Thomas Bonnecarrere Imaginaeria, un nouveau système social centré sur la synerg

Thomas Bonnecarrere Imaginaeria, un nouveau système social centré sur la synergie entre territoires singuliers interconnectés Résumé Notre recherche porte sur l'implémentation d'un système territorial conçu pour encourager la créativité, l'innovation et l'intelligence collective ancré dans l'économie des Communs, baptisé Imaginaeria. Celui-ci repose sur un modèle d'intelligence territoriale « évoluée », nommé intelligence imaginieriale, que nous avons développé dans le cadre de notre thèse. Nous avons conçu ce modèle pour développer des territoires créatifs, apprenants et adaptatifs dont l'activité économique et sociale repose sur le développement, la protection et la promotion des imaginaires locaux qui définissent la culture singulière de chaque territoire. L'objectif est de lutter contre le phénomène de standardisation des cultures par le biais de son industrialisation au sein d'une économie marchande mondialisée en encourageant l'expression libre des subjectivités et des singularités dans le monde. Mots-clés intelligence stratégique internationale, créativité, synergie, innovation, théorie sociale, culture, design organisationnel Introduction Imaginaeria constitue un système ouvert, complexe et dynamique que nous avons conçu pour développer une intelligence collective universelle reposant sur le conflit cognitif afin de stimuler la créativité et l'innovation dans le monde. Il reflète notre volonté de développer un modèle territorial reposant sur la créativité distribuée et l'innovation ouverte dans le but de proposer une évolution sociétale positive ancrée dans la connexion, la coopération et l'auto-organisation. La particularité de ce système territorial est de reposer sur l'imaginierie de territoires1 fédérés autour de l'identité d'un univers 1 Ingénierie de l'imaginaire, définie par Walt Disney comme le mélange de l'imagination créative et du savoir-faire technique pour expérimenter sans cesse de nouveaux systèmes et concepts. Elle peut être qualifiée d' « art de réaliser des rêves » reposant sur l'invention de visions collectivement désirées. Diane Nijs (2014, p. 188) définit l'imaginierie comme un phénomène d'autonomisation de la création de valeur en utilisant ou concevant une image qui fait appel à l'imagination des acteurs au sein d'un collectif. L'image (ou artefact) permet à ces acteurs de percevoir un nouvel horizon d'innovation pour le collectif qu'ils n'étaient pas capables de voir au préalable, et les invite et autorise à agir de manière créative dans la direction perçue, en 1 culturel commun tout en enrichissant leur culture spécifique liée à leur imaginaire local. Notre objectif est, à travers son implémentation, de proposer une alternative sociétale viable et pérenne afin d'appréhender les nombreux problèmes complexes (écologiques et sociétaux) actuels concernant la gestion des ressources communes. Notre territoire d'expérimentation (commune de Gerde, Hautes-Pyrénées) est inscrit au programme national TEPOS (Territoire à Énergie Positive) piloté par le Ministère de l'Ecologie. Nous développons un projet d'« entrepreneuriat civique » dans le cadre d'un besoin en connaissances de notre commune qui souhaite opérer une transition harmonieuse vers un futur intégrant le développement durable et culturel basé sur l'art libre. Problématique de recherche La problématique principale concernant le système Imaginaeria est la suivante : Comment développer une dynamique culturelle synergique et universelle, centrée sur l'hybridation des connaissances, alimentée par des territoires autonomes et singuliers? Développement 1 - Une « nouvelle réalité créative » pour appréhender la complexité des territoires et favoriser leur évolution positive selon une logique de progression durable Nous évoluons, selon le prospectiviste Michel Saloff-Coste (2005), dans l'âge de la Création et de la Communication dans lequel le pouvoir repose sur la capacité à générer de l'altérité. Pour Boyd (2010) et Nijs (2014), notre époque est « post-normale » et induit la nécessité de définir de nouveaux paradigmes permettant d'appréhender sa complexité. Saloff-Coste souligne à ce propos l'importance d'adopter une pensée globale et transdisciplinaire pour faire face aux problèmes complexes auxquels nous devons actuellement faire face : « Pour la première fois dans l’histoire de l’humanité, nos impacts systémiques démultipliés nous rendent responsables localement à court terme d’enjeux globaux à long terme. » La pensée logico-rationnelle (vision du monde mécaniste), adaptée à l'ère industrielle, ne peut plus permettre d'appréhender seule la complexité de nos environnements. Il est nécessaire, pour Nijs (2014), de structurer nos stratégies d'évolution selon une vision du monde élargie intégrant la vision du monde « émergente » ancrée dans l'analyse des systèmes vivants dynamiques2. Ces deux modes d'analyse complémentaires permettent ainsi de nourrir une pensée « intégrale », « évolutionnaire » et « narrative » (Saloff-Coste, 2013; Gautier, 2013; Nijs, 2014) nécessaires pour développer la créativité au sein des territoires. Saloff-Coste souligne ainsi que les nombreuses menaces actuelles nous forcent à être créatif et « génial » interagissant avec les autres dans le but de changer les routines existantes. L'imaginierie consiste ainsi, selon elle, à « concevoir un récit afin d'allumer et encadrer stratégiquement la créativité collective ». 