50 .' ....... !l''/ .. /'/ /// .( CHAMBRE A.~- "-··-; · SOUTERRAINE -- ~ i '-.

50 .' ....... !l''/ .. /'/ /// .( CHAMBRE A.~- "-··-; · SOUTERRAINE -- ~ i '-. i \ ..- PLAN DIMITRI LABOURY ~ .. SECTION LONGITUDINALE SUR A-B-C -Légende- ~ Roche taillée lThm Moellons ~ Grès ~ Briques ÉCHELLE N.M. , COUR _.-- _ . Fig. 1. Coupe et plan de la tombe de Nakht (TT52). UNE RELECTURE DE LA TOMBE DE NAKHT 51 La porte d'entrée divise la paroi adossée à la façade en deux smfaces inégales (fig. 2)6, Cependant, le peintre de NakhC en a structuré le décor de la même manière: un registre unique se déroule sur toute la largeur du mur et repose sur un soubassement historié, bien que ce bandeau de mise en place de l'image n'ait jamais été réalisé du côté gauche (Sud-Est). Le registre est lui-même scindé en deux moitiés: l'une, la plus proche de la porte, avec une scène unique, occupant toute la hauteur disponible; l'autre avec des personnages plus petits, répartis en trois sous-registres. Mais l'unité des deux parties est signifiée par leur appartenance à un même registre, tout comme celle de l'ensemble du décor de chaque paroi est assuré par sa structure d' encadre- ment, surmontée de noeuds khékérou. La scène principale sur chacun des deux murs représente N akht suivi de son épouse, «la place de son coeur, la chanteuse d'Amon, Taouy», en train de répandre le contenu d'un vase sur un monceau d'offrandes: «offrir toute chose bonne et pure (pain, bière, boeuf, volaille), des taureaux à longues et à courtes cornes, ce qui est créé sur les autels, [à Amons, à] Rê-Harakhty, à Osiris le grand dieu, à Hathor qui préside à la nécropole, et à Anubis sur sa butte», dit l'inscription qui accompagne la scène de droite, tandis qu'à gauche, on lit «mettre de la myrrhe et de l'encens sur [la flamme pour Amon, Rê-Harakhty, Osiris le grand dieu], Hathor qui préside à Thèbes et Anubis sur sa butte». Deux actions complémentaires de l'offrande faite par les défunts sont donc différenciées dans l'inscription alors qu'elles sont exprimées par le même geste dans les deux scènes, ce qui nous montre déjà qu'une même image - à peine modi- fiée - peut être investie de différentes significations. La composition est à nouveau clairement bipartite. 6 D'après DAVIES, Nakht, pL 12-18 (que l'on comparera avec la photographie in situ, mais de côté, de SHEDID-SEIDEL, Nacht, p, 16, fig. 6); photos couleurs dans SHEDID-SEIDEL, Nacht, p. 34-5,76-7; A. LHOTE, Les chefs-d'oeuvre de la peinture égyptienne (Paris, 1954), fig. 12, p. 37 (détail de l'offrande de la scène du mur sud-ouest), abrégé ci-après LHOTE, Peinture. 7 Je désigne par cette expression l'artiste en chef, le maître d'atelier qui dirigea l'équipe de décora- teurs de cet hypogée; sur les conditions de travail en équipe des peintres des tombes thébaines, on' verra M. MEGALLY, 'À propos de l'organisation administrative des ouvriers à la XVIIIe dynastie', Stu- dAeg l, p. 297-311; Arielle P. KOZLOFF, 'A Study of the Painters of the Tomb of Menna, N°. 69', in Acts lst lCE, p. 395-402; l'organisation du travail était la même sous l'Ancien Empire (L.G. LEEU- WENBURG, 'Un groupe de sculpteurs égyptiens à Leiden', Bulletin van de Vereeniging tot Bevordering der Kennis van de Antieke Beschaving te 's-Gravenhage 39 (1964), p. 50-4) et à l'époque ramesside (Dominique VALBELLE, «Les ouvriers de la Tombe ». Deir el-Medineh à l'époque ramesside (Le Caire, 1985), p. 99-103). 8 Le nom d'Amon a été martelé sous le règne d' Akhénaton, pmfois avec un certain débordemènt sur le reste de l'inscription. 52 DIMITRI LABOURY J, UNE RELECTURE DE LA TOMBE DE NAKHT 53 On retrouve fréquemment ce type de représentations sur les parois qui jouxtent la porte d'entrée d'une tombe9, ce qui montre qu'il s'agit d'un lieu commun, d'un topos iconographique du décor de l 'hypogée thébain de la XVIIIe dynastie. Différents indices, comme le titre de la scène, le geste du défunt, le collier ménat et le sistre hathorique aux mains de l'épouse, ou les offrandes, dénotent la signification rituelle de l'acte représenté. Bien que différentes divinités - d'empire ou à prérogatives funé- raires - soient explicitement mentionnées à titre de bénéficiaire de ce rite, l' orienta- tion de toutes les scènes de ce type, en direction de la porte d'entrée de la tombe, là où l'astre du jour apparaît tous les matins, semble bien désigner le soleil comme destina- taire privilégié de l'offrande. J. Assmann a d'ailleurs démontré que la plupart des hymnes solaires inscrits dans les tombes thébaines et dédiés au soleil levant se situent sur cette paroi adossée à la façade 1o, à moins qu'ils ne soient, comme dans la tombe de Nakht, gravés sur