Chapitre I Présentation générale des procédés de mise en forme par déformation

Chapitre I Présentation générale des procédés de mise en forme par déformation plastique Ce chapitre présente l’ensemble des procédés de fabrication des pièces métalliques, puis décrit de manière détaillée les opérations de mise en forme par déformation plastique avec et sans enlèvement de matière. Après avoir précisé la géométrie et la cinématique des différents procédés, le chapitre présente les phénomènes physiques fondamentaux, puis les modalités de la mise en œuvre pratique des procédés selon la température et la nature des principaux alliages (base fer, aluminium et cuivre). 1. Aspects généraux 1.1. Principales opérations de fabrication des pièces métalliques La figure I.1 récapitule les principales classes de procédés utilisés. Elle montre qu’il existe trois voies principales de fabrication de pièces métalliques selon l’état de départ du matériau métallique : • Le moulage à partir de l’état liquide. • Le façonnage à partir d’une ou plusieurs pièces à l’état solide. Cette voie peut, elle- même, se scinder en formage, ou mise en forme sans enlèvement de matière par déformation plastique, usinage, ou mise en forme avec enlèvement de matière, et l’assemblage, où l’on solidarise deux ou plusieurs pièces selon les procédés. • Le frittage à partir de poudres par disparition des vides intergranulaires à haute température et éventuellement sous pression hydrostatique (compaction isostatique) ou un état de contrainte plus général par forgeage, filage… En raison, entre autres causes, de la classification socio-économique des secteurs industriels correspondants, on distingue dans le formage : • Le travail des métaux à l’état massif, pratiqué essentiellement dans les industries métallurgiques : laminage, forgeage, filage, étirage, tréfilage. • Le travail des métaux en feuilles, pratiqué comme l’usinage dans les industries mécaniques et dont le principal procédé est l’emboutissage des tôles. 12 Chap. I : Présentation générale des procédés de mise en forme Figure I.1 : Principaux procédés de fabrication des matériaux métalliques [T.I.] Bien que le volume de pièces concernées soit nettement plus modeste, il ne faut pas oublier diverses autres voies permettant de modifier la forme d’un solide et très utiles dans diverses situations, notamment pour la réalisation ou la réparation d’outillages de mise en forme : • Addition d’un matériau métallique solide à une pièce en le transformant temporairement en ions par électrolyse (électroformage), en liquide (rechargement par les techniques de soudage) ou en gaz (pulvérisation et condensation). • Passage temporaire d’un alliage métallique par l’état semi-solide entre liquidus et solidus et injection dans un moule. 1.2. Evolution de la mise en forme des métaux L’objectif premier de la mise en forme des métaux est de conférer à une pièce métallique des dimensions situées dans une fourchette de tolérance donnée. Les principaux procédés de mise en forme des métaux sont apparus progressivement, donnant naissance par la suite à diverses variantes, parfois très nombreuses. Les formes modernes des divers procédés sont le plus souvent apparues récemment pour assurer la production en grande série de pièces à faible coût. On note dans le tableau I.1 quatre stades principaux d’émergence des divers procédés. 1. Aspects généraux 13 • Dès les débuts de l’élaboration des métaux et alliages métalliques à partir de minerais sont pratiqués, semble-t-il, le moulage à partir de l’état liquide, le forgeage libre à chaud de pièces massives brutes de coulée ou réchauffées et le formage à froid de feuilles métalliques. Il s’agit en effet d’une extension assez naturelle du processus d’élaboration mettant en jeu des moyens assez simples : des fours, des moules, un outil de frappe et un support. Pour les pièces minces, les artisans pratiquaient sans doute le travail à froid par frappes successives entrecoupées de réchauffages pour adoucir le métal et restaurer sa capacité de déformation. Par la suite, il a fallu attendre 1940 pour que les Allemands inventent la forge à froid (extrusion) des aciers pour fabriquer des pièces d’armement durcis par écrouissage en économisant des éléments d’alliage. Cette innovation majeure a été rendue possible par l’introduction de la lubrification par la phosphatation et le savonnage. En 1970 dans le cadre des politiques d’économie d’énergie imposées par le premier choc pétrolier, la coulée continue des demi-produits en acier prend son véritable essor industriel et a depuis supplanté totalement la coulée traditionnelle en lingots pour la fabrication des produits courants en aciers. Depuis 1990 environ, l’hydroformage constitue une opération intéressante de certaines gammes industrielles de travail des métaux en feuille. • Vers les premiers siècles de l’ère chrétienne, apparaissent les procédés d’étirage de fils à travers des plaques percées et d’usinage de pièces à l’aide de burins, forets, limes et scies. Petit à petit, ces procédés mécaniques d’usinage (dits traditionnels) se sont diversifiés en