Cours de droit de l’informatique, IUT de Tahoua, par SOUMANA Hamadou. 2018/2019
Cours de droit de l’informatique, IUT de Tahoua, par SOUMANA Hamadou. 2018/2019 1 Chapitre 1/ La protection des créations informatiques Au Niger, comme dans la plupart des pays en développement, la protection des créations intellectuelles, au nombre desquelles figurent les créations informatiques, relève du droit de la propriété intellectuelle. Celui-ci distingue selon qu’il s’agisse d’une création relevant de la propriété littéraire et artistique ou de la propriété industrielle. Section 1/ La protection des créations relevant de la propriété littéraire et artistique La propriété littéraire et artistique est la branche du droit de la propriété intellectuelle qui protège les créations littéraires et artistiques. Elle comprend le droit d’auteur et les droits voisins (ces derniers sont aussi appelés droits connexes). Le droit d’auteur est constitué de l’ensemble des prérogatives exclusives reconnues à l’auteur d’une œuvre littéraire ou artistique. Quant aux droits voisins, ils regroupent les droits conférés aux auxiliaires de la création, c’est-à-dire aux personnes qui concourent à la diffusion de ces œuvres littéraires et artistiques (éditeurs, producteurs, imprimeurs, arrangeurs, etc.). Au Niger, le régime de la propriété littéraire et artistique est fixé par la loi n° 2010- 95 du 23 décembre 2010 portant sur le droit d’auteur, les droits voisins et les expressions du patrimoine culturel traditionnel. Les œuvres numériques et les œuvres multimédias étant considérées comme des œuvres littéraires et artistiques, sont donc régies par cette loi. Toutefois, elles présentent des traits particuliers qui nécessitent que l’étude de leur régime soit séparée de celle du régime général du droit d’auteur. Il convient donc de voir successivement la protection générale des œuvres par le droit d’auteur, puis les spécificités de la protection des œuvres numériques et des œuvres multimédias. Sous-section 1/ La protection générale des œuvres par le droit d’auteur Il y’a lieu de présenter successivement l’objet du droit d’auteur, les conditions de la protection, les prérogatives conférées et les titulaires des droits. Parag.1/ L’objet du droit d’auteur Le droit d’auteur porte, à titre principal, sur les œuvres de l’esprit. Mais, le législateur n’a pas défini la notion d’œuvre de l’esprit. Il s’est simplement borné à énumérer les différents types d’œuvres en indiquant que certaines sont admises à la protection tandis que d’autres en sont exclues. Ainsi, sont admises à la protection : les œuvres littéraires, les œuvres artistiques et musicales, les œuvres scientifiques, les œuvres dérivées, les recueils et Cours de droit de l’informatique, IUT de Tahoua, par SOUMANA Hamadou. 2018/2019 2 les titres des œuvres littéraires et artistiques1. Inversement, la loi exclut de la protection certains objets. Il s’agit en premier lieu des idées qui doivent être de « libre parcours », selon l’expression de Desbois ; c’est-à-dire à la disposition de tous. Il s’agit ensuite des textes officiels qu’ils soient de nature législative, administrative ou judiciaire ainsi que de leurs traductions officielles. C’est également le cas des nouvelles du jour (informations brutes), des découvertes, des procédés, systèmes, concepts, principes et méthodes de fonctionnement, mêmes incorporés dans une œuvre. C’est enfin le cas des simples faits et données. Parag.2/ Les conditions de la protection Aux termes de l’art. 4 de la loi sur le droit d’auteur, l’auteur de toute œuvre originale littéraire et artistique jouit sur cette œuvre d’un droit de propriété incorporelle exclusif et opposable à tous, du seul fait de sa création. Malgré cette disposition, pour bénéficier de la protection, une œuvre doit remplir un certain nombre de conditions. En effet, elle doit être originale et se matérialiser dans une forme. L’originalité sous-entend d’abord que l’œuvre a été créée. Or, l’œuvre créée est celle qui résulte d’une activité intellectuelle et non d’un fait de hasard ou d’une simple mise en œuvre d’une technique ou d’un savoir-faire. Elle ne découle pas d’une découverte ou d’une simple captation d’un élément préexistant dans la nature. Néanmoins, elle peut résulter d’un choix ou d’une disposition opérés par l’auteur parmi des éléments préexistants. En définitive, il y a création lorsqu’il y a eu « conception », c’est-à-dire l’idée, mais également « réalisation », c’est-à-dire la transformation de l’idée en objet, avec un minimum de conscience du résultat à atteindre. Il n’est cependant pas nécessaire que cette réalisation soit terminée pour bénéficier de la protection car, selon la loi, « l’œuvre est réputée créée, indépendamment de toute divulgation, du seul fait de la réalisation même inachevée de la conception par l’auteur ». Il importe également peu que la création soit fixée sur un support ou non. En effet, elle est considérée comme un fait juridique et peut, par