une stèle devant une statue du défunt, qui elle aussi est dirigée vers la porte d'entrée. Le dieu bénéficiaire du rite n'est donc pas figuré ici, contrairement à l'usagell , puisqu'il apparaît chaque matin dans l'encadrement de la porte, entre les deux scènes d'offrande, par sa manifestation naturelle la plus tangible, l'astre solaire lui-même. L'orientation de l'image et son emplacement en déterminent donc le sens12• À côté et en-dessous de la scène d'offrande de la paroi de droite se trouvent des représentations d'activités agricoles. À nouveau, cette association thématique n'est pas rare dans la nécropole thébaine, et on la retrouve notamment dans la tombe de Djéser- karaséneb 13, un contemporain de Nakht. Mais si, chez Djéserkaraséneb, l'artiste a réparti les deux thèmes sur deux murs contigus - la relation entre les scènes étant exprimée par le rapport architectural entre les deux surfaces peintes - le peintre de Nakht les a combinés sur une seule et même paroi. De l'autre côté de la porte, sur le mur sud-est, ce sont également les produits des champs et de la nature en général qui sont évoqués derrière le couple officiant, mais cette fois à un autre stade de produc- tion, non plus en cours de réalisation, mais finis, prêts à la consommation, et présen- tés par des porteurs d'offrandes. 9 On verra la liste proposée dans PM l, 1, p. 470 (28[a-b]). 10 J. ASSMANN, SOl1nenhymnen in thebanischen Gràbern (Mayence, 1983), p. Xill-XVill (Theben, 1). Il R. TEFNIN, 'Discours et iconicité dans l'art égyptien', Annales d'Histoire de l'Art et d'Archéolo- gie 5 (1983), p. 13-4 [republié dans GM 79 (1984), p. 55-71]. 12 C'est une des conclusions essentielles de l'étude de la 'grammaire' décorative des temples égyp- tiens, cf. Ph. DERCHAIN, 'Un manuel de géographie liturgique à Edfou' , CdE73 (1962), p. 31-65; Id., 'Réflexions sur la décoration des pylônes', BSFE 46 (1966), p. 17-24; sur l'étude de la grammaire du temple, on verra encore Françoise LABRIQUE, Stylistique et Théologie à Edfou (Louvain, 1992), p. 1-9 (OLA,51). 13 TT 38, PM l, 1, p. 69. 54 DIMITRI LABOURY Les scènes champêtres du mur sud-ouest sont réparties sur quatre niveaux séparés par une ligne de sol. On découvre, de bas en haut14, des laboureurs qui manient char- rues et houes, des bûcherons et des semeurs, puis des moissonneurs, des cueilleuses de lin et des fonctionnaires mesurant et récoltant les céréales, et, enfin, des vanneurs. La série d'images décrit donc la succession réelle des opérations effectuées dans les champs, depuis la préparation de la tene et les semailles, jusqu'au traitement et à l'en- registrement des productions, en passant par leur récolte. L'oeil suit cet enchaînement, depuis la ligne de sol où apparaissent des bovidés jusqu'à la scène principale, traitée en plus grandes proportions et naturellement placée au -dessus: la scène d'offrande, qui évoque le contact entre les humains et les dieux, et notamment le dieu céleste par excellence, le soleil. L'élément essentiel de la composition des scènes de champs est la double effigie de N akht assis sous un dais: il est représenté en taille dite héroïque; il s'oppose, par son attitude et par sa place dans l'image, au reste de la figuration; et c'est son action qui est décrite par la légende du tableau: «s'asseoir sous le dais et regarder ses champs». Toute la composition lui est donc subordonnée. Il est le sujet regardant, auquel on pré- sente un objet regardé. Comme Roland Tefnin l'a bien montré, cette structure sémio- tique est le fondement de la représentation funéraire égyptienne, depuis l'Ancien Empire15. Les exemples sont innombrables. Le sujet regardant reste toujours à peu près immuable, tandis que l'objet regardé est susceptible d'infinies variations, et c'est précisément là que l'artiste semble pouvoir intervenir en tant que tel. Au bandeau de soubassement, nous trouvons une scène de charruage offerte en spectacle à Nakht (fig. 3)16. Les deux laboureurs dirigent leur attelage l'un vers l'autre, si bien que la composition est symétrique. Mais cette symétrie n'est qu'apparente ou partielle, car les deux membres mis en parallèle ne se conespondent pas rigoureuse- ment. On pounait désigner ce phénomène par l'expression 'symétrie égyptienne', car une telle confrontation de concepts différents mais globalement synonymes ou com- plémentaires est très fréquente dans les arts plastiques, l'architecture, la religion, la lit- térature et la langue pharaoniques 17. Décrire les choses à travers plusieurs aspects dif- uploads/s3/ laboury-nakht.pdf

  • 26
  • 0
  • 0
Afficher les détails des licences
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise
Partager