tournage, fraisage, perçage, brochage, taraudage..., procédés pratiqués sur diverses machines-outils spécialisées. Leur mise en œuvre et leurs performances ont considérablement évolué à partir de 1960 avec l’introduction de la commande numérique qui donne naissance, entre autres machines-outils polyvalentes, aux centres d’usinage. Malgré les progrès des procédés de formage sans enlèvement de matière, les procédés mécaniques d’usinage restent les procédés de mise en forme des métaux les plus importants d’un point de vue économique. • À la Renaissance, apparaissent le laminage, devenu depuis, du fait de sa très haute productivité et de sa grande polyvalence, le procédé de mise en forme sans enlèvement de matière le plus important, et le procédé de gravure par eau forte, devenu à l’ère moderne l’usinage chimique. Ce dernier procédé reste toutefois le procédé d’usinage non traditionnel le plus confidentiel (si l’on excepte l’usinage des circuits imprimés dans l’industrie électronique), à côté des autres procédés développés à partir de 1945 : procédés d’usinage par abrasion (meulage, rectification, polissage, rodage, jet d’eau abrasif, ultra-sons), électroérosion, usinages électrochimique, au jet d’eau, oxycoupage, avec un faisceau de lumière laser ou d’électrons. Ces procédés ont permis, entre autres applications, de résoudre les problèmes d’usinage et/ou polissage des matériaux de faible usinabilité mécanique, comme les outils de mise en forme. • Au XIXe siècle, apparaît le filage à chaud des alliages cuivreux rendu possible par la réalisation de presses hydrauliques de fortes capacités. C’est au Français Séjournet que revient le mérite de l’invention, vers 1945, de la lubrification au verre qui rend possible le filage à chaud des aciers et d’autres alliages de haute dureté (alliages de titane…). 14 Chap. I : Présentation générale des procédés de mise en forme Procédés primitifs Date d’émergence Formes modernes Forgeage libre du produit chaud 5000 avant J.-C. Matriçage, estampage entre matrices sur pilon, presses mécaniques, hydrauliques Forge à froid des aciers Forge à tiède, Forgeage sans bavure Fonderie 5000 avant J.-C. Fonderie sous pression En moules perdus ou permanents Coulée centrifuge de tubes Coulée continue de brames, blooms, billettes Formage des métaux en feuille par martelage, repoussage 5000 avant J.-C. Opérations d’emboutissage Cisaillage, Cintrage, Profilage Chaudronnerie et travail des tôles fortes Fluotournage, Repassage des produits tubulaires, Hydroformage Étirage de fils premiers siècles Tréfilage multipasse Étirage de profilés Usinage par burin, bédane, foret, lime, scie premiers siècles Coupe par tournage, fraisage, perçage, brochage, taraudage, sciage Usinages par abrasion : meulage, rectification, polissage, rodage, jet d’eau abrasif, ultra-sons Gravure par eau forte XVe siècle Usinages physico-chimique : par électroérosion, faisceaux laser ou d’électrons, par jet d’eau, oxycoupage, chalumeau plasma, électrochimique, chimique Laminage XVIe siècle Laminages sur train tandem, cage réversible, cage universelle, cage Sendzimir, l Laminoirs de tubes à pas pélerin, Laminoirs Manesmann perceurs… Filage à froid de Pb, métaux mous XIXe siècle Filage à chaud des alliages Al, Cu Filage à chaud (1200°C) au verre des aciers Extrusion (20 C) des aciers phosphatés savonnés Tableau I.1 : Évolution et formes diverses des procédés de mise en forme des métaux et alliages métalliques La plupart des objets métalliques d’utilisation courante ont subi plusieurs opérations de mise en forme à l’état massif ou/et à l’état de feuilles. Traditionnellement, la mise en forme d’une pièce métallique est suivie d’un traitement thermique permettant de conférer à la pièce la microstructure et les propriétés mécaniques requises par son utilisation, et, le plus souvent, d’un traitement de surface pour maîtriser ses propriétés 1. Aspects généraux 15 superficielles : rugosité (aspect esthétique, adhésion à un autre matériau), propriétés mécaniques (résistance à la fatigue), chimiques (résistance à la corrosion, adhésion à un autre matériau) et tribologiques (diminuer le frottement, augmenter la résistance à l’usure). Si la nature des opérations de mise en forme n’a pas fondamentalement changé durant les cinquante dernières années, leurs conditions de mise en œuvre ont très fortement évolué dans le sens d’une productivité de plus en plus élevée. Quatre grandes tendances se sont ainsi développées. • Substitution de procédés Elle vise à remplacer diverses opérations d’usinage, peu économes en matière première et en énergie, par des opérations de mise en forme sans enlèvement de matière comme le forgeage à froid ou le frittage. Dans l’industrie automobile, par exemple, la forge à froid s’est développée au détriment de l’usinage. La coulée continue directe des demi-produits a permis d’améliorer la qualité métallurgique tout en supprimant les opérations de laminage à chaud sur lingots et en économisant de la matière (suppression des têtes et pieds de lingots). Pour les matériaux uploads/s3/ extrait 1 .pdf

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