Alain Daniélou Origines et Pouvoirs de la musique s© les cahiers du mie c ch a

Alain Daniélou Origines et Pouvoirs de la musique s© les cahiers du mie c ch a 1 / EDITIONS | I Origines et Pouvoirs de la musique © Kailash Editions 2005 deuxième édition 69, rue Saint-Jacques - 75005 Paris 169, Lal Bahadur Street - 605 001 Pondicherry ISBN 2-84268-090-1 Directeur de la collection : J.L. Gabin © Calligraphies : Hiralal Prajapati En couverture : Shiva Sharan, Shruti © Frontispice : J.L. Gabin © Dessin d ’Alain Daniélou, p.242, collection Jacques E. Cloarec Alain Daniélou Origines et Pouvoirs de la musique É DI TI ON & P R É F AC E J E A N - L O U I S GABIN les c a h i e r s du ml e c c h a Ir a * n 3*^ I - Dans un monde qui n’est que changement [où rien n’est permanent] le divin est partout présent [dans les fleurs, les oiseaux, les animaux, dans les forêts, dans les hommes]. II - Jouis pleinement de ce que le dieu t’abandonne et n’envie jamais ce qui appartient aux autres [ni leurs biens, ni leur talent, ni leur succès]. Isha Upanishad, I & II texte et commentaire, traduction Alain Daniélou. AVERTISSEMENT Les textes réunis dans ce cahier proviennent, pour la plupart, d’un fonds d’inédits, de conférences ou d’articles publiés dans des revues de 1938 à 1991. On ne s’étonnera pas d’y trouver parfois des différences de formulation, voire de ces contradictions apparentes qui témoignent de la vitalité et de l’évolution d’une pensée. Afin d’éviter autant que possible les répétitions, on a procédé parfois à des suppressions ou à des mélanges de textes. Toutes ces nouvelles versions ont été revues par l’auteur entre 1990 et 1992. Une version anglaise de ce cahier paraît simultanément aux édi­ tions Indica Books de Bénarès, sous le titre : SacredMusic, it’ s Origins, Pomrs and Future, The Traditional Music in the Modem World. Une version abrégée, français-tamoul, est publiée aux Editions Kailash sous le titre : A.venir de la musique indienne. J.L.G. LES CAHIERS DU MLECCHA PAR JACQUES E. CLOAREC. Le premier livre qu’Alain Daniélou a publié, en 1936, était un recueil d’articles intitulé Le Tour du monde*. Depuis lors, en marge d’une vingtaine d’ouvrages fondamentaux**, Alain Daniélou a écrit jusqu’en 1993 plusieurs centaines d’articles pour des revues, des encyclopédies, des conférences, des programmes de radio etc., cer­ tains directement en français, d’autres en anglais, hindi ou italien. Ces textes traitent de sujets extrêmement variés concernant l’Inde, la religion, la société, le langage, le yoga, la musique, etc. Certains sont restés inédits, la plupart sont devenus introuvables. Avec l’accord de l’auteur et sous sa supervision, j’avais commencé à les réunir par sujet, d’où l’idée de ces Cahiers du mleccha. Le mleccha est, en hindi, le barbare qui n’est pas né sur le sol sacré de l’Inde. Dans la société traditionnelle, l’étranger, quelle que soit son origine, est assimilé à la caste des shudra, des artisans, des ouvriers, la caste la plus nombreuse de l’Inde puisqu’elle doit repré­ senter plus de 80 % de la population. Comme Alain Daniélou l’explique dans ses mémoires***, ce sta­ tut qui fut le sien durant de longues années n’est en aucun cas un obstacle pour accéder à la connaissance. Il a pu étudier auprès des pandits, les brahmanes lettrés de Bénarès, à condition de respecter les usages d’un bon étudiant shudra : être végétarien, ce qui n’est pas ordinairement l’usage pour les membres de cette caste, prendre * Réédité chez Flammarion en 1987. ** Voir la bibliographie en fin de volume. *** Le Chemin du Labyrinthe, Editions du Rocher, 2e édition, 1993. 10 ORIGINES ET POUVOIRS DE LA MUSIQUE ses^ bains rituels chaque jour dans le Gange, ne pas toucher son maître, ne pas entrer dans certaines parties de sa maison, etc. Devenu disciple du moine-lettré Swami Karpâtri, Daniélou a étudié la cosmologie et la métaphysique traditionnelles auprès de Pandit Vijayanand Tnpathi, et la rudra vînâ auprès de Sri Sivendranath Basu pendant plusieurs années. Sur l’ordre de Sami Karpâtri, il fut régulièrement rattaché à l’hindouisme et reçut le nom de Shiva Sharan (le protégé de Shiva). Jean-Louis Gabin, qui s’était intéressé au projet des Cahiers du mleccha et avait commencé à y travailler du vivant de l’auteur, a bien voulu se charger de recueillir, éditer et préfacer ces différente textes présentant des points de vue inédits de l’œuvre d’Alain Daniélou. Jacques E. Cloarec. ALAIN DANIÉLOU ET LA RENAISSANCE DES MUSIQUES PAR JEAN-LOUIS GABIN Ce qui frappe dès l’abord, dans la collection d’articles et de conférences d’Alain Daniélou réunis pour la première fois ici, c’est leur caractère ardent et savant — savant et soucieux de clarté — , ainsi que