Dossier d’accompagnement de la conférence / concert du samedi 25 avril 2009 pro
Dossier d’accompagnement de la conférence / concert du samedi 25 avril 2009 proposée dans le cadre du projet d’éducation artistique des Trans et des Champs Libres. “Les musiques brésiliennes” Conférence d’Alex Melis Concert de Agua Na Boca Le Brésil est un continent culturel à lui tout seul. La musique y permet de réu- nir des peuples différents : les descendants des Africains, les Portugais, les Amérindiens. Les traditions régionales y sont vivantes et elles se sont succes- sivement greffées sur le jazz, la pop, la soul, le funk et l'électro. Le tropica- lisme, par exemple, mêlait le rock aux traditions du Nordeste. Au cours de cette conférence, nous expliquerons les raisons de ce métissage incessant. Nous parlerons du choro, du forró, de la samba, de la bossa nova et de ses créateurs (João Gilberto, Antonio Carlos Jobim, Vinicius De Moraes), de la musique populaire et de ses principaux représentants, de Chico Buarque à Gilberto Gil en passant par Caetano Veloso et Maria Bethânia. Nous dresserons aussi un panorama des musiques d'aujourd'hui qui forment un kaléidoscope détonant. On y trouve des artistes aussi divers que Carlinhos Brown, Lenine, Seu Jorge, Marcelo D2, ou DJ Dolores, sans oublier ceux qui sont expatriés à New York, Londres ou Paris. Chacun d'eux est à sa manière un bricoleur de génie, un apôtre du recyclage, qui incarne une identité basée sur la distanciation et l'ouverture. Samba rock, samba soul, heavy metal ou pop arty, il ne semble pas y avoir de limites dans cet ensemble où la créativité correspond à une vision à la fois moderne et traditionnelle, mondialisée et locale, tant il est vrai que ce labyrinthe sonore est en même temps un patri- moine et un laboratoire. Enfin, nous montrerons comment toutes ces musiques, par un jeu de miroirs où la séduction et la fascination jouent un grand rôle, influencent depuis long- temps beaucoup d'esthétiques du monde entier, et notamment en France, où il existe une forte connexion - dans les deux sens d'ailleurs - entre le Brésil et l'hexagone, à tel point que toutes les familles des " musiques actuelles " en sont imprégnées. “Une source d'informations qui fixe les connaissances et doit permettre au lecteur mélomane de reprendre le fil de la recherche si il le désire” Afin de compléter la lecture de ce dossier, n'hésitez pas à consulter les dos- siers d’accompagnement des pré- cédentes conférences-concerts ainsi que les “Bases de données” consacrées aux éditions 2005, 2006, 2007 et 2008 des Trans, tous en téléchargement gratuit, sur www.lestrans.com/jeu-de-l-ouie 1 - Présentation Dossier réalisé par Pascal Bussy (Atelier des Musiques Actuelles) 2 - L'anthropophagie culturelle Âgé d'à peine plus de cinq siècles, le Brésil est en même temps un pays jeune et un "pays continent". Parmi ses 175 millions d'habitants, on trouve plusieurs populations à l'origine et au statut bien définis : les Amérindiens qui sont les premiers propriétaires des terres, les Portugais qui sont les colonisateurs européens, et les Africains qui sont la main d'oeuvre, puisque 3,6 millions des 9,5 millions d'esclaves venus d'Afrique ont été déportés au Brésil. En 1888, le Brésil sera le dernier pays à abolir l'esclavage, et il faut savoir que 45 % de ses habitants sont aujourd'hui Noirs ou Métis. Dans le ressenti de nombre de musiciens brésiliens noirs ou métis, l'Afrique reste omniprésente. Le chanteur et compositeur Carlinhos Brown résume très bien ce sentiment lorsqu'il parle de ses origines et qu'il dit : "bien sûr, c'est à Bahia, comme moi, que sont nés João Gilberto, Caetano Veloso, Maria Bethania, Gilberto Gil, et d'autres grands noms encore de la musique populaire brésilienne, mais pour nous, Bahianais, le Brésil n'est qu'un passage, et l'Afrique reste notre terre natale." Le système politique est basé sur une fédération d'états qui sont eux-mêmes regroupés en régions. Les traditions régionales et les arts populaires y sont très vivants, et tous les acteurs des différentes disciplines culturelles, de la danse au théâtre en passant bien sûr par la musique, s'y abreuvent régulière- ment, à tel point qu'on parle fréquemment d' " anthropophagie ", en faisant référence à un mouvement littéraire, artistique et politique qui est apparu au Brésil dans les années 1920. Nous avons là l'une des clefs de la vivacité des musiques brésiliennes : elles sont des sources de création et de re-création évidentes, immédiatement accessibles, et elles forment un terreau ô combien fertile, à tel point que tous les genres musicaux peuvent en permanence s'interpénétrer et mutuellement s'enrichir. L'affirmation "j'aime la musique brésilienne" que l'on entend souvent est un contresens, ou