o H Table 1. Liste des vingt-deux signes libyques et leur valeur dans les ecritures punique et latine (Chabot, 1940). La comparaison avec les tifinagh montre qu'en vingt-cinq si~cles, six se sont transmis dans la dizaine d'alphabets touaregs connus comprenant de vingt a vingt-six signes, avec la meme fonne et la meme valeur: I, m, n, r, t, y. Une douzaine d'autres signes ont garde la meme fonne avec des valeurs differentes, quelques-uns n'ont aucune correspondance graphique et phonique. LES SIGNES SAHARIENS OU SIGNES ANCIENS . ~ 'I v/#Ilfr i Peut-on definir les sahariens?;,,'i Si l'on se reIere ala terminologie de Foucau1dp~ exemple, les "sahariens anciens" sont les signes (Table IV»qu'on ne sait pas lire, bien que ceux-ci soient clairement giaves ou ins crits sur les roehers, c'est a dire ne faisant pas partie des 11 CAHIERS DE L'AARS - N°6 - Mai 2001 _ Ahaggar Ghat Jll.ir Azawagh Adghagh (A1g6rie) (Libye) (Niger) Niger-Mali (Mall) a . b (]) (]) (]) (]) (]) d u u ~ ~ V ~ ~ ~ f '-' ,...., '-' ,...., '-' ,...., '-' ,...., I 9 X T T T T gy T I Y .. h , i i j I *' *' I k · · I 11 11 11 11 11 m C C C C C n I I I I I ny '# q ... ... ·. ·. ... r 0 0 0 0 0 S 0 0 0 0 0 S m m m m 8 t + + + + + t IE w : : : : : X .. .. .. . . ... · . ·. y S ~ S S ~ z I *' I I X + *' I t *' Table II. Comparaison des tifinagh des principaux groupes touaregs (Aghali-Zakara, 1993). signes usuels. Embarrasse pour les nommer, Monod (1993 : 381-385.) parle des «inscriptions sahariennes n'appartenant ni au libyque, ni a l'ecriture tifinagh». Certes, de nombreux auteurs - L. Galand, H. Lhote, F. Nicolas, K.G. Prasse - entre autres, mentionnent quelques uns de ces signes dans des publications, sans apporter d'eclaircissement. ~x du RILB recensent une tren taine de signesl(dTable IV)~'d9nt un aper~u est donne dans notre publicatiori1Ul~etleCf. La Lettre 3 , tentent d'apporter de nouveaux elemen~ de reflexion sur ce sujet hermetique. Une recension des Sah~ens anciens actuellement connus et repertories permet de c~stater qu'il existe environ 28 a 30 signes, selon les auteurs. s principales conformations gra phiques sont les suivantes . \!) (J 6 ~ 8 'f 8. 0 1ZI X L..., L +( 1: f, rrf T l1J A fH m a l:l 1::1 't:f ~'l:I' .,... > ){ Table IV : caracteres dits "sahariens". Un examen attentif de ces signes fait ressortir les caracteris tiques suivantes : - une identite de formes geometriques avec celies des libyques et des tifinagh, - l'identite de certains signes avec ceux des d'alphabets connus sans que l'on sache s'ils en ont les m~mes valeurs. Il semble assez difficile de le demontrer en raison de l'insuffi sance des materiaux d'analyse aetuellement disponibles. En depit de toutes nos investigations dans les principales publi cations existantes et de nos frequents entretiens et tests de lecture aupres de nombreux locuteurs vivant en zone sahClo saharienne, aucune donnre serieuse ne permet de repondre avec certitude acette question. l:ll::l't:f'l:l'~-<E -10 !I 6* - certains signes ne figurent dans aucun alphabet connu : 't:f "t~te de chat" ou )0 "noeud de cravate", 1 "potence", \!) "coquille" dont la forme s'apparente, en tifinagh, aux signes simples (]) 0, ou au signe ayant la valeur biconso nantique d Im.!. C'est precisement cette categorie de signes 't:f )0 L ..J 1 J \!) <!.J d, qui pose tant de questions en epigraphie berbere (Lettre 3). De quelle maniere metho dique peut-on les aborder lorsqu'on ne dispose d'aucun texte en bigraphie ? Confrontes acette situation, les epigra phistes recourent souvent a diverses techniques d'approche. Peut-on en deduire la ou les valeurs par la methode sequen tielle? Cela suppose de travailler sur de nombreuses ins criptions et de rep6rer les sequences des signes concemes dans des inscriptions dont on connait la valeur par l'identi fication des autres elements graphiques constitutifs : on en tire, par deduction, une valeur graphique en se fondant sur le sens general ou specifique de I'expression. Dans cet essai de dechiffrage, le signifiant, I'environnement contextuel et les informations issues de la lecture des sequences conse cutives sont d'un apport fort utile. En effet, ces differentes informations peuvent conduire a des resultats interessants, car elles permettent de passer de la polysemie graphique a la monosemie du signe conceme. A titre illustratif on retiendra ici des inscriptions contenant deux ou trois signes dont on tente de retrouver la valeur (Lettre 5). Je reprends et developpe ici, a!'intention des cher cheurs de terrain, la question relative acertains incipit et des sequences graphiques que j'ai abordes dans les Lettre 5 et 6. Cette demarche consiste areperer lors des essais de lecture les occurrences 00 l'on retrouve une sequence graphique comportant, par exemple trois signes, toujours les m~mes et generalement disposes selon un ordre quasi immuable. C'est ce critere que l'on retrouve dans les trois incipits : 1:-, i 0 :, o 0 t , marqueurs d'orientation dont nous avons parles dans la Lettre 5 et qui sont bien connus des personnes mai trisant parfaitement les caracteres contemporains. Concemant les signes "sahariens", on peut en rencontrer un ou plusieurs dans une inscription. Si un de ces signes anciens garde la m~me valeur dans plusieurs mots identifies, on peut alors en deduire sa valeur, valeur hypothetique qui pourrait ~tre confirmee lorsqu'elle est toujours la m~me dans diverses sequences dechiffrees. Hormis les textes bilingues de la periode libyque - libyco uploads/s3/ aghali-akara-2001-pdf.pdf
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- Publié le Sep 01, 2022
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