l’ampleur et la variété des approches du phénomène musical. L’ampleur des approches, on la pressent d’emblée à la variété des musiques examinées. Les références à la musique africaine, au vaudou, ont un relief qui apparaît rarement à la lecture des ouvrages publiés du vivant de Daniélou*, et jamais avec la vigueur qui les souligne dans les conférences internationales réunies dans ce cahier. Quelques phrases explicites sur le cante jondo, le negro-spiri- tual et le jazz étendent ainsi le champ visible d’une pensée que l’on imagine volontiers en consonance quasi exclusive avec l’Inde ou, du moins, avec les rapports de l’Orient et de l’Occident. Apparaît ainsi clairement un idéal de coexistence, d’harmonie, d’influences naturelles, de réinterprétations réciproques dans le génie de chaque culture, totalement à contre-courant de la tendance uniformisante de ce que l’on désigne aujourd’hui sous le terme de globalisation ou de mondialisation : « Le monde antique était un monde multiculturel. Les apports des civilisations les unes aux autres se faisaient, comme les échanges commerciaux, sur un plan d’égalité : les Hindous employaient des artisans grecs, les Chinois avaient des orchestres birmans, les Mongols influençaient l’art per­ san.» * Voir la bibliographie musicale et la discographie en fin de volume. 12 ORIGINES ET POUVOIRS DE LA MUSIQUE C est donc, encore une fois, une leçon de tolérance qui se dégage des textes vifs et stimulants d’Alain Daniélou. Mais une leçon de tolérance active : celle du plaisir curieux, celle du désir de com­ prendre d’autres systèmes, de pénétrer leur logique, d’apprendre leur beauté. « Le fait que les connaissances de certaines civilisations du monde ne se sont pas exprimées dans la terminologie — inadéquate et souvent désuète - de la musicologie occidentale, encore dans un état d enfance, n implique pas qu’elles ne représentent pas une ana­ lyse plus profonde du fait musical et du phénomène audio-mental de la perception sonore. » Et le caractère ardent, combatif, de certains passages montre bien l’importance de la lutte menée par Daniélou dès le début des années soixante, pour défendre, réhabiliter, sauver dans bien des cas des musiques originales menacées d’extinction par « l’agression harmonique » (c’est le titre d’un des articles) et les tentatives de « folklorisation ». On reste frappé de la netteté des positions expri­ mées par Daniélou, et parfois jusqu’au cœur même des citadelles de la normalisation, comme le montre la conférence prononcée à Moscou en 1971. Il faut se souvenir qu à cette époque l’idéologie soviétique était activement protégée par la fraction la plus démonstrative de l’intel­ ligentsia occidentale, et qu’il fallait un courage et une indépendance certains pour oser critiquer les méthodes et les objectifs des fabri­ cants de l’« avenir radieux » : « La folklorisation est l’une des méthodes les plus perverses de dépersonnalisation des cultures nationales sous prétexte de s’intéresser à elles. » Ce que 1 on ne perçoit pas toujours, à la lecture des autres ouvrages de Daniélou sur la musique, c’est qu’en luttant avec l’ef­ ficacité que 1 on sait pour la survie de la musique orientale, en permettant la renaissance d’un aspect de la civilisation humaine sur le point de s éteindre — ici, en particulier, la musique modale — , 1 auteur luttait pour déclencher chez ses lecteurs et ses auditeurs une prise de conscience des dangers internes qui menaçaient leur propre univers : « La tradition est inévitablement la base sur PRÉFACE 13 laquelle les innovations peuvent se développer. Le changement, s il .ihoutit à la perte de la tradition, est plus souvent une perte qu un profit.» 1 /accent était mis sur le fait que l’agression contre la musique modale et, plus généralement, contre les musiques non-écrites dont la transmission se fait par voie orale, ne bénéficiait aucune- mcnt au système musical de l’Occident. Celui-ci, en effet, précisément dans ses formes savantes « fixées p.ir l’écriture », mourait de sclérose et d’intellectualisme. Quant nix tentatives de syncrétisme faites au mépris des différences entre 1rs systèmes, aux emprunts « décoratifs », ils paraissaient à I ianiélou comparables au comportement d un enfant « imitant les sons d’une langue qu’il ne comprend pas. » C’est donc à un véritable cri d’alarme pour l’Occident qu’abou- nssent certains textes : « Nous sommes les partenaires demi- conscients d’une entreprise de destruction des langages musicaux qui pourraient être pour nous-mêmes, dans 1 uploads/s3/ alain-danielou-origines-et-pouvoirs-de-la-musique-pdf.pdf

  • 26
  • 0
  • 0
Afficher les détails des licences
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise
Partager