conséquent, se prouver par tous moyens. Quant à l’exigence d’originalité proprement dite, elle constitue la condition essentielle de protection des œuvres de l’esprit. Selon une conception classique, qualifiée de conception subjective, une œuvre est considérée comme originale lorsqu’elle porte l’empreinte de la personnalité de son auteur. L’originalité, dans cette optique, se distingue de la nouveauté exigée en matière de propriété industrielle. A l’inverse, une conception objective perçoit l’originalité comme l’apport intellectuel de l’auteur de l’œuvre. Cet apport 1 Toutefois, cette énumération n’est pas exhaustive. En effet, une ouverture est faite à d’autres œuvres non prévues expressément. Cours de droit de l’informatique, IUT de Tahoua, par SOUMANA Hamadou. 2018/2019 3 est généralement déduit des différences que l’œuvre présente avec l’état antérieur de l’art d’où une forte ressemblance avec le critère de nouveauté requis en propriété industrielle. L’originalité peut aussi comporter des degrés. En effet, une œuvre peut être d’une originalité absolue, lorsqu’elle est créée pour la première fois (on l’appelle œuvre première), ou d’une originalité relative, lorsqu’elle incorpore des éléments appartenant à une œuvre préexistante (on parle d’œuvre dérivée, d’œuvre composite ou encore d’œuvre seconde). C’est ainsi que la Cour de cassation française a admis que des logiciels rédigés dans un langage informatique différent de logiciels précédemment créés devaient être considérés comme des œuvres originales dès lors que ce langage avait permis de les faire fonctionner avec un certain type de processeur traduisant ainsi «l’existence d’un apport intellectuel propre et d’un effort personnalisé ». La preuve de l’originalité doit être appréciée au cas par cas. Il appartient donc à celui qui se réclame auteur d’une œuvre de démontrer qu’elle remplit les conditions exigées pour être investie de la protection légale. Mais, dans bien des cas, cette protection est présumée par les juges. S’agissant de l’exigence de forme, elle découle du fait que seule la réalisation concrète d’une œuvre la fait bénéficier de la protection. En effet, le droit d’auteur ne protège pas les idées ; celles-ci étant considérées comme étant de « libre parcours ». Seule donc la forme de l’œuvre qui présente un caractère particulier fait l’objet de protection. Il faut toutefois, noter que la protection par le droit d’auteur n’est pas admise lorsque la forme est purement fonctionnelle, c’est-à-dire lorsqu’elle est imposée par les fonctions techniques de l’objet. En effet, dans une telle hypothèse, c’est la protection par la propriété industrielle qu’il faut envisager. Si toutes ces conditions sont réunies, la protection n’est soumise à aucune formalité et elle est indépendante du genre de l’œuvre, de la forme de son expression, de son mérite ou de sa destination (art. 5 de la loi). Parag.3/ Les prérogatives conférées par le droit d’auteur Le droit d’auteur se décompose en deux séries de prérogatives que sont le droit moral et le droit patrimonial. Contrairement au système anglo-saxon du copyright où le droit moral est relégué à un second rang, dans les systèmes d’inspiration française, il tient une place de choix dans l’ordre des prérogatives de l’auteur. C’est pourquoi, il sera examiné avant le droit patrimonial. Cours de droit de l’informatique, IUT de Tahoua, par SOUMANA Hamadou. 2018/2019 4 A/ Le droit moral Le droit moral appartient à la catégorie des droits de la personnalité. Il a pour but la protection de la personnalité de l’auteur, à travers son œuvre, indépendamment de l’exploitation de celle-ci. C’est un droit d’ordre public. Il est perpétuel, inaliénable, imprescriptible et insaisissable. Il est transmissible aux héritiers de l’auteur en cas de décès. Le droit moral confère à l’auteur un certain nombre de prérogatives énumérées à l’art. 8 de la loi. Il s’agit : du droit de divulgation de l’œuvre, du droit à la paternité de l’œuvre, du droit au respect de l’œuvre et du droit de retrait et de repentir. - Le droit de divulgation : c’est le droit qu’a l’auteur de choisir le moment et les conditions de la communication de son œuvre au public. C’est le fait de révéler au public l’existence de l’œuvre. C’est un droit exclusif. Autrement dit, personne ne peut procéder à la divulgation de l’œuvre sans le consentement de l’auteur. Le droit de divulgation est reconnu sur chaque mode de communication de l’œuvre. - Le droit à la paternité : il comprend le droit au respect du nom et le droit au respect de la qualité. Le premier consiste à faire connaître l’auteur en faisant mentionner son nom sur l’œuvre. Le second impose que soient indiqués ses titres, grades et distinctions. La divulgation de la paternité n’est cependant pas une obligation. En effet, l’auteur a le uploads/s3/ cours-di2018-2019.pdf
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- Publié le Aoû 08, 2021
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