tout du moins elle est le reflet d'une grande méconnaissance du sujet. Car les musiques du Brésil ont toujours été immensément variées et elles le sont encore plus aujourd'hui. Elles proviennent de traditions musicales multiples qui sont la conséquence directe du métissage de base de la population. Les Portugais ont apporté leur savoir-faire en matière de chanson de facture nostalgique, les Africains les rythmes de leurs cultures principalement d'origine yoruba et bantou (le style candomblé en fait partie), et les Amérindiens sans doute des chants et des musiques qui sous-tendaient des danses rituelles. Il en a résulté de nombreux mariages que l'on pourrait qualifier de métissages musicaux en chaîne, et dont le rythme a été accéléré par l'arrivée dans le pays du jazz, de la pop, et de la musique électronique. La vérité est qu'un dossier comme celui-ci, ainsi que la conférence qui en est le prétexte, ne suffisent pas à recenser toutes les composantes d'un ensemble qui comprend des styles nationaux et régionaux, ruraux et citadins, populaires et "savants". Ce n'est pas un hasard si le Brésil est un des pays, comme la France d'ailleurs, qui a le mieux résisté à la toute puissance des musiques pop américaine et anglaise. D'ailleurs, sa taille en fait un marché autonome, et la plupart de ses musiques n'ont pas besoin des autres pays pour s'épanouir et vivre. Dans les années vingt et trente, tel un pionnier de l'ethnomusicologie, le moderniste Mário de Andrade parcourt le Brésil afin d'enregistrer ses traditions musicales. À l'image de son héros Macunaíma qu'il met en scène dans un roman éponyme, il se considère comme un anthropophage. Cette démarche constitue un modèle culturel qui va traverser l'ensemble des styles musicaux brésiliens jusqu'à aujourd'hui, et qui donne du même coup aux artistes une capacité étonnante : ils peuvent absorber les musiques les plus diverses et savent s'en servir pour alimenter des créations neuves et uniques. Le berimbau, présent notamment dans les musiques du Nordeste, est un instrument de musique qui est certainement d'origine africaine. Il est constitué d'un gros arc en bois, d'un fil d'acier qui va de l'une à l'autre de ses deux extrémités, et d'une calebasse qui fait office de caisse de résonance. L'instrumentiste frappe le fil d'acier avec un morceau de bois. Un dernier élément, qui peut être une pierre ou un morceau de métal, et qui sera placé entre la corde et le bois, permet d'obtenir une grande variété de sons. "La caractéristique de la culture et de la civilisation brésilienne, c'est l'"anthropophagie", c'est-à-dire que le Brésil s'alimente de ce qui se passe dans toutes les traditions, l'ingurgite et le recrache "brésilien". Parce que tout Brésilien est d'origine quelque chose, et tout élément de la culture est le fruit d'une fusion." Dominique Dreyfus, commissaire scientifique de l'exposition "M.P.B. : Musique Populaire Brésilienne" organisée à la Cité de la Musique à Paris en 2005. 3 - Les premières musiques On distingue au Brésil deux principales zones géographiques. La première est celle du sud, avec des musiques qui sont principalement celles qui ont vu le jour dans les grands centres urbains, Rio de Janeiro et São Paulo en tête. La seconde est le Nordeste, un territoire extrêmement étendu qui se trouve au nord de la capitale Brasilia. 3.1 - Le choro Le choro est ce qu'on appelle au Brésil un "genre national", et il a pour particularité d'être à la fois une musique traditionnelle et une musique urbaine. Musique instrumentale, elle est née à la fin du dix-neuvième siècle sur le même modèle que le fado au Portugal ou le tango en Argentine et elle est le résultat de la rencontre entre certaines musiques "occidentales" qui étaient alors pratiquées dans les milieux bourgeois blancs - comme la valse, la polka, ou le quadrille - et des styles venus d'Afrique. Le terme "choro" signifie "pleur" (on l'appelle aussi quelquefois "chorinho" ou "petit pleur"), et comme le fado ou le tango justement, il possède une couleur nostalgique et mélancolique qui sait aussi se marier à des envolées festives et à une grande vivacité rythmique, à tel point qu'on l'a souvent comparé au ragtime. Ses instruments de base sont la flûte, le violon, la guitare, le cavaquinho, une petite guitare à quatre cordes d'origine portugaise, le bandolim (une mandoline) et des instruments de percussion afro-brésiliens. L'improvisation y joue un rôle important. On le pratique toujours beaucoup et il est une source d'inspiration pour des musiciens qui sont souvent catalogués pop et rock mais aussi jazz. 3.2 - La uploads/s3/ les-musiques-bresiliennes.pdf
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- Publié le Mai 21, 2021
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