2 Johnson (1992 in Dent, 1991:11) défend le fait que « peut-être que le modèle mental le plus utile pour penser la vision du monde traditionnelle et la vision du monde émergente est celle de la polarité. Les polarités constituent des opposés qui ne peuvent pas fonctionner indépendamment l'un de l'autre. Les deux côtés d'une polarité sont interdépendants, ce qui fait qu'un côté ne peut pas être “vrai ” ou la “ solution ” au détriment de l'autre » Ainsi, la vision du monde émergente complète et élargit l'autre. 2 pour nous en sortir. Cette analyse est corroborée par Florida (2002), qui soutient que la créativité constitue la compétence la plus importante au XXIème siècle. Pour Saloff- Coste, notre société doit impérativement évoluer en opérant un changement radical de paradigme, de l'« avoir » à l'« être » singulier. Cette transformation nécessaire implique une évolution profonde de notre philosophie, de nos cultures, de nos systèmes de représentation et de nos valeurs. Il est ainsi important, dans cette perspective, de sortir des sentiers battus, de faire se rencontrer les cultures, les expertises et les disciplines, de réfléchir de manière décloisonnée et de faire dialoguer science, art et philosophie. Il est également nécessaire, selon lui, de « ré-enchanter l'avenir » et de changer les attitudes et comportements afin d'éviter un scénario dystopique pour les territoires. Ces analyses nous ont amené à concevoir un nouveau système social, dont la structure repose intrinsèquement sur l'« intelligence systémique » afin de permettre aux acteurs territoriaux de développer leur « génie créatif », d'agir de manière connectée, coopérative et auto-organisée pour nourrir une dynamique créative collective et singulière au sein des territoires. Notre objectif est ainsi d'opérer le changement du paradigme sociétal « prolétarisation généralisée » (qui induit, selon Stiegler, 2012, une perte des savoirs et savoir-faire des individus) vers « imaginierisation universelle », c'est à dire : nourrir une créativité collective distribuée centrée sur le « rêver et faire ensemble ». La créativité collective a été analysée par Hargadon et Bechky (2006) et définie par George (2007: 494) comme « venir avec de nouvelles façons de combiner des idées vieilles et exigeantes, des procédures et processus existants pour arriver à des solutions créatives concernant des problèmes. La créativité collective émerge ainsi de l'interaction des idées de diverses personnes plutôt que de l'esprit de n'importe quel individu (Marion, 2012). Elle est la créativité dont aucun individu n'est par lui-même responsable de la résolution du problème. Ce concept converge, selon Nijs (2014), avec les idées d'approche systémique de la créativité. Il est donc nécessaire, pour Saloff-Coste, d'arrêter d'être en conflit, d'assumer pleinement son génie et de nous « donner à l'autre » via un partage et une transmission de nos énergies singulières permettant de créer un « monde extraordinaire ». Pour ce philosophe - entrepreneur, chaque culture possède son propre génie et doit ainsi être développée et protégée dans sa singularité. Imaginaeria constitue une « œuvre culturelle artistique universelle anti-rivale » : - Œuvre culturelle artistique : Selon la définition de Lepage de la culture3 de son analyse, nourrie par celles de Stiegler (2012) et Van Pelt (2010) sur l'art comme moyen de créer de la beauté (i.e., du désir et de la motivation), du discernement (i.e., la capacité à distinguer l'essentiel pour l'évolution positive) et d'apprendre via une culture de l'expérimentation nourrie par l'affect et l'instinct ancrée dans 3 Définie comme la mise en récit des sociétés afin de comprendre et expliquer les forces qui la façonnent dans le but de développer un système réellement démocratique. La démocratie réfère ici à la définition de Paul Ricoeur (1957) qui place la contradiction, la divergence d'intérêt et leur gestion au cœur de la société : « Est démocratique, une société qui se reconnaît divisée, c'est-à- dire traversée par des contradictions d'intérêt et qui se fixe comme modalité, d'associer à parts égales, chaque citoyen dans l'expression de ces contradictions et la mise en délibération de ces contradictions, en vue d'arriver à un arbitrage ». 3 un travail ludifié basé sur la rigueur, l'effort et l'intelligence espiègle. Cette œuvre narre de manière originale un concept déterminant un paradigme qui repose sur une pensée globale et sur le long terme dans une logique de progression durable à l'échelle de la planète. La dimension artistique connote les concepts fondamentaux d'esthétique et de désir, en l'occurrence le désir d'acteurs territoriaux à « territorialiser » cette utopie au sein de leur territoire d'évolution uploads/s3/ imagineerint-presentation-resume-de-recherche